Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Date: 20020311

Dossier: 1999-4723-IT-G

ENTRE :

620357 SASKATCHEWAN LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Motifs du jugement modifiés

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1]            Le présent appel, qui est interjeté sous le régime de la procédure générale, a été entendu à Prince Albert (Saskatchewan), les 18, 19, 20, 21 et 22 février 2002. L'appelante a appelé Larry Langeman, vérificateur de l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « ADRC » ) pour ce dossier; Lyle Zuk, l'avocat de Madraga Distributors Ltd. ( « MDL » ) à l'égard de ses transactions avec l'appelante ( « 620357 » ); Kari Madraga ( « Kari » ), petite-fille de George Madraga, Sr. ( « George, Sr. » ), la fille de George Madraga, Jr. ( « George, Jr. » ), ancienne préposée du service des pièces de MDL et gérante actuelle de 620357. L'intimée a appelé Benedict Chow, évaluateur habilité à titre d'expert. L'avocat de l'intimée a également lu au dossier des passages des interrogatoires préalables de George Madraga, Sr., unique actionnaire de l'appelante, et de Garth Busch, comptable agréé de l'appelante.

[2]            Les paragraphes 2 à 14 inclusivement de la réponse à l'avis d'appel décrivent en détail la position de l'intimée quant à la cotisation à l'instance. Les voici reproduits ici :

                                [TRADUCTION]

2.              En ce qui concerne le paragraphe (a) de l'avis d'appel, il déclare que l'adresse fournie par l'appelante est l'adresse de « Madraga Speed 'N Sport » , une entreprise exploitée par l'appelante dans la ville de Prince Albert. Cette entreprise était auparavant exploitée, dans les mêmes locaux, par une autre société enregistrée conformément aux lois de la Saskatchewan, Madraga Distributors Ltd. ( « Madraga Distributors » ). L'entreprise était auparavant connue sous la désignation « Madraga's Deals on Wheels » .

3.              En ce qui concerne la première phrase du paragraphe (b) de l'avis d'appel, il nie que l'appelante ait fait l'objet d'une cotisation en vertu de l'article 18 de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e supp.), modifiée, (la « Loi » ), comme il est allégué, et il affirme que l'avis de cotisation 11747 daté du 21 septembre 1998 avait été établi en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi et de l'article 19 de la loi de la Saskatchewan « Income Tax Act » ch. I-2, R.S.S. 1978, modifiée (la « Loi de la Saskatchewan » ). Il accepte le reste du paragraphe (b) de l'avis d'appel.

4.              En ce qui concerne le paragraphe 1 de l'avis d'appel, il admet qu'il existait une entente écrite entre Madraga Distributors et l'appelante, en date du 17 octobre 1997, selon laquelle des pièces d'équipement et des vêtements pour motoneige seraient vendus à l'appelante pour un prix d'achat total de 125 000,00 $ (le « contrat de vente » ). À part cela, il nie tous les faits allégués au paragraphe 1 de l'avis d'appel.

5.              En outre, en ce qui concerne le paragraphe 1 de l'avis d'appel, il affirme qu'il existait une deuxième entente écrite entre Madraga Distributors et l'appelante, en date du 17 octobre 1997, selon laquelle d'autres éléments du stock de Madraga Distributors seraient offerts en consignation à l'appelante afin d'être mis en vente publique, une partie du produit de la vente devant être retournée à Madraga Distributors Ltd. (le « contrat de consignation » ).

6.              Le sous-procureur général affirme que le contrat de vente prévoyait, entre autres, la vente à l'appelante de pièces d'équipement et de vêtements pour motoneige, lesdits articles étant en la possession de Madraga Distributors à la clôture des affaires le 17 octobre 1997 et dénombrés à l'annexe A du contrat de vente (les « articles vendus » ).

7.              Il affirme que le coût global des articles vendus est indiqué à l'annexe A du contrat de vente comme étant de 329 073,30 $. Le contrat de vente prévoit la vente des articles vendus de Madraga Distributors à l'appelante pour un prix total de 125 000,00 $.

