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Dossier : 2002 3291(GST)I

 

ENTRE :

3859681 CANADA INC.,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu avec les appels de 3859681Canada Inc. (2002‑3293(GST)I) et Zellers Inc. (2002‑3294(GST)I) le 27 mai 2003 à Toronto (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge Diane Campbell

 

Comparutions

 

Avocats de l’appelante :

MBradley E. Berg et

MAllan Gelkopf

 

Avocat de l’intimée :

MJohn McLaughlin

 

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise dont l’avis est daté du 17 août 2001 et porte sur la période allant du 28 février 1999 au 3 avril 1999 est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux termes des motifs du jugement ci‑joints.

 

          Le présent appel ayant été entendu avec les appels de 3859681 Canada Inc. (2002‑3293(GST)I) et Zellers Inc. (2002‑3294(GST)I), seul un mémoire de dépens est accordé.

 

 

Signé à Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), ce 24jour de juillet 2003.

 

 

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16jour de février 2004.

 

 

 

 

Sylvie Sabourin, traductrice


 

 

 

 

Dossier : 2002‑3293(GST)I

 

ENTRE :

3859681 CANADA INC.,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

___________________________________________________________________

 

Appel entendu avec les appels de 3859681 Canada Inc. (2002‑3291(GST)I) et Zellers Inc. (2002‑3294(GST)I) le 27 mai 2003 à Toronto (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge Diane Campbell

 

Comparutions

 

Avocats de l’appelante :

MBradley E. Berg et

MAllan Gelkopf

 

Avocat de l’intimée :

MJohn McLaughlin

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise dont l’avis est daté du 22 août 2001 et porte sur la période allant du 27 février 2000 au 1er avril 2000 est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux termes des motifs du jugement ci‑joints.

 

          Le présent appel ayant été entendu avec les appels de 3859681 Canada Inc. (2002‑3291(GST)I) et Zellers Inc. (2002‑3294(GST)I), seul un mémoire de dépens est accordé.

 

 

Signé à Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), ce 24jour de juillet 2003.

 

 

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16jour de février 2004.

 

 

 

 

 

Sylvie Sabourin, traductrice


 

 

 

 

Dossier : 2002‑3294(GST)I

 

ENTRE :

ZELLERS INC.,

 

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

 

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu avec les appels de 3859681 Canada Inc. (2002‑3291(GST)I) et (2002‑3293(GST)I) le 27 mai 2003 à Toronto (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge Diane Campbell

 

Comparutions

 

Avocats de l’appelante :

MBradley E. Berg et

MAllan Gelkopf

 

Avocat de l’intimée :

MJohn McLaughlin

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise dont l’avis est daté du 8 août 2001 et porte sur la période allant du 1er février 1999 au 30 avril 2000 est accueilli et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation conformément aux termes des motifs du jugement ci‑joints.

 

          Le présent appel ayant été entendu avec les appels de 3859681 Canada Inc. (2002‑3291(GST)I) et (2002‑3293(GST)I), seul un mémoire de dépens est accordé.

 

 

Signé à Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), ce 24jour de juillet 2003.

 

 

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 16jour de février 2004.

 

 

 

 

 

Sylvie Sabourin, traductrice


 

 

 

 

Référence : 2003CCI501

Date : 20030724

Dossiers : 2002‑3291(GST)I

2002‑3293(GST)I

2002‑3294(GST)I

ENTRE :

3859681 CANADA INC.,

ZELLERS INC.,

appelantes,

Et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Campbell

 

Contexte et question

 

[1]     Les trois appels en question ont été entendus ensemble en vertu de la procédure informelle. Aucun témoin n’a été appelé, et les avocats de chacune des parties n’ont présenté que des observations.

 

[2]     Les appelantes sont des sociétés inscrites en vertu des lois fédérales du Canada. Elles sont exploitées dans tout le Canada sous forme de grands magasins exploités sous le nom « Zellers Stores ». Zellers mute régulièrement des employés d’une région du pays à l’autre. Cela constitue un élément habituel de son fonctionnement en tant que vendeur au détail de masse. Pour aider les employés à déménager, Zellers leur rembourse leurs dépenses directes ou réelles de déménagement (comme le camion de déménagement, les dépenses de déplacement). En outre, Zellers verse une indemnité aux employés réinstallés s’élevant à 10 p. 100 de leur salaire de l’année précédente, sans les bonus. Le paragraphe 8 suivant, reproduit ci‑dessous, se trouvant dans chacun des avis d’appel énumère les coûts supplémentaires devant être couverts par cette indemnité de 10 p. 100 :

