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Date: 20010823

Dossier: 1999-1979-IT-G

ENTRE :

TORONTO REFINERS & SMELTERS LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement

Le juge Bell, C.C.I.

GÉNÉRALITÉS

[1]            À moins d'indication contraire, les dispositions législatives mentionnées dans les présents motifs sont tirées de la Loi de l'impôt sur le revenu ( « Loi » ).

QUESTION EN LITIGE

[2]            Il s'agit de déterminer si une partie de la somme de 9 000 000 $ que la Corporation de la Ville de Toronto ( « Toronto » ) a payée à l'appelante en 1992 au titre des dommages résultant de l'impossibilité pour l'appelante de déplacer son entreprise, dont Toronto a acquis le bien-fonds et les bâtiments en 1988, était une « dépense en immobilisations admissible » au sens de l'article 14.

FAITS

[3]            Les parties ont déposé un exposé conjoint des faits énonçant tous les faits qui ont été présentés à la Cour.

[4]            L'appelante exploitait une entreprise d'affinage de plomb de seconde fusion ( « entreprise » ) sur un bien-fonds et dans des bâtiments ( « biens immeubles » ) lui appartenant dans la ville de Toronto.

[5]            Au début des années 1980, Toronto s'est dite intéressée à acheter les biens immeubles de l'appelante. Les deux parties ont alors entrepris des négociations en vue de la vente des biens immeubles, assortie de la condition que l'appelante trouve un endroit convenable, à proximité, pour y déménager son entreprise. Le 11 juillet 1988, l'appelante et Toronto en sont venues à une entente écrite ( « entente de 1988 » ) prévoyant le transfert des biens immeubles de l'appelante en faveur de Toronto. Cette entente a été conclue conformément à l'article 31 de la Loi sur l'expropriation, libellé dans les termes suivants :

[TRADUCTION]

Si le propriétaire d'un bien-fonds consent à l'acquisition de celui-ci par une autorité légalement compétente, celle-ci ou le propriétaire, avec le consentement de l'autre intéressé, peut demander à la Commission, par voie de requête, de fixer le montant de l'indemnité à laquelle le propriétaire aurait droit aux termes de la présente loi si le bien-fonds était exproprié. La Commission peut fixer ce montant; les dispositions de la présente loi et des règlements relatives à la fixation de l'indemnité, aux audiences et à la procédure, y compris les frais et les appels, s'y appliquent de la même façon que si le bien-fonds avait été exproprié. À cette fin, sous réserve d'un accord entre les parties, l'indemnité est calculée à compter de la date à laquelle le propriétaire consent à l'acquisition de celui-ci.

[6]            Selon l'entente en question, l'appelante et Toronto consentaient toutes deux à ce que l'autre partie demande à la Commission des affaires municipales de l'Ontario (la « Commission » ) de fixer l'indemnité à laquelle l'appelante aurait eu droit en vertu de la Loi sur l'expropriation. En 1988, Toronto n'exploitait aucune entreprise d'affinage de plomb de seconde fusion. L'entente de 1988 n'était pas assujettie à la condition que l'appelante trouve un endroit convenable à proximité pour y déménager son entreprise. Elle prévoyait toutefois que, si l'appelante ne déménageait pas son entreprise, Toronto était tenue de reconnaître, dans le cadre de toute formalité à venir, qu'il était impossible pour l'appelante de déménager son entreprise.

[7]            Aux termes de l'entente de 1988, l'appelante pouvait récupérer son stock, son équipement et les biens meubles qui se trouvaient dans les biens immeubles, et en disposer pour son propre compte. L'appelante s'engageait à informer Toronto du produit de la vente de ces biens si elle demandait une indemnité basée sur un usage existant ou des dommages-intérêts pour troubles de jouissance. L'appelante acceptait également qu'il soit tenu compte de ce montant dans le calcul de la valeur marchande ou des dommages-intérêts pour troubles de jouissance si la Commission jugeait opportun d'en tenir compte.

[8]            Conformément à l'entente de 1988, l'appelante a transféré les biens immeubles en faveur de Toronto le 15 juillet 1988. Cette dernière a versé à l'appelante 1 000 000 $ à titre de paiement initial et 60 000 $ au titre des frais juridiques, des frais d'évaluation et d'autres frais engagés par l'appelante. L'appelante a touché la somme de 1 000 000 $ sans qu'il soit porté atteinte à son droit de demander une indemnité supplémentaire dont le montant serait établi en fonction de la valeur des biens au 15 juillet 1988.

[9]            L'appelante a cessé d'exploiter son entreprise et a vendu la totalité ou presque de l'actif restant avant 1989. Elle a remis à Toronto la libre possession des biens immeubles le 20 février 1989. L'appelante n'a jamais déménagé son entreprise.

[10]          Le 13 octobre 1989, l'appelante a demandé à la Commission de fixer le montant de l'indemnité à laquelle elle avait droit conformément à l'entente de 1988 et à l'article 31 de la Loi sur l'expropriation. Les évaluateurs dont les services ont été retenus par l'appelante et Toronto aux fins de l'audience tenue devant la Commission ont attribué au fonds commercial une valeur se situant entre 3 850 000 $ et 8 000 000 $. Ils ont attribué aux biens immeubles, compte tenu de l'usage qui en était fait, une valeur se situant entre 1 000 000 $ et 6 800 000 $. Ces évaluations ont été faites le 15 juillet 1988.

