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Dossier : 2001-3832(IT)G

ENTRE :

LENESTER SALES LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Sushi Sales Limited

(2001-3852(IT)G) les 21, 22 et 23 juillet 2003 à Toronto (Ontario)

Par : L'honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

Comparutions

Avocats de l'appelante :

Me Clifford L. Rand et

Me Susan Thomson

Avocats de l'intimée :

Me Peter M. Kremer, c.r., et

Me Carole Benoit

____________________________________________________________________

JUGEMENT

L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est accueilli avec dépens et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que l'appelante n'était ni contrôlée par Giant Tiger Stores Limited, ni associée avec Giant Tiger Stores Limited ou toute autre société avec laquelle Giant Tiger Stores avait une convention de franchise et n'était, par conséquent, pas obligée d'imputer quelque portion que ce soit de son plafond des affaires à toute autre société que ce soit aux fins du calcul de sa déduction accordée aux petites entreprises en vertu de l'article 125 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2003.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de février 2004.

Sylvie Sabourin, traductrice


Dossier : 2001-3852(IT)G

ENTRE :

SUSHI SALES LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Lenester Sales Ltd. (2001-3852(IT)G) les 21, 22 et 23 juillet 2003 à Toronto (Ontario)

Par : L'honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

Comparutions

Avocats de l'appelante :

Me Clifford L. Rand et

Me Susan Thomson

Avocats de l'intimée :

Me Peter M. Kremer, c.r., et

Me Carole Benoit

JUGEMENT

L'appel interjeté à l'encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est accueilli avec dépens et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que l'appelante n'était ni contrôlée par Giant Tiger Stores Limited, ni associée avec Giant Tiger Stores Limited ou toute autre société avec laquelle Giant Tiger Stores avait une convention de franchise et n'était, par conséquent, pas obligée d'imputer quelque portion que ce soit de son plafond des affaires à toute autre société que ce soit aux fins du calcul de sa déduction accordée aux petites entreprises en vertu de l'article 125 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2003.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de février 2004.

Sylvie Sabourin, traductrice


Référence : 2003CCI531

Date : 20030731

Dossier : 2001-3832(IT)G

ENTRE :

LENESTER SALES LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

ET ENTRE :

Dossier : 2001-3852(IT)G

SUSHI SALES LIMITED,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge en chef adjoint Bowman

[1]      Les présents appels sont interjetés à l'encontre de cotisations établies pour l'année d'imposition 1997 des appelantes. Ils ont été entendus ensemble sur preuve commune.

[2]      Lenester Sales Ltd. ( « Lenester » ) exploitait un magasin Tigre Géant à Pembroke, en Ontario, sous une franchise et une licence accordées par Giant Tiger Stores Limited ( « GTS » ), une société canadienne fondée par Gordon Reid et ayant son siège social à Ottawa. Lenester est maintenant la propriété exclusive de Russell Bennett Kerr mais, en 1997, 501 de ses actions appartenaient à M. Kerr et 499 à GTS.

[3]      Sushi Sales Limited ( « Sushi » ) exploitait un magasin Tigre Géant à Campbellford, en Ontario. En 1984, 501 actions de Sushi étaient détenues par M. Havelock Bingley et 499, par GTS. En 1997, les 501 actions de M. Bingley étaient détenues par 176485 Canada Limited, une société dont les actions étaient détenues par M. Bingley et son épouse, Mabel.

[4]      La question qui se pose dans les présents appels est celle de savoir si les appelantes, qui sont toutes deux des sociétés privées sous contrôle canadien ( « SPCC » ), ont toutes deux droit à l'entière déduction accordée aux petites entreprises en vertu de l'article 125 de la Loi de l'impôt sur le revenu. En 1997, l'article 125 permettait à une SPCC de déduire, de son impôt autrement payable, 16 p. 100 du nombre le moins élevé parmi certains chiffres dont l'un était son plafond des affaires pour l'année. Il n'est pas soutenu que Lenester ou Sushi n'exploitaient pas des entreprises actives au Canada.

