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98-341(IT)I

ENTRE :

GEORGETTE TREMBLAY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appels entendus le 20 juillet 1998 à Québec (Québec) par

l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

Comparutions

Représentant de l'appelante :                                   Marc-André Plante

Avocat de l'intimée :                                               Me Alain Gareau

JUGEMENT

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 sont rejetés, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour d'août, 1998.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


Date: 19980820

Dossier: 98-341(IT)I

ENTRE :

GEORGETTE TREMBLAY,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Lamarre Proulx, C.C.I.

[1]      L'appelante en appelle des nouvelles cotisations du ministre du Revenu national (le « Ministre » ), pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993. Ces nouvelles cotisations ont été établies par la méthode de l'avoir net.

[2]      Les faits sur lesquels le Ministre s'est appuyé pour établir les nouvelles cotisations sont décrits au paragraphe 4 de la Réponse à l'avis d'appel comme suit :

a.          lorsqu'elle a déclaré son revenu pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, l'appelante n'a pas inclus la totalité des revenus qu'elle a reçus au cours de ces années-là;

b.          les montants de revenus déclarés en moins par l'appelante s'élèvent à 17 614 $ en 1991, 24 096 $ en 1992 et à 45 679 $ en 1993;

c.          les montants non déclarés ont été déterminés à l'aide de la méthode dite d'avoir net (une copie de l'état de la valeur nette de l'appelante et des annexes l'accompagnant sont jointes à la présente);

d.          lors de la production de ses déclarations de revenu, pour les années d'imposition 1991 et 1992, l'appelante a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire;

e.          en omettant ainsi de déclarer la totalité de ses revenus, l'appelante a fait sciemment, ou dans des circonstances qui justifient l'imputation d'une faute lourde, un faux énoncé ou une omission dans les déclarations d'impôt sur le revenu produites pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, ou a participé, consenti ou acquiescé à ce faux énoncé ou cette omission, d'où il résulte que l'impôt qu'elle aurait été tenue de payer d'après les renseignements fournis dans les déclarations d'impôt déposées pour ces années-là était inférieur au montant d'impôt à payer pour ces années-là;

f.           par suite de l'omission par l'appelante de déclarer la totalité de son revenu, le ministre a imposé à l'appelante, lors des avis de nouvelle cotisation du 3 juin 1996, des pénalités de 1 222,56 $, de 1 671,11 $ et de 3 851,06 $ pour respectivement les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, conformément au paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ).

[3]      Les revenus déclarés pour les années 1991, 1992 et 1993 sont respectivement de 4 979 $, 4 792 $ et 3 087 $, et les revenus additionnels sont respectivement de 17 614 $, 24 096 $ et 45 679 $.

[4]      L'avis d'appel faisait valoir les motifs suivants :

Les faits que nous désirons invoquer sont:

L'arbitraire du coût de vie suivant statistiques Canada.

Nous pourrons lors de l'appel fournir une déclaration du créancier hypothécaire concernant la provenance d'un montant de 20 000 $ qui servit à réduire l'hypothèque lors du renouvellement en 1993 et qui ne doit, en aucun temps être considéré comme un revenu.

[5]      L'audition de l'appel a été fixée au 22 juillet 1998. Par une lettre en date du 15 juillet 1998 reçue par télécopieur le même jour, le représentant de l'appelante demandait une remise pour déterminer la provenance d'une somme d'argent au montant de 20 000 $ qui a été utilisée en 1993 pour réduire d'autant l'hypothèque sur une maison acquise par l'appelante en 1992. Cette demande de remise a été refusée. La même demande a été faite au début de l'audience. À une question de la Cour, à savoir quelle était selon l'appelante la provenance de ce montant, le représentant de l'appelante a répondu qu'il ne lui avait pas demandé mais qu'il voulait obtenir cette réponse de l'institution financière où le dépôt avait été fait. Comme ce dépôt ne pouvait être fait qu'à la connaissance de l'appelante, c'était elle qui en premier lieu devait en expliquer la provenance s'il ne provenait pas de ses revenus de l'année. Il est à noter que l'appelante n'était pas présente à l'audition. Considérant le motif de la demande de remise comme non fondé, la demande a été rejetée et l'audition de la cause a procédé.