8.              Le sous-procureur général affirme que le contrat de consignation prévoyait, entre autres, le transfert à l'appelante, en vue d'une vente publique, d'articles en la possession de Madraga Distributors à la clôture des affaires le 17 octobre 1997, dénombrés à l'annexe A du contrat de consignation (les « articles vendus en consignation » ). Le contrat de consignation engage l'appelante à payer à Madraga Distributors Ltd. la valeur de chaque article décrit à l'annexe A, en permettant à l'appelante de conserver les montants reçus en sus de ces montants.

9.              Par avis de cotisation numéro 11747 daté du 21 septembre 1998, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a établi une cotisation à l'encontre de l'appelante au montant de 139 279,00 $ en vertu du paragraphe 160(1) de la Loi et de l'article 19 de la Loi de la Saskatchewan.

10.            En établissant la cotisation à l'égard de l'appelante, le ministre s'est fondé, entre autres, sur les hypothèses suivantes :

a)              les faits énoncés et admis ci-dessus;

b)             l'appelante est une société qui a été constituée conformément aux lois de la Saskatchewan le 13 mai 1997. L'administrateur et actionnaire unique de l'appelante est George Madraga Sr. ( « George Sr. » ), de Prince Albert, en Saskatchewan.

c)              Madraga Distributors Ltd. est une société qui a été constituée conformément aux lois de la Saskatchewan le 3 novembre 1986. Depuis le 25 octobre 1993, le seul administrateur et actionnaire de Madraga Distributors est George Alex Madraga ( « George Jr. » ) de Prince Albert, en Saskatchewan;

d)             George Sr. est le père de George Jr.;

e)              L'appelante et Madraga Distributors entretenaient un lien de dépendance pendant la période en question;

f)              Avant le 17 octobre 1997, Madraga Distributors avait un stock de véhicules récréatifs, de pièces, d'équipement et de vêtements aux fins de la vente dans les locaux commerciaux situés au 4189-2e avenue ouest, Prince Albert (Saskatchewan).

g)             Le 17 octobre 1997, ou aux environs de cette date, Madraga Distributors a transféré son stock de véhicules récréatifs, de pièces, d'équipement et de vêtements à l'appelante par le biais du contrat de vente et du contrat de consignation (le « transfert » ). Le coût total du stock transféré en vertu du contrat de vente et du contrat de consignation était de 928 528,06 $, la somme du coût des articles qui figure à l'annexe A du contrat de consignation et à l'annexe A du contrat de vente.

h)             Le coût du stock décrit à l'annexe A du contrat de consignation et à l'annexe A du contrat de vente était le coût de gros pour Madraga Distributors, et était inférieur à la juste valeur marchande d'alors des articles transférés.

i)               La juste valeur marchande des articles vendus et des articles vendus en consignation était un minimum de 15 %, soit 139 279,00 $, au-delà du coût des articles décrit à l'annexe A du contrat de consignation et à l'annexe A du contrat de vente, et au moins 139 279,00 $ en sus du montant que l'appelante devait payer pour ce stock conformément au contrat de vente et au contrat de consignation.

j)               Le total du versement effectué par l'appelante à Madraga Distributors pour le transfert était d'au moins 139 279,00 $, déduction faite de la juste valeur marchande du stock transféré.

k)              Dès réception des articles vendus en consignation et des articles vendus, l'appelante s'est mise à exploiter la même ou sensiblement la même entreprise que Madraga Distributors Ltd., et ce, dans les mêmes locaux commerciaux situés au 4189-2e avenue ouest à Prince Albert (Saskatchewan).

l)               Le 17 octobre 1997, Madraga Distributors était tenue de verser des impôts, intérêts et pénalités conformément à la Loi de l'impôt sur le revenu pour ses années d'imposition 1992, 1993, 1994 et 1995, le montant étant d'au moins 329 210,83 $.

m)             À cause du transfert, l'appelante est conjointement responsable, avec Madraga Distributors, d'un montant d'au moins 139 279,00 $.