[11]          L'audience visant à fixer le montant de l'indemnité a commencé au mois de janvier 1992. Le 27 du mois, l'appelante et Toronto ont conclu un règlement dont le procès-verbal a été approuvé par une ordonnance de la Commission. Toronto y convenait de payer à l'appelante, à titre d'indemnité :

a)                    2 900 000 $ pour le bien-fonds;

b)                    100 000 $ pour les bâtiments;

c)                    9 000 000 $ « pour les dommages causés par suite de l'impossibilité pour » l'appelante de « déménager son entreprise » .

[12]          La somme de 12 000 000 $ a été payée à l'appelante conformément aux articles 31, 13 et 18 et au paragraphe 19(2) de la Loi sur l'expropriation. Dans le calcul de son revenu pour l'année d'imposition 1992 aux fins des états financiers, l'appelante a inclus le montant de 9 000 000 $ à titre de dommages-intérêts. Dans le calcul de son revenu aux fins de l'impôt sur le revenu, elle a demandé la déduction d'un montant de 9 000 000 $, faisant valoir que celui-ci représentait une rentrée de capital non imposable.

[13]          Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelante pour l'année d'imposition 1992 pour le motif que les trois quarts de la somme de 9 000 000 $ constituaient un « montant en immobilisations admissible » au sens du paragraphe 14(1). L'appel en l'instance porte sur cette cotisation.

OBSERVATIONS DE L'APPELANTE

[14]          Initialement, l'avocat de l'appelante a fait valoir que les dommages-intérêts de 9 000 000 $ faisaient partie du coût des biens immeubles achetés par Toronto ou qu'ils étaient des dépenses courantes, auquel cas ils ne pouvaient constituer un montant en immobilisations admissible aux termes de l'article 14. Il a par la suite laissé tomber cette dernière thèse.

[15]          Il a indiqué que, pour constituer un montant en immobilisations admissible au sens de l'article 14, les dommages-intérêts payés à l'appelante devaient être, conformément à la division 14(5)a)(iv)(A) :

[...] [un] montant que, par suite d'une disposition, [...] le contribuable est devenu ou peut devenir en droit de recevoir, au titre de l'entreprise qu'il exploite ou qu'il a exploitée, si la contrepartie qu'il en donne est telle que, s'il avait fait, pour cette contrepartie, un paiement après 1971, ce paiement aurait été pour le contribuable une dépense en immobilisations admissibles au titre de l'entreprise. [...]

Puis il a mentionné que l'alinéa 14(5)b) prévoit notamment ceci :

« dépense en immobilisations admissible » d'un contribuable au titre d'une entreprise s'entend de la partie de quelque débours ou dépense de capital, fait ou engagé par lui, par suite d'une opération effectuée après 1971, en vue de tirer un revenu de l'entreprise, à l'exception de quelque débours ou dépense de cette nature [...]

(i) relativement à laquelle toute somme est [...] déductible [...]

[...]

(iii) représentant tout ou partie du coût

des biens corporels acquis par le contribuable;

[Je souligne.]

[16]          Se reportant à la division 14(5)a)(iv)(A), l'avocat a fait valoir qu'il fallait tenir compte de la situation véritable du payeur, Toronto, pour déterminer si le payeur théorique, l'appelante, a engagé une dépense en immobilisations admissible. Par conséquent, a-t-il soutenu, si le montant des dommages-intérêts payés à l'appelante ne constitue pas une dépense en immobilisations admissible de Toronto parce que ce montant fait partie du coût des biens immeubles pour Toronto ou qu'il est une dépense courante déductible, le fait pour l'appelante de recevoir le montant en question ne peut donner lieu à un montant en immobilisations admissible[1]. Il a renvoyé à l'arrêt Sa Majesté la Reine c. Goodwin Johnson, C.A.F., no A-1649-83, 17 mars 1986 (86 DTC 6185). Dans cette affaire, la Cour a été appelée à déterminer si les dommages-intérêts pour rupture d'un contrat étaient des montants en immobilisations admissibles au sens de l'article 14. Une société exploitée sous la raison sociale de Naden avait acquis le droit de propriété à titre bénéficiaire d'un permis de coupe de bois d'une tierce partie, mais le titre du permis était détenu par Goodwin Johnson ( « Johnson » ), pour des raisons de réglementation, semble-t-il. Naden a engagé Johnson pour gérer les activités de coupe de bois moyennant honoraires, calculés en partie en fonction de la quantité de bois coupé, laquelle était tributaire de la décision de Naden de construire ou non un moulin. Naden a intenté des poursuites contre Johnson pour le transfert du titre du permis. Johnson a déposé une demande reconventionnelle en vue d'obtenir des dommages-intérêts pour rupture de contrat et manquement à une obligation fiduciaire, faisant valoir que le refus de Naden de construire un moulin signifiait qu'une quantité moindre de bois était coupée. Le litige a été réglé lorsque Naden a versé à Johnson des dommages-intérêts pour rupture de contrat. La Cour a statué que ces dommages-intérêts étaient de la nature d'une immobilisation. L'avocat de l'appelante a fait valoir que, même si Naden et Johnson exploitaient toutes deux des entreprises de coupe de bois et qu'elles étaient donc des concurrentes potentielles, la Cour a conclu que Naden ne tentait pas d'acquérir une partie de l'entreprise de Johnson et qu'elle ne faisait que se libérer d'une action en rupture de contrat. La Cour a déclaré ceci à la page 11 (DTC : à la page 6189) :

