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Dossier : 2000-4697(IT)G

ENTRE :

ANDRÉ TREMBLAY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus le 25 septembre 2003 à Victoria (Colombie-Britannique)

Devant : l'honorable juge R. D. Bell

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :

Me Lynn M. Burch

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          Les appels des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1991, 1992, 1993, 1994, 1995, 1996, 1997 et 1998 sont rejetés conformément aux motifs du jugement ci-joints.


Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour d'octobre 2003.

« R. D. Bell »

J.C.C.I

Traduction certifiée conforme

ce 13e jour de juin 2005.

Sophie Debbané, réviseure


Référence : 2003CCI703

Date : 20031010

Dossier : 2000-4697(IT)G

ENTRE :

ANDRÉ TREMBLAY,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bell

[1]      Le 23 septembre 2003, l'intimée a déposé un avis de requête auprès de la Cour. La requête était présentable le 25 septembre 2003. L'avis de requête a été signifié à l'appelant en lui laissant une copie ainsi que les documents qui y sont annexés dans une enveloppe scellée dans sa boîte aux lettres à 15 h 05, au 3807, 5e av., Port Alberni, Colombie-Britannique.

[2]      Lorsque la Cour a indiqué à l'avocate de l'intimée qu'elle avait eu amplement le temps de déposer une requête tout en respectant le délai imparti par les règles, elle a répondu que la présente requête ne causait aucun préjudice à l'appelant. Avant d'être assermenté, l'appelant a déclaré qu'il n'avait pas reçu la copie de l'avis de requête qui a été signifiée.

[3]      La requête vise à obtenir une ordonnance rejetant les appels en vertu des dispositions de la règle 116(4) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (Procédure générale). La requête allègue que l'appelant n'a pas répondu aux questions posées dans un interrogatoire préalable effectué par écrit au moyen d'une déclaration sous serment rédigée selon la formule 114, dans les 30 jours, tel que le prévoient les Règles de la Cour canadienne de l'impôt, ni après les 30 jours.

[4]      Une copie de la déclaration sous serment de Me Karen A. Truscott, avocate, Services du droit fiscal, ministère de la Justice à Vancouver (Colombie-Britannique) est rédigée de la façon suivante :

                        [TRADUCTION]

Je, Karen A. Truscott, de la ville de Vancouver, dans la province de Colombie-Britannique, DÉCLARE SOUS SERMENT CE QUI SUIT :

1.          Je suis avocate des Services du droit fiscal du ministère de la Justice (ci-après le « ministère » ) à Vancouver (Colombie-Britannique) et, de ce fait, je suis personnellement au courant des questions mentionnées ci-après, sauf celles que l'on dit provenir de renseignements tenus pour véridiques, et lorsque c'est mentionné, je les crois véridiques.

2.          Des copies de l'avis d'appel et de la réponse à l'avis d'appel déposés dans la présente instance sont annexées respectivement comme pièces A et B.

3.          Des copies de la liste de documents de l'appelant et de la liste de documents de l'intimée sont annexées comme pièces C et D.

4.          J'ai examiné les dossiers du ministère. Me Lynn Burch, avocate aux Services du droit fiscal du ministère de la Justice, Vancouver (Colombie-Britannique), qui s'occupe du présent appel m'informe également et je crois sincèrement que le            6 février 2003, Me Burch a signifié à Me George Jones, qui représentait alors l'appelant, le questionnaire relatif à l'interrogatoire préalable effectué par écrit ainsi que des copies de documents comprenant la liste de documents de l'intimée. Une copie de la lettre de Me Burch et du questionnaire relatif à l'interrogatoire préalable effectué par écrit sont annexées comme pièce E.

5.          Me Burch m'informe et je crois sincèrement que l'appelant n'a pas répondu au questionnaire relatif à l'interrogatoire préalable effectué par écrit au moyen de la formule 114 tel que le prescrivent les Règles de la Cour canadienne de l'impôt (Procédure générale) ni dans les trente jours de la signification du questionnaire à son avocat ni après les trente jours. Toutefois, l'avocat de l'appelant a transmis une lettre, datée du 6 mars 2003, portant la mention « sous toutes réserves » . Une copie de cette lettre est annexée comme pièce F.