11.            Le sous-procureur général affirme qu'en établissant la cotisation 11747 en date du 21 septembre 1998, le ministre n'a pas fait de distinction entre le contrat de vente et le contrat de consignation à l'égard des modalités de paiement. Le ministre a présumé que tous les articles étaient transférés selon les mêmes modalités que celles prévues au contrat de consignation, où l'appelante était responsable de payer à Madraga Distributors le coût des stocks établi à l'annexe A et avait le droit de garder tout montant reçu au-delà du coût des stocks. Par conséquent, en calculant la sous-évaluation, le ministre a appliqué la sous-évaluation de 15 %, conformément à l'hypothèse 10(i) ci-dessous, au coût de tous les articles transférés, soit 928 528,06 $.

12.            Malgré cela, le sous-procureur général déclare qu'une sous-évaluation bien plus importante que celle présumée par le ministre a eu lieu à l'égard des articles vendus. Le contrat de vente transférait les articles vendus avec un coût détaillé de 329 073,30 $ pour 125 000,00 $, lequel montant était, en lui-même, d'au moins 139 279,00 $ inférieur à la juste valeur marchande des stocks transférés.

13.            Le sous-procureur général déclare que, malgré le mode de calcul du montant de la dette fiscale l'appelante, à la suite du transfert, l'appelante est conjointement et individuellement, avec Madraga Distributors, assujettie à l'impôt à raison d'un montant d'au moins 139 279,00 $.

B.             QUESTION EN LITIGE

14.            L'enjeu de cet appel est :

a)              de savoir si l'appelante est assujettie, conformément à l'article 160 de la Loi et de l'article 19 de la Loi de la Saskatchewan, à la cotisation numéro 11747 en date du 21 septembre 1998 et au montant de 139 279,00 $.

[3]            Les alinéas 10 b), c), d), e), f), g) et k) n'ont pas été réfutés par la preuve. En ce qui concerne l'alinéa k), même si 620357 exploitait la même entreprise que MDL, sauf qu'elle a cessé de vendre des bateaux et des voitures d'occasion en consignation après le 17 octobre 1997, elle l'a fait sans les contraintes financières auxquelles MDL était assujettie avant le 17 octobre 1997. En ce qui concerne l'alinéa b), George, Sr. réside à Yellow Creek (Saskatchewan).

[4]            Au début de son témoignage, l'avocat de l'appelante a appelé Larry Langeman, vérificateur de l'ADRC pour le dossier, à titre de témoin hostile. Il a témoigné qu'il avait aidé à préparer le matériel pour cette cotisation. Toutefois, il a également témoigné que la cotisation en tant que telle était préparée par la directrice de l'impôt au bureau de district de Saskatoon. L'avocat de l'appelante a contesté la cotisation parce que M. Langeman l'avait préparée. D'après le témoignage de M. Langeman, la cotisation était faite par la directrice de l'impôt au bureau de district de Saskatoon et elle est autorisée à le faire en vertu du paragraphe 900(2) de la Partie IX du Règlement de l'impôt sur le revenu.

[5]            L'autre enjeu touchant la cotisation consiste à savoir si les biens transférés le 17 octobre 1997 par MDL à 620357, des sociétés apparentées, étaient transférés à leur juste valeur marchande pour la contrepartie versée par 620357, soit 125 000 $. Cela concerne deux contrats :

1.              Le contrat de consignation (pièce A-1), dans lequel MDL consignait ses « biens entiers » , nommément des motoneiges, véhicules tous terrains, véhicules aquatiques récréatifs et remorques à 620357 à la condition que 620357 règle le financement de 100 % de leur coût à MDL. Il n'y avait aucune autre contrepartie. Le coût total des 121 unités en question s'élevait à 599 454,76 $.

2.              La vente (pièce A-2) de pièces, de vêtements et d'accessoires que MDL a vendus à 620357 pour 125 000 $. À l'annexe A de la pièce A-2, leur coût est établi à 329 073,30 $.