Comme je l'ai dit, j'estime qu'en l'espèce l'intimée n'entendait pas, en réglant l'action en dommages-intérêts, vendre un actif immobilisé pas plus que Naden n'avait l'intention d'en acheter un, bien que ce fut là le résultat accessoire de l'acceptation de l'offre de règlement. Ce que l'intimée visait réellement, c'était le règlement d'une action en rupture de contrat.


[17]          La Cour a conclu que, puisque les dépenses en immobilisations admissibles définies à l'alinéa 14(5)b) n'englobaient pas les dépenses courantes déductibles et, puisque Naden, le payeur véritable, avait engagé une dépense courante déductible en payant des dommages-intérêts, il fallait aussi considérer que Johnson, en tant que payeur théorique, avait effectué une dépense courante déductible. Aux pages 12 et 13 (DTC : à la page 6190), le juge Urie a dit ceci :

J'en arrive maintenant à l'incidence, s'il en est, du paragraphe 14(1) sur la conclusion que, du point de vue de l'intimée, le paiement de 830 000 $ était un montant en capital. Comme je l'ai dit plus tôt, ce paragraphe détermine assez curieusement si un paiement constitue ou non une dépense en immobilisations admissible en renversant les rôles et en considérant le bénéficiaire du paiement comme le payeur théorique, la contrepartie restant la même. J'estime que ce renversement théorique des rôles ne peut s'effectuer dans le vide. Je veux dire par cela que les circonstances dans lesquelles le paiement réel a été fait moyennant la contrepartie effectivement reçue ne changent pas et ne peuvent être mises de côté. Elles doivent essentiellement entrer en ligne de compte lorsqu'il s'agit d'établir si le paiement est une dépense en immobilisations admissible ou non. Tout comme j'ai conclu que le paiement des 830 000 $ effectué par Naden en qualité de payeur réel était fait en règlement d'une action en dommages-intérêts pour rupture de contrat, il en va de même pour le paiement de cette somme par le payeur théorique, soit l'intimée. La seule question qui se pose est donc de savoir si le paiement est visé par le sous-alinéa 14(5)b)(i) ou non? En termes généraux, cette question en suscite une autre, à savoir, le paiement est-il une dépense déductible à titre de dépense faite dans le but de tirer un revenu de l'entreprise ou de lui faire produire un revenu, et non une dépense visée par les exceptions décrites aux alinéas (i) à (vi) inclusivement du paragraphe 14(1), et plus particulièrement, en l'espèce, à l'alinéa (i)? Si le paiement n'est pas visé par ces exceptions et constitue légitimement une dépense déductible, il est bien une dépense d'exploitation. Puisqu'il n'entre pas dans le champ d'application du paragraphe 14(1), il n'est pas une dépense en immobilisations admissible.

Note : Les passages pertinents du paragraphe 14(1) mentionnés dans l'affaire Johnson sont pour ainsi dire identiques aux parties pertinentes du sous-alinéa 14(5)a)(iv) en cause dans la présente affaire.

[18]          Le juge Urie a dit également ceci à la page 6190 :

Compte tenu des faits de l'espèce, quel était donc le but du paiement? À mon avis, il est clair que la dépense a été faite « dans le but de tirer un revenu de l'entreprise ou de lui faire produire un revenu, ... » en s'acquittant d'une dépense d'exploitation prévue au contrat par le versement de dommages-intérêts pour rupture de ce contrat. On ne pourrait en aucune façon considérer que cette dépense visait l'acquisition d'un actif immobilisé. Cela étant, le paragraphe 14(1) n'entre pas en jeu parce que si l'intimée avait été le payeur, le paiement fait par elle n'aurait pas été une dépense en immobilisations admissible puisqu'il ne répondait pas à l'un des critères imposés par le sous-alinéa 14(5)b)(i) de la Loi, à savoir que le paiement ne doit pas être ce qui est décrit de façon générale comme une dépense d'entreprise déductible. Par conséquent, le juge de première instance a conclu à bon droit que la somme de 830 000 $ avait été reçue à compte de capital.

[19]          L'avocat a ensuite renvoyé à l'affaire Pe Ben Industries Company Limited c. Sa Majesté La Reine, C.F. 1re inst., no T-1583-83, 8 juin 1988 (88 DTC 6347), où le juge Strayer (tel était alors son titre) a fait sienne et appliqué la décision rendue dans l'affaire Goodwin Johnson, à la page 9 (DTC : à la page 6351), relativement à un paiement :

[...] Elle se libérait de ses obligations contractuelles conclues avec la demanderesse et évitait les poursuites ultérieures. Elle se libérait de toute autre obligation future de payer ce qui constituerait normalement des dépenses d'exploitation prévues au contrat. En d'autres termes, le paiement remis à la demanderesse par NAR revêtait pour cette dernière la nature d'une dépense d'exploitation déductible à titre de dépense d'entreprise. Par conséquent, en application du sous-alinéa 14(5)b)(i) de la Loi de l'impôt sur le revenu, si cette somme avait été versée par la demanderesse, elle n'aurait pu constituer une « dépense en immobilisations admissible » et elle ne peut dont être un « montant en immobilisations admissible » lorsque la demanderesse la reçoit. C'est le raisonnement qui a été suivi dans l'arrêt Goodwin Johnson et il s'applique directement en l'espèce.

