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Date: 20010118

Dossier: 1999-3391-EI

ENTRE :

LE TREMPLIN DES LECTEURS,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Motifs du jugement

La juge Lamarre, C.C.I.

[1]            L'appelante porte en appel une décision du ministre du Revenu national (" Ministre ") par laquelle il a été décidé que madame Paulette Pierre-Louis occupait auprès de l'appelante un emploi assurable au sens de l'alinéa 3(1)a) de la Loi sur l'assurance-chômage et de l'alinéa 5(1)a) de la Loi sur l'assurance-emploi (" Loi ") au cours des périodes du 1er avril 1996 au 14 juin 1996 et du 1er octobre 1996 au 20 décembre 1996.

[2]            Pour rendre sa décision, l'intimé s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

(b)            l'appelante est un organisme d'enseignement à but non lucratif;

(c)            l'appelante offre un programme d'alphabétisation aux adultes afin de les aider à une intégration éventuelle au marché du travail;

(d)            la travailleuse a été embauchée comme enseignante;

(e)            les heures de travail de la travailleuse ont été déterminées par l'appelante;

(f)             la travailleuse était rémunérée un taux horaire de 25,00 $ l'heure;

(g)           la rémunération de la travailleuse a été déterminée par l'appelante;

(h)            la travailleuse était rémunérée pour ses congés de maladie;

(i)             la travailleuse devait informer l'appelante lors de ses absences;

(j)             la travailleuse était supervisée par l'appelante;

(k)            la travailleuse devait enseigner selon le programme dicté par le Ministère de l'Éducation du Québec et les instructions émises par l'appelante;

(l)             tout l'équipement ainsi que les fournitures requis par la travailleuse étaient fournis par l'appelante;

(m)           les services de la travailleuse faisaient partie intégrante des services offerts par l'appelante;

(n)            il y avait un contrat de louage de services entre la travailleuse et l'appelante;

[3]            L'appelante est un organisme à but non lucratif qui a reçu au cours des périodes en litige une subvention de la Commission scolaire des Draveurs pour donner des cours dans le cadre d'un programme d'alphabétisation conçu par le ministère de l'Éducation du Québec pour aider les adultes à éventuellement s'intégrer au marché du travail. Selon le témoignage de madame Aline Drouin Prud'homme, laquelle était dûment autorisée par l'appelante pour la représenter, madame Pierre-Louis se serait présentée auprès de l'appelante vers la fin de l'année 1995 pour offrir ses services. Celle-ci avait une expérience de six ans dans le domaine.

[4]            Au début, madame Drouin Prud'homme, a tâché de recruter des étudiants à l'aide de madame Pierre-Louis qui avait plus d'expérience. Les deux travaillaient bénévolement.

[5]            Selon le témoignage de madame Drouin Prud'homme, il fallait recruter un minimum de 10 étudiants qui accepteraient de suivre un certain nombre d'heures de cours de formation pour pouvoir bénéficier d'une subvention.

[6]            Selon le témoignage de monsieur Louis Prud'homme, président de l'appelante et beau-frère de madame Drouin Prud'homme, ce n'était pas le rôle de l'appelante de faire la demande de subvention. C'est le professeur intéressé qui devait se présenter auprès de la Commission scolaire avec les informations requises et qui devait compléter un questionnaire, lequel après analyse par la Commission scolaire pouvait donner droit à une subvention. Monsieur Prud'homme a dit qu'il n'a jamais vu un tel questionnaire.

[7]            Ainsi dans le cas de madame Pierre-Louis, une subvention aurait été octroyée au cours du mois d'avril 1996 pour les cours qu'elle aurait dispensés à compter du mois de février 1996. La subvention octroyée par la Commission scolaire devait couvrir la rémunération de madame Pierre-Louis pour le nombre de cours donnés par cette dernière selon les informations qu'elle avait elle-même données. Aux dires de madame Drouin Prud'homme, cela équivalait à une rémunération d'environ 20 $ l'heure, laquelle lui était versée par l'appelante qui recevait la subvention. Toutefois, si l'enseignant ne donnait pas tous les cours au nombre d'étudiants indiqué dans le questionnaire soumis pour obtenir la subvention, celle-ci pouvait être réduite.

[8]            Dans ce contexte, madame Pierre-Louis devait obtenir la signature de chaque étudiant à chaque cours tout comme madame Drouin Prud'homme le faisait pour les cours qu'elle donnait elle-même, et ceci était transmis avec le nombre d'heures enseignées à la Commission scolaire.