[5]      Le plafond des affaires est défini au paragraphe 125(2) comme 200 000 $ sauf lorsqu'une société est associée avec une autre, auquel cas il est nul, à moins que la société associée ne dépose un accord répartissant les 200 000 $ entre elle et les autres sociétés avec lesquelles elle est associée ou, en l'absence d'un tel accord, le ministre du Revenu national effectue la répartition.

[6]      En 1997, GTS possédait des conventions de franchise similaires à celles qu'elle avait avec Lenester et Sushi avec de 80 à 90 sociétés. Selon la position de la Couronne, Lenester et Sushi étaient respectivement associées avec GTS et, par conséquent, l'une avec l'autre et, naturellement, avec les autres 80 ou 90 sociétés avec lesquelles GTS avait passé des conventions de franchise. La raison est celle que des sociétés associées avec la même société sont réputées être associées entre elles.

[7]      Le fondement de l'argument selon lequel GTS et les appelantes sont associées consiste en ce que les appelantes étaient « contrôlée[s], directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit ... » par GTS au sens de l'alinéa 256(1)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[8]      Selon le paragraphe 256(5.1) :

(5.1) Pour l'application de la présente loi, lorsque l'expression « contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, » est utilisée, une société est considérée comme ainsi contrôlée par une autre société, une personne ou un groupe de personnes - appelé « entité dominante » au présent paragraphe - à un moment donné si, à ce moment, l'entité dominante a une influence directe ou indirecte dont l'exercice entraînerait le contrôle de fait de la société. Toutefois, si cette influence découle d'un contrat de concession, d'une licence, d'un bail, d'un contrat de commercialisation, d'approvisionnement ou de gestion ou d'une convention semblable - la société et l'entité dominante n'ayant entre elles aucun lien de dépendance - dont l'objet principal consiste à déterminer les liens qui unissent la société et l'entité dominante en ce qui concerne la façon de mener une entreprise exploitée par la société, celle-ci n'est pas considérée comme contrôlée, directement ou indirectement, de quelque manière que ce soit, par l'entité dominante du seul fait qu'une telle convention existe.

[9]      Les faits ne sont pas particulièrement en litige. Avant, pendant et après l'année en litige, l'entreprise GTS accordait en franchise les grands magasins d'escompte à des entrepreneurs indépendants qui les exploiteraient.    

[10]     Les conventions étaient, en gros, les suivantes : GTS louait les installations de vente puis les sous-louait aux franchisés tels que les appelantes ou si elle possédait le magasin, elle le louait au franchisé.

[11]     GTS choisissait avec soin les gens qui allaient exploiter la franchise. Ainsi, tant M. Kerr que M. Bingley possédaient de nombreuses années d'expérience de gestion de grands magasins comme Woolco ou Woolworth dans tout le Canada. Il y avait une période de formation, qui pouvait durer de six mois à deux ou trois années, pendant laquelle ils exploitaient un magasin appartenant à GTS ou loué par elle. M. Greg Farrell, le vice-président (finances) de GTS, a témoigné qu'il y avait beaucoup plus de supervision et de contrôle de l'exploitation de la part de GTS pendant la période de formation qu'après le transfert au franchisé.

[12]     Après la période de formation, M. Kerr et M. Bingley se sont vu offrir une franchise pour exploiter respectivement les magasins de Pembroke ou de Campbellford. Le déroulement des événements en l'espèce était, d'après ce que je comprends, typique de ce qui se passait pour les autres franchisés. La convention comportait un certain nombre d'aspects :

a)        la personne, comme M. Kerr et M. Bingley, acquérait auprès de GTS pour une contrepartie nominale, 501 des 1 000 actions de la société exploitante existante (Lenester ou Sushi). GTS conservait 499 actions. Un accord des actionnaires était signé par GTS, la personne (appelée le « dirigeant » dans l'accord Lenester ou le « gérant » dans l'accord Sushi) et la société (Lenester ou Sushi). Me Arnell Goldberg, un avocat, signait également en qualité de tiers convenu.

[13]     Quelques-unes des stipulations de l'accord des actionnaires devraient être soulignées. Le dirigeant devait être engagée par la société en qualité d'employé et devait considérer son emploi avec la société comme un emploi à temps plein. Sa rémunération devait être déterminée de temps en temps par le conseil d'administration.