 

                   [Traduction]

 

[...] le coût de l’immatriculation des véhicules ou de l’obtention de permis dans une nouvelle province, l’installation du téléphone, les services de connexion à Internet, de câble et de satellite; les frais de branchement pour l’électricité, l’eau, le gaz et autres services publics, les achats de nourriture, de peinture, de bois de chauffage et de produits de nettoyage qui ne peuvent être transportés de l’ancienne résidence, le transport et l’hébergement d’animaux familiers, les services temporaires d’aides ménagères, le coût des uniformes scolaires en double si les enfants sont réinstallés en cours d’année scolaire, le débranchement et le branchement de la cuisinière, du réfrigérateur, de la machine à laver, de la sécheuse, du lave‑vaisselle, les services de nettoyage et de réparations mineures des propriétés, ancienne et nouvelle, la conversion des appareils électriques ou au gaz pour répondre aux exigences de la nouvelle région, les rideaux et les revêtements de sol, l’envoi de biens précieux ou de collection et le transport de véhicules de plaisance. 

 

[3]     Les avocats des appelantes et de l’intimée ont convenu que les montants de 10 p. 100 payés à ces employés constituent des indemnités et que le montant desdites indemnités est raisonnable. Ils ont également convenu que ces indemnités de déménagement sont imposables pour l’employé aux fins de l’impôt sur le revenu conformément à l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu et que, en tant que telles, elles sont incluses sur le formulaire T4 de l’employé.

 

[4]     Chaque appelante, étant l’employeur, a déposé une demande de remboursement en vue de recouvrer les crédits d’impôt sur le revenu en matière de TPS. Elles ont déposé ces demandes conformément aux articles 169 et 174 de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi ») en se fondant sur le fait qu’en leur qualité d’employeur, elles étaient réputées avoir payé la TPS liée aux indemnités de déménagement. Le ministre a rejeté les demandes de remboursement d’impôt au motif que les indemnités de déménagement versées aux employés constituaient des dépenses personnelles encourues par les employés et que les fournitures n’avaient aucun lien avec les activités poursuivies par les appelantes conformément au sous‑alinéa 174a)(i) de la Loi.

 

[5]     La question est celle de savoir si les appelantes ont le droit de demander des crédits de taxe sur les intrants (CTI) conformément à l’article 174 de la Loi concernant lesdits déménagements des employés et en particulier celle de savoir si la fourniture de biens ou de services acquis par les employés dans le cadre du déménagement était liée aux activités poursuivies par l’employeur, Zellers, conformément au sous‑alinéa 174a)(i) de la Loi. L’intimée soutient également que l’article 170 et, en particulier l’alinéa 170(1)b) de la Loi, empêche toute admissibilité à des crédits de taxe sur les intrants concernant ces indemnités.

 

Observations des appelantes et de l’intimée

 