[9]            Madame Drouin Prud'homme a expliqué qu'elle avait accepté à certaines occasions de remplacer bénévolement madame Pierre-Louis afin que celle-ci ne perde pas le droit à sa subvention. Elle avait agi ainsi afin d'aider cette dernière qui avait seule la charge de deux enfants. Toutefois, madame Drouin Prud'homme a clairement dit qu'il n'avait jamais été question de congés de maladie payés à madame Pierre-Louis. De toute façon, l'appelante était un organisme à but non lucratif qui n'avait pas les moyens d'engager du personnel, encore moins de payer des congés de maladie à une enseignante subventionnée par la Commission scolaire.

[10]          Madame Drouin Prud'homme a indiqué qu'elle ne supervisait pas madame Pierrre-Louis dans son travail. Cette dernière devait donner ses cours selon le programme décrit et aux heures choisies par la Commission scolaire, dans un local fourni par celle-ci. Selon madame Drouin Prud'homme, elle agissait plutôt comme aide et collaboratrice de madame Pierre-Louis et elle faisait le lien avec la Commission scolaire. D'ailleurs, elle dit avoir fait elle-même un stage de formation dans le cadre de l'obtention de son diplôme d'études supérieures en andragogie sous la supervision de madame Pierre-Louis. Par ailleurs, madame Drouin Prud'homme a elle-même avancé sous forme de dons de charité une somme d'un peu plus de 1 400 $ à l'appelante (pièce A-3), pour permettre à cette dernière de couvrir les frais de recrutement d'étudiants (annonces et publicité, matériel requis et distribution).

[11]          Le 21 juin 1996, madame Pierre-Louis signait un document par lequel elle acceptait de travailler à contrat pour l'appelante au cours de l'année 1996. Elle se disait travailleuse autonome et reconnaissait qu'elle avait charge de payer elle-même toutes les redevances dues sur sa rémunération aux gouvernements (pièce A-1).

[12]          Le 27 novembre 1996, l'appelante signait un " contrat de service " avec madame Pierre-Louis par lequel cette dernière s'engageait à offrir les cours en alphabétisation au groupe d'étudiants inscrits par l'appelante à la Commission scolaire des Draveurs. Par ce contrat, madame Pierre-Louis acceptait d'enseigner 20 heures par semaine sur une durée de 11,5 semaines pour la période du 1er octobre 1996 au 20 décembre 1996, selon un horaire déterminé. Ce contrat spécifiait que les honoraires seraient remis à madame Pierre-Louis en quatre versements à compter du 11 novembre 1996. Le contrat spécifiait également la possibilité pour l'une ou l'autre partie de résilier le contrat sur préavis. Une des clauses du contrat stipule que l'appelante s'engage à payer pour les services rendus avant la date de résiliation du contrat, s'il y a lieu, dans la mesure où ces services ont été satisfaisants et conformes au contrat. L'appelante s'engage également à ne payer que les heures travaillées.

[13]          Madame Drouin Prud'homme a commenté ce contrat en disant que madame Pierre-Louis avait un minimum de 20 heures à faire pour avoir le droit à la subvention mais que l'horaire suggéré pouvait varier. Elle a indiqué qu'elle avait préparé ce contrat pour être en règle avec la Commission scolaire, laquelle voulait s'assurer que les heures de cours avaient réellement été données.

[14]          Monsieur Louis Prud'homme, qui a signé ce contrat, a dit que ce contrat n'avait pas été présenté au conseil d'administration. Il a dit que madame Pierre-Louis réclamait beaucoup et qu'il lui avait fait signer cet accord afin de se protéger au cas où elle quitterait en disant qu'elle n'avait pas été rémunérée.

[15]          Selon lui, l'appelante est un " canal " entre l'enseignante et la Commission scolaire. Si une subvention est octroyée, le travail bénévole devient un travail rémunéré. Il a dit que l'appelante n'avait pas d'argent pour engager quelqu'un pour superviser le travail d'un enseignant. Madame Drouin Prud'homme, elle-même, travaillait bénévolement sauf si la subvention reçue couvrait également les heures de cours qu'elle donnait. Ainsi, l'engagement de madame Pierre-Louis à titre de contractuelle avait été approuvé par le conseil d'administration dans la mesure ou la demande de subvention était acceptée officiellement.

