Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Date: 20010611

Dossier: 2000-3759-EI,

2000-3760-CPP

ENTRE :

RIVERSIDE SKATING CLUB,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Motifs du jugement

Le juge O'Connor, C.C.I.

[1]            Les appels en l'instance ont été entendus à Windsor (Ontario), le 1er juin 2001.

[2]            La réponse à l'avis d'appel interjeté en matière d'assurance-emploi (2000-3759(EI)) énonce de la manière suivante les faits à l'origine du litige :

                                [TRADUCTION]

4.                     L'appelante a interjeté appel devant l'intimé à l'encontre d'une décision portant sur la question de savoir si Jennifer Jackson (la « travailleuse » ) exerçait un emploi assurable au sens de la Loi sur l'assurance-emploi (la « Loi » ) alors qu'elle était au service de l'appelante durant la période du 1er janvier 2000 au 14 mars 2000.

5.              Dans une lettre datée du 13 juin 2000, l'intimé a informé l'appelante qu'il avait été décidé que l'emploi que la travailleuse exerçait auprès de l'appelante durant la période en question était un emploi assurable au motif qu'il était exercé conformément à un contrat de louage de services.

6.              Pour rendre sa décision, l'intimé s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

a)              l'appelante est un organisme sans but lucratif qui offre des programmes de patinage à la collectivité;

b)             l'appelante était responsable de l'inscription des élèves;

c)              l'appelante était responsable de la perception des frais auprès des élèves ou de leurs parents;

d)             l'appelante était responsable de l'établissement des horaires de cours;

e)              la travailleuse a été engagée par l'appelante à titre de professeur de patinage;

f)              la travailleuse exerçait ses fonctions à l'aréna de Riverside;

g)             l'appelante rémunérait la travailleuse mensuellement, à un taux horaire de 34 $;

h)             le taux de rémunération était fixé par l'Association canadienne de patinage artistique;

i)               l'appelante avait le droit de ne plus retenir les services de la travailleuse si celle-ci ne donnait pas un cours, ou si elle faisait preuve d'un comportement inapproprié sur la patinoire ou à l'égard d'un élève;

j)               l'appelante déterminait où, quand et à qui la travailleuse devait fournir ses services d'entraîneur;

k)              la travailleuse était tenue de fournir ses services personnellement;

l)               l'appelante payait la location du temps d'utilisation de la patinoire, sans frais pour la travailleuse;

m)             la travailleuse n'a engagé aucune dépense dans l'accomplissement de ses fonctions.

[3]            La réponse à l'avis d'appel relatif au RPC (2000-3760(CPP)) est identique à celle qui précède, à l'exception du paragraphe 4 qui renvoie au Régime de pensions du Canada plutôt qu'à la Loi sur l'assurance-emploi.

[4]            Après avoir entendu le témoignage de Theresa Hart, la représentante de l'appelante (le « Club » ) et l'un de ses administrateurs, ainsi que de June Liu-Vajko, une autre administratrice du Club, je n'ajouterai que les réserves suivantes relativement aux allégations et aux faits énoncés dans la réponse à l'avis d'appel.

[5]            L'Association canadienne de patinage artistique est maintenant connue sous le nom de Skate Canada et c'est Skate Canada qui a établi les qualifications d'un entraîneur en patinage. Le Club ne pouvait engager que les entraîneurs en patinage approuvés par Skate Canada. De plus, la travailleuse fournissait ses propres patins, et elle était responsable de leur entretien et de leur aiguisage. La travailleuse devait comptabiliser ses heures de travail et présenter une facture de façon périodique des heures d'entraînement et de la rémunération qui devait lui être versée pour ces heures de travail. L'entraînement était offert périodiquement, débutant principalement en septembre et se terminant en mars de l'année suivante.

[6]            Le Club était une association à but non lucratif légalement constituée. Il comptait comme membres environ 129 enfants âgés entre trois à dix-huit ans et offrait trois niveaux ou classements différents de patineurs. Il s'adressait aux très jeunes patineurs qui, essentiellement, apprenaient à patiner jusqu'au dernier groupe de patineurs relativement accomplis. Au cours de la période en cause, quatre entraîneurs fournissaient leurs services. La travailleuse n'avait pas d'horaire de travail assuré, mais en général, elle travaillait 24 heures par semaine. À l'occasion, mais rarement, lorsque la travailleuse ne pouvait pas donner un cours, elle faisait appel aux services d'un entraîneur d'expérience pour la remplacer. Outre les heures qu'elle consacrait aux membres du Club, la travailleuse donnait également des cours privés à certains de ces membres ainsi qu'à d'autres élèves. Les administrateurs étaient bénévoles.