[6]            Les pièces A-1 et A-2 contenaient l'inventaire de l'entreprise de MDL, qui était essentiellement une concession Polaris. D'autres marchés ont été conclus à plus ou moins la même époque, à savoir :

1.              Le 17 octobre 1997 - George Madraga, Jr. (propriétaire de MDL) a transféré l'immeuble de la concession à son père George Madraga, Sr. (propriétaire de 620357) pour 150 000 $, somme devant être réglée sur une période de plusieurs années. (George, Sr. était déjà propriétaire du terrain.) À part l'acompte et un versement que George, Sr. a versé par mégarde, les montants étaient déduits du montant de la dette de George, Jr. à l'égard de George, Sr.

2.              Le ou vers le 14 octobre 1997, 620357 a fait l'acquisition de la franchise Polaris (qu'elle a enregistrée sous le nom « Madraga Speed 'N Sport » ) directement de Polaris, contre versement de frais d'environ 10 000 $ (pièce R-4, section 36). George, Sr. avait été le concessionnaire Polaris d'origine à sa concession John Deere à Yellow Creek (Saskatchewan) et, lorsqu'il a quitté l'entreprise, George, Jr. et Stanley Madraga (frère de George Sr.) ont constitué MDL en société et obtenu la concession Polaris en question à Prince Albert (Saskatchewan), sous l'appellation « Madraga's Deals on Wheels » .

3.              Le 17 octobre 1997, 620357 a pris possession des accessoires du magasin de MDL : tiroir-caisse, comptoirs, outils, ordinateurs, système informatique, écriteaux et équipement, le tout ayant une valeur supérieure à 130 000 $, et ce, sans payer de frais ni signer de contrat, en s'installant dans les locaux à la place de MDL. Le personnel est resté essentiellement composé des mêmes personnes, sauf que Kari, petite-fille de George Sr. et fille de George, Jr., est devenue gérante. George, Jr. occupe maintenant le grand bureau situé dans un coin de l'immeuble.

4.              George. Jr. avait racheté les actions de Stanley dans MDL pour 35 000 $, somme que George, Sr. a prêtée à George, Jr. vers le mois d'avril 1993. Toutefois, il a opéré une importante retenue en attendant la vérification de l'ADRC. En fin de compte, Stanley a intenté des poursuites contre George, Jr. et MDL, alléguant que ces derniers avaient fraudé Stanley et réclamant le solde du montant de 35 000 $. George, Jr. a racheté à Stanley les actions de ce dernier pour la somme de 40 000 $. Ces actions consistaient en créances judiciaires de 40 502 $ contre George, Jr. et de 121 951,70 $ contre George Jr. et MDL. Stanley a intenté ses poursuites plus ou moins au même moment où George, Jr. a été reconnu coupable de fraude fiscale, le 14 mars 1996.

5.              George Sr. a racheté les terres agricoles de George Jr. par voie de paiements échelonnés. Ce marché fait l'objet de poursuites intentées par la femme de George, Jr. en vertu de la Matrimonial Property Act (la loi sur les biens matrimoniaux), pour moitié, et par l'ADRC.

Toutes ces transactions ont produit différentes défalcations. La conséquence en a été qu'à l'exception du montant payé par George, Sr. au syndic de faillite de George, Jr. par mégarde, George, Sr. n'a pas effectué de versements autres que ceux qui sont indiqués.

[7]            Le 14 mars 1996, George, Jr. a été déclaré coupable de fraude fiscale relativement à une somme de 208 152,99 $ de revenu non déclaré qu'il avait tiré de MDL. En même temps, MDL a été reconnue coupable d'avoir déclaré son revenu en moins de 170 797,42 $ (pièce R-1, onglet 80). Ces condamnations ont été confirmées sur appel le 25 mars 1998, et des amendes ont été imposées. George, Jr. a effectué une cession de faillite.

[8]            En ce qui concerne la transaction du 17 octobre 1997, lors de l'interrogatoire préalable, on a posé la question 961 à George, Sr. à titre de dirigeant de 620357 :

                                [TRADUCTION]

Mme Lee : Bon. Alors, M. Madraga, qu'est-ce qui vous a inspiré la notion ou l'idée que vous pourriez reprendre le magasin?

