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Date: 20010418

Dossier: 98-1750-IT-G

ENTRE :

JACQUES ST-ONGE INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Archambault, C.C.I.

[1]            Jacques St-Onge Inc. (Gestion) a investi par l'intermédiaire d'une filiale en propriété exclusive, 3091-5243 Québec Inc. (Récupération), dans un projet (projet de récupération) qui a mal tourné. Elle a perdu en 1994 au moins 186 010 $ dans ce projet, soit une somme représentant le coût de ses actions de Récupération. Toutefois, en raison de circonstances exceptionnelles, Gestion pourrait éliminer une très grande partie de cette perte en obtenant des avantages fiscaux (double avantage fiscal) beaucoup plus généreux que ceux que le ministre du Revenu national (ministre) est prêt à lui consentir. Si elle obtenait gain de cause dans cet appel, Gestion aurait droit à la déduction en 1994 d'un montant de 139 507,50 $ (soit 75 % d'une perte au titre d'un placement d'entreprise (PTPE) qui s'est élevée à 186 010 $) comme perte déductible au titre d'un placement d'entreprise (PDTPE). À la suite de la fusion de Gestion et de Récupération le 15 mai 1997, elle aurait pu déduire de son revenu imposable un montant de 211 202 $ comme perte d'entreprise subie par Récupération. En quelque sorte, Gestion aurait déduit presque deux fois la même perte.

[2]            La principale question soulevée dans ces appels est de savoir si Gestion a subi au cours de son exercice 1994 une PTPE à l'égard des actions de Récupération qu'elle détenait. Le seul motif avancé par le vérificateur du ministre pour refuser à Gestion la déduction de la PDTPE est le fait qu'il n'était pas raisonnable de s'attendre à ce que Récupération soit liquidée ou dissoute au 30 avril 1994, tel que l'exige la division 50(1)b)(iii)(D) de la Loi de l'impôt sur le revenu (Loi).

[3]            Comme elle a reporté, en vertu de l'article 111 de la Loi, une partie de la perte sur les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 de même que 1995, Gestion conteste les cotisations établies par le ministre à l'égard de toutes ces années. Toutefois, la solution du litige dépend entièrement du traitement fiscal de la perte subie en 1994. De plus, au début de l'audience, Gestion a modifié son avis d'appel pour indiquer que le montant de 223 031 $[1] indiqué dans la déclaration de revenu de 1994 comme une PTPE devrait être diminué à 186 010 $. Par conséquent, le montant de la PDTPE que Gestion désire déduire n'est plus 167 273 $ (75 % x 223 031 $) mais plutôt 139 507 $. Par contre, elle demande dans le calcul de son revenu d'entreprise une déduction de 36 915 $ (dépenses supplémentaires) au titre de dépenses qu'elle aurait engagées elle-même dans la poursuite du projet de récupération.

Faits

[4]            Gestion a été constituée en 1968 dans le but de détenir des participations dans différentes sociétés. Son siège social est situé à Caplan, dans la péninsule gaspésienne, et son exercice se termine le 30 avril. Monsieur Jacques St-Onge détient 99 % des actions de Gestion et son fils détient le reste. En 1994, Gestion détient :

— 51 % de Pétroles Chaleurs (1987) Inc. (Pétroles) (les autres actions appartenant à Petro-Canada)

— 84 % de Toyota Baie des Chaleurs Inc. (les autres actions appartenant au frère de Jacques St-Onge)

— 81 % de Bonaventure Nissan (le pourcentage varie au cours de la période pertinente)

— 71 % de Gaspésie Auto Inc. (les autres actions appartenant à trois autres investisseurs)

— 33 1/3 % de Les Immeubles Landry et St-Onge Inc., (les autres actions appartenant en parts égales à deux autres personnes)

— 400 actions privilégiées d'Automobiles Caplan (Bonaventure) Inc.[2]

Monsieur St-Onge a indiqué que chaque fois qu'il fondait une nouvelle entreprise, il formait une nouvelle société.

[5]            Monsieur St-Onge est le président et directeur général de Pétroles, société dont il assure lui-même la gestion quotidienne. Quant aux autres sociétés détenues par Gestion, le rôle de monsieur St-Onge se limite à agir comme administrateur au conseil d'administration. Ces autres sociétés sont gérées par des gestionnaires à plein temps.

[6]            Lors de son témoignage, monsieur St-Onge a indiqué que lui ou Gestion avait, au cours des années 1980, vendu un navire à la société 2754002 Canada Inc. (MTI), une société appartenant à monsieur Michel Tadros. Gestion avait dû cautionner le prêt (prêt du navire) obtenu pour acquitter le prix d'achat de ce navire. Le navire devait servir à la pêche à la morue mais en raison de la disparition des stocks de morue dans le golfe du Saint-Laurent, MTI avait beaucoup de difficulté à exploiter de façon profitable ce navire.

[7]            C'est monsieur Michel Tadros qui a fait des démarches auprès de monsieur St-Onge au cours du printemps 1993 dans le but de l'intéresser au projet de récupération, soit un projet de récupération de 130 tonnes[3] de nickel se trouvant sur le paquebot l'Empress of Ireland qui avait coulé le 29 mai 1914 au large de Ste-Luce-sur-mer, près de Rimouski. Le paquebot se trouvait à 180 pieds sous l'eau. Selon monsieur Tadros, la valeur de la cargaison de nickel était de 1 600 000 $ alors que les frais de récupération ne devaient pas dépasser 200 000 $. Gestion a donc accepté de se lancer dans ce projet.