[6]      Le représentant de l'appelante a indiqué à la Cour trois motifs de contestation : le premier était le montant trop élevé de la contribution du conjoint. Quand il a compris que ce montant n'augmentait pas mais diminuait le revenu additionnel net de l'appelante, le représentant a abandonné ce point. Le deuxième point était le montant trop élevé du coût de la vie de l'appelante et de son mari et le troisième point concernait la provenance de la somme de 20 000 $ qui a été utilisée en 1993, pour réduire un emprunt hypothécaire.

[7]      Monsieur Jean-Claude Delisle, vérificateur à Revenu Canada, a expliqué le rapport qu'il avait préparé pour les fins de l'établissement de l'avoir net de l'appelante pour les trois années en cause. Ce rapport a été produit comme pièce I-1.

[8]      Cet avoir net a été préparé à partir de documents. Rien n'a été estimé sauf certaines dépenses afférentes au coût de la vie d'une famille de deux adultes. Je cite des notes explicatives du vérificateur à la pièce I-1 :

Suite à la production de bilans personnels par le c/t, nous avons utilisé la méthode de l'avoir net pour effectuer la vérification de ses déclarations d'impôt. Nous avons procédé à l'examen de ses comptes de banque auprès d'institutions financières. Les postes du bilan ont tous été vérifiés à l'aide de contrats, factures ou autres pièces justificatives pertinentes et redressés s'il y avait lieu.

...

Revenus additionnels :

Nous avons établi ces revenus additionnels par différence de capital. À l'aide de contrats et d'analyse des comptes de banque du c/t, nous avons corrigé certains actifs dans les bilans du c/t et inscrits d'autres qui n'apparaissaient pas dans les bilans originaux. Les dépenses personnelles ont été évaluées selon les données du c/t d'une part et par Statistiques Canada d'autre part.

Les revenus additionnels proviennent en grande majorité de l'acquisition du 3250 rue Duc de Milan à Beauport dans laquelle son fils Mario demeure. Notre vérification nous a démontré que la c/t demeure dans sa résidence du Boul. Blanche à Baie Comeau en compagnie de son époux, Guilmond Tremblay. Elle travaille aussi dans cette région. Les revenus non déclarés par Mme Tremblay ont servi à l'acquisition de la résidence de Beauport ainsi qu'aux paiements des hypothèques, taxes, assurances, entretien, etc. ...

...

Nous avons présenté le projet par écrit au c/t le 28 septembre 1995. À la demande de M. J.L. Martel, représentant du c/t, nous lui en avons aussi fait parvenir une copie. Le 3 novembre 1995, M. Martel a communiqué avec nous et tous les renseignements demandés lui ont été fournis. Une nouvelle discussion a eu lieu le 6 février 1996 avec M. Martel. Le 26 février, j'ai rencontré M. Martel à ses bureaux de Baie Comeau et finalisé les informations requises ainsi que notre position dans ce dossier. (voir le T2020 au dossier)

...

M. Martel « n'a rien à redire de nos chiffres » . Toutefois aucun accord définitif n'a pu être obtenu du représentant du c/t. Quant à Mme Tremblay, nous n'avons jamais réussi à entrer en communication avec elle.

[9]      Voici les notes explicatives du vérificateur concernant l'imposition d'une pénalité en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi :

Les montants établis par avoir net sont importants.

L'augmentation par avoir net et le profit des dépenses personnelles ne sont pas compatibles avec le revenu total déclaré.

Le contribuable ne pouvait ignorer que ses déclarations étaient incomplètes et que ses revenus étaient sous-évalués.

Les bilans ont été établis en obtenant des informations auprès de tiers et ou du client, des copies de micro fiches auprès d'institutions bancaires. Les dépenses personnelles ont été établies selon Statistiques Canada et nous avons ajouté certains paiements non inclus dans les données de Statistiques Canada.

[10]     L'annexe 4 du rapport sur l'avoir net est la compilation des dépenses personnelles de l'appelante et de son mari, monsieur Guilmond Tremblay. Tel que mentionné au paragraphe 8 de ces motifs, cette compilation a été préparée en grande partie à partir de renseignements fournis par le comptable de l'appelante et en se fondant sur des données statistiques pour la vie de deux adultes.

