97-1921(IT)I
ENTRE :
ESTHER TREMBLAY,
appelante,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
Appel entendu le 6 juillet 1998 à Montréal (Québec) par
l'honorable juge Louise Lamarre Proulx
Comparutions
Représentant de l'appelante : Michel Chapman
Représentante de l'intimée : Susan Saughnessy (Stagiaire en droit)
JUGEMENT
L'appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 est rejeté, selon les motifs du jugement ci-joints.
Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de juillet 1998.
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J.C.C.I.
Date: 19980716
Dossier: 97-1921(IT)I
ENTRE :
ESTHER TREMBLAY,
appelante,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
MOTIFS DU JUGEMENT
Le juge Lamarre Proulx, C.C.I.
[1] L'appelante en appelle par voie de la procédure informelle des nouvelles cotisations du ministre du Revenu national (le « Ministre » ) pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993.
[2] La question en litige est de savoir si l'achat et l'exploitation d'une mini-excavatrice par l'appelante avaient le caractère d'une entreprise commerciale.
[3] Les faits sur lesquels le Ministre s'est fondé pour établir ses nouvelles cotisations sont décrits aux paragraphes 3, 4, 5, 6 (a) à (f) et 7 de la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) comme suit :
3. Dans le calcul de son revenu, l'appelante a déduit des montants de 9 422 $ pour l'année d'imposition 1991, de 9 593 $ pour l'année d'imposition 1992 et de 6 408 $ pour l'année d'imposition 1993 à titre de pertes nettes d'entreprise.
4. Le ou vers le 17 octobre 1994, l'appelante a produit une déclaration amendée, pour l'année d'imposition 1993, en demandant de réviser le montant de sa perte d'entreprise à 7 908 $ et une déduction pour des frais financiers au montant de 1 669 $.
5. Par avis de nouvelle cotisation datés du 18 mai 1995, pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, le ministre du Revenu national (le « Ministre » ) a refusé d'accorder à l'appelante lesdites pertes d'entreprise aux montants de 9 422 $ en 1991, de 9 583 $ en 1992 et de 7 908 $ en 1993 et la déduction pour des frais financiers au montant de 1 669 $.
6. Pour établir ces nouvelles cotisations, le Ministre a tenu notamment pour acquis les faits suivants :
a. l'appelante a débuté en 1990 une soi-disant entreprise d'excavation sous la raison sociale « Mini Excavation B.M. Tremblay » ;
b. au cours des années sous appel, l'appelante avait un travail chez son employeur, Paysage Claude;
c. au cours des années sous appel, l'appelante recevait également de l'assurance-chômage;
d. le revenu brut le plus élevé de l'entreprise n'a été que de 1 610 $ et ce, pour l'année d'imposition 1993;
e. depuis 1990, l'appelante a réclamé, à chacune des années, des pertes d'entreprise;
f. l'appelante n'a pas eu beaucoup de revenu en rapport avec les dépenses encourues, elle n'a pas ainsi démontré qu'elle avait une entreprise dans l'espoir d'en tirer un profit;
...
7. Au stade de l'opposition, le Ministre a constaté que la perte d'entreprise de l'appelante pour les années d'imposition 1992 et 1993 comprenait une dépense de loyer au montant de 1 800 $, pour chacune de ces deux années là, qui ne pouvait pas dépasser le revenu de l'appelante tiré de cette entreprise.
[4] L'appelante et monsieur Michel Chapman, c.a., ont témoigné. Monsieur Chapman a agi comme le représentant de l'appelante lors de l'audience. Monsieur Chapman était le comptable et le conseiller financier de l'appelante et de Paysage Claude dont il est mention à l'alinéa 6(b) de la Réponse.
[5] L'appelante et son mari ont commencé en 1987 le commerce d'aménagement paysager faisant affaires sous le nom de Paysage Claude. Ils étaient actionnaires chacun à vingt pour cent. Leurs trois fils étaient également actionnaires à vingt pour cent. Les fils étaient nés respectivement en 1957, 1961 et 1963. D'après l'appelante, chacun travaillait au commerce.