[6]     L’intimée soutient que les articles 169, 170 et 174 fournissent le cadre législatif dans lequel ces questions doivent être examinées. L’article 169 prévoit la règle générale et la formule pour déterminer le droit aux CTI. D’après ce que je comprends de l’argument de l’intimée, Zellers a un problème pour faire tomber sa demande de CTI sous le coup de l’article 169, étant donné que ces dépenses n’étaient pas destinées à la consommation, à l’utilisation ou à la fourniture dans le cadre de ses activités commerciales. L’article 169 commence par les mots « Sous réserve des autres dispositions de la présente partie ». Cela est approprié car il existe d’autres dispositions qui peuvent avoir un effet sur une demande pour obtenir ces crédits. L’article 174 est l’une d’entre elles; une portion de cet article comporte des dispositions déterminatives. L’intimée soutenait que si nous abrogions l’article 174 pendant un moment, Zellers n’aurait pas le droit de demander les CTI pour dépenses personnelles, car l’article 169 détermine l’admissibilité aux CTI sur la base de la question de savoir si le bien ou le service a été consommé, utilisé ou fourni dans le cadre d’activités commerciales de Zellers. L’intimée soutenait que malgré les dispositions déterminatives de l’article 174, il n’accorde pas à Zellers le droit de demander les CTI liés aux dépenses de déménagement qui sont largement de nature personnelle. L’intimée soutenait que l’article 174 est le seul véhicule grâce auquel Zellers pourrait demander les CTI en vertu de l’article 169, puisqu’elle n’avait pas acquis les fournitures directement ou payé directement les taxes qui leur étaient applicables, et qu’en particulier, elle ne les avait pas utilisées dans le cadre de ses activités commerciales. L’article 174 contient un certain nombre de dispositions déterminatives mais avant d’arriver à ces dispositions, les autres exigences de l’article 174 doivent avoir été remplies. L’intimée a convenu que Zellers avait payé une indemnité aux employés réinstallés et que tous ou presque tous ces articles étaient des fournitures imposables. Cependant, l’intimée soutenait qu’il doit exister un critère de relation ou de lien qui lierait directement la fourniture pour laquelle la taxe est payée aux activités commerciales ou d’affaires de Zellers. L’intimée soutenait que des articles comme la connexion à Internet, celle du câble ou les rideaux ne sont manifestement pas liés aux activités commerciales de Zellers mais sont destinées à l’utilisation personnelle et à la jouissance exclusive des employés de Zellers ayant été réinstallés. Par conséquent, selon l’intimée, il n’est pas satisfait aux exigences de l’article 169. Parce que l’article 174 est le seul article que l’appelante peut utiliser pour tomber sous le coup de l’article 169 pour demander les CTI, elle n’a pas prouvé sa cause, puisque les articles liés aux dépenses de déménagement sur lesquels la TPS a été payée par les employés sont strictement personnels à ces derniers. Par conséquent, selon l’intimée, l’article 174 ne s’applique pas.

 

[7]     Le but de l’article 174 est de réputer que certaines choses sont des réalités. L’intimée soutient qu’avant de pouvoir en arriver aux dispositions déterminatives de l’article 174, il faut répondre aux exigences du sous‑alinéa 174a)(i). Cependant, en l’espèce, ce n’est pas le cas, puisque les dépenses de déménagement sont de nature personnelle pour les employés et n’ont aucun lien avec les activités commerciales de l’employeur. Par conséquent, selon l’argument de l’intimée, on n’en arrive jamais aux dispositions déterminatives des alinéas d) et e) de l’article 174 car toutes les exigences prévues aux alinéas a), b) et c) de l’article 174 n’ont pas été remplies. Comme il n’existe aucun lien entre les dépenses personnelles engagées par les employés et les activités commerciales de Zellers, les exigences prévues par les alinéas 174a), b) et c) et en particulier le sous‑alinéa 174a)(i) ne sont pas remplies, ce qui empêche l’application des dispositions déterminatives de l’article 174. Sans l’article 174, soutient l’intimée, les appelantes ne sont pas admissibles aux CTI en vertu de la Partie 9 de la Loi ou plus particulièrement, en vertu de l’article 169.

 