[8]            Dans le cadre du projet de récupération, MTI devait fournir le navire nécessaire au transport du personnel et à la récupération du nickel. Récupération n'était pas responsable des frais d'assurance maritime ni des frais d'intérêts relatifs au prêt du navire (si ce n'était à titre de caution). Après le paiement de toutes les dépenses engagées dans le projet de récupération, les profits devaient être partagés en parts égales entre le propriétaire du navire, les plongeurs et Récupération.

[9]            Pour démarrer le projet, Gestion a avancé le 29 avril 1993 une somme de 11 400 $ pour acheter à Pétroles du diesel requis pour le navire. Le même jour, Gestion versait aussi une somme de 22 201,12 $ à la Caisse populaire de Caplan en paiement de l'arriéré dû par MTI sur le prêt du navire. Ces sommes devaient être remboursées à Gestion après qu'on eut mené à bien le projet de récupération. Toutefois, le montant de 22 201,12 $ n'a pas encore été remboursé par MTI. Selon monsieur St-Onge, MTI a fait face à de continuelles difficultés financières.

[10]          Ayant constaté les risques inhérents à la plongée à plus de 180 pieds sous l'eau, Gestion a décidé de constituer Récupération en société. Selon la déclaration de revenu de Récupération pour 1993, sa date de constitution est le 18 mai 1993. Son exercice se termine le 31 décembre. Dans une entente en date du 25 mai 1993 entre Gestion et Récupération[4], on affirme que Récupération aurait accepté de “ procéder à l'émission de 265 000 actions "D" et [sic] son capital-actions à [Gestion] ”. On y déclare aussi que Récupération avait “ reçu à ce jour, 22 201,12 $ sous forme d'avance et converti ce montant en capital-actions "D" ”. Lors de l'établissement de sa nouvelle cotisation pour l'année 1994, le vérificateur du ministre a tenu pour acquis qu'au 31 décembre 1993 et au 31 décembre 1994 le capital-actions de Récupération était constitué de 10 actions de catégorie A et de 186 000 actions de catégorie D dont le capital versé total était de 186 010 $. Le procureur de Gestion a admis ce fait au début de l'audience[5].

[11]          Selon un relevé manuscrit de monsieur St-Onge (pièce A-1) faisant état des sommes investies par Gestion dans le projet de récupération, tous les débours de Gestion ont été effectués après la constitution de Récupération, sauf les deux déjà mentionnés. La plupart des sommes investies par Gestion ont d'abord été avancées à Récupération et cette dernière a payé par la suite ses fournisseurs.

[12]          Lors de son témoignage, monsieur Michel Bernier, fiscaliste chez RCMP, a indiqué sur un document (pièce A-5) les dépenses supplémentaires suivantes que Gestion désire déduire comme ses propres dépenses :

                                                                                                                    $

Solde au 30 avril 1993                                                           22 201,12[6]

Transfert de chèque effectué à [MTI]

Et/ou Michel Tadros en relation avec le projet

                                B              882                           4 999,00

                                B              902                           5 000,05

                                B              941                           300,00

                                                                                                                10 299,05

Transfert à Denis Boissonneault [sic]

07-10-93 B              976                                                           400,00

Factures payées par [Gestion]

20-05-93 Centre Plongée Gaspé Inc.                  800,00

05-06-93 Boutique du Plongeur Ltée                                 3 215,00[7]

                                                                                                                36 915,17

[13]          Selon monsieur Bernier, ces dépenses sont admissibles dans le calcul du revenu d'entreprise de Gestion parce qu'elles ont toutes été payées directement par Gestion aux fournisseurs et non pas à Récupération.

[14]          Le projet de récupération a nécessité l'engagement d'une quinzaine de personnes, dont une équipe pour faire fonctionner le navire et une autre pour la plongée. Il semble que les activités de plongée ont débuté en juin 1993. Malheureusement, quelques semaines plus tard, les difficultés ont débuté. Les plongeurs de Récupération ont reçu la visite de la Sûreté du Québec et de la Gendarmerie royale du Canada. D'autres organismes gouvernementaux comme la CSST sont aussi venus faire enquête. Finalement, une injonction interlocutoire a été obtenue par la Société touristique de l'Empress of Ireland, qui contestait le droit de Récupération de faire des fouilles. Récupération a dû cesser temporairement ses activités de récupération du nickel. À ce moment-là, on n'avait récupéré que du bois de teck, qui d'ailleurs a été saisi par le receveur des épaves.

[15]          En raison de toutes les difficultés qu'elle a rencontrées et quoiqu'elle ait pu obtenir l'annulation de l'injonction interlocutoire, Récupération a décidé d'abandonner définitivement le projet de récupération. Des avis de cessation d'emploi ont été envoyés le 16 septembre 1993 à 9 employés. Parmi eux, on retrouve un des deux capitaines, des plongeurs, un mécanicien et un cuisinier. Le dernier jour de travail pour ces employés était le 20 août 1993. L'autre capitaine a quitté volontairement le 15 septembre 1993 alors que les deux derniers employés ont été licenciés les 18 septembre et 9 octobre 1993 respectivement pour manque de travail.