[14]     Il devait y avoir deux administrateurs, l'un nommé par GTS et l'autre par le dirigeant. Les actionnaires ont convenu de voter leurs actions à cet effet. Il ne devait y avoir aucune voix prépondérante.

[15]     Il y avait une clause ultimatum typique permettant à l'un des actionnaires de vendre ses actions à l'autre qui devait, soit accepter soit présenter la même offre de vente à l'autre.

[16]     Dans l'accord Sushi, la clause ultimatum est quelque peu différente mais le résultat est le même. Qui plus est, il prévoit qu'au cas où il existerait un désaccord entre les administrateurs ou les actionnaires à propos de la direction de la société, chaque actionnaire peut convoquer une réunion générale pour adopter une résolution visant à dissoudre la société.

b)       La deuxième partie de la convention est la franchise par laquelle GTS accorde une franchise au franchisé (Lenester ou Sushi). Les sections III et IV de l'accord Lenester sont ainsi libellées :

                   [traduction]

SECTION III - OCTROI DE FRANCHISE

3.1        Sous réserve des conditions prévues par le présent accord, le franchiseur accorde au franchisé, qui accepte, le droit et la licence l'autorisant à exploiter un magasin en franchise en utilisant le Système ainsi que les marques de commerce dans les installations de même que le droit d'indiquer au public que le magasin est exploité dans le cadre du Système.

32.        Le franchisé reconnaît et convient que le droit et la licence lui étant octroyés ne sont pas exclusifs et ne sont accordés qu'en vue de leur utilisation dans le magasin en franchise dans les installations et que ledit octroi n'empêchera en aucune façon le franchiseur d'octroyer des droits et des licences supplémentaires en vertu de son seul pouvoir discrétionnaire, à quelque personne, compagnie, partenariat, société ou autre entité (y compris le franchiseur lui-même) que ce soit en vue de l'utilisation des marques de commerce ou du Système ailleurs que dans les installations.

3.3        Sous réserve des dispositions du paragraphe 9.1.13 du présent accord, le franchisé ne doit pas, sauf consentement écrit préalable accordé par le franchiseur, utiliser ou permettre l'utilisation de toute autre marque de commerce, nom commercial ou symbole commercial lié au magasin en franchise. Il ne doit pas, non plus, utiliser ou permettre l'utilisation du Système ou des marques de commerce ou de toute information se trouvant dans le Manuel, sauf en ce qui touche le magasin en franchise.

SECTION IV - DURÉE ET RENOUVELLEMENT

4.1        La durée du présent accord, à moins qu'il ne soit résilié plus tôt conformément à ses conditions, est de une (1) année à partir de la date de signature.

4.2        Le présent accord est renouvelé chaque année pour une période de une (1) année à moins que l'une ou l'autre des parties n'ait donné un préavis de trois (3) mois à l'autre de son intention de ne pas le renouveler.

La durée de la franchise Sushi était de 10 années renouvelables pour une autre période de 10 années.

[17]     Les accords de franchise n'ont rien d'inhabituel. Il est certain qu'ils imposent d'importantes restrictions sur la façon d'exploiter cette affaire, mais cela caractérise tous les accords de franchise. L'une des exigences contenues dans l'accord Sushi est que l'affaire doit être gérée conformément à un manuel d'exploitation. Ce dernier n'a pas été déposé en preuve mais, d'après ce que je comprends, il est long et détaillé.

c)        Le troisième aspect de la convention est la location auprès de GTS aux sociétés franchisées. Il n'y a rien d'inhabituel à propos de ces baux.

d)       Les avocats de l'intimée ont mis l'accent sur un dernier aspect : les arrangements bancaires et financiers.

[18]     Chaque jour ou deux fois par semaine, les rentrées de fonds de l'entreprise étaient déposées dans un compte bancaire au nom de Lenester ou de Sushi à Pembroke ou à Campbellford selon le cas. Une fois par semaine, ils étaient transférés dans le compte bancaire de la société à la Banque Canadienne Impériale de Commerce ( « CIBC » ) à Ottawa. Les sommes se trouvant dans tous les comptes des franchisés à la CIBC à Ottawa sont théoriquement « regroupés » avec les comptes de GTS, et des intérêts sont versés sur cette somme. Lorsque le compte d'un franchisé particulier se trouvait en position de déficit, des intérêts lui étaient imputés.