[8]     L’intimée soutient que, même si la Cour est persuadée que l’article 174 s’applique, l’alinéa 170(1)b) refuse le CTI. L’intimée avance que l’alinéa 170(1)b) déclare simplement qu’il n’existe aucun CTI concernant toute fourniture sur laquelle la taxe est versée lorsque la fourniture est exclusivement prévue pour la consommation, l’utilisation ou la jouissance personnelle de l’employé. En l’espèce, l’intimée soutenait que toutes les dépenses sont manifestement engagées en vue de l’utilisation personnelle exclusive des employés. Elle a ajouté que l’article 170 prévoit deux exceptions dans ses sous‑alinéas (1)b)(i) et (1)b)(ii). Celui qui est applicable en l’espèce est le sous‑alinéa 170(1)b)(ii). Pour déterminer si l’exception prévue au sous‑alinéa 170(1)b)(ii) permet d’accorder un CTI, l’intimée a soutenu qu’il faut également examiner l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Selon l’argument de l’intimée, le sous‑alinéa 170(1)b)(ii), qui permettrait d’accorder un CTI, ce qui ne serait pas possible autrement, ne s’applique que si un employé ne doit pas inclure dans son revenu cette somme particulière conformément à l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu. La Loi de l’impôt sur le revenu est donc pertinente aux fins de l’alinéa 170(1)b) car nous devons examiner cette Loi afin de déterminer si l’exception permettra l’octroi d’un CTI. Selon l’intimée, le sous‑alinéa 170(1)b)(ii) permet d’accorder un CTI à condition qu’un employé ne soit pas obligé d’inclure quelque avantage que ce soit en vertu de l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu, lorsqu’il calcule son revenu en vertu de cette Loi. En l’espèce, les employés n’incluent pas les indemnités dans leur revenu conformément à l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[9]     L’appelante soutient que toutes les conditions de l’article 174 sont réunies, c’est‑à‑dire celles des alinéas 174a), b) et c), qui à leur tour déclenchent les dispositions déterminatives qui permettent à Zellers de demander les CTI en vertu de l’article 169. Une fois que Zellers tombe sous le coup de l’article 174, ces dispositions déterminatives s’appliqueront aux fins de l’ensemble de la partie 9 de la Loi. Les appelantes soutiennent que les exigences imposées par le sous‑alinéa 174a)(i) ont été remplies. Naturellement, c’est la dernière phrase de cet alinéa « ... relativement à des activités qu’elle exerce » qui est en cause. Les avocats des appelantes soutiennent que la réinstallation des employés fait partie intégrante du succès des opérations commerciales de Zellers et qu’en tant que telles, les indemnités versées aux employés pour les aider à déménager sont engagées dans le cadre des activités commerciales de Zellers. Cela place Zellers, selon l’appelante, dans les limites d’application des dispositions déterminatives de l’article 174. Selon le fonctionnement desdites dispositions déterminatives, Zellers serait réputée avoir reçu la fourniture de biens ou de services conformément à la première phrase de l’article 174 et serait également réputée avoir consommé ou utilisé les biens ou les services conformément à l’alinéa 174d) et, enfin, serait réputée avoir payé les taxes sur ledit bien ou service conformément à l’alinéa 174e).

 

[10]    L’appelante soutient que le versement de cette indemnité, dans le cadre des dépenses de déménagement de l’employé, est essentiel pour le succès des opérations commerciales de Zellers, et c’est la raison pour laquelle les indemnités sont engagées dans le cadre des activités commerciales de Zellers. L’appelante soutient que, par conséquent, Zellers a le droit de demander les CTI à l’égard desdites indemnités de déménagement conformément à l’article 174 et à l’alinéa 169(1)c). L’appelante a également soutenu que le ministre a erré dans son application de l’alinéa 170(1)b) en refusant les demandes de remboursement lorsque, grâce à l’Avis de décision du 24 mai 2002, Zellers a été informée que cet  alinéa motivait le refus des CTI en raison du fait que la fourniture avait été engagée personnellement par les employés dans le cadre de leur déménagement. Puisque les indemnités ont été engagées dans le cadre des activités commerciales de Zellers, les exigences imposées par les alinéas 174a), b) et c) sont remplies. Par conséquent, conformément aux alinéas 174d) et e), Zellers est réputée avoir reçu et consommé ou utilisé une fourniture de biens ou de services et avoir payé la TPS sur ces indemnités de déménagement. Rien, dans l’article 174 ne soumet ces dispositions déterminatives à quelque autre article de la Loi que ce soit. Selon l’appelante, l’intimée a erré dans son application de l’alinéa 170(1)b) car les dispositions déterminatives de l’article 174 ont pour but d’enlever tout élément personnel qui pourrait être attribué à l’employé en vertu de l’alinéa 170(1)b).

 

Analyse

 

[11]    La disposition essentielle ici est l’article 174. Il contient les dispositions déterminatives qui relient directement l’employeur à la fourniture pour qu’il – en l’occurrence Zellers – puisse demander les CTI en vertu de l’article 169 comme s’il avait consommé, utilisé ou joui directement de la fourniture. Si les exigences des alinéas a), b) et c) de l’article 174 sont remplies, les dispositions déterminatives prévues aux alinéas d) et e) de l’article 174 entrent en jeu, réputant l’employeur, et non pas l’employé, avoir reçu la fourniture de biens ou de services et payé la TPS sur ce montant. La question de savoir si ces dispositions déterminatives devraient s’appliquer en l’espèce dépend de celle de savoir si les conditions prévues aux alinéas a), b) et c) de l’article 174 sont réunies préalablement. Si c’est le cas, les dispositions déterminatives entrent en jeu, permettant à un employeur de demander les CTI. Les parties pertinentes de l’article 174, en ce qu’elles ont trait aux faits de l’espèce, sont les suivantes :

 

Pour l'application de la présente partie

 

a) la personne verse une indemnité à l'un de ses salariés

           

[...]