R : Ce qui - eh bien, George n'aurait rien eu, vous savez, et la même chose pour Kari, alors j'ai pensé, vous savez, qu'il fallait le reprendre. D'ailleurs, le comptable a dit que c'était une entreprise rentable qui produisait des bénéfices, alors j'ai pris le risque.

[9]            Kari a maintenant environ 30 ans. Elle travaille pour le service des pièces de MDL depuis environ 1993. Elle a terminé l'école secondaire et a fréquenté l'université pendant à peu près trois années. Elle a témoigné que ces dernières années, elle tenait les livres de 620357, mais, lors de l'interrogatoire principal, il est apparu qu'elle ne comprenait pas certains des relevés informatiques de 620357 qu'elle avait devant les yeux. Elle a témoigné qu'elle est la gérante de 620357 et que son père, George, Jr., y travaille comme vendeur. Le grand bureau de George, Jr., à l'avant des locaux occupés par 620357, semble être plus vaste et mieux situé que celui de Kari.

[10]          Kari a témoigné que le principal franchiseur de MDL était Polaris Industries Ltd. ( « Polaris » ) fabricant de motoneiges, de véhicules tous terrains et de véhicules aquatiques, et que son financier pour Polaris était Deutsche Financial Services ( « Deutsche » ). À la fin de l'exercice 1996, l'ADRC a établi des cotisations à l'égard de MDL quant à certaines années, ce qui a abouti à l'établissement de cette cotisation relativement à 620357. Kari a témoigné qu'à cause de cela, l'entreprise de MDL aurait « terriblement » dépéri. Toutefois l'état financier de MDL pour les exercices se terminant le 31 août (pièce R-4, section 16) montre un chiffre d'affaires de 4 177 903 $ en 1997 et de 4 869 065 $ en 1996. D'autre part, MDL a essuyé une perte de revenu liée à l'exploitation de 111 598 $ en 1996, et un revenu positif de 128 881 $ en 1997. La marge bénéficiaire brute de MDL avant les frais d'exploitation était de 573 666 $ en 1996 et de 742 048 $ en 1997. Kari n'est pas digne de foi.

[11]          Il y a d'autres raisons de ne pas croire Kari. Elle se plaisait à argumenter et donnait des réponses évasives. De toute évidence, elle croyait qu'il est malin d'afficher ce genre de comportement. En outre, ses manoeuvres ont été mises au jour quand on lui a demandé de prouver ce qu'elle disait. En particulier, elle a témoigné que Revenu Canada avait saisi les comptes en banque de MDL en 1995. En fait, il s'avère que les seuls biens que Revenu Canada a saisis en 1995 sont des documents.

[12]          Kari a également témoigné qu'en 1996, le directeur de district de Polaris contrôlait le retour de pièces et de matériel de MDL à Polaris de façon exceptionnelle et avait crédité le compte impayé de MDL de 100 000 $. En 1997 :

1.              Polaris a demandé une garantie de 100 000 $ de George, Sr. et une lettre de crédit pour continuer à traiter avec MDL. George, Sr. a refusé.

2.              Deutsche a demandé des garanties de George, Sr. et de sa femme, ainsi qu'une hypothèque sur leurs terres, afin de continuer à traiter avec MDL. George, Sr. n'a pas accepté.

Par conséquent, au début de juillet 1997, tout le crédit dont MDL jouissait s'est volatilisé, et tous ses fournisseurs à part quelques petites entreprises locales exigeaient un paiement entier au comptant, de façon anticipée ou à la livraison de l'article.

[13]          À ce moment-là, MDL faisait appel de la cotisation de l'intimée en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années 1992, 1993 et 1994. Le total à payer par MDL le 17 octobre 1997 pour les impôts, l'intérêt et les pénalités était de 339 210,82 $.