[19]     La fonction d'achat était également réalisée par GTS. L'inventaire était soit envoyé de l'entrepôt de GTS, soit acheté auprès de fournisseurs qui facturaient GTS qui les payait. GTS ne chargeait aucune majoration sur les produits qu'elle fournissait à partir de son entrepôt ou sur les produits livrés directement par les fournisseurs au magasin du franchisé.

[20]     L'intimée soutient que GTS contrôlait les franchisés en se fondant sur le libellé de la première moitié du paragraphe 256(5.1) et sur le fait que les appelantes ne sont pas exemptées par l' « exception de franchise » de la seconde moitié dudit paragraphe.

[21]     Les avocats de l'intimée acceptent le fait que les accords de franchise se trouvent dans les limites de l'exception de franchise mais soutiennent que l'accord des actionnaires et les arrangements bancaires et financiers ne tombent pas sous le coup de l'exception au paragraphe 256(5.1). Les appelantes soutiennent qu'elles ne tombent pas sous le coup de la première partie du paragraphe (5.1) et que, même si c'était le cas, elles tombent sous le coup de l'exception prévue dans la seconde partie.

[22]     Avant de se pencher sur le paragraphe (5.1), examinons le cas en l'espèce. Nous avons une franchise très prospère exploitée par GTS qui permet à de petits entrepreneurs comme M. Kerr et M. Bingley et à leurs épouses d'exploiter des entreprises qui n'auraient jamais été à leur portée sans cela. En passant de telles conventions avec GTS, ils obtiennent de nombreux avantages :

a)        ils ne doivent investir qu'un capital nominal;

b)       ils ont l'avantage de reprendre un commerce de vente prospère;

c)        ils peuvent utiliser des marques de commerce très connues;

d)       ils profitent des avantages économiques du système d'achat, d'approvisionnement et de distribution d'une vaste organisation;

e)        ils sont intégrés au système financier, bancaire et comptable d'une vaste organisation qui s'occupe de leurs affaires financières, bancaires et fiscales de façon compétente et efficiente.

[23]     Naturellement, ils perdent une certaine partie de leur indépendance, mais cela fait partie d'une relation d'affaires mutuellement avantageuse, et cela leur permet de survivre face à la concurrence d'énormes organisations comme Wal-Mart. Le franchiseur, GTS, exige que le franchisé respecte certaines pratiques et procédures. Cela s'avère nécessaire pour protéger son fonds commercial, ses marques de commerce et sa réputation. Cela s'avère également nécessaire pour protéger les autres franchisés car, si un client a eu une mauvaise expérience dans l'un des magasins en franchise, il pourrait considérer tous les autres magasins de la même façon.

[24]     Néanmoins, il découle de la preuve que les exploitants des franchisés comme M. Kerr ou M. Bingley bénéficiaient d'une autonomie considérable pour exploiter leur entreprise. Cela n'est guère surprenant, étant donné la vaste expérience de chacun d'eux en matière de commercialisation acquise avant de se joindre à l'organisation de GTS.

[25]     Il serait négligent de ma part de ne pas mentionner la considérable contribution des épouses de M. Kerr et de M. Bingley, Susan et Mabel. Elles travaillaient dans les magasins aux côtés de leur mari et les ont aidés à en faire des entreprises prospères.

[26]     Cela me semble être une franchise parfaitement ordinaire, assortie des conditions et restrictions nécessaires et habituelles imposées par le franchiseur, mais sans aucun excès.

[27]     Ma conclusion est confirmée par le témoignage de John Sotos. Me Sotos est un avocat chevronné dans le domaine des franchises. Il a publié de nombreux écrits dans ce domaine. Il a examiné les franchises de GTS et a interrogé, non seulement les Kerr et les Bingley, mais également les exploitants de plusieurs autres franchises ainsi que des dirigeants de GTS. J'ai trouvé que Me Sotos est un témoin expert impressionnant et bien informé et je n'hésite nullement à accepter son rapport dans sa totalité. Pour illustrer à quel point la convention de GTS caractérise les franchises telles qu'elles existent au Canada, je reproduis une partie du rapport de Me Sotos qui porte sur de telles franchises :