[16]          Monsieur St-Onge a affirmé que Récupération n'avait aucune intention au 30 avril 1994 de relancer le projet de récupération et que Gestion avait abandonné tout espoir de récupérer sa mise de fonds dans Récupération. Selon l'expression de monsieur St-Onge, Récupération était “ morte ” après le 31 décembre 1993, et il n'avait aucune intention d'utiliser cette société pour une autre entreprise. D'ailleurs aucun état financier de Récupération n'a été dressé dans les mois qui ont suivi la fin de l'exercice 1993 et aucun placement dans Récupération n'apparaît dans les états financiers de Gestion pour l'exercice se terminant le 30 avril 1994 et les exercices suivants. Ce n'est qu'à la demande du vérificateur du ministre que des états financiers ont été dressés pour les années 1993 à 1996. Toutefois, les déclarations auprès du ministère des Institutions financières avaient été produites régulièrement par Récupération afin d'éviter toute pénalité.

[17]          Au bilan du 31 décembre 1993 de Récupération, les seuls actifs qui apparaissent sont une encaisse de 703 $ et une créance fiscale de 2 981 $. Le bois de teck que Récupération avait récupéré en 1993 mais qui avait été saisi par le receveur des épaves n'y apparaît pas. Cette saisie a finalement été levée et, en contrepartie d'une somme de 500 $, Récupération a recouvré ce bois, qui se trouve toujours sur un fardier dans la cour arrière de monsieur St-Onge. Il a indiqué qu'il considérait le bois comme appartenant au Patrimoine national du Canada et qu'il avait l'intention de le donner une fois qu'il aurait réglé sa contestation des cotisations établies par le ministre.

[18]          Monsieur St-Onge a affirmé qu'il n'avait jamais eu l'intention de “ liquider ou dissoudre ” Récupération. Selon lui, il n'était pas question que cette société fasse faillite. Étant un homme d'affaires bien connu dans la région, il était important que tous les créanciers de Récupération soient payés, même les organismes gouvernementaux compte tenu de l'obligation qu'il avait comme administrateur de s'assurer que les sommes dues seraient versées.

[19]          Monsieur Bernier a confirmé que monsieur St-Onge s'était complètement désintéressé de Récupération et qu'il ne désirait pas engager de frais comptables pour établir les états financiers de celle-ci. Il a expliqué qu'il n'y avait pas eu de liquidation ou de dissolution en raison de l'existence de poursuites ou de menaces de poursuites qui n'avaient pas encore été réglées. Dans les états financiers de Récupération au 31 décembre 1994, on retrouve un compte créditeur de 28 076 $ au 31 décembre 1993 et de 26 697 $ au 31 décembre 1994. Il aurait été imprudent de liquider Récupération compte tenu de certaines dispositions législatives, notamment celles de la Loi sur les compagnies et du Code civil en vertu desquelles, les administrateurs de Récupération auraient pu être tenus responsables si cette dernière avait été dissoute alors qu'il existait des dettes impayées.

[20]          De plus, il n'avait pas été question en 1994 de fusion de Récupération et de Gestion. Apparemment, la décision de fusion n'aurait été prise qu'après que le ministre eut refusé la déduction de la PDTPE. Cette décision du ministre a été communiquée dans un projet de cotisation en date du 30 janvier 1997. Puisque Gestion se voyait refuser la PDTPE, on désirait qu'elle puisse déduire les pertes d'entreprise de Récupération. C'est alors que monsieur Bernier a indiqué qu'il était possible d'atteindre cet objectif soit en procédant par liquidation en vertu de l'article 88 de la Loi ou en procédant par fusion en vertu de l'article 87. On a opté pour la fusion parce que cela était plus facile et moins coûteux. Lors de la fusion réalisée le 15 mai 1997, l'avoir des actionnaires négatif de Récupération s'élevait à 25 192 $ en raison d'un déficit accumulé de 211 202 $[8]. De plus, le compte créditeur de 26 697 $ de Récupération demeurait toujours impayé. Il a donc été pris en charge par Gestion et la dette aurait été payée par la suite.

[21]          Lors de sa vérification, le vérificateur du ministre a appris que Récupération avait signé le 14 octobre 1994 une entente par laquelle Récupération s'engageait à verser à 165927 Canada Inc. (BLI), une somme de 25 000 $ dont 5 000 $ à titre d'acompte, pour obtenir les droits de récupération du nickel. Récupération devait aussi lui verser 10 % de la valeur nette du nickel récupéré. Monsieur St-Onge a expliqué que cette lettre d'entente avait été signée à la suite des négociations tenues à son bureau entre lui, monsieur Tadros et monsieur Bruce Lynch. Ce dernier avait passé toute la journée à tenter de le convaincre de l'intérêt commercial qu'il y avait à reprendre l'exécution du projet de récupération. Lorsqu'il est retourné chez lui à la fin de la journée et après en avoir discuté avec sa nouvelle épouse, monsieur St-Onge a décidé qu'il avait fait une erreur en s'embarquant à nouveau dans un tel projet. Le lendemain, il a communiqué avec sa banque pour faire opposition au chèque de 5 000 $. Par la suite, ni Gestion ni Récupération n'a repris l'exécution du projet de récupération. Monsieur St-Onge a reçu de monsieur Lynch une lettre le menaçant de poursuites en justice pour avoir annulé unilatéralement l'entente du 14 octobre 1993, mais aucune poursuite n'a jamais été intentée.

[22]          Selon le vérificateur du ministre, il était plus probable que Récupération ferait l'objet d'une fusion ou qu'elle serait utilisée pour exploiter une nouvelle entreprise. Pour en arriver à cette conclusion, il se fondait sur sa propre expérience de vérificateur et sur le fait qu'on retrouvait dans Récupération une importante perte fiscale. Il disait de plus que la liquidation n'est plus probable qu'une fusion que lorsqu'une fusion n'est pas possible, notamment lorsqu'un particulier détient directement des actions d'une société ou s'il s'agit de deux sociétés qui ne sont pas régies par la même loi sur les sociétés.