 

(i)  soit pour des fournitures dont la totalité, ou presque, sont des fournitures taxables, sauf des fournitures détaxées, de biens ou de services que le salarié, l'associé ou le bénévole a acquis au Canada relativement à des activités qu'elle exerce,

          (Je souligne.)

 

[...]

 

                        De plus:

 

d) toute consommation ou utilisation du bien ou du service par le salarié, l'associé ou le bénévole est réputée effectuée par la personne et non par l'un de ceux‑ci;

 

e) la personne est réputée avoir payé, au moment du versement de l'indemnité et relativement à la fourniture, une taxe égale au résultat du calcul suivant :

 

A x B

 

où :

 

[...]

 

 

 

[12]    L’intimée soutient que les conditions prévues par le sous‑alinéa 174a)(i) ne sont pas réunies puisque les faits sont liés à la phrase suivante :

 

[...] relativement à des activités qu’elle exerce,

 

Il a été convenu que les autres conditions imposées par le présent article sont remplies.

 

[13]    En résumé, dans les présents appels, seul l’alinéa 174a) s’applique aux faits et c’est seulement la dernière phrase du sous‑alinéa 174a)(i) qui est en litige. Si l’appelante a réussi à me convaincre que les conditions prévues par la phrase litigieuse du sous‑alinéa 174a)(i) sont remplies, nous passons alors aux dispositions déterminatives de l’article 174 énoncées aux alinéas d) et e). Si les conditions prévues par le sous‑alinéa 174a)(i) sont réunies, la première phrase de l’article 174 répute Zellers avoir reçu la fourniture de biens ou de services; l’alinéa 174d) répute Zellers les avoir consommés ou utilisés et l’alinéa 174e) répute Zellers avoir payé la taxe.

 

[14]    L’indemnité de déménagement est payée aux employés afin qu’ils puissent acheter certains articles nécessaires en raison du déménagement. Ces articles font l’objet de la TPS. Zellers a payé la TPS au moyen du paiement de l’indemnité à ses employés. Étant donné que les conditions litigieuses prévues par le sous‑alinéa 174a)(i) sont remplies, ces dispositions déterminatives permettraient à Zellers de demander les CTI puisqu’une portion de l’indemnité représenterait la TPS. La première étape est donc de déterminer si les conditions du sous‑alinéa 174a)(i) sont remplies. Encore une fois, ce ne sont que les quelques derniers mots du sous‑alinéa 174a)(i) qui sont en litige.

 

[15]    L’intimée a soutenu que cette condition n’est pas remplie, car l’indemnité a été utilisée par les employés pour acheter des articles qui servent exclusivement à leur consommation personnelle. L’appelante a soutenu que la réinstallation des employés et le paiement des indemnités faisaient partie intégrante des pratiques commerciales de Zellers et qu’elles avaient, par conséquent, eu lieu dans le cadre des activités commerciales de Zellers.

 

[16]    Je suis d’accord avec les observations des appelantes aux termes desquelles les promotions et les relocalisations d’employés dans d’autres régions géographiques vont de pair. Ces éléments sont essentiels à la croissance et à la viabilité économique de ce vendeur à l’échelle nationale. De telles indemnités cultivent de bonnes relations entre employeur et employé, permettant la mobilité ascendante au sein de l’organisation bien qu’au prix d’un déménagement. Chaque employé était remboursé des dépenses directes liées à un tel déménagement et il recevait également une indemnité s’élevant à 10 p. 100 de son salaire pour couvrir les dépenses qui ne pouvaient pas être facturées directement. Je suis d’accord avec l’appelante sur le fait que cela ne représente pas un avantage personnel ou indirect. Le système de rémunération des cadres supérieurs est conçu pour effacer les effets du déménagement sur les employés. Plus important encore, je suis d’accord sur le fait que Zellers tire un avantage certain de la promotion d’employés méritants tout en les incitant à demeurer au sein de la société en payant ce qui les remettrait approximativement dans la même position financière qu’avant le déménagement. La promotion des employés pourrait très bien dépendre de leur déménagement, peut‑être dans un endroit qu’ils n’auraient pas choisi. Il existe ici un élément de réciprocité, et Zellers tire manifestement un avantage du fait que ses employés demeurent au sein de la société et acceptent de déménager.