[20]          Au sujet du paragraphe 14(1), l'avocat a encore une fois cité le juge :

En l'appliquant, on doit théoriquement placer la demanderesse dans la position du payeur qui payait effectivement ce montant comme s'il s'agissait d'une question de revenu, c.-à-d. une dépense déductible engagée dans le but de tirer un revenu. Ceci étant le cas en l'espèce, la demanderesse placée théoriquement dans cette position ne peut réclamer le montant qu'elle a reçu comme un « montant en immobilisations admissible » en raison des dispositions de l'alinéa 14(5)b).

[21]          L'avocat de l'appelante a fait valoir également qu'une « dépense en immobilisations admissible » doit être une dépense ou un débours fait « au titre de l'entreprise » en vue de tirer un revenu de celle-ci. Or, il n'y a devant la Cour aucune preuve que Toronto exploitait une entreprise. Le paiement effectué par Toronto, l'avocat a-t-il soutenu, ne serait pas une dépense en immobilisations admissible.

[22]          De plus, aux dires de l'avocat, si Toronto a payé les dommages-intérêts, c'est parce qu'elle souhaitait acquérir les biens immeubles et qu'elle avait subséquemment été obligée de verser un montant à l'appelante au titre de son incapacité de déménager son entreprise. L'avocat a affirmé, à l'appui de cet argument, que le paiement n'avait pas été fait en vue de fermer les portes de l'entreprise. Il a renvoyé à l'entente de 1988 conclue entre l'appelante et Toronto et déclaré que, aux termes de cette entente, l'appelante n'avait pas accepté de cesser d'exploiter son entreprise.

[23]          L'avocat a fait valoir en outre que le paiement ne se rapportait pas à l'acquisition d'un fonds commercial puisque Toronto n'avait pas acquis l'entreprise. Il a soutenu que le paiement n'avait pas été fait en vue d'acquérir un fonds commercial en éliminant l'entreprise de l'appelante, Toronto n'étant pas une concurrente de l'appelante et aucune preuve n'ayant démontré qu'elle souhaitait faire siens les clients que l'appelante aurait perdus du fait de son incapacité de déménager son entreprise.

[24]          L'avocat a soutenu que la totalité du montant de 12 000 000 $ représentait le coût pour Toronto des biens immeubles. Il a étayé cette prétention en renvoyant à l'arrêt La Reine c. Metropolitan Properties Co. Limited, C.F. 1re inst., no T-5339-82, 4 février 1985 (85 DTC 5128). Dans cette affaire, la contribuable, qui exploitait une entreprise d'aménagement de terrains, avait convenu avec une municipalité d'installer des services et d'effectuer des améliorations - services d'égouts, conduites maîtresses, revêtements de sol, plantation d'arbres, réverbères et services de téléphone et d'électricité - sur des terrains dont elle était propriétaire, mais qu'elle consentirait à la ville à titre de don. Les ententes prévoyaient que le coût des services en question serait considéré comme le paiement anticipé des impôts fonciers qui seraient par ailleurs exigés par la ville. La contribuable a déduit ce coût à titre de dépense courante. La Cour fédérale a conclu, en rejetant la déduction demandée, que ce coût devait être ajouté à celui de l'inventaire des terrains de la contribuable de façon à obtenir un portrait plus fidèle du revenu réel de la contribuable dans une année donnée. L'avocat a fait valoir que rien n'indiquait que la dépense devait être considérée comme une dépense en immobilisations admissible.

[25]          L'avocat a fait valoir également que l'inclusion de la totalité de la somme de 12 000 000 $ dans le coût, pour Toronto, des biens immeubles, est acceptée aussi par la Cour d'appel fédérale dans l'affaire Gladstone Investment Corporation et al c. Canada (C.A.), [1999] 3 C.F. 485 (99 DTC 5207). Dans cette affaire, les contribuables, qui étaient propriétaires d'un centre commercial, souhaitaient agrandir le terrain de stationnement. Cependant, le terrain nécessaire à cette fin était utilisé par la ville - il servait de rue. La ville a finalement convenu de déménager la rue plus au nord et de transférer le bien-fonds aux contribuables à condition que ces derniers transfèrent en faveur de la ville une parcelle de terrain se trouvant plus au nord. Les contribuables ont versé à la ville la somme de 480 900 $ à titre de remboursement du coût de déménagement de la rue sur le bien-fonds situé plus au nord. Ils ont fait valoir que le paiement était déductible puisqu'il visait, en fait, non pas à acquérir un bien durable, mais à inciter la ville à effectuer, sur des biens lui appartenant, des changements facilitant le déroulement des activités courantes. La Cour d'appel fédérale a conclu que la somme de 480 900 $ devait être ajoutée au coût du bien-fonds acquis de la ville. Elle a de plus confirmé la décision de la Cour canadienne de l'impôt, qui avait conclu que le bien-fonds utilisé pour agrandir le terrain de stationnement était un bien durable. On peut lire ceci à la page 502 (DTC : à la page 5209) :

En l'espèce, l'échange de terrains et le déplacement de la rue Pierre Corneille n'étaient pas séparables. Il ressort clairement de la preuve que les appelantes avaient considéré ces deux éléments comme faisant partie d'un seul arrangement qui visait à prévoir l'agrandissement du terrain de stationnement.