[7]            Une fois de plus, il s'agit en l'espèce de déterminer si la travailleuse travaillait pour le compte du Club en vertu d'un contrat de louage de services ou d'un contrat d'entreprise, c.-à-d. à titre d'entrepreneur autonome.

[8]            Comme toujours, dans les affaires de cette nature, il est nécessaire d'examiner les quatre éléments formulés par le juge MacGuigan de la Cour d'appel fédérale dans l'arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 3 C.F. 553 (87 DTC 5025), à savoir le contrôle, la propriété des instruments de travail, les chances de profit et les risques de perte ainsi que le critère d'intégration.

[9]            Selon les hypothèses de fait énoncées dans les réponses, le Club exerçait un contrôle important sur la travailleuse. Il faut notamment souligner que le Club a établi les horaires des cours et qu'il a engagé la travailleuse qui exerçait ses fonctions dans un lieu déterminé, soit l'aréna de Riverside. De plus, l'appelante avait le droit de cesser de faire appel aux services de la travailleuse, tel que la réponse à l'avis d'appel en fait état.

[10]          En ce qui concerne les instruments de travail, la travailleuse possédait ses propres patins et elle était responsable de leur entretien, mais le Club payait et fournissait le temps d'utilisation de la patinoire. La travailleuse n'avait aucune chance de profit ni aucun risque de perte. Elle était tout simplement rémunérée à un taux horaire de 34 $.

[11]          De plus, à mon avis, l'emploi de la travailleuse faisait partie intégrante des services fournis par le Club, à savoir les cours de patinage.

[12]          La représentante de l'appelante était notamment d'avis qu'essentiellement, le Club agissait tout simplement à titre d'intermédiaire auprès des parents des membres qui payaient les frais des cours de patinage et que, par conséquent, le Club ne devait pas être considéré comme un employeur distinct. Selon moi, ce point de vue est erroné.

[13]          Si j'avais des doutes relativement à cette affaire, ils sont dissipés par l'examen des décisions rendues dans deux affaires citées par l'avocate de l'intimé.

[14]          Dans l'affaire Puri c. Le ministre du Revenu national, [1998] A.C.I. no 175, qui est pratiquement identique à la présente affaire, le juge Rowe de la Cour s'est ainsi prononcé au paragraphe 10 :

                               

Les appelantes étaient des entraîneuses qualifiées, accréditées par l'ACPA. Comme membres de l'ACPA, elles devaient se conformer à ses statuts, à ses règles et à ses règlements et se soumettre à son code de déontologie pour les entraîneurs. Les exigences à cet égard posées dans les contrats entre les appelantes et le Club étaient simplement superflus et n'avaient pas d'incidence sur le contrôle. Les appelantes étaient peu supervisées puisqu'elles étaient des entraîneuses qualifiées et pouvaient enseigner les cours composant les programmes offerts par le Club. Toutefois, le Club (au paragraphe 3.05 de la pièce A-2) se réservait le droit de déterminer, après avoir consulté les appelantes en leur qualité d'entraîneuses, le genre d'enseignement à fournir dans une séance donnée. Aux termes des contrats, les appelantes devaient assister aux réunions mensuelles du comité exécutif du Club et s'assurer que tous les élèves connaissaient les règles et les règlements du Club (voir paragraphes 4.08 et 4.09 de la pièce A-2) et s'y conformaient. À titre d'entraîneuses, elles devaient travailler en collaboration avec le responsable des cours ou avec d'autres entraîneurs afin de s'assurer que les règles et règlements étaient respectés et afin de maintenir la discipline pendant un cours, quand le Club l'exigeait (voir paragraphe 4.10 de la pièce A-2). Les appelantes devaient également maintenir des relations harmonieuses avec tous les membres du Club, les entraîneurs et les instructeurs. Fait encore plus révélateur, on leur assignait des classes ou des programmes que le Club mettait sur pied, dont le Club faisait la promotion, que le Club structurait, dont le Club organisait les horaires et que le Club finançait en percevant des droits d'inscription. Le Club établissait le taux horaire pour les leçons de groupe et, dans le contrat de 1995, établissait le tarif à 30 $ l'heure pour les leçons particulières (disposition étrange dont on n'a donné aucune explication). Les appelantes ne pouvaient inclure aucun de leurs élèves personnels dans une séance de groupe ayant lieu sous les auspices du Club. Le Club déterminait le nombre d'heures d'instruction ainsi que la durée d'un programme donné. On exigeait des appelantes qu'elles donnent elles-mêmes les leçons et, à l'exception de substitutions limitées dans certaines circonstances, elles ne pouvaient sous-traiter leurs services.