Analyse

La PTPE à l'égard des actions de Récupération

[23]          Les dispositions pertinentes pour résoudre la première question soulevée par ces appels sont les alinéas 39(1)c) et 50(1)b) de la Loi qui se lisent comme suit :

39 (1) Pour l'application de la présente loi:

[. . .]

c) une perte au titre d'un placement d'entreprise subie par un contribuable, pour une année d'imposition, résultant de la disposition d'un bien quelconque s'entend de l'excédent éventuel de la perte en capital que le contribuable a subie pour l'année résultant d'une disposition, après 1977:

(i) soit à laquelle le paragraphe 50(1) s'applique,

(ii) soit en faveur d'une personne avec laquelle il n'avait aucun lien de dépendance,

d'un bien qui est:

(iii) soit une action du capital-actions d'une société exploitant une petite entreprise,

(iv) soit une créance du contribuable sur une société privée sous contrôle canadien (sauf une créance, si le contribuable est une société, sur une société avec laquelle il a un lien de dépendance) qui est:

(A) une société exploitant une petite entreprise,

(B) un failli, au sens du paragraphe 128(3), qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où il est devenu un failli pour la dernière fois,

(C) une personne morale visée à l'article 6 de la Loi sur les liquidations qui était insolvable, au sens de cette loi, et qui était une société exploitant une petite entreprise au moment où une ordonnance de mise en liquidation a été rendue à son égard aux termes de cette loi,

[. . .]

50 (1) Pour l'application de la présente sous-section, lorsque, selon le cas :

[. . .]

b) une action du capital-actions d'une société (autre qu'une action reçue par un contribuable en contrepartie de la disposition d'un bien à usage personnel) appartient au contribuable à la fin d'une année d'imposition et :

(i) soit la société est devenue au cours de l'année un failli au sens du paragraphe 128(3),

(ii) soit elle est une personne morale visée à l'article 6 de la Loi sur les liquidations, insolvable au sens de cette loi et au sujet de laquelle une ordonnance de mise en liquidation en vertu de cette loi a été rendue au cours de l'année,

(iii) soit les conditions suivantes sont réunies à la fin de l'année :

(A) la société est insolvable,

(B) ni la société ni une société qu'elle contrôle n'exploite d'entreprise,

(C) la juste valeur marchande de l'action est nulle,

(D) il est raisonnable de s'attendre à ce que la société soit dissoute ou liquidée et ne commence pas à exploiter une entreprise,

le contribuable est réputé avoir disposé de la créance ou de l'action à la fin de l'année pour un produit nul et l'avoir acquise de nouveau immédiatement après la fin de l'année à un coût nul, à condition qu'il fasse un choix, dans sa déclaration de revenu pour l'année, pour que le présent paragraphe s'applique à la créance ou à l'action.

                                                                                                [Je souligne.]

[24]          La première constatation qu'il faut faire ici est qu'il est possible de subir une PTPE à l'égard d'une action du capital-actions d'une société exploitant une petite entreprise ou à l'égard d'une créance sur une telle société. Toutefois, le sous-alinéa 39(1)c)iv) prévoit une exception : n'est pas admissible au régime avantageux de la PTPE la créance d'une société (par exemple Gestion) sur une société (par exemple Récupération) avec laquelle elle a un lien de dépendance. Comme Récupération est une filiale en propriété exclusive de Gestion, une perte à l'égard d'une créance de Gestion sur Récupération ne pourrait constituer une PTPE. Ceci explique pourquoi Gestion ne demande la déduction d'une PDTPE qu'à l'égard de ses actions de Récupération.

[25]          Tel qu'il a déjà été mentionné, seule l'application de la division 50(1)b)(iii)(D) pose ici un problème quant au droit de Gestion de déduire la PDTPE à l'égard de ses actions de Récupération. Selon les alinéas 8g), h) et k) de la Réponse à l'avis d'appel[9], il semble raisonnable de croire que le ministre a d'abord conclu qu'il n'était pas raisonnable de s'attendre à ce que Récupération “ soit dissoute [. . .] au 30 avril 1994 ”, et ce en raison des activités du mois d'octobre 1994, lesquelles laissaient croire que cette société n'avait pas abandonné son projet de récupération. Il incombait à Gestion de faire la preuve que les faits sur lesquels le ministre s'était fondé pour établir sa cotisation étaient erronés. Gestion pouvait s'acquitter de cette tâche en démontrant que Récupération avait abandonné son projet de récupération, qu'elle n'avait aucune intention de le relancer et qu'il était raisonnable de s'attendre à ce que Récupération soit dissoute ou liquidée.

[26]          Il est important de noter que la date pertinente pour ce qui est de la détermination de ce caractère raisonnable est, tel que l'édicte le sous-alinéa 50(1)b)(iii) de la Loi, la fin de l'année, soit, en l'occurrence, le 30 avril 1994. De plus, la division 50(1)b)(iii)(D) ne fixe aucun délai pour que la société soit dissoute ou liquidée[10]. Pour remplir la condition du caractère raisonnable de l'attente de dissolution ou de liquidation, il n'est donc pas nécessaire que Récupération puisse être liquidée ou dissoute au 30 avril 1994. Il suffit qu'il soit raisonnable de s'attendre à ce qu'elle le soit à un moment donné.