[6] Paysage Claude a acquis vers l'année 1990 une pépinière qui consistait en une terre où il y avait la vente d'arbres et de plantes ainsi que de produits utilisés pour le jardinage. L'appelante s'occupait de cette pépinière. Elle avait aussi une part active dans la gestion des activités d'aménagement paysager de Paysage Claude.
[7] En 1989, le mari de l'appelante est décédé lui laissant sa part des actions.
[8] Monsieur Chapman a dit à la Cour que c'était lui qui avait conseillé à l'appelante d'acheter personnellement l'excavatrice à cause de problèmes de liquidités que rencontrait Paysage Claude et aussi à cause de problèmes d'entente entre les actionnaires. L'excavatrice était exclusivement utilisée par Paysage Claude. Cette dernière payait l'appelante en lui remettant les frais qu'elle chargeait aux clients pour l'usage de l'excavatrice lors des travaux d'aménagement paysager. C'est ainsi qu'elle lui a remis 920 $, 1 157 $ et 1 610 $ pour les années 1991, 1992 et 1993, ainsi qu'on le voit aux états financiers de chacune des années. Les déclarations de revenu de l'appelante ainsi que les états financiers ont été déposés comme pièce I-1.
[9] Les frais d'exploitation pour chacune des années étaient les suivants :
MINI EXCAVATION B.M. TREMBLAY ENR.
RÉSULTATS
POUR L'EXERCICE TERMINÉ LE 31 DÉCEMBRE 1991
1991 1990
REVENUS 920 $ 1 260 $
FRAIS D'EXPLOITATION
Honoraires professionnels 500 500
Entretien et réparation 675 826
Frais de banque 149 384
Intérêts dette à long terme 2 408 3 281
Amortissement - matériel roulant 5 890 8 415
Amortissement - Équipement 720 900
(10 342) (14 306)
PERTE NETTE ( 9 422) $ (13 406) $
MINI EXCAVATION B.M. TREMBLAY ENR.
RÉSULTATS
POUR L'EXERCICE TERMINÉ LE 31 DÉCEMBRE 1992
1992 1991
REVENUS 1 157 $ 920 $
FRAIS D'EXPLOITATION
Loyer 1 800 0
Entretien et réparation local 1 366 675
Frais de déplacement 622 0
Honoraires professionnels 500 500
Intérêts et frais de banque 218 149
Intérêts sur la dette à long terme 1 534 2 408
Amortissement - équipement 576 720
Amortissement - matériel roulant 4 124 5 890
(10 740) $ (10 342) $
BÉNÉFICE NET ( 9 583) $ ( 9 422) $
MINI EXCAVATION B.M. TREMBLAY ENR.
RÉSULTATS
POUR L'EXERCICE TERMINÉ LE 31 DÉCEMBRE 1993
1993
REVENUS 1 610 $
FRAIS D'EXPLOITATION
Loyer 1 800
Entretien et réparation - local 926
Frais de déplacement 617
Honoraires professionnels 500
Intérêts et frais de banque 181
Intérêts sur la dette à long terme 647
Amortissement - équipement 461
Amortissement - matériel roulant 2 886
( 8 018) $
PERTE NETTE ( 6 408) $
[10] On voit que les pertes ont été très élevées pour chacune des années en cause.
Conclusion
[11] Il est difficile de croire, dans des circonstances où l'excavatrice était à la seule disposition de Paysage Claude, que l'appelante ait acheté l'excavatrice personnellement, pour la seule raison qu'elle voulait s'assurer du contrôle entier de l'excavatrice, contrôle qu'elle aurait dû partager avec ses fils si l'excavatrice avait été achetée par Paysage Claude.