[16]          Quant à l'évaluation du travail de madame Pierre-Louis, monsieur Prud'homme a indiqué que le conseil d'administration était inapte à la faire. C'est la Commission scolaire qui avait accepté madame Pierre-Louis comme étant apte à enseigner selon ses qualifications.

[17]          Madame Nicole Sarrault, agent des appels pour l'Agence des douanes et du revenu du Canada, a indiqué que madame Pierre-Louis recevait de l'assurance-emploi lorsqu'elle a commencé à travailler pour l'appelante. Dans ce contexte, madame Pierre-Louis lui aurait indiqué qu'elle était intéressée à signer un contrat par lequel elle serait considérée une travailleuse autonome; elle ne voulait pas d'un travail considéré assurable au sens de la Loi. Par la suite, c'est madame Pierre-Louis qui est venu réclamer de l'assurance-emploi et madame Sarrault a opté pour l'assurabilité de l'emploi. Elle a spécifié que madame Pierre-Louis lui avait mentionné qu'elle gagnait 25 $/heure et non 20 $/heure, que celle-ci était assurée d'être payée pour toutes les heures de cours qu'elle donnait, qu'elle était rémunérée pour ses congés de maladie et qu'elle était supervisée par madame Drouin Prud'homme qui comptabilisait les heures de cours données.

[18]          Il est important de souligner ici l'absence de madame Pierre-Louis à l'audience qui a eu lieu à Ottawa. L'avocate de l'intimé a indiqué qu'elle s'était abstenue de l'assigner en cour, bien que l'intimé ait pris fait et cause en faveur de madame Pierre-Louis, au motif que cette dernière habitait maintenant à Toronto et que ceci aurait engendré trop de frais pour l'intimé.

[19]          L'avocate de l'intimé soutient que madame Pierre-Louis était une employée de l'appelante au cours des périodes en litige en raison des facteurs suivants :

1)              l'existence d'une résolution du conseil d'administration de l'appelante autorisant l'embauche de madame Pierre-Louis;

2)              la signature des chèques de paie par le président de l'appelante;

3)              c'est l'appelante qui a reçu les subventions de la Commission scolaire;

4)              l'appelante a émis des feuillets T-4 à madame Pierre-Louis indiquant les sommes totales qui lui ont été versées (sans toutefois qu'aucune retenue à la source n'ait été effectuée);

5)              l'existence du contrat de service (pièce I-1) qui prévoit le paiement des honoraires à madame Pierre-Louis si ses services sont jugés satisfaisants.

[20]          Dans sa plaidoirie, l'avocate de l'intimé a repris les critères établis dans l'affaire Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., 87 DTC 5025, soit le contrôle, la propriété des instruments de travail, les chances de profit et les risques de perte de même que le test de l'intégration ou de l'organisation, à savoir si madame Pierre-Louis travaillait pour son propre compte ou pour le compte de l'appelante. Ces critères doivent être analysés à la lumière de l'ensemble des éléments composant la relation entre les parties.

Analyse

[21]          Dans la présente cause, il m'apparaît que si un contrôle était exercé par l'appelante, il ne l'était que sur le nombre d'heures enseignées par madame Pierre-Louis. En effet, il ressort de la preuve que c'est la Commission scolaire qui acceptait les qualifications d'un candidat pour enseigner ce qui était prévu au programme de formation établi par le ministère de l'Éducation du Québec. Madame Drouin Prud'homme n'avait pas la compétence ni l'autorité de vérifier que madame Pierre-Louis suivait bien les consignes du programme de formation. Par ailleurs, de ce que je comprends de la preuve, c'est le candidat lui-même qui devait s'occuper d'obtenir une subvention pour les cours qu'il était prêt à donner. Ce candidat devait s'assurer de trouver le nombre d'étudiants requis et proposer un nombre d'heures suffisant pour que la Commission scolaire accepte de le subventionner.

[22]          Je me suis posée la question à savoir quelle est la raison d'être de l'appelante? Quel est l'intérêt de l'appelante de recevoir ces subventions?

[23]          La preuve n'a rien révélé à ce sujet. Tout ce que je possède comme information vient des représentants de l'appelante, qui semblent des gens honnêtes et de bonne foi, qui croient en une bonne cause et qui essaient de contribuer à leur façon à l'éducation d'une population moins instruite. Je ne retiens pas de leurs témoignages qu'ils ont quelque chose à gagner des subventions qu'ils reçoivent. Il semble que ces subventions ne servent uniquement qu'à payer l'enseignant qui accepte de donner des cours selon le programme fourni par la Commission scolaire. L'appelante est d'ailleurs un organisme à but non lucratif qui n'a pas de fonds propres pour engager quelque employé que ce soit. Comme le disait monsieur Prud'homme, le bénévolat devient un travail rémunéré, dans la mesure où la Commission scolaire accepte de fournir des subventions. Ceci n'est pas garanti.