[26]          L'avocat a fait valoir que le paiement dont il est question dans l'affaire Gladstone est semblable à celui que Toronto a effectué en faveur de l'appelante en l'espèce en ce qu'il a été effectué dans le cadre d'une entente prévoyant l'achat d'un bien-fonds, aux termes de laquelle Toronto avait convenu de verser à l'appelante, à titre de dommages-intérêts, un montant correspondant à la valeur marchande des biens immeubles et des frais de déménagement de son entreprise ou de l'incapacité de déménager celle-ci. Par conséquent, a-t-il conclu, à cet égard, le paiement effectué par Toronto en faveur de l'appelante doit être ajouté au coût des biens immeubles qu'elle a acquis, et il ne constitue pas une dépense en immobilisations admissible compte tenu des décisions rendues dans les affaires Goodwin Johnson et Pe Ben.

[27]          L'avocat a ensuite fait valoir que le montant des dommages-intérêts payés à l'appelante ne pouvait être visé par l'article 14 puisque le paiement n'a pas été reçu au titre de la « disposition » de son entreprise au sens de la division 14(5)a)(iv)(A) puisque le terme « disposition » , lorsqu'il est lu en conjugaison avec le reste du libellé, signifie le transfert en faveur d'une autre personne. En outre, a-t-il dit, le montant d'argent en question n'a pas été reçu « au titre de l'entreprise » au sens de la division, mais plutôt à titre de dommages-intérêts relativement à la perte d'une entreprise. L'avocat a fait valoir que le sens dans lequel le terme « disposition » est utilisé signifie que seul un transfert de propriété à titre onéreux pouvait donner lieu à un montant en immobilisations admissible. Il a renvoyé à la décision de la Cour suprême du Canada dans l'affaire Sa Majesté la Reine c. Compagnie Immobilière BCN Limitée, [1979] 1 R.C.S. 865 (79 DTC 5068). Dans cette affaire, la Cour s'est fondée notamment sur les définitions générales de « produit de disposition » et de « disposition » contenues dans la Loi, appliquées aux fins de la déduction pour amortissement. Il a soutenu que ces définitions n'étaient d'aucune utilité pour analyser le sens du terme « disposition » puisqu'elles ne s'appliquent qu'aux déductions pour amortissement et aux gains en capital. L'avocat a renvoyé également à l'affaire Contonis c. La Reine, C.C.I., no 92-2495(IT)G, 19 janvier 1995 (95 DTC 511), où, appelée à déterminer à quel moment un montant devient « payable » au sens de l'article 14, la Cour a dit ceci à la page 11 (DTC : à la page 515) :

« Le produit [...] tiré de la disposition » est défini dans au moins deux dispositions, soit les alinéas 13(21)d) et 54h), et il comprend « le prix de vente des biens qui ont été vendus » .

Il convient de mentionner, toutefois, que les alinéas 13(21)d) et 54h) ne traitent pas de la disposition de biens en immobilisation admissibles. L'alinéa 13(21)d) fait partie d'un paragraphe qui définit les mots utilisés dans les articles 13 et 20, ainsi que dans les règlements pris en vertu de l'alinéa 20(1)a). L'alinéa 54h) se trouve dans la sous-section c de la section B qui traite des gains et pertes en capital.

[28]          De plus, à cet égard, l'avocat de l'appelante a indiqué que la division 14(5)a)(iv)(A) ne s'applique que dans les cas où un contribuable convient de transférer des droits sur des biens en faveur d'une autre personne, à titre onéreux, et que ces cas n'incluent pas les dommages-intérêts pour extinction d'un bien comme une entreprise. Il a déclaré que la disposition en question renvoie à une « disposition » et à un « paiement » « pour [...] contrepartie » . Il a soutenu que, suivant une interprétation logique, cette disposition alambiquée s'applique lorsque le bénéficiaire du paiement (l'appelante) a disposé d'une contrepartie en faveur du payeur (Toronto) et qu'il a reçu un paiement en conséquence. L'avocat a ensuite fait valoir que les dommages-intérêts reçus par l'appelante pour son incapacité de déménager son entreprise ne sont pas visés par cette disposition puisqu'aucune partie de l'entreprise en question n'a été transférée à Toronto. Il a fait valoir en outre que le critère décrit dans l'affaire Johnson suppose que le bénéficiaire d'un paiement doit tenir pour acquis qu'il a effectué le paiement pour obtenir la contrepartie qu'il a cédée. Il a ensuite indiqué que le paiement réel et le paiement théorique doivent être reçus « au titre de l'entreprise » et que le libellé de la division 14(5)a)(iv)(A) englobe donc les cas où les biens sont transférés d'une entreprise à une autre dans le cadre de l'exploitation des deux entreprises.