6.          Me Burch m'informe et je crois sincèrement que l'appelant, son avocat et Me Burch ont assisté à une conférence préparatoire au procès devant le juge Beaubier, à Victoria (Colombie-Britannique) le 3 avril 2003. Une copie du compte rendu de la conférence préparatoire au procès est annexée comme pièce G.

7.          Me Burch m'informe et je crois sincèrement qu'à la conférence préparatoire au procès, il n'a pas été possible d'établir les questions en litige dans le présent appel et de les résoudre.

8.          Le 4 juin 2003, Me Jones a présenté une requête en vue de cesser d'occuper à laquelle il avait annexé une lettre datée du même jour adressée au juge Beaubier. Une copie de l'avis de requête et de la lettre sont annexées comme pièce H.

9.          Me Burch m'informe et je crois sincèrement que la requête en vue de cesser d'occuper de Me Jones a été entendue par téléconférence le 27 juin 2003, qu'elle n'a pas été contestée par l'intimée et qu'elle a été accordée par le juge Beaubier. Une copie de l'ordonnance et des motifs de l'ordonnance sont annexées comme pièce I.

10.        Je fais la présente déclaration sous serment pour appuyer la requête de l'intimée visant à ce que l'appel soit rejeté en vertu de la règle 116(4) des Règles de la Cour canadienne de l'impôt (Procédure générale).

[5]      Les parties pertinentes de la pièce E annexée à la déclaration sous serment de Me Karen Truscott sont rédigées comme suit :

                        [TRADUCTION]

QUESTIONNAIRE RELATIF À L'INTERROGATOIRE PRÉALABLE EFFECTUÉ PAR ÉCRIT

            L'intimée a choisi de faire subir un interrogatoire préalable à l'appelant au moyen de questions écrites, et l'appelant y a consenti. L'intimée exige que les réponses aux questions suivantes soient données au moyen d'une déclaration sous serment rédigée selon la formule 114 prescrite par les Règles de la Cour canadienne de l'impôt (Procédure générale) et signifiée dans les trente jours de la signification des présentes questions.

1.          Reconnaissez-vous que la cotisation relative à votre année d'imposition 1998 datée du 14 septembre 2000 (voir le point 42, liste de documents de l'intimée) est une cotisation portant qu'aucun impôt n'est payable (c'est-à-dire, qu'il ne s'agit pas d'une cotisation d'impôt, mais d'un avis selon lequel aucun impôt n'est payable)?

2.          Si vous ne le reconnaissez pas, dites pourquoi.

3.          Reconnaissez-vous les faits énoncés aux paragraphes 8(b), (c) et (d) de la réponse?

4.          Si vous ne les reconnaissez pas, exposez entièrement les faits qui contredisent ceux qui sont plaidés.

5.          Reconnaissez-vous que le ministre du Revenu national a inclus à bon droit dans votre revenu pour les années indiquées dans la réponse les montants indiqués au paragraphe 8(e) de la réponse?

6.                   Si vous ne le reconnaissez pas, dites pourquoi.

7.          N'avez-vous pas déclaré un certain revenu de pension et d'investissement comme un revenu de votre frère Marquis Tremblay, alors que ce revenu était effectivement le vôtre, tel qu'énoncé aux alinéas 8e)(i) et (ii)?

8.          Les documents sous les onglets 60, 61, 4, 7, 9 et 62 ne sont-ils pas des déclarations de revenus pour 1991, 1992, 1993, 1994, 1995 et 1996 que vous avez produites au nom de votre frère?

9.          N'avez-vous pas signé le nom de Marquis Tremblay dans chacune de ces déclarations de revenus?

10.        Marquis Tremblay n'est-il pas décédé depuis 1935?

11.        Reconnaissez-vous les faits énoncés aux paragraphes 8(f), (g), (h), (i), (j), (k), (m), (n), (o) et (p) de la réponse à l'avis d'appel?