[27]          Sur la foi de la preuve qui m'a été présentée, je crois que Gestion a réussi à faire la preuve qu'elle avait à faire. Au 31 décembre 1993, Récupération avait abandonné toute intention de poursuivre le projet de récupération. L'inactivité de Récupération entre le mois de septembre 1993 et le 14 octobre 1994 étaye manifestement cette conclusion. Si Récupération avait voulu continuer l'exploitation de son entreprise, la preuve aurait certainement révélé l'existence d'activités au cours de l'été 1994. La signature de l'entente intervenue le 14 octobre 1994 n'était pas vraiment prévisible au 30 avril 1994. De plus, cette entente n'a été qu'une tentative avortée de redémarrer le projet. À la date de l'entente, monsieur Lynch a tout fait pour convaincre monsieur St-Onge de relancer le projet. Il y est presque parvenu. En effet, à la fin d'une longue journée de négociations, monsieur St-Onge, au nom de Récupération, avait signé une nouvelle entente. Par contre, après réflexion, monsieur St-Onge a réalisé qu'il n'avait aucun intérêt à se lancer à nouveau dans une telle entreprise. Il a donc décidé le jour suivant de mettre fin à l'entente du 14 octobre et de faire opposition au chèque de 5 000 $. À mon avis, on ne peut considérer la négociation et la signature de l'entente du 14 octobre 1994 comme constituant la reprise de l'exploitation d'une entreprise.

[28]          Même si on avait abandonné définitivement le projet de récupération, pouvait-on s'attendre, au 30 avril 1994, à ce que Récupération soit liquidée ou dissoute et à ce qu'elle ne recommence pas à exploiter une entreprise? Le procureur de Gestion a soutenu qu'il fallait appliquer un critère subjectif en examinant cette question. Selon lui, Récupération n'a jamais eu l'intention d'exploiter à nouveau son entreprise de récupération ni d'exploiter une autre entreprise. Monsieur St-Onge s'était complètement désintéressé de cette société, qu'il considérait comme morte et n'ayant aucun avenir. On craignait d'éventuelles poursuites et le règlement des comptes créditeurs a pris un certain temps. On peut penser notamment aux poursuites qu'aurait pu engager BLI pour faire respecter l'entente du 14 octobre 1994. Après un certain temps, il est devenu évident que cette société avait abandonné toute idée de poursuites et c'est pour cela qu'on a finalement pu procéder à la fusion de Récupération et de Gestion. Évidemment, il semble que le fait que le ministre ait refusé la déduction de la PDTPE ait aussi incité Gestion à procéder à cette fusion.

[29]          La procureure de l'intimée soutient qu'il faut plutôt appliquer un critère objectif. Elle se fonde sur la décision rendue par mon collègue le juge Rip dans l'affaire Bailey v. Canada, [1989] T.C.J. No. 602. Même si le litige ne concernait pas l'article 50 de la Loi ou une disposition analogue, le juge Rip avait à déterminer comment interpréter le mot “ raisonnable ” dans le contexte de l'alinéa 152(5)c) de la Loi. Voici l'interprétation qu'il a adopté :

[TRADUCTION]

Ce n'est pas l'opinion personnelle de l'appelant ou de l'intimé sur ce qui est “ raisonnable ” qui importe plutôt, mais celle d'un observateur impartial qui aurait une connaissance de tous les faits pertinents : voir le juge Cattanach à la page 5028 de l'arrêt Canadian Propane Gas & Oil Limited c. M.R.N., 73 DTC 5019.

[30]          Pour les fins de l'article 50 de la Loi, je crois que l'approche décrite par le juge Rip convient tout à fait. Compte tenu de tous les faits pertinents, y compris certaines considérations juridiques et fiscales, était-il raisonnable de s'attendre, au 30 avril 1994, à ce que Récupération soit dissoute ou liquidée et ne recommence pas une entreprise?

[31]          Dans ses notes écrites du 7 juillet 2000, l'avocate de l'intimée défend sa position ainsi :

L'existence de ces comptes à payer est un fait important pour conclure qu'il n'est pas raisonnable que [Récupération] soit liquidée et ce, en se replaçant en 1994.

                Il faut aussi mentionner qu'étant donnée les comptes à payer de [Récupération] ainsi que certaines poursuites, il n'est pas raisonnable de s'attendre à ce que cette compagnie soit liquidée mais, il est raisonnable étant donné les conditions à respecter de s'attendre à ce que [Récupération] et l'appelante soient fusionnées. Ce dernier point n'est pas comme tel le test à rencontrer mais, il est important de regarder la raisonnabilité d'une fusion pour déterminer la raisonnabilité d'une liquidation ou d'une dissolution. Le fait qu'il soit plus simple de procéder à une fusion plutôt qu'à une liquidation fait en sorte qu'il n'est pas raisonnable de s'attendre à ce que [Récupération] soit liquidée. Une personne raisonnable ne choisirait pas l'avenue jonchée d'embûches mais celle qui est la plus simple et directe pour arriver au but souhaité et celle où il n'y a pas d'obligation de payer les dettes.