[29]          L'avocat a prétendu ensuite qu'aux termes de la division 14(5)a)(iv)(A), le paiement doit être fait à l'appelante « au titre de l'entreprise qu'[elle] exploite ou qu'[elle] a exploitée » . L'exigence suivant laquelle le paiement doit être fait « au titre de l'entreprise » de l'appelante est reprise au paragraphe 14(1), a-t-il souligné, et le paiement de dommages-intérêts au titre de la perte d'une entreprise n'est pas un paiement fait « au titre de l'entreprise » au sens de l'article 14. Il a renvoyé à l'affaire La Reine c. Atkins, C.A.F., no 444-75, 20 mai 1976 (76 DTC 6258), où un employé congédié sans préavis a menacé d'instituer une action contre son ancien employeur. Les parties en sont arrivées à un règlement aux termes duquel l'employeur a versé un montant à l'employé à titre d' « allocation de départ » en échange d'une décharge. La Couronne a fait valoir que le montant était un revenu d'emploi au sens de l'alinéa 6(1)a) de la Loi, qui inclut les :

[...] avantages de quelque nature que ce soit [...] reçus [...] dans l'année au titre, dans l'occupation ou en vertu d'une charge ou d'un emploi

[30]          La Cour d'appel fédérale a exprimé son désaccord à la page 2 (DTC : à la page 6258) :

En admettant, comme le fait l'appelante, que l'intimé a été congédié « sans préavis » , on ne peut considérer les sommes d'argent qui lui ont été payées (à la suite d'une entente subséquente) pour tenir « lieu de préavis » de congédiement comme un « traitement » , « salaire » ou « rémunération » , ou comme des prestations « qu'il reçoit ou dont il jouit... à l'égard, dans le cours ou en vertu de la charge ou de l'emploi » . Les sommes payées à cet égard (c.-à-d. pour tenir « lieu de préavis » ) l'ont été à cause de la « rupture » du contrat d'emploi et non pas en tant que prestations qui découlent du contrat ou de la relation qui existait en vertu du contrat avant que cette relation ne prenne fin de façon injustifiée.

[31]          L'avocat de l'appelante a déclaré que, bien que cette décision eût été mise en doute par la Cour suprême du Canada - dans des remarques incidentes - dans l'affaire Jack Cewe Ltd. c. Jorgenson, [1980] 1 R.C.S. 812 (80 DTC 6233), la Cour d'appel fédérale a subséquemment confirmé sa décision dans l'affaire La Reine c. Pollock, C.A.F., no A-532-81, 20 juin 1984 (84 DTC 3670). En outre, l'avocat a-t-il souligné, la Cour d'appel fédérale, dans l'affaire Buccini c. La Reine, C.A.F., no A-611-98, 20 novembre 2000 (2000 DTC 6685), a confirmé la décision rendue dans l'affaire Atkins. Dans cette affaire, la fusion de l'employeur du contribuable et de son actionnaire majoritaire avait éteint toutes les options d'achat non exercées d'actions de l'employeur, et les détenteurs des options avaient reçu une indemnisation. La Couronne a fait valoir que le montant reçu était un avantage reçu au titre d'un emploi. La Cour d'appel fédérale a exprimé son désaccord à la page 6689 :

Il est cependant de droit constant que les dommages-intérêts découlant de la rupture du contrat de travail ne sont pas imposables sous le régime de cette disposition. Le principe en a été établi dans La Reine c. Atkins, et est toujours applicable.

[32]          L'avocat a déclaré que ces dommages-intérêts avaient été reçus au titre de la perte de l'entreprise plutôt qu'au titre de l'entreprise. Il a indiqué également que les termes « au titre de l'entreprise [que le contribuable] exploite ou qu'il a exploitée » ne sont pas incompatibles avec cette interprétation. Il a déclaré que, en raison de la présence, dans le libellé, de l'expression « a exploitée » , les paiements faits à un contribuable pour le transfert d'une entreprise ne cessent pas d'être visés par l'article 14 du simple fait que le contribuable n'exploite plus l'entreprise au moment où son droit au paiement prend naissance. Il a déclaré que, en temps normal, ce droit ne prendrait naissance qu'après le transfert véritable de l'entreprise, quand le contribuable n'exploite plus l'entreprise.

[33]          Enfin, l'avocat de l'appelante a affirmé que les dommages-intérêts reçus par l'appelante au titre de son incapacité de déménager son entreprise ne doivent être imposables que si l'article 14 l'indique clairement, et que tout doute raisonnable à cet égard doit être résolu par le recours à la présomption résiduelle en faveur du contribuable. Il a renvoyé à l'affaire La Reine c. Fortino, C.C.I., no 92-2407(IT)G, 5 novembre 1996 (97 DTC 55), où la Cour canadienne de l'impôt, se reportant à la page 27 (DTC : à la page 65) de la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'affaire Schwartz c. Canada, [1996] 1 R.C.S. 254 (96 DTC 6103), a dit :

... Nos tribunaux semblent faire preuve d'énormément de prudence lorsqu'il s'agit d'inclure dans le revenu imposable des montants qui ne sont pas expressément visés par la Loi. [...] Je rappellerai ici ce que la Cour suprême du Canada a dit dans l'arrêt CUQ c. Corp. Notre-Dame de Bon-Secours, à l'égard des règles qui devraient s'appliquer à l'interprétation de la législation fiscale. Qu'une disposition législative reçoive une interprétation stricte ou libérale sera déterminée par le but qui la sous-tend, qu'on aura identifié à la lumière du contexte de la loi, de l'objet de celle-ci et de l'intention du législateur : c'est l'approche téléologique. Et lorsqu'un doute raisonnable n'est pas dissipé par les règles ordinaires d'interprétation, il sera résolu par le recours à la présomption résiduelle en faveur du contribuable.