[14]          Le 17 octobre 1997, MDL :

1.              a consigné ses biens entiers (remorques, véhicules tous terrains et motoneiges) à 620357, au prix coûtant à être payé lorsqu'ils seraient vendus, conformément à l'accord de financement signé avec Deutsche;

2.              a vendu ses vêtements, pièces et accessoires à 620357 pour 125 000 $, montant réglé par le chèque de 620357 daté du 7 novembre 1997.

[15]          En même temps, et sans entente écrite, 620357 a repris le personnel (y compris George, Jr.), l'équipement, les écriteaux, les outils, le système informatique, l'emplacement et les locaux de MDL à Prince Albert, le tout à titre d'entreprise en exploitation et sans frais. 620357 occupait les locaux sans avoir signé de bail écrit, à titre de locataire du propriétaire de l'immeuble et du terrain, George, Sr. Il n'existe aucune preuve de l'existence d'une entente ou d'une durée relativement à l'occupation des locaux par 620357, qui payait les taxes foncières, les comptes des services publics et les frais d'entretien. Le propriétaire de MDL restait George, Jr., maintenant un employé de 620357. 620357 exploitait l'entreprise prorogée.

[16]          Au contrat de vente des pièces, vêtements et accessoires était annexée une liste de pièces indiquant un coût de 329 073,30 $ (pièce A-2, Annexe A). Le contrat indique spécifiquement qu'ils « ont accepté l'évaluation » d'un certain M. Moberly. Toutefois, cette évaluation comportait deux chiffres dont aucun ne figure dans la preuve. Aucun chiffre n'a été proposé par les parties comme contrepartie. Bien que M. Moberly ait apparemment effectué un ajustement pour les stocks désuets, les parties au contrat ont déduit un montant bien plus important pour arriver à 125 000 $. Par conséquent, MDL et 620357, de leur propre accord, n'ont accepté aucun des deux chiffres avancés par M. Moberly pour la juste valeur marchande selon deux méthodes d'évaluation. Ils avaient demandé l'évaluation de M. Moberly par l'intermédiaire de leur comptable agréé ou d'un avocat.

[17]          Pour ces motifs, le chiffre de 125 000 $ n'est pas accepté comme la juste valeur marchande. Le seul chiffre établi par 620357 comme solution de rechange est le coût de 329 073,30 $. Kari a dit que ce chiffre était inexact parce qu'il était le résultat d'un imprimé informatique effectué le 30 octobre 1997, époque à laquelle, selon les allégations de Kari, l'inventaire comprenait des marchandises payées par 620357. Toutefois, les parties (chacune ayant à sa tête un propriétaire qui avait l'expérience de l'entreprise) au contrat à l'époque ont été conseillées par leur propre avocat et n'ont pas rectifié ou modifié le chiffre pour des raisons qu'elles sont seules à connaître. Par conséquent, la Cour accepte ces marchandises et ce coût comme étant véridiques et corrects au moment pertinent.

[18]          Kari a effectué plusieurs calculs avec l'aide du personnel de 620357 et de son avocat dans les deux semaines précédant l'audience, et des déclarations ont été rédigées à ce sujet. Le matin du 19 février, l'avocate de l'intimée s'est opposée à ce qu'on les utilise à titre de preuve. Après les observations, la Cour a rendu l'ordonnance suivante :

                                [TRADUCTION]

Il s'agit d'une décision concernant l'objection générale émise par l'avocate de l'intimée en l'espèce relativement à l'interrogatoire de Kari Madraga, dont l'avocat de l'appelante nous signale qu'il comprendra la présentation de pièces consistant en des documents préparés par Kari à titre de gérante de 620357, ou des renvois auxdits documents, ayant partiellement à voir avec le fait qu'avant la prise de contrôle par 620357 des activités de l'entreprise de Madraga Distributors Ltd., elle était préposée au service des pièces pour Madraga Distributors Ltd. Dans le cadre de cette décision, je suis conscient du fait que le litige a commencé en 1999, et qu'il y a eu des interrogatoires préalables approfondis entre les parties au sujet de cette instance. Maintenant que j'ai dit tout cela à titre de préliminaire, je vais vous lire un passage de la règle 89 des Règles de procédure générale de cette cour.