[Traduction]

La franchise de produits et le franchisage de l'image commerciale peuvent tous deux être effectués de trois façons différentes : le franchisage exclusif, le franchisage de développement régional et le sous-franchisage (souvent appelée franchisage principal). Le réseau actuel de franchises de Tigre Géant est un exemple de franchisage exclusif. Dans ce cas, le franchiseur accorde la franchise pour établir et exploiter l'entreprise de franchisage dans un endroit unique défini (ou, dans le cas d'une franchise mobile, le long d'une route définie.) Les parties signent un « contrat de franchisage exclusif » et (généralement) un ou plusieurs contrats auxiliaires (par exemple : sous-bail, bail pour le matériel, les panneaux, contrat de fourniture, accord de sécurité, garanties personnelles du propriétaire, accords de confidentialité ou de non-concurrence des administrateurs ou des dirigeants) qui définissent les obligations des parties concernant l'établissement et l'exploitation de l'entreprise du franchisé.

Le franchisage exclusif revêt de nombreuses formes. Dans le cadre de l'une d'entre elles, généralement appelée « franchise en coparticipation » , le franchiseur a une participation dans son franchisé. Une société, une société en commandite ou un autre instrument de placement adéquat est créé pour détenir la franchise, et le franchiseur accorde des droits de franchisage exclusif à l'instrument de placement qui représente la franchise en coparticipation de la façon habituelle. Le franchiseur a une participation dans l'instrument de la franchise. Un accord distinct d'actionnaires ou de partenariat ou une autre coparticipation distincte est signé pour définir les droits et obligations respectifs des parties concernant la propriété et le contrôle du franchisé en coparticipation. Les franchises du type de celles accordées à Lenester et Sushi examinées ici constituent des exemples représentatifs de franchisage exclusif en coparticipation.

Il existe de nombreuses raisons pour lesquelles un franchiseur peut souhaiter utiliser le franchisage exclusif en coparticipation. Ainsi, un franchiseur peut choisir d'utiliser la technique afin d'aider des personnes manquant de capitaux (peut-être des professionnels ayant récemment reçu leur diplôme comme des pharmaciens ou peut-être des gérants de magasins appartenant au franchiseur qui se sont avérés des vendeurs exceptionnels) à se lancer dans les affaires puisque ces personnes sont, soit nécessaires (les professionnels réglementés) ou très souhaitables (les gérants qui ont fait leurs preuves) dans la position de franchisés. Quelquefois, les franchisés en coparticipation rachètent la participation du franchiseur dans l'entreprise de franchisage au fil du temps à partir de la portion des profits qui leur revient. Cependant, cela ne constitue pas une caractéristique obligatoire d'un franchisage en coparticipation.

[28]     Dans son rapport, Me Sotos décrit les contrôles que le franchiseur exerce généralement sur la franchise. Ils naissent tant de raisons pratiques qu'économiques ainsi que de la nécessité juridique. Après avoir discuté des contrôles exercés dans les franchises de GTS, il a conclu ceci :

[Traduction]

4)          L'entreprise de franchise Tigre Géant

L'accord de franchise et de sous-location Lenester de 1995 ainsi que l'accord de franchise et de sous-location Sushi de 1992 contiennent la plupart des contrôles mentionnés dans la section précédente du présent rapport (ceux liés au choix de l'emplacement et à la construction sont naturellement absents puisque les magasins en franchise existaient déjà au moment de la signature des accords.) Ces accords ne contiennent aucun contrôle qui excède ceux que j'ai énumérés. Il découle également de chacune de mes entrevues avec les franchisés que GTS non seulement n'impose aucun contrôle excédant ceux énumérés dans ses contrats écrits mais qu'en pratique, elle ne fait pas appliquer tous ceux qui apparaissent dans ses contrats écrits. Chaque actionnaire franchisé que j'ai interrogé m'a déclaré que c'était lui, et non GTS, qui prenait toutes les décisions quotidiennes liées à ses magasins. Donc, je suis d'avis que :

a)          les contrôles imposés par GTS à Lenester et à Sushi grâce à l'accord de franchise et de sous-location sont des contrôles représentatifs d'un franchisage exclusif commercial;