 

[17]    Du point de vue des employés, s’ils souhaitaient une promotion et acceptaient de déménager, ils se retrouvaient tout simplement dans la même position financière que celle précédant le déménagement. Cela était accompli grâce au remboursement des dépenses directes de déménagement et au versement d’une indemnité particulière pour les genres de dépenses énumérés au paragraphe 8 de la Réponse à l’avis d’appel. Cela ne peut jamais totalement indemniser un employé pour les bouleversements apportés dans sa vie par un déménagement, qui souvent pouvait être un déménagement dans un endroit moins souhaitable du point de vue de l’employé. Puisque le déménagement fait partie intégrante du fonctionnement de la société, Zellers doit veiller à la continuité de la direction dans des emplacements géographiques qui pourraient être moins attirants, grâce au versement de ces indemnités. Cela garantit la viabilité, l’essor et la santé renouvelés de la société. Zellers considérerait certainement le versement de ces indemnités comme une condition préalable à la rétention du personnel essentiel et comme la clé de sa future stabilité économique. Je conclus que ces indemnités sont directement liées au fonctionnement de Zellers. Elles ne font qu’approfondir le dévouement et la loyauté des employés et elles aident à cultiver de meilleures relations à long terme entre les employés et l’employeur. 

 

[18]    Les avocats de l’appelante m’ont renvoyé à la décision concernant la TPS 11650‑7, intitulée Input Tax Credit Entitlement and Removal Expenses (droit au crédit de taxe sur les intrants et frais de déménagement) (émise le 16 février 1996). Cette décision porte sur l’article 175 et non l’article 174. L’article  75 porte sur les remboursements effectués par les employeurs des dépenses des employés, plus particulièrement les honoraires juridiques et les commissions des agents immobiliers mais ne traite pas des indemnités. Cependant, la structure des deux articles, l’article 174 et l’article 175, est similaire. La décision disait qu’un employeur devrait être en mesure de demander les CTI pour les remboursements de dépenses de réinstallation engagées par ses employés conformément aux articles 169 et 175. L’ADRC a décidé que ces remboursements seraient considérés comme ayant été effectués dans le cadre des activités commerciales de l’inscrit. L’appelante a soutenu que cette décision visait directement la question en litige. L’intimée distinguait cette décision sur la base du fait qu’elle traitait de remboursements et non d’indemnités. Je suis d’accord avec l’intimée sur le fait que cette décision porte sur un article (article 175) totalement différent et sur un sujet (remboursements) également totalement différent.

 

[19]    Je conclus que Zellers verse ces indemnités aux employés réinstallés relativement à ses activités commerciales. Les exigences imposées par l’alinéa 174a)(i) ont donc été remplies, et les dispositions déterminatives sont maintenant applicables aux fins de la partie 9 de la Loi. La première phrase de l’article 174 (« Pour l’application de la présente partie ») est un renvoi à la partie 9 de la Loi et dicte la portée de l’application de ces dispositions déterminatives.

 

[20]    Les avocats de l’appelante m’ont renvoyé à des commentaires faits par Driedger (Sullivan and Driedger on the Construction of Statutes, quatrième édition, par Ruth Sullivan, Butterworths) à propos des dispositions déterminatives. À la page 69, Driedger déclare ceci :

 

                   [Traduction]

 

            Lorsque « répute » est utilisé pour créer une fiction juridique, la fiction ne peut pas être réfutée. Les faits tels qu’ils sont déclarés par le pouvoir législatif gouvernent même malgré des preuves irréfutables du contraire. La difficulté qui survient concernant l’interprétation des fictions juridiques est celle de déterminer leur portée.

 

[21]    Dans les faits de l’espèce, il est clair que c’étaient les employés relocalisés qui recevaient la connexion au câble, par exemple, et non Zellers, l’employeur. Cependant, les dispositions déterminatives fonctionnent pour créer la fiction juridique qui permet à Zellers de demander les CTI.

 

[22]    Les dispositions déterminatives de l’article 174 créent une fiction juridique selon laquelle l’employeur, Zellers, et non l’employé, utilise l’indemnité de déménagement pour payer directement les biens et les services et que c’était Zellers, et non l’employé, qui consommait ou utilisait les biens ou les services. Par conséquent, conformément à la première phrase de l’article 174 et à l’alinéa 174d), c’est Zellers qui est réputée être la bénéficiaire de la fourniture de biens ou de services, et non l’employé. L’alinéa 174e) répute ensuite Zellers avoir payé la taxe sur les biens ou les services. L’article 169, qui permet à un inscrit de demander les CTI, commence avec la phrase « Sous réserve des dispositions de la présente partie ». Je conclus que cela signifie en fait « sous réserve de tout le reste que renferme la partie 9 », qui inclurait les dispositions déterminatives prévues par l’article 174.