[11]     Les dépenses sont évaluées à environ 26 000 $ annuellement. Monsieur Tremblay a dit lors de son témoignage que le couple ne dépensait pas plus de 300 $ par semaine. Toutefois, la compilation des dépenses personnelles contient plusieurs chefs soit ceux de l'alimentation, du logement, de l'entretien ménager, de l'habillement, du transport, des soins de santé, des soins personnels, des loisirs, du matériel de lecture et autre, de l'éducation, du tabac et boissons alcoolisées, de la sécurité, des cadeaux et contributions, divers et impôt personnel. Or, il est à noter qu'aucun des chefs n'a été spécifiquement attaqué par le représentant de l'appelante ni par son témoin.

[12]     Une fois la compilation des dépenses personnelles ayant été établie, le vérificateur l'a montrée au comptable de l'appelante et elle a été réduite d'environ 5 000 $ pour en arriver au montant actuel. Selon le vérificateur, le comptable était satisfait de cet état des dépenses personnelles de l'appelante. En ce qui concerne l'appelante, le vérificateur n'a jamais réussi à entrer en communication avec elle.

[13]     Les pénalités ont été imposées pour la grande différence entre le revenu déclaré et celui établi par avoir net, tel que mentionné au paragraphe 9 de ces motifs. L'appelante a été informée par écrit de l'intention du ministre d'imposer une pénalité en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), aucune représentation n'a été faite sur ce sujet par ses représentants. Il est aussi à noter que cet aspect n'a pas été soulevé dans l'avis d'appel.

Conclusion

[14]     Les paragraphes 163(2) et 163(3) de la Loi se lisent comme suit :

(2) Faux énoncés ou omissions - Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse (appelé « déclaration » au présent article) rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d'imposition pour l'application de la présente loi, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d'une pénalité égale, sans être inférieure à 100 $, à 50 % du total des montants suivants :

...

(3) Charge de la preuve relativement aux pénalités - Dans tout appel interjeté, en vertu de la présente loi, au sujet d'une pénalité imposée par le ministre en vertu du présent article, le ministre a la charge d'établir les faits qui justifient l'imposition de la pénalité.

[15]     En ce qui concerne l'avoir net établi par le vérificateur du Ministre, comme il n'y a pas eu d'éléments de preuve valables présentés à son encontre, il me faut donc conclure que selon la prépondérance de la preuve, cet avoir net a été correctement établi et que les nouvelles cotisations du Ministre ont été correctement établies en fait et en droit.

[16]     En ce qui concerne les pénalités, aucune représentation spécifique n'a été faite dans l'avis d'appel à ce sujet. Cependant, nous sommes ici en procédure informelle et l'appelante n'est pas représentée par un avocat, je considère donc dans ces circonstances que la cotisation, incluant l'imposition de la pénalité, est contestée. L'appelante n'était pas présente lors de l'audience et n'avait pas été assignée à comparaître par l'intimée.

[17]     Le fardeau de la preuve des faits établissant l'intention trompeuse ou de circonstances indicatives de l'intention trompeuse incombe au Ministre. J'aurais préféré que l'appelante soit assignée à venir témoigner lors de l'audience sur l'imposition de la pénalité car l'appelante était le témoin principal pour cette preuve. Toutefois, l'agent du Ministre qui a établi le revenu par avoir net est venu expliquer à la Cour sur quoi il s'était appuyé pour l'établir. Il a aussi demandé des explications à l'appelante qui n'a jamais répondu. Dans ces circonstances et vu la différence substantielle entre le revenu déclaré initialement et le revenu additionnel établi à partir de données objectives, je suis d'avis que le Ministre s'est déchargé de son fardeau de preuve concernant l'imposition des pénalités.

[18]     Les appels sont en conséquence rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 20e jour d'août, 1998.

« Louise Lamarre Proulx »

J.C.C.I.


No DU DOSSIER DE LA COUR :       98-341(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Georgette Tremblay et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 22 juillet 1998

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        l'honorable juge Louise Lamarre Proulx

DATE DU JUGEMENT :                    le 20 août 1998

COMPARUTIONS :

Pour l'appelante :                       Marc André Plante (représentant)

Pour l'intimée :                          Me Alain Gareau

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

Pour l'appelante :

                   Nom :          

                   Étude :                  

Pour l'intimé(e) :                        Morris Rosenberg

                                                Sous-procureur général du Canada

                                                Ottawa, Canada

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