89 (1) Sauf directive contraire de la Cour, ou sauf si les autres parties ont renoncé au droit d'obtenir communication de documents ou ont consenti par écrit à ce que des documents soient utilisés en preuve, aucun document ne doit être utilisé en preuve par une partie à moins, selon le cas

(a)            qu'il ne soit mentionné dans les actes de procédure, ou dans une liste ou une déclaration sous serment déposée et signifiée par une partie à l'instance;

(b)            qu'il n'ait été produit par l'une des parties, ou par quelques personnes interrogées pour le compte de l'une des parties, au cours d'un interrogatoire préalable;

(c)            qu'il n'ait été produit par un témoin qui n'est pas, de l'avis de la Cour, sous le contrôle de la partie.

                D'après ce qu'a dit l'avocate de la Couronne, elle ne consentira à la production d'aucun document proposé par Kari Madraga. J'estime également que, pendant toute cette instance, Kari Madraga était sous le contrôle de l'appelante pour les fins de la Règle 89. J'interprète également (dans les circonstances de cette instance exclusivement) que Kari, selon ce que j'ai entendu ou appris dans une certaine mesure ou dans une large mesure de Kari elle-même dans son témoignage hier, a préparé les documents que l'on propose de présenter, au cours des derniers jours, plus ou moins pendant les deux dernières semaines.

                Dans les circonstances de cette cause, qui a débuté ici en 1999, il m'apparaît que les documents en question auraient pu être préparés par Kari à tout moment au cours des deux dernières années, plus ou moins, et peut-être même des trois dernières années, compte tenu des dates mentionnées au début de la cause.

                Et c'est pourquoi je vais permettre à Kari de continuer de témoigner, mais elle ne pourra pas utiliser les documents préparés et présentés, que ce soit pour se rafraîchir la mémoire ou pour servir de preuve. J'accepte ce que l'avocate de la Couronne a dit, avec les références qu'elle a données, relativement aux nombreuses recherches menées. Je suis conscient du fait que le matériel que Kari se propose de présenter concerne un hiatus de dates qui ont fait l'objet de commentaires approfondis par Me Sanderson dans ses observations, essentiellement la période du 29 août au 30 octobre 1997, et, dans une assez grande mesure par la suite, relativement à la vente subséquente des pièces dont il est question. À mon avis, toutes ces questions auraient pu être documentées il y a bien longtemps aux fins de cette audience, et aux fins de la Règle 89, elles auraient dû être documentées il y a bien longtemps.

                Et c'est ce qui fonde ma décision.

[19]          Le chiffre auquel M. Chow est parvenu, soit 329 000 $, pour la juste valeur marchande des marchandises vendues par MDL à 620357, comme le décrit l'annexe A de la pièce A-2, est accepté comme correct. M. Chow a tenu compte d'un ajustement de 2,4 % pour les pièces obsolètes ou dépréciées comprises dans le stock. Toutefois, il a également tenu compte des hausses de prix subséquentes pour le stock qui compenseraient cela avec le temps; d'après la preuve devant la Cour relativement aux pratiques d'établissement des prix de l'appelante, cela est correct. Kari a témoigné que, lors de son examen des stocks deux semaines avant l'audience, les marchandises restantes en février 2002 avaient une valeur de 64 900 $. Les chiffres de Kari posent quelques problèmes. Tout d'abord, sa crédibilité : elle avait l'habitude de faire ce genre d'affirmations dans son témoignage alors qu'elle était incapable de les prouver. Ensuite, il s'agit de déterminer sur quoi est fondé son calcul : la majoration de 620357 sur ces marchandises était souvent de 100 %, ou de 60 % et plus. D'après le comportement de Kari lors de cette audience, même si elle avait raison, la valeur de 64 900 $ devrait correspondre au prix de vente au détail, et non au coût. Enfin, lors du contre-interrogatoire, il s'est avéré que Kari utilisait le numéro de pièce d'une pièce identique pour affirmer qu'il s'agissait d'une entrée en double, alors que le relevé des pièces montre la pièce en question à un emplacement différent. C'est pourquoi Kari n'est pas digne de foi. La Cour ne se fie pas du tout à son témoignage. Son chiffre de 64 900 $ est tout bonnement rejeté. Il n'y a aucune preuve acceptée qui contredise M. Chow. Le fait que 620357 et MDL ont accepté en connaissance de cause, à l'époque, 329 073,30 $ à titre de coût des biens transférés le 17 octobre 1997 figurant sur la liste détaillée confirme le fait qu'il s'agissait des biens transférés et confirme le coût réel de ces biens.