b)          sauf quelques exceptions (discutées ci-dessous), les accords de franchise et de sous-location Lenester et Sushi sont des accords de franchise et de sous-location représentatifs habituellement utilisés par un franchiseur qui est dans l'exploitation du franchisage exclusif;

c)          encore une fois, avec les mêmes exceptions, les relations et les arrangements commerciaux entre GTS et les appelantes (tels qu'ils sont reflétés par les accords de franchise, les accords de sous-location et les accords des actionnaires de Lenester et de Sushi ainsi que les renseignements que j'ai obtenus pendant mes entrevues avec MM. Kerr et Havelock et les gérants de GTS) sont représentatifs de ceux qui existent entre les parties à un franchisage en coparticipation.

Comme vous l'avez demandé, je discuterai des quelques aspects des franchises des appelantes qui sortent quelque peu de l'ordinaire.

[29]     Les aspects des conventions qu'il considère comme quelque peu différents sont les suivants :

          a)        l'équité inhabituelle envers le franchisé;

          b)       le droit initial nominal payé pour la franchise à GTS;

          c)        la durée de une année stipulée dans l'accord Lenester (bien que renouvelable).

Selon lui, ces éléments ne sont pas normalisés mais ne sont pas non plus inhabituels. Je ne les considère pas comme un motif pour rejeter l'appel. Ainsi, le droit initial peu élevé versé à GTS ne fait que refléter la politique de GTS de ne pas faire de profit sur le droit initial, contrairement à ce que font certains franchiseurs, mais de le faire grâce aux frais de service payables au cours de l'exploitation. Cela a pour avantage de permettre à des personnes comme M. Kerr et M. Bingley, qui ne possèdent pas un capital très élevé, de devenir franchisés dans l'organisation de GTS sans avoir à fournir, au départ, une mise de fonds considérable.

[30]     Les contrôles exercés par GTS sur l'exploitation par les franchisés constituent-ils un contrôle de fait tel qu'il est prévu par le paragraphe 256(5.1)? Il ne fait aucun doute que GTS n'avait pas le contrôle de droit puisqu'elle ne possédait pas plus de la moitié des votes et ne pouvait pas élire le conseil d'administration[1].

[31]     Je ne vois rien, dans ces conventions, y compris les documents et les accords des actionnaires, les baux et les accords de franchise, qui pourrait créer un contrôle de fait de Lenester ou de Sushi. Les arrangements bancaires, financiers et comptables ne donnent pas le contrôle à GTS. La déclaration classique à propos de la signification du contrôle de fait d'une société se trouve dans la décision Silicon Graphics Ltd. c. La Reine[2] :

66 La jurisprudence laisse entendre qu'en décidant de la question de savoir si un contrôle de fait existe, il est nécessaire d'examiner les ententes externes (Duha Printers, précité, au paragraphe 55); les résolutions des actionnaires (Société Foncière d'Investissement Inc. c. Canada, [1995] A.C.I. no 1568 (QL), au paragraphe 10); et la question de savoir si une partie peut modifier le conseil d'administration ou si la convention des actionnaires accorde à une partie la possibilité d'influencer la composition du conseil d'administration (International Mercantile Factors Ltd. c. Canada, [1990] 2 C.T.C. 137 (C.F. 1re inst.), à la page 148; confirmé par (1992), 94 DTC 6365 (C.A.F.); et Multiview Inc. c. Canada, [1997] 3 C.T.C. 2962 (C.C.I.), aux pages 2966 à 2970).


67 Par conséquent, je suis d'avis que pour que l'on puisse conclure à un contrôle de fait, une personne ou un groupe de personnes doivent avoir le droit et la capacité manifestes de procéder à une modification importante du conseil d'administration ou des pouvoirs du conseil ou d'influencer d'une façon très directe les actionnaires qui auraient autrement la capacité de choisir le conseil d'administration.

[32]     Si l'on applique ces critères, il est manifeste que GTS ne possède pas ces droits.

[33]     Même si l'on applique une interprétation un peu plus large proposée dans certaines décisions comme Société Foncière D'Investissement Inc. c. R.[3] et Transport M.L. Couture Inc. c. R.[4], il est manifeste que GTS n'avait aucune influence directe ou indirecte qui se serait soldée par un contrôle de fait sur Lenester ou Sushi.