[32]          J'ai beaucoup de difficulté à suivre la logique de cet exposé. Comment l'existence de comptes créditeurs pourrait-elle constituer plus un empêchement - ou à tout le moins un facteur défavorable - à la liquidation de Récupération qu'à la fusion de cette société et de Gestion? S'il y avait fusion de ces deux sociétés, la société résultant de la fusion deviendrait la débitrice de tous les comptes créditeurs des sociétés fusionnantes. La société issue de la fusion serait aussi exposée à toutes poursuites qui auraient pu être intentées contre les sociétés fusionnantes. Par conséquent, l'existence de comptes créditeurs et de poursuites possibles constitue, me semble-t-il, un facteur défavorable aussi bien dans le cas d'une liquidation que dans le cas d'une fusion.

[33]          Que l'on ait décidé de liquider Récupération ou bien de procéder à sa fusion avec Gestion, il aurait fallu d'abord déterminer l'étendue des obligations auxquelles pouvaient être assujettis Gestion et les administrateurs de Récupération. Au 30 avril 1994, je crois qu'il était raisonnable de s'attendre à ce que les menaces de poursuites ne soient pas exécutées et qu'elles ne constituaient un empêchement sérieux ni à la liquidation ni à la fusion. Il fallait être prudent et attendre que le temps fasse son oeuvre. Il aurait été possible, au besoin, de négocier le règlement des dettes contestables. Le fait que la situation s'est tassée et qu’il a été possible de procéder à la fusion des sociétés confirme après coup le caractère raisonnable de cette appréciation. Reste à déterminer laquelle de la liquidation ou de la fusion constituait la meilleure façon de procéder.

[34]          Il semble qu'en procédant par liquidation, Gestion pouvait espérer obtenir le double avantage fiscal. Une des façons de pouvoir déduire la PDTPE prévue à l'article 39 de la Loi était de réunir toutes les conditions énoncées au sous-alinéa 50(1)b)(iii). Une de ces conditions était qu'il devait être raisonnable de s'attendre à ce que la société soit liquidée ou dissoute. Un contribuable bien conseillé aurait certainement conclu qu'il était plus avantageux de liquider ou de dissoudre Récupération que de la fusionner avec Gestion, même si cela pouvait comporter un peu plus de frais. En procédant ainsi, on pouvait espérer gagner sur les deux tableaux, c'est-à-dire, avoir la possibilité de déduire la PDTPE subie à l'égard des actions que Gestion détenait dans Récupération et, par la suite, bénéficier de la déduction des pertes d'entreprise subies par Récupération elle-même.

[35]          Le fait que monsieur St-Onge a déclaré qu'il n'avait pas l'intention de liquider Récupération et le fait que l'on a procédé par la suite par voie de fusion ne change pas cette conclusion. Il faut se rappeler qu'il s'agit d'appliquer ici un critère objectif et non subjectif. D'ailleurs, monsieur St-Onge semble avoir cru, à tort, que liquider ou dissoudre une société signifiait éluder le paiement des dettes de celle-ci. De plus, il semblait plus enclin à vouloir oublier le revers qu'il avait subi. Il faut se rappeler aussi que ce n'est qu'après le refus du ministre d'accorder la déduction de PDTPE que l'on a envisagé, sur les conseils du fiscaliste de Gestion, la fusion de Récupération et de Gestion.

[36]          Compte tenu du double avantage fiscal qu'on pouvait espérer obtenir et de la probabilité que l'on pouvait régler de façon satisfaisante les créances contestables sur Récupération, il était raisonnable de s'attendre, au 30 avril 1994, à ce que Récupération finisse par être dissoute ou liquidée. À mon avis, la condition prévue à la division 50(1)b)(iii)(D) de la Loi a été remplie ici.

[37]          Avant de terminer, j'aimerais commenter deux aspects des cotisations du ministre qui, à mon avis, ont été escamotés. Tout d'abord, certains éléments de preuve me font douter que Récupération ait effectivement émis toutes ses actions. Selon les états financiers de Récupération au 31 décembre 1993, le capital émis et versé était de 186 010 $. Or, une analyse du compte des avances à Récupération[11] de Gestion révèle que le solde au 30 avril 1994 totalise 196 809,05 $. À ce montant, on a ajouté à la main deux entrées (vraisemblablement des sommes versées à des fournisseurs de Récupération), ce qui donne un nouveau solde de 200 824,05 $. À côté de ce chiffre, on retrouve l'annotation manuscrite suivante “ avances sur actions à être émises ”, laquelle aurait pu être ajoutée par après. Ces actions auraient donc été émises, si effectivement elles l'ont été, non seulement après que Récupération eut abandonné son projet de récupération en septembre 1993 mais après le 30 avril 1994[12]. Il est ainsi probable que Gestion a réclamé au 30 avril 1994 une déduction d'une PDTPE à l'égard d'actions qui, en totalité ou en partie, n'avaient pas été émises[13]. Toutefois, comme le ministre a établi la cotisation à l'égard de Gestion en tenant pour acquis que 186 010 actions avaient été émises au 31 décembre 1993 pour une contrepartie de 186 010 $, je ne peux reprocher à Gestion de ne pas avoir fourni la preuve de l'émission de ces actions. Par conséquent, ces actions doivent être considérées comme ayant été émises.

[38]          Deuxièmement, je suis loin d'être certain que Gestion ait satisfait à la condition énoncée à la division 50(1)b)(iii)(A), à savoir que Récupération devait être une société insolvable au 30 avril 1994. En effet, même si cette société était dans un état déficitaire à cette époque, monsieur St-Onge et Gestion, qui contrôlaient Récupération, ont toujours eu l'intention de voir à ce que cette dernière paie tous ses créanciers. L'intention de Gestion était de financer tous les besoins financiers de Récupération. L'entente du 25 mai 1993 mentionne que Récupération avait accepté de procéder à l'émission de 265 000 actions de catégorie D. Selon les états financiers de Récupération, seulement 180,000 actions de cette catégorie auraient été émises et l'avoir des actionnaires négatif n'était que de 25 192 $. Il est donc raisonnable de croire que l'intention de Gestion était de fournir par voie de souscription d'actions les fonds nécessaires pour payer tous les créanciers de Récupération. On peut même constater qu'il n'aurait même pas été nécessaire d'émettre toutes les 265,000 actions de catégorie D pour acquitter les dernières dettes de Récupération.