 

[23]    Je crois que cela suffit pour trancher les présents appels et pour les accueillir et les déférer au ministre pour nouvelle cotisation. Cependant, l’avocat de l’intimée a présenté des observations concernant l’alinéa 170(1)b) qui, à mon avis, devraient être examinées.

 

[24]    L’Avis de décision du ministre daté du 24 mai 2002 notifiait la décision suivante :

 

[Traduction]

 

Votre droit est fondé sur l’article 174 de la Loi sur la taxe d’accise qui permet à un inscrit de demander le CTI dans une proportion égale à 7/107 pour certaines indemnités. Après examen plus approfondi, il s’avère que l’alinéa 170(1)b) refuse l’admissibilité à un CTI si la fourniture est utilisée dans un but personnel par un dirigeant ou un employé. L’indemnité de déménagement en litige était accordée pour couvrir les dépenses personnelles d’un dirigeant ou d’un employé ayant déménagé. Ces dépenses incluent, par exemple, les uniformes scolaires, les connexions personnelles au câble et au téléphone ainsi qu’un grand nombre d’autres articles personnels.

 

[25]    Rien, dans le libellé de l’article 174, ne le subordonne (et en particulier les dispositions déterminatives qu’il contient) à tout autre article ou disposition que ce soit de la Loi. Il opère dans les limites de la partie 9 de la Loi et, ayant conclu que Zellers répond aux exigences prévues par l’article 174, les dispositions déterminatives entrent en jeu pour faire en sorte que Zellers soit réputée être la bénéficiaire de la fourniture et la consommatrice ou l’utilisatrice de ladite fourniture et celle qui a payé la taxe. L’avocat de l’intimée a soutenu que l’article 170 doit être interprété en corrélation avec l’article 174.

 

[26]    L’intimée a soutenu ceci :

 

                   [Traduction]

 

[...] la disposition déterminatives ne fait ni disparaître, ni ne change le fait que ce sont toujours des services de connexion du câble, des services Internet, de l’aide ménagère ou des uniformes scolaires. Ce sont toujours des dépenses de type personnel, qui ne sont pas admissibles aux crédits de taxe sur les intrants en vertu de la partie 9 de la Loi sur la taxe d’accise, plus particulièrement l’article 169 de la Loi sur la taxe d’accise, sans même renvoyer à l’article 170 que nous examinerons plus avant.

(transcription, pages 49 et 50)

 

[27]    L’intimée ajoute que, parce que ces indemnités de déménagement sont incluses comme avantages imposables pour les employés conformément à l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu, nous devons examiner l’alinéa 170(1)b). Cet article prévoit un certain nombre de restrictions à la demande des CTI en ce qui concerne la fourniture pour laquelle la taxe a été payée lorsque ladite fourniture est achetée exclusivement en vue de sa consommation, de son utilisation ou de sa jouissance par l’employé lui‑même. Selon l’exigence posée par l’alinéa 170(1)b), la fourniture doit être acquise en vue de la consommation ou de l’utilisation personnelle et exclusive par un employé. L’intimée a soutenu qu’en l’espèce, tous les articles étaient manifestement et exclusivement achetés en vue de la consommation personnelle des employés. L’intimée m’a renvoyée à la définition du terme « exclusif » se trouvant à l’alinéa 123(1)a) de la Loi :

 

« exclusif » S'entend,

 

dans le cas des personnes autres que les institutions financières, de la totalité, ou presque, de la consommation, de l'utilisation ou de la fourniture d'un bien ou d'un service et, dans le cas des institutions financières, de la totalité de pareille consommation, utilisation ou fourniture;

 

[28]    Le paragraphe 123(1) a défini le terme « exclusif » ainsi : « la totalité, ou presque ». Alors que l’ADRC a interprété cette définition comme signifiant 90 p. 100 ou plus, la Cour n’est pas liée par cette interprétation ministérielle.