[24]          En fait, je crois comprendre de toute la preuve que c'est la Commission scolaire qui exerce un contrôle sur le candidat en passant par l'appelante afin de s'assurer que le nombre d'étudiants requis assiste aux cours et que le nombre d'heures enseignées par le candidat soit conforme aux informations données à la Commission scolaire. Pour ce faire, la Commission scolaire verse la subvention à l'appelante qui doit par la suite payer l'enseignant avec cette subvention. C'est l'interprétation que je fais de la preuve à défaut d'avoir pu entendre un témoin qui aurait pu exposer le point de vue de la Commission scolaire.

[25]          Dans ce contexte, je ne vois pas comment on peut qualifier l'appelant d'employeur. Le contrôle au niveau des heures est effectué pour le compte de la Commission scolaire qui, de ce que je comprends, semble déléguer ce pouvoir à l'appelante dans le cadre d'une entente de service, qui malheureusement n'a pas été déposée en preuve.

[26]          C'est la Commission scolaire qui fournit les locaux et les quelques autres fournitures ont pu être achetées grâce à un don de charité effectué par madame Drouin Prud'homme à l'appelante.

[27]          Quant aux chances de profit et aux risques de perte, il me semble que c'est madame Pierre-Louis qui les assumait. En effet, si elle ne faisait pas toutes ses heures, ou si elle ne recueillait pas la signature de tous ses étudiants, elle risquait de voir le montant de la subvention réduite et par le fait même, sa propre rémunération qui était entièrement payée à même cette subvention. Rien dans la preuve n'indique que c'est l'appelante qui devait assumer la rémunération de madame Pierre-Louis, ou que l'appelante devait rembourser la Commission scolaire si madame Pierre-Louis n'effectuait pas toutes ses heures.

[28]          Quant au critère de l'intégration, le procès-verbal du 2 avril 1996 du conseil d'administration de l'appelante déposé sous la pièce I-4, indique bien que madame Pierre-Louis ne sera " acceptée à titre de contractuelle [que lorsque] la demande de subvention à la Commission scolaire des Draveurs sera acceptée officiellement ". Selon moi, le contrat de madame Pierre-Louis n'était qu'accessoire aux activités de l'appelante. C'était la première fois que l'appelante faisait face à ce genre de situation (c'était toujours madame Drouin Prud'homme qui avait donné les cours auparavant, principalement sur une base bénévole).

[29]          Quant au contrat de service déposé sous la pièce I-1 et sur lequel s'appuie avec insistance l'avocate de l'intimé, je note que celui-ci a été signé vers la fin de la période, soit le 27 novembre 1996. De plus, les modalités convenues entre les parties ne font que reprendre, selon ce que je comprends de la preuve, les exigences de la Commission scolaire quant à l'horaire. Les honoraires sont répartis selon la subvention reçue. Finalement, ce n'est qu'en cas de résiliation du contrat, que le contrat indique que l'appelante s'engage à payer madame Pierre-Louis pour les services rendus avant la date de résiliation du contrat, dans la mesure où ces services ont été satisfaisants et conformes au contrat.

[30]          Les témoins de l'appelante ont dit qu'ils avaient rédigé ce contrat pour se protéger après avoir connu quelques problèmes avec madame Pierre-Louis. Celle-ci n'était pas présente en cour. Toutefois, il ressort de la preuve qu'elle a eu un comportement douteux avec les Prud'homme. Au début, c'est elle-même qui aurait insisté pour être déclarée travailleuse autonome. Au cours d'une certaine période (février à avril 1996), elle aurait bénéficié de l'assurance-emploi en même temps que de la subvention de la Commission scolaire.

[31]          Par la suite, elle aurait dit avoir été rétribuée 25 $/heure en calculant sa rémunération globale sur une plus courte période (avril à juin 1996) alors que celle-ci devait s'appliquer pour une plus longue période (février à juin 1996) ce qui n'équivaut en fait qu'à 20 $/heure.

[32]          Malgré tout, l'intimé ferme les yeux et prend parti en faveur de madame Pierre-Louis en s'appuyant sur la pièce I-1 (contrat de service) et en ignorant délibérément la première lettre signée par madame Pierre-Louis qui parlait de son statut de travailleuse autonome (pièce A-1).