[39]          À ce fait, il faut ajouter les circonstances entourant le financement de Récupération. Gestion a généralement fourni à Récupération les fonds nécessaires pour lui permettre de payer ses fournisseurs. L'argent était d'abord avancé sous forme de prêt et par la suite converti en actions, si l'on se fie à l'entente du 25 mai 1993. De plus, selon cette entente, Récupération avait accepté d'émettre 265 000 actions de catégorie D. Il aurait été intéressant de déterminer si Gestion s'était formellement engagée à les souscrire. En tout état de cause, il aurait peut-être été plus approprié de décrire la situation de Récupération comme étant celle d'une société en position déficitaire ou sans financement adéquat et non pas celle d'une société insolvable. La détermination de l'état d'insolvabilité d'une personne est une question mixte de fait et de droit et cette détermination aurait pu se faire selon une approche analogue à celle que j'ai adoptée dans l'affaire Flexi-Coil Ltd. c. Canada, [1995] A.C.I. no 1558 ([1996] 1 C.T.C. 2941) (confirmée par la Cour d'appel fédérale, [1996] A.C.F. no 811 ([1996] 3 C.T.C. 57, 96 DTC 6350)).

[40]          Toutefois, cette question n'a jamais été soulevée ni dans les actes de procédure de l'intimée ni lors de l'audience. Parmi les faits énoncés dans la Réponse à l'avis d'appel, sur lesquels le ministre s'est fondé pour établir sa cotisation, il n'est fait aucune mention de l'état de solvabilité de Récupération. Aucune demande de modification de la Réponse à l'avis d'appel n'a été faite. Le débat n'a porté que sur la question de savoir s'il était raisonnable de s'attendre à ce que Récupération soit dissoute ou liquidée au 30 avril 1994. Dans la jurisprudence portant sur la question du fardeau de la preuve, on affirme que la tâche d'un contribuable est de démolir les faits sur lesquels le ministre s'est fondé pour établir sa cotisation[14]. Si le ministre n'a pas énoncé un fait pertinent dans sa Réponse à l'avis d'appel, il est difficile de reprocher au contribuable de ne pas avoir démoli ce fait. Il serait donc tout à fait inapproprié de rejeter l'appel de Gestion sur la base de sa solvabilité.

Dépenses supplémentaires de Gestion

[41]          Quant aux dépenses supplémentaires de 36 915,17 $ dont Gestion demande la déduction dans le calcul de son propre revenu d'entreprise, j'en viens à la conclusion que Gestion a échoué dans sa tâche de démontrer qu'il s'agissait de dépenses qu'elle a engagées dans le but de gagner un tel revenu. Tout d'abord, je ne crois pas que Gestion ait jamais entrepris le projet de récupération. Il faut se rappeler que monsieur St-Onge a dit que chaque fois qu'il lançait une nouvelle entreprise il utilisait une nouvelle société. Récupération a été constituée en société le 18 mai 1993, soit quelques jours à peine après les premiers débours du 29 avril 1993.

[42]          De plus, les dépenses supplémentaires représentent toutes des dépenses engagées après la constitution de Récupération, à l'exception de la somme de 22 201,12 $, qui apparaît à la pièce A-5 comme le “ solde au 30 avril 1993 ”. Comme cette somme correspond au cent près au montant versé comme intérêts à la Caisse populaire relativement au prêt du navire et qu'il n'y a pas vraiment d'autres dépenses qui ont été engagées avant le 18 mai 1993, si ce n'est la dépense de 11 400 $ pour le diesel, il faut conclure que la somme de 22 201,12 $ représente les intérêts sur le prêt du navire. Or, Gestion n'était pas l'emprunteur mais uniquement la caution. Elle avait donc le droit de se faire rembourser cette somme.

[43]          De plus, Gestion aurait par la suite considéré cette somme de 22 201,12 $ comme une avance à Récupération. On retrouve à la note 8 du bilan au 30 avril 1993 de Gestion la mention qu'une somme de 22 201 $ a été avancée à Récupération. Des écritures de régularisation apparaissant à la pièce A-6 confirment aussi ce traitement comptable à l'égard d'un montant de 22 201,12 $. Il faut se rendre à l'évidence que Gestion a considéré la dépense d'intérêts de 22 201,12 $ non pas comme une de ses dépenses mais plutôt comme une avance à Récupération — tout comme les autres avances faites à Récupération — et comme une dépense de Récupération. Selon l'entente du 25 mai 1993, cette avance aurait même été convertie en actions de catégorie D. Cette somme fait donc partie de la PTPE de 186 010 $. D'où il s'ensuit que ce que prétend Gestion par rapport à cette somme est manifestement mal fondé. Elle ne peut être traitée comme une dépense engagée par Gestion pour gagner un revenu d'entreprise.