 

[29]    Si nous retournons, comme le souhaite l’intimée, à l’alinéa 170(1)b), selon son argument, en incorporant cette définition et en relisant le libellé de l’alinéa 170(1)b), comme la taxe est payée par l’employé pour ces articles en vertu de l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu (les parties ont convenu qu’ils sont inclus comme avantages imposables) et que la fourniture est acquise exclusivement en vue de l’utilisation personnelle par l’employé, Zellers ne peut présenter de demande de CTI. Il existe deux exceptions à l’alinéa 170(1)b) énumérées aux sous‑alinéas (1)b)(i) et (1)b)(ii). Seul le sous‑alinéa (1)b)(ii) s’applique en l’espèce, et il prévoit qu’un CTI peut être demandé à condition qu’il n’existe aucun montant payable par l’employé concernant un avantage imposable en vertu de l’article 6 de la Loi de l’impôt sur le revenu. Naturellement, je suis d’accord avec l’intimée sur le fait que l’article 6 est pertinent pour l’application de l’alinéa 170(1)b) en vue de déterminer si un CTI peut être payé. Je suis également d’accord sur le fait que le Parlement avait l’intention de refuser les CTI pour tout article destiné exclusivement à l’utilisation, à la consommation ou à l’emploi personnel par l’employé dans le contexte de cet article. 

 

[30]    J’ai cependant conclu que c’est l’article 174 qui s’applique aux faits de l’espèce et non l’article 170 et que, comme les exigences du sous‑alinéa 174a)(i) sont remplies, cela déclenche automatiquement les dispositions déterminatives prévues par les alinéas 174d) et e). Les dispositions déterminatives permettent à Zellers de demander les CTI sans aller plus loin. Je pense que cet article a été précisément inclus dans la partie 9 de la Loi précisément pour faire face au type d’affaire que je dois trancher. Une fois les dispositions déterminatives engagées, l’article 174 s’applique, un point c’est tout. Il n’existe aucune consommation, utilisation ou jouissance personnelle qui se rapporte à l’article 170. L’article 170 ne s’applique tout simplement pas ici.

 

[31]    L’intimée, dans un argument subsidiaire, a soutenu que, si je concluais que les exigences du sous alinéa 174a)(i) étaient remplies, alors [Traduction] « ... la disposition déterminatives ne va pas jusqu’à enlever l’élément inhérent de “consommation personnelle” de cette dépense » (observations de l’intimée, paragraphe 16). L’intimée fait une interprétation complètement erronée de ces dispositions déterminatives. Si elle avait raison, dans tous les sens du terme, il n’y aurait aucune raison d’inclure les dispositions déterminatives dans l’article.

 

[32]    Et, enfin, les avocats des appelantes m’ont renvoyé à la décision BJ Services Company Canada et al. v. The Queen, [2002] G.S.T.C. 124 (C.C.I.) qui traitait des frais engagés pour des conseils commerciaux particuliers et des frais juridiques après un regroupement d’entreprises. Cette décision n’était pas particulièrement utile car, non seulement elle portait sur des dépenses complètement différentes de celles de l’espèce, mais elle était centrée sur des articles de la Loi complètement différents.

 

[33]    L’avocat de l’intimée a renvoyé à la décision Procureur général du Canada c. MacDonald, C.A.F., nA‑1523‑92, 23 mars 1994 (94 DTC 6262). Cette affaire peut être considérée comme distincte car elle portait sur des subventions ou des indemnités au logement que je considère comme un genre d’indemnités totalement différent de celles versées en l’espèce.

 

[34]    En résumé, une fois que les exigences de l’article 174 sont remplies, les dispositions déterminatives entrent en jeu. Elles ne peuvent être plus claires. Il n’existe aucun doute quant à l’intention, et l’alinéa 170(1)b) ne peut s’appliquer aux présents appels.

 

[35]    Les appels sont accueillis avec un seul mémoire de dépens et sont déférés au ministre pour nouvelle cotisation et nouvel examen en tenant compte du fait que les appelantes ont le droit de demander les CTI pour les indemnités de déménagement versées aux employés, conformément aux articles 174 et 169 de la Loi.

 

Signé à Charlottetown (Île‑du‑Prince‑Édouard), ce 24jour de juillet 2003.

 

 

 

« Diane Campbell »

Juge Campbell

 

Traduction certifiée conforme

ce 16jour de février 2004.

 

 

 

 

 

Sylvie Sabourin, traductrice


 

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