L'affaire Whistler Mountain Ski Club c. Le ministre du Revenu national, [1996] A.C.I. no 876 a également été citée. Dans cette affaire, le juge Sobier de notre cour s'est ainsi prononcé aux paragraphes 22 et 25 :

22.            La supervision ou le contrôle de la façon dont un professionnel ou un expert exécute ses fonctions ne peuvent être qualifiés de contrôle puisque le professionnel en sait généralement plus long sur ses fonctions que son employeur. Ce dernier peut cependant exercer un contrôle sur son employé en fixant ses heures et son lieu de travail et en déterminant s'il peut aller et venir à sa guise.

[...]

25.            En l'espèce, les entraîneurs étaient informés du nom des membres qu'ils devaient entraîner de même que de l'endroit et du moment où les entraînements auraient lieu. Ils ne pouvaient aller et venir à leur guise. C'est un entrepreneur qui prend des risques, non pas un employé. Un entrepreneur peut dire : « Si je travaille fort et ne compte pas mes heures, mes efforts seront récompensés » . Il dira : « Plus le nombre de personnes que j'entraîne est élevé, plus je ferai d'argent » . Par contre, le fait de recevoir une rémunération à la pièce ou une commission n'est pas synonyme de travail autonome si l'employeur fixe les autres normes et contrôle par ailleurs l'employé. En l'espèce, l'entraîneur ne peut gagner plus que le taux journalier ou mensuel établi. Si la taille de son groupe diminue en raison de l'absence d'athlètes, son taux de rémunération reste le même. En l'espèce, peu importe combien d'heures il travaillait, peu importe combien d'athlètes il entraînait, l'entraîneur touchait le même montant. On lui attribuait des groupes et on lui disait quand les entraîner. Il ne pouvait inclure de tiers dans son groupe. Il ne risquait pas de subir de perte.

[15]          Selon la prépondérance des probabilités, je suis d'avis, en m'appuyant sur les allégations de l'intimé énoncées dans les réponses à l'avis d'appel (nonobstant les réserves que j'ai ajoutées) ainsi que sur les deux affaires précitées, que la travailleuse a accompli son travail en vertu d'un contrat de louage de services. Par conséquent, elle était une employée et les appels doivent donc être rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 5e jour de juillet 2002.

Martine Brunet, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-3759(EI)

ENTRE :

RIVERSIDE SKATING CLUB,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Appel entendu avec l'appel de Riverside Skating Club (2000-3760(CPP))

le 1er juin 2001 à Windsor (Ontario) par

l'honorable juge Terrence O'Connor

Comparutions

Représentante de l'appelante :                                            Terry Hart

Avocate de l'intimé :                                                             Me Rosemary Fincham

JUGEMENT

                L'appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 5e jour de juillet 2002.

Martine Brunet, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

2000-3760(CPP)

ENTRE :

RIVERSIDE SKATING CLUB,

appelante,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

Appel entendu avec l'appel de Riverside Skating Club (2000-3759(EI))

le 1er juin 2001 à Windsor (Ontario) par

l'honorable juge Terrence O'Connor

Comparutions

Représentante de l'appelante :                                            Terry Hart

Avocate de l'intimé :                                                             Me Rosemary Fincham

JUGEMENT

                L'appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 11e jour de juin 2001.

« T. O'Connor »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 5e jour de juillet 2002.

Martine Brunet, réviseure

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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