[44]          Quant aux autres dépenses supplémentaires, elles ont toutes été engagées après la constitution de Récupération. Même si elles ont été versées directement par Gestion aux fournisseurs de Récupération, ces sommes ne peuvent être considérées comme ayant été engagées par Gestion dans le but de tirer un revenu d'une entreprise, puisque l'entreprise de récupération était exploitée au même moment par Récupération. Ces sommes doivent plutôt être considérées comme des sommes versées par Gestion pour le compte de Récupération et, par conséquent, comme des avances à Récupération, tout comme les autres sommes versées directement à celle-ci. Lorsque ces avances sont devenues irrécouvrables, Gestion a subi une perte en capital. Par contre, cette perte ne permet pas de bénéficier de l'application du régime plus avantageux de la PTPE.

[45]          Pour ces raisons, les appels de Gestion sont accueillis avec dépens et les cotisations pour les années d'imposition 1992, 1993, 1994 et 1995 sont déférées au ministre pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant pour acquis que Gestion a subi une PTPE de 186 010 $ au cours de l'année 1994.

Signé à Ottawa, Canada, ce 18e jour d'avril 2001.

“ Pierre Archambault ”

J.C.C.I.



[1] Ce montant apparaît aussi au bilan de Gestion au 30 avril 1994 comme une “ perte sur la radiation de placements ”.

[2] Décrite comme une société affiliée dans les états financiers de Gestion.

[3] Selon le témoignage de monsieur St-Onge. Toutefois, parmi les faits énoncés dans la Réponse à l'avis d'appel de l'intimée, le procureur de Gestion avait admis celui selon lequel il s'agissait de 30 tonnes (alinéa 8d) de la Réponse à l'avis d'appel).

[4] Cette entente d'une demi-page ressemble à une résolution d'une société. En plus de la signature de monsieur St-Onge pour le compte de Gestion, on y retrouve celles de messieurs Bourdages et Boissonnault. Le nom de monsieur Tadros s'y retrouve aussi, mais pas sa signature.

[5] Le vérificateur s'est probablement fondé sur les états financiers de Récupération pour les exercices 1993 et 1994 établis par Raymond, Chabot, Martin et Paré (RCMP) le 1er octobre 1996 et le 24 juillet 1997 respectivement. Par contre, il est plutôt surprenant de constater qu'aux états financiers de Gestion pour l'exercice se terminant le 30 avril 1993, on décrit le placement dans le projet de récupération comme des “ avances sur prêt, taux préférentiel 22 201 $ ” faites à Récupération alors que cette société n'existe pas encore à cette date. De plus, on n'indique aucun placement dans Récupération pour les exercices subséquents de Gestion.

[6] Monsieur Bernier n'était pas en mesure de décrire la nature des dépenses représentées par ce montant. Toutefois, il correspond exactement à celui des intérêts versés pour le prêt du navire. De plus, on ne retrouve pas parmi les dépenses engagées avant le 30 avril 1993 les 11 400 $ payés pour le diesel pour le navire de MTI.

[7] Ce montant de 3 215 $ correspond à une somme de 3 715,25 $ inscrite dans le relevé manuscrit de monsieur St-Onge. Selon monsieur Bernier, la différence s'expliquerait par le montant de TPS.

[8] Ce déficit provient de l'exercice se terminant le 31 décembre 1993, au cours duquel Récupération était engagée dans son projet de récupération.

[9] Ces alinéas se lisent comme suit :

g) Le 3 octobre 1994 la Salvage Association a donné son accord à [BLI] pour l'engagement de deux sous-contractants soit [MTI] et [Récupération] pour la récupération du nickel.

h) Le 14 octobre 1994, il y a eu une entente entre [BLI] et [MTI] et [Récupération] pour la récupération du nickel. La date du début des travaux est spécifiée à cette entente.

k) Il n'était pas raisonnable de s'attendre à ce que [Récupération] soit dissoute ou liquidée au 30 avril 1994.

Il est à noter que le motif énoncé à l'alinéa k) est celui que le ministre a énoncé dans son avis de ratification du 24 avril 1998 (pièce I-1, onglet 12).

[10] De plus, le paragraphe 50(1.1) de la Loi prévoit un mécanisme qui, en quelque sorte, annule la perte si, par exemple, la société dont on détenait les actions exploitait une entreprise au cours de la période de 24 mois suivant la disposition réputée des actions. La question de l’application de ce paragraphe n’a été soulevée par l’intimée ni dans ses actes de procédure ni à l’audition.

[11] Pièce A-6. Il s'agit d'un document imprimé intitulé “ Jacques St-Onge Inc. Analyse détaillée (01 mai 1993 au : 30 avr. 1994) ” et portant la date du 6 juillet 1994. Ce document fournit des données sur le “ compte : 11401 C/R [Récupération] ”

[12] Puisque l'annotation manuscrite se retrouve sur un document en date du 6 juillet 1994.

[13] Il faut rappeler que les créances de Gestion ne sont pas admissibles au régime de la PTPE.

[14] Voir notamment M.N.R. v. Pillsbury Holdings Limited, 64 DTC 5184, 5188. Dans l’affaire Hickman Motors Ltd. c. Canada, [1997] 2 R.C.S. 336 (1997 CarswellNfld 81 (TaxPartner)) au paragraphe 92, madame la juge L'Heureux-Dubé semble aller encore plus loin lorsqu’elle dit : “ Le fardeau initial consiste seulement à “ démolir ” les présomptions exactes qu'a utilisées le ministre, mais rien de plus: First Fund Genesis Corp. c. La Reine, 90 D.T.C. 6337 (C.F. 1re inst.), à la p. 6340.

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