OBSERVATIONS DE L'INTIMÉE

[34]          L'avocate de l'intimée a fait valoir que le montant de 9 000 000 $ payé à l'appelante aurait été considéré comme une dépense en immobilisations admissible s'il avait été payé par l'appelante.

[35]          Elle a indiqué qu'en droit fiscal des règles spéciales s'appliquent aux dépenses liées à l'entreprise qui ne sont ni déductibles au complet, parce qu'elles sont de la nature d'une immobilisation, ni admissibles à une déduction pour amortissement. Elle a déclaré que les dépenses faites au titre d' « un bien en immobilisations admissible » incluent le fonds commercial, certaines listes de clients, des marques de commerce et des droits de quotas.

[36]          Selon l'avocate, l'alinéa 14(5)a) définit le montant cumulatif des immobilisations admissibles d'un contribuable, lequel compte est fondé sur la notion du groupement des biens, ce qui signifie en général qu'une partie des dépenses faites par un contribuable relativement à un bien en immobilisations admissible doit être ajoutée au compte et qu'une portion des montants reçus par le contribuable relativement à la disposition de ces biens doit en être soustraite. L'avocate a ensuite fait valoir que, lorsque le solde du compte est négatif à la fin d'une année d'imposition, ce solde doit être inclus dans le calcul du revenu. Elle a ajouté que, suivant la politique qui sous-tend le traitement du produit de disposition de biens en immobilisations admissibles, ce produit doit être déduit pour déterminer le montant cumulatif des immobilisations admissibles d'un contribuable au moment de la disposition car il constitue en grande partie le recouvrement d'une « radiation » dont la déduction avait précédemment été autorisée.

[37]          L'avocate a soutenu qu'un montant constitue un montant en immobilisations admissible au sens du sous-alinéa 14(5)a)(iv) si, au lieu de recevoir le montant, le contribuable avait effectué un paiement pour cette contrepartie après 1971, et que le paiement avait été une dépense en immobilisations admissible du contribuable au titre de l'entreprise. Elle a indiqué qu'une dépense en immobilisations admissible s'entend, aux termes de l'alinéa 14(5)b), de la partie de quelque débours ou dépense de capital (à l'exception de quelque débours et dépenses énumérés) fait ou engagé par le contribuable, par suite d'une opération effectuée après 1971, en vue de tirer un revenu de l'entreprise. Puis elle a dit que, pour déterminer si un montant reçu est un montant en immobilisations admissible, il faut se demander quelle contrepartie a été remise au contribuable pour le montant en question. Elle a renvoyé au Black's Law Dictionary, 5e éd. (St. Paul, Minnesota : West Publishing Co. 1979), où, indique-t-elle, le mot anglais consideration [contrepartie] est défini dans les termes suivants :

                                [TRADUCTION]

Incitation à conclure un contrat. Cause, motif, prix ou influence principale qui incite une partie contractante à conclure un contrat. Droit, intérêt, profit ou avantage accordé à une partie, ou abstention imposée à l'autre partie au contrat, perte ou désavantage subi par celle-ci, ou responsabilité assumée par elle.

[38]          L'avocate a fait remarquer qu'il faut déterminer l'abstention, la perte ou le désavantage qui a valu le montant de 9 000 000 $ à l'appelante.

[39]          L'avocate a ensuite fait valoir que Toronto avait incité l'appelante à abandonner son entreprise et que la contrepartie remise par l'appelante avait été l'abandon de son entreprise. Elle a indiqué que la valeur pécuniaire de cette contrepartie correspondait à la valeur du fonds commercial de l'entreprise. Elle a indiqué en outre qu'il fallait que le montant soit reçu « par suite d'une disposition » . Le terme « disposition » n'étant pas défini dans la Loi, a-t-elle dit, il faut lui donner son sens ordinaire. Elle a renvoyé de nouveau au Black's Law Dictionary, où le terme est défini comme suit :

                                [TRADUCTION]

Action de disposer; céder à une autre partie. Se défaire de; aliénation ou abandon d'un bien.

Elle a fait valoir que le sens de ce terme était suffisamment général pour englober l'abandon d'une entreprise « dans les circonstances » .

[40]          Puis elle a affirmé qu'il faut ensuite poser la question suivante : si un paiement avait été fait par l'appelante après 1971 pour cette contrepartie (l'abandon de l'entreprise), aurait-il constitué une dépense en immobilisations admissible? Elle a déclaré qu'il aurait fallu que le paiement soit de la nature d'une immobilisation et qu'il ait été fait en vue de tirer un revenu de l'entreprise.