[33]          L'avocate de l'intimé se réfère à la décision de la Cour d'appel fédérale dans M.R.N. c. Emily Standing, [1992] F.C.J. No. 890 (Q.L.) pour soutenir que les parties ne peuvent définir une relation qui existe entre elles " sans égards aux circonstances entourantes appréciées en fonction des critères définis de l'arrêt [Wiebe Door Services Ltd., précitée] ". L'avocate de l'intimé fait allusion ici à la lettre signée par madame Pierre-Louis le 21 juin 1996 (pièce A-1).

[34]          Je considère que les circonstances entourant la relation entre les parties ne modifient pas la façon dont les parties ont elles-mêmes défini leur entente dès le début. Le contrat de service sur lequel s'appuie l'intimé pour affirmer qu'il s'agit plutôt d'un contrat de louage de services, a été rédigé à la fin de la période par madame Drouin Prud'homme, sans l'ascendant d'un conseiller légal. Il a été rédigé dans le but premier d'être en règle avec la Commission scolaire qui voulait s'assurer que les heures de cours avaient réellement été données et également dans le but de ne pas se faire accuser par madame Pierre-Louis de s'être approprié la subvention qui lui revenait. Je ne considère pas que ce seul contrat change en soi la relation qui existait entre les parties depuis le début.

[35]          Par ailleurs, en prenant fait et cause pour madame Pierre-Louis, tout en sachant que celle-ci avait elle-même fait valoir qu'elle était une travailleuse autonome afin de pouvoir continuer à retirer des prestations d'assurance-emploi tout en bénéficiant d'une subvention au cours de l'année 1996, l'intimé se devait, selon moi, d'assigner cette dernière à l'audition, peu importe les coûts engendrés pour ce faire. En agissant de la sorte, l'intimé donne l'impression de vouloir éviter de présenter certains éléments de preuve tout en laissant entendre que la preuve documentaire doit avoir préséance sur la crédibilité des témoins. En fait, la preuve documentaire est également contradictoire si l'on accepte le point de vue de l'intimé voulant que l'entente de service (pièce I-1) constitue un document établissant un contrat de louage de services. En effet, la première lettre signée par madame Pierre-Louis (pièce A-1) indiquait qu'elle était engagée comme travailleuse autonome. Compte tenu de cette contradiction documentaire, je suis d'avis que la présence de madame Pierre-Louis était cruciale pour permettre à l'intimé d'établir son point. Il n'est pas suffisant dans le cas présent de soutenir que le fardeau de preuve appartient de toute façon à l'appelante. Il s'agit ici d'une question de principe, laquelle selon moi, va au-delà des considérations monétaires invoquées par l'avocate de l'intimé.

[36]          Compte tenu de l'absence de ce témoin important de même que d'un représentant de la Commission scolaire, et compte tenu de la crédibilité que j'accorde aux témoignages des Prud'homme, (qui sont à mon avis des gens honnêtes, dévoués à une bonne cause sur une base principalement bénévole), je suis d'avis que la preuve faite par l'appelante est suffisante pour contredire en grande partie les allégations faites par l'intimé dans la Réponse à l'avis d'appel.

[37]          En conséquence, l'appelante n'a pas à supporter un fardeau de preuve plus grand en l'espèce. Dans les circonstances, je considère que la preuve démontre, selon la prépondérance des probabilités, que madame Pierre-Louis n'était pas une employée de l'appelante au cours des périodes en litige.

[38]          Pour ces raisons, je suis d'avis d'accueillir l'appel et d'annuler la décision du Ministre.

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour de janvier 2001.

" Lucie Lamarre "

J.C.C.I.

No DU DOSSIER DE LA COUR :                        1999-3391(EI)

INTITULÉ DE LA CAUSE :                                 Le tremplin des lecteurs c. M.R.N.

LIEU DE L'AUDIENCE :                                      Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :                    le 12 janvier 2001

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :                         l'honorable juge Lucie Lamarre

DATE DU JUGEMENT :                                      le 18 janvier 2001

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant(e) :                                               Aline Drouin Prud'homme

Pour l'intimé(e) :                                                    Me Cathy Chalifour

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

Pour l'appelant(e) :

                                Nom :                      

                                Étude :                    

Pour l'intimé(e) :                                                    Morris Rosenberg

                                                                                Sous-procureur général du Canada

                                                                                Ottawa, Canada

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