[12] De plus, quand un contribuable réclame, à l'égard d'une de ses activités, la nature d'entreprise, il doit en démontrer la structure commerciale. Une structure commerciale normale d'une entreprise de location ou d'exploitation d'une excavatrice aurait demandé la conclusion d'une entente préalable de principe avec l'unique utilisateur des services de l'excavatrice. Cette entente aurait prévu des frais de location suffisants pour couvrir les frais d'exploitation et permettre une marge de profits. En réalité, l'utilisation de l'excavatrice est sujette aux contrats que Paysage Claude obtient et les inscriptions que Paysage Claude veut bien faire relativement aux frais d'usage de l'excavatrice. Ce sont ces frais d'usage qui sont remis à l'appelante.
[13] La conclusion s'impose d'elle-même, l'entente avec Paysage Claude n'avait aucun caractère de nature commerciale. De plus, il est à noter qu'au moment où l'amortissement de l'excavatrice diminuait, l'appelante a ajouté le coût d'un loyer de bureau dont on ne peut que douter de l'utilité dans le cas d'une excavatrice qui est à la disposition exclusive d'un seul usager.
[14] Je ne dois pas considérer conjointement l'exploitation de l'entreprise de Paysage Claude et celle de l'appelante et conclure que l'entreprise de l'appelante par l'entremise de l'excavatrice dont elle était propriétaire était utile à l'exploitation de Paysage Claude. Je dois prendre les entreprises de chacun des contribuables et analyser à l'égard de chaque contribuable s'il s'agit d'une entreprise de nature commerciale. Dans le cas de l'entreprise de l'appelante, il ne s'agit pas d'une entreprise de nature commerciale pour les raisons ci-avant données.
[15] L'appelante et le comptable monsieur Chapman font valoir que l'achat d'une excavatrice ne peut être pour des fins personnelles. Il est accepté en droit fiscal que les dépenses peuvent avoir un autre but qu'un but personnel mais cela n'en fait pas des dépenses dans le but de gagner un revenu d'entreprise. Ce n'est que dans le cas de dépenses faites véritablement dans le but de tirer un revenu de l'entreprise, que ces dépenses peuvent être déduites dans le calcul du revenu de cette entreprise.
[16] Je suis d'avis, à la lumière de la preuve, que la décision d'acquérir personnellement l'excavatrice avait d'autres motifs que les motifs commerciaux d'exploiter une entreprise de location d'excavatrice. Elle pouvait avoir comme motifs de réduire les gains faits par l'appelante au niveau des salaires et des prestations d'assurance-chômage; elle pouvait avoir comme motif d'avantager l'entreprise de Paysage Claude, mais elle n'avait pas pour but de faire des profits.
[17] Monsieur Chapman a mentionné que l'appelante avait véritablement engagé des dépenses et que si ces dépenses n'étaient pas des dépenses d'entreprise, elles devraient être considérées comme des pertes au titre de placement d'entreprise. Il s'agit ici d'un changement majeur de position en ce qui concerne le calcul de ce qui est admissible ainsi que l'a soulevé l'avocate de l'intimée. Cela doit être plaidé au niveau de l'avis d'appel et encore mieux au stade de l'avis d'opposition afin qu'au moment de l'audition il y ait un débat judiciaire. Comme la question n'a pas été le sujet d'un débat judiciaire, je ne peux trancher une telle question.
[18] L'appel est en conséquence rejeté.
Signé à Ottawa, Ontario, ce 16e jour de juillet, 1998.
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J.C.C.I.
No DU DOSSIER DE LA COUR : 97-1921(IT)I
INTITULÉ DE LA CAUSE : Esther Tremblay et Sa Majesté la Reine
LIEU DE L'AUDIENCE : Montréal (Québec)
DATE DE L'AUDIENCE : le 6 juillet 1998
MOTIFS DE JUGEMENT PAR : l'honorable juge Louise Lamarre Proulx
DATE DU JUGEMENT : le 16 juillet 1998
COMPARUTIONS :
Pour l'appelante : Michel Chapman (représentant)
Pour l'intimée : Susan Shaughnessy (Stagiaire en droit)
AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :
Pour l'appelant(e) :
Nom :
Étude :
Pour l'intimé(e) : Morris Rosenberg
Sous-procureur général du Canada
Ottawa, Canada