[41]          Si le paiement répond à ces deux critères, a-t-elle déclaré, il serait alors nécessaire de déterminer s'il appartient à l'une des exceptions énumérées avant de conclure qu'il constitue une dépense en immobilisations admissible du contribuable au titre de l'entreprise.

[42]          Elle a soutenu que, si l'appelante avait effectué le paiement pour inciter le bénéficiaire théorique à abandonner son entreprise, le paiement « aurait probablement été de la nature d'une immobilisation » . Elle a indiqué également que le paiement « aurait probablement été fait en vue de tirer un revenu » , et qu'il ne relèverait pas des exceptions prévues au sous-alinéa 14(5)b)(ii). Elle a déclaré ensuite que :

                               


[TRADUCTION]

Le montant ne serait probablement pas déductible par le contribuable dans le calcul du revenu tiré de l'entreprise. De plus, il ne serait probablement pas déductible en vertu d'une disposition autre que l'alinéa 18(1)b). [...] En outre, il ne ferait probablement pas partie du coût d'un bien matériel du contribuable. Par conséquent, il n'est pas exclu par le sous-alinéa 14(5)b)(iii).

[43]          L'avocate a ensuite fait valoir que les trois quarts du montant de 9 000 000 $ (moins les débours et les dépenses) reçus par l'appelante constituaient un montant en immobilisations admissible dans l'année d'imposition 1992 et que, par conséquent, le montant de 6 471 277 $ avait été à juste titre inclus dans le revenu de l'appelante conformément au paragraphe 14(1) de la Loi. Elle a soutenu également que la valeur attribuée à l'abandon de l'entreprise était fondée sur la valeur du fonds commercial et que le montant était payé pour l'ensemble de l'équipement productif de revenu de l'entreprise de l'appelante.

ANALYSE ET CONCLUSION

[44]          Je conviens avec l'avocat de l'appelante que les conclusions tirées dans les affaires Johnson et Pe Ben, précitées, s'appliquent aux circonstances de la présente affaire. Je souscris à ses observations selon lesquelles, du fait qu'il faut prendre en considération la situation du payeur réel, le paiement de dommages-intérêts par Toronto ne pouvait pas être une dépense en immobilisations admissible au sens de la définition de cette expression parce qu'il n'y a aucune preuve que Toronto a effectué le paiement en vue de tirer un revenu d'une entreprise. Je conviens que le paiement a été effectué à titre de dommages-intérêts pour indemniser l'appelante de son incapacité de déménager son entreprise dans un autre endroit, et qu'il n'a pas été effectué pour mettre fin aux activités de l'entreprise. Je conviens également que le paiement n'a pas été effectué en vue d'acquérir un fonds commercial puisque Toronto n'a pas acquis l'entreprise. En outre, le paiement n'a pas été fait indirectement pour acquérir un fonds commercial en éliminant l'entreprise de l'appelante, Toronto n'étant pas une concurrente de l'appelante et aucune preuve n'ayant permis d'établir qu'elle souhaitait faire siens les clients que l'appelante avait perdus en raison de son incapacité de déménager l'entreprise.

[45]          Je conviens avec l'avocat de l'appelante que, Toronto n'exploitant pas une entreprise concurrente de l'appelante, elle doit inclure le montant des dommages-intérêts payés dans le coût des biens immeubles achetés à l'appelante. Ce montant ne serait pas payable sans l'entente de 1988 concernant la vente des biens immeubles, qui prévoit le versement des dommages-intérêts.

[46]          Je conviens avec l'avocat que, dans le contexte de la disposition législative en cause, la disposition doit être faite en faveur d'une personne. Je rejette l'argument de l'avocate de l'intimée selon lequel, dans ce contexte-ci, une disposition signifie simplement « se défaire » de l'entreprise.

[47]          Les dommages-intérêts payés par Toronto à l'appelante ne peuvent constituer « une dépense en immobilisations admissible » au sens de l'alinéa 14(5)b) car il faut considérer qu'elles faisaient « partie du coût [...] des biens corporatifs » acquis par le contribuable, à savoir, les biens immeubles.

[48]          Conséquemment, l'appel est admis avec frais.

Signé à Ottawa, Canada ce 23e jour d'août 2001.

« R. D. Bell »

     J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 29e jour d'octobre 2002.

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-1979(IT)G

ENTRE :

TORONTO REFINERS & SMELTERS LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 15 août 2001 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge R. D. Bell

Comparutions

Avocats de l'appelante :                                      Me Brian D. Segal

                                                                                                Me James R. Sennema

Avocate de l'intimée :                                           Me M. Judith Sheppard

Jugement

                L'appel interjeté à l'encontre de la nouvelle cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1992 est admis et la nouvelle cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation selon les motifs du jugement ci-joints.

                Les frais sont adjugés à l'appelante.

Signé à Ottawa, Canada ce 23e jour d'août 2001.

« R. D. Bell »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 29e jour d'octobre 2002.

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]



[1]               Aux termes du paragraphe 14(1), le « montant en immobilisations admissible » s'entend du total des montants déterminés en vertu du sous-alinéa (5)a)(iv).

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