[20]          Le résultat des chiffres que la Cour accepte comme représentant correctement la vente par MDL de pièces, vêtements et accessoires à 620357 le 17 octobre 1997 et décrits à la pièce A-2 est le suivant :

1.              Juste valeur marchande                                                                      329 000 $

2.              Moins la contrepartie versée par 620357                           125 000 $

                3.              Montant se rapportant à l'inventaire

                                transféré par MDL à

                                620357 pour lequel on a payé moins

                                que la juste valeur marchande                                                            204 000 $

[21]          Benedict Chow a également calculé que la consignation de « biens entiers » - motoneiges, véhicules tous terrains, véhicules aquatiques et remorques - décrits à la pièce A-1 et consignés par MDL à 620357 sans contrepartie, représentait un transfert de juste valeur marchande de MDL à 620357 de 11 000 $ net. Selon les modalités de la transaction, 620357 rembourserait le financement de 100 % engagé par MDL pour ces unités à mesure qu'elles étaient vendues, tout en conservant le bénéfice éventuel. Il n'existe aucune preuve résumant le profit ou la perte de 620357 sur ces unités. Il n'existe non plus aucune preuve de la juste valeur marchande d'une telle transaction, sauf celle de M. Chow. Toutefois, Kari a témoigné que MDL avait accepté des véhicules d'occasion pour vente en consignation à un prix de vente convenu fixé par le consignateur pour des frais de 100 $ par unité pour 90 jours sur leur lot. Cent vingt et une unités étaient l'objet de ce contrat de consignation. À des frais de 100 $ chacune, cela produit plus ou moins une confirmation du chiffre de M. Chow, qui est de 11 000 $. Par conséquent, le chiffre de 11 000 $ avancé par M. Chow est accepté par la Cour.

[22]          Pour ces motifs, l'appel est rejeté. L'intimée a droit à ses frais entre parties.

[23]          Enfin, à la fin de la plaidoirie, l'avocat de l'appelante a signalé à la Cour que le cabinet d'experts comptables de Garth Busch avait demandé d'être rémunéré pour les heures passées par M. Busch à l'interrogatoire en l'espèce. Or, c'est tout simplement une partie du coût qu'un professionnel peut avoir à engager lorsqu'il travaille sur un contrat tel que celui-ci. C'est un coût que le cabinet comptable doit supporter, tout comme un bon citoyen qui témoigne en cour aura peut-être des frais personnels associés à l'accomplissement de son devoir.

                Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de mars 2002.

« D. W. Beaubier »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 13e jour de janvier 2003.

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-4723(IT)G

ENTRE :

620357 SASKATCHEWAN LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu les 18, 19, 20, 21 et 22 février 2002

à Prince Albert (Saskatchewan),

par l'honorable juge D. W. Beaubier

Comparutions

Avocat de l'appelante :                                        Me James Sanderson, c.r.

Avocate de l'intimée :                                          Me Elaine Lee

JUGEMENT MODIFIÉ

                L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est rejeté en conformité avec les motifs du jugement ci-joints.

                L'intimée a droit à ses frais entre parties.

                Ce jugement et les motifs du jugement remplacent le jugement et les motifs du jugement du 11 mars 2002.

                Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de mars 2002.

« D. W. Beaubier »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme ce 13e jour de janvier 2003.

Mario Lagacé, réviseur

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.