12.        Si vous ne les reconnaissez pas, exposez entièrement les faits qui contredisent ceux qui sont plaidés.

13.        Vous n'avez pas fait appel de la décision de la Cour suprême de la Colombie-Britannique ordonnant un remboursement à Shipp, n'est-ce pas?

14.        Vous n'avez pas fait appel de la déclaration de culpabilité pour fraude, n'est-ce pas?

15.        Vous n'avez pas fait appel de votre déclaration de culpabilité dans la poursuite en matière fiscale en 1999, n'est-ce pas?

16.        Si l'une ou l'autre de ces condamnations faisaient l'objet d'un appel, veuillez expliquer en détail quelle en serait l'issue.

17.        À la suite d'une ordonnance rendue par la Cour suprême de la Colombie-Britannique dans la poursuite civile que Frederick Shipp (ci-après « Shipp » ) avait instituée contre vous, vous avez remboursé 794 899 $ à Shipp dans votre année d'imposition 1998.

18.        Si vous n'êtes pas d'accord avec cette déclaration, exposez entièrement pourquoi.

19.       Reconnaissez-vous que les nouvelles cotisations du 14 septembre 2000 vous ont permis de reporter la perte autre qu'en capital découlant du remboursement sur vos années d'imposition 1995, 1996, 1997, comme il a été énoncé à l'Annexe 1 de la réponse?

20.        Sur quels faits vous basez-vous pour appuyer la thèse que vous adoptez dans l'avis d'appel selon lequel il devrait vous être permis de reporter sur l'année d'imposition 1994 la perte autre qu'en capital découlant du remboursement en 1998?

21.        Estimez-vous qu'il doive vous être permis de reporter la perte autre qu'en capital découlant du remboursement en 1998 sur vos années d'imposition 1991, 1992 ou 1993?

22.        Dans l'affirmative, sur quels faits vous fondez-vous pour appuyer cette thèse?

23.        À quel montant exactement se chiffrent les « importants frais judiciaires » et « les frais judiciaires au complet » mentionnés aux paragraphes B.1 et C.3 de l'avis d'appel?

24.        Que comprennent les frais judiciaires?

25.        Les frais judiciaires couvrent-ils la poursuite civile intentée par Shipp et les deux poursuites pénales?

26.        Quand les frais juridiques ont-ils été engagés?

27.        Qui était votre procureur dans chacune de ces instances?

28.        Comment vos procureurs dans ces instances vous ont-ils facturé leurs services?

29.        Veuillez fournir des copies de tous les documents indiquant les frais judiciaires que vous avez engagés pour contester la poursuite intentée par M. Shipp et vous défendre dans les deux poursuites pénales et que, à votre avis, il devrait vous être permis de déduire.

30.        Avez-vous payé des frais judiciaires?

31.        Dans l'affirmative, de quelle façon ont-ils été payés?

32.        Quand les paiements ont-ils été effectués? Fournissez des copies de tous les documents démontrant qu'un paiement a été effectué.

[6]      L'avocate de l'intimée, Me Lynn Burch, a indiqué à la Cour que, si ces questions demeuraient sans réponses, il était impossible de trancher les questions en litige dans le présent appel. Elle a fait référence à la partie de l'avis d'appel intitulée [TRADUCTION] « C. QUESTIONS EN LITIGE À TRANCHER » qui est rédigée de la façon suivante :

                        [TRADUCTION]

1.          Certains montants reçus de Fred Shipp devraient-ils être effectivement inclus dans le revenu de l'appelant en 1994?

2.          Tous les montants d'argent payés à la succession de Fred Shipp dans les années subséquentes devraient-ils être crédités à l'appelant?

3.          Tous les frais judiciaires engagés par l'appelant à l'égard de la contestation des poursuites intentées par Shipp sont-ils déductibles en vertu des dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu?

4.          L'appelant a-t-il le droit de reporter les frais judiciaires et les montants remboursés sur l'année d'imposition 1994?