[34]     Même si ma conclusion est erronée, je pense que la convention de GTS est précisément le type de convention visée par l'exception de franchise prévue dans la seconde partie du paragraphe 256(5.1). Il est évident que le Parlement a reconnu que les franchiseurs exercent fréquemment un contrôle considérable sur la façon dont les franchisés exploitent leur entreprise. En l'espèce, refuser d'appliquer l'exception en reviendrait à la radier de la Loi. Les avocats soutiennent que les arrangements bancaires et financiers ainsi que les accords des actionnaires ne font pas partie de l'exception. Je n'accepte pas cet argument. Les arrangements financiers constituent une partie essentielle des conventions générales, tout comme les accords des actionnaires. Ils font tous partie de l'éventail extrêmement vaste d'arrangements contractuels et financiers entre les franchiseurs et les franchisés prévus par le paragraphe 256(5.1). Je ne comprends absolument pas pourquoi l'ADRC souhaite réduire cette exception extrêmement utile à la règle du paragraphe (5.1) pour les conventions de franchise qui forment une partie si importante du commerce au Canada et qui permet aux petits entrepreneurs de soutenir la concurrence avec les grandes multinationales dominatrices. Le but de ces conventions est de régir la relation entre GTS et le franchisé en ce qui concerne la façon dont l'entreprise doit être exploitée.

[35]     Je suis également d'avis que les franchisés et GTS n'avaient aucun lien de dépendance. Ils avaient des intérêts distincts, et il n'y avait certainement pas une seule volonté ou une âme dirigeante. On ne peut pas non plus dire qu'ils « agissaient de concert » d'une façon qui prive la relation de sa nature indépendante. Dire que chaque fois que deux hommes d'affaires indépendants poursuivant leurs propres intérêts commerciaux collaborent pour atteindre un objectif commercial qui leur apporte des avantages mutuels signifie qu'ils « agissent de concert » et ont, par conséquent, un lien de dépendance signifierait que toute relation commerciale comporterait toujours un lien de dépendance.

[36]     L'avocat de l'intimée a fait remarquer ce qui pourrait constituer une anomalie. Il a fait remarquer que si un franchiseur contrôlait un franchisé de façon telle que la première partie du paragraphe 256 (5.1) était applicable, il s'ensuivrait qu'ils auraient nécessairement un lien de dépendance et que, par conséquent, l'exception prévue dans la seconde partie ne pourrait jamais s'appliquer. Il suggère que l'expression « lien de dépendance » doit être interprétée comme étant tacitement restreinte par le terme « autrement » si l'on veut qu'elle ait un sens. Je serais plutôt d'accord avec lui mais, en l'espèce, il n'est pas nécessaire d'en arriver à une conclusion définitive sur ce point.

[37]     Les appels sont accueillis avec dépens et les cotisations pour l'année d'imposition 1997 des appelantes sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que ni l'une ni l'autre des appelantes n'était ni contrôlée par Giant Tiger Stores Limited, ni associée avec Giant Tiger Stores Limited ou toute autre société avec laquelle Giant Tiger Stores avait une convention de franchise et n'était, par conséquent, pas obligée d'imputer quelque portion que ce soit de son plafond des affaires à toute autre société que ce soit aux fins du calcul de sa déduction accordée aux petites entreprises en vertu de l'article 125 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

Signé à Ottawa, Canada, ce 31e jour de juillet 2003.

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

Traduction certifiée conforme

ce 16e jour de février 2004.

Sylvie Sabourin, traductrice



[1]           Buckerfields Ltd. v. M.N.R., [1965] 1 Ex. C.R. 299; Dworkin Furs (Pembroke) Limited v. M.N.R., [1967] R.C.S. 223.

[2]           C.A.F., no A-286-01, 17 juin 2002 [2002] 3 CTC 527, aux paragraphes 66 et 67.

[3]           C.C.I., no 95-1996(IT)I, 6 décembre 1995 (1996 3 CTC 2537).

[4]           C.C.I., nos 2000-2264(IT)G, 2000-2266(IT)G, 16 janvier 2003 (2003 DTC 134).

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