5.          L'appelant est-il coupable d'une faute lourde et est-ce qu'il encoure des pénalités?

[7]      L'avocate a également indiqué à la Cour que l'appelant avait été reconnu coupable en vertu du Code criminel de détournement de fonds appartenant à M. Shipp (ci-après « Shipp » ) et condamné à un emprisonnement de deux ans. Elle a aussi déclaré que l'appelant avait été reconnu coupable de certaines des infractions prévues à l'article 239 de la Loi de l'impôt sur le revenu (ci-après la « Loi » ) et que, le 26 juin 1998, la Cour suprême de la Colombie-Britannique lui avait ordonné de rembourser 830 620 $ à Shipp en ce qui concerne le détournement de fonds susmentionné.

[8]      L'avocate a ensuite expliqué comment l'appelant avait remboursé des montants à Shipp en ce qui concerne le détournement de fonds, comment l'appelant avait traité ces remboursements comme des déductions et les avait déduits de son revenu en 1998 et de son revenu en 1997, 1996 et 1995, le solde étant reporté sur les sept années subséquentes. Elle a également déclaré qu'une des difficultés dans le cas de l'appelant est que le délai légal de prescription empêchait le report de la perte sur son année d'imposition 1994. L'avocate de l'intimée a aussi indiqué à la Cour que lors de la première audience de l'appel, le 3 avril 2003, celle-ci s'est essentiellement transformée en une conférence préparatoire au cours de laquelle une tentative de conclure une transaction fut faite. L'avocate a indiqué que l'appelant avait refusé de consentir à une transaction acceptable aux yeux de l'intimée et de l'avocat de l'appelant et que l'appel avait été reporté au 25 septembre 2003.

[9]      L'appelant a nié avoir discuté des questions écrites avec son avocat et a nié les avoir reçues de son avocat après que, par ordonnance rendue le 27 juin 2003, la présente Cour a autorisé l'avocat à cesser de représenter l'appelant. L'appelant a fait cette dénégation bien que je lui aie affirmé que son avocat, qui jouit d'une excellente réputation et dont la compétence est reconnue, lui aurait remis tous les documents après avoir cessé d'occuper pour lui.

[10]     La Cour a fait assermenter l'appelant pour que toutes ses réponses subséquentes soient sous serment. La Cour lui a alors demandé de dire quels éléments de preuve il présenterait si l'instance avait lieu. L'appelant a répondu qu'il prouverait qu'il n'avait pas dérobé de l'argent à Shipp. Il a également fait allusion à de fausses déclarations formulées par l'avocate de l'intimée.

[11]     L'appelant a donné à la Cour l'impression qu'il était un menteur et qu'il faisait de l'obstruction et que, n'ayant ni répondu aux questions, ni établi les questions en litige comme il se devait de le faire, il n'était absolument pas prêt à procéder à l'audition de son appel. Cette impression a été renforcée par la déclaration renversante de l'appelant selon laquelle il n'était pas coupable des accusations retenues contre lui et jetait le blâme sur son avocat pour de tels résultats.

[12]     La Cour estime que l'appelant n'avait nullement l'intention de se préparer pour la conduite d'une audience raisonnable, et, comme il a nié l'existence de faits établis, il n'y a aucune raison de tenir l'audience ou de la reporter.

[13]     La règle 116(4) est libellée de la façon suivante :

(4)        Si une personne refuse ou omet de répondre à une question légitime posée dans un interrogatoire écrit ou de produire un document qu'elle est tenue de produire, la Cour peut, en plus d'imposer les sanctions prévues aux paragraphes (2) et (3) :

a)          rejeter ou accueillir l'appel, selon le cas, si la personne interrogée est une partie ou une personne interrogée à la place ou au nom d'une partie;

b)         radier, en totalité ou en partie, la déposition de la personne interrogée;

c)         donner une autre directive appropriée.

[14]     Compte tenu de ce qui précède, j'ai conclu que le court délai d'avis d'audition de la requête ne cause aucun préjudice à l'appelant. J'ai abrégé le délai de signification de l'avis de requête en vertu de la règle 12 et j'ai rejeté l'appel en vertu de la règle 116(4).

Signé à Ottawa, Canada, ce 10e jour d'octobre 2003.

« R. D. Bell »

J.C.C.I

Traduction certifiée conforme

ce 13e jour de juin 2005.

Sophie Debbané, réviseure

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