Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date : 20021112

Dossier : 2002-1509(IT)I

ENTRE :

GIOVANNI CHIRIATTI,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE

intimée.

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                   Pour l'appelant :                                   L'appelant lui-même

                   Avocat de l'intimée :                            Me A'Amer Ather

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MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l'audience à Toronto (Ontario)

le lundi 7 octobre 2002.)

Le juge Margeson, C.C.I

[1]      L'affaire que la Cour doit trancher à ce moment est celle de Giovanni Chiriatti c. Sa Majesté la Reine. La seule question en litige est de savoir si l'appelant est en droit de déduire, pour les années d'imposition 1998 et 1999, des dépenses autres que celles admises par le ministre du Revenu national (le « ministre » ) tel qu'il apparaît dans la réponse à l'avis d'appel (la « réponse » ) et dans l'annexe « A » , le rapport du vérificateur, qui est jointe à la réponse.

[2]      L'appelant déclare qu'il participait, au cours des années en question, à une entreprise que l'on peut appeler une entreprise de distribution; cette dernière était spécialisée dans les produits pour soins capillaires. D'une façon générale, il a fait tout ce qu'il a pu pour en faire une entreprise et produire des revenus. Il a fait ce qu'il pensait devoir faire. Il s'est rendu à des salons de coiffure; il a fait publier des annonces publicitaires; il a acheté du matériel; il a donné du matériel aux salons de coiffure; il a parlé aux gens; il a rencontré des clients potentiels aux États-Unis et en Europe pour essayer de promouvoir son entreprise. Il s'est servi d'une automobile pour exploiter son entreprise. Comme l'indique la réclamation des dépenses, il a engagé des frais de publicité, d'automobile, de bureau, de « fournitures » , comme il les a appelées, de comptabilité, de voyage et de téléphone au cours de chacune des années 1998 et 1999. C'est le genre de dépenses dont on s'attendrait qu'une personne qui participe à une entreprise comme la sienne engagerait.

[3]      Il ne fait aucun doute que le particulier gérait une entreprise au cours des années en question. En fait, le ministre a bien admis certaines dépenses d'exploitation d'entreprise durant ces années. La seule question qui se pose est de savoir s'il en a admis suffisamment. L'appelant a soutenu que non. Le ministre affirme que oui et que toutes les dépenses qui n'étaient pas admises n'ont pu être prouvées, qu'elles étaient déraisonnables dans les circonstances ou qu'elles n'ont pas été engagées afin de tirer un revenu de l'entreprise.

[4]      En ce qui concerne le dernier argument, la Cour est convaincue que toutes les dépenses réclamées ont été engagées afin de tirer un revenu. Il n'y a aucun doute à ce sujet. Il aurait été plutôt ridicule de sa part de dépenser de l'argent pour des publicités de produits capillaires et de soins ou pour des brochures et d'acheter du matériel qu'il pouvait prêter aux salons de coiffure pour tenter de faire des affaires avec eux si ce n'était pas dans un but commercial. Ces dépenses étaient certainement liées à l'entreprise.

[5]      Un problème qui est inhérent à ce genre de réclamations est le fait qu'il n'a pas gardé de reçus adéquats, qu'il n'a pas maintenu une bonne répartition de ses dépenses d'automobile et qu'il n'a pas conservé de journal. L'essentiel des plaintes que le ministre porte à l'encontre des réclamations de dépenses d'entreprise est qu'elles ne sont pas bien classées et que les reçus ne sont pas bien conservés. L'appelant en l'espèce est certainement coupable, tout comme son comptable, d'un certain laisser-aller pour ce qui est de fournir des reçus adéquats au ministre. La Cour ne peut remettre en question les actions du ministre lorsque celui-ci a considéré que certaines de ces dépenses n'étaient pas appropriées.

[6]      Quoi qu'il en soit, cette cour doit déterminer si le ministre avait entièrement raison de faire ce qu'il a fait et si on doit autoriser d'autres dépenses engagées par l'appelant.

[7]      Pour commencer, la Cour affirme qu'elle a été impressionnée par le témoignage de l'appelant. Elle est convaincue que l'appelant exploitait une entreprise et qu'il faisait de son mieux pour en produire des revenus. C'est une personne honnête et la Cour accorde beaucoup de crédibilité à son témoignage. Il est vrai que certains des éléments qu'il a réclamés n'ont pas été entièrement corroborés par des reçus ou des relevés bancaires. Dans certains cas, il n'y avait que des factures, mais l'appelant a témoigné à leur sujet. Son témoignage était franc et on peut s'y fier.

[8]      En ce qui concerne l'année 1998, l'appelant a réclamé des frais de publicité de 5 375 $ et son témoignage indique qu'il a dépensé ce montant en 1998 pour produire une brochure. Il a présenté des éléments de preuve quant à ce à quoi la brochure ressemblait. Elle s'appelait « Olajos » . Il n'appartient pas à la Cour de déterminer combien ces articles coûtent ou devraient coûter. Il est vrai qu'il semble s'agir d'une somme relativement élevée pour une brochure de ce genre, mais elle est en papier glacé, bien organisée et très détaillée. Lorsqu'on tient compte du travail qu'il a fallu y consacrer, du travail préliminaire qu'elle aurait exigé et du nombre de brochures qui pourraient avoir été produites, il ne semble pas déraisonnable que cette somme aurait été nécessaire pour produire cette brochure.

[9]      L'avocat de l'intimée a soutenu que cela posait un sérieux problème parce que la preuve de l'appelant n'était pas conséquente. L'appelant a témoigné qu'il en avait produit 200 ou 300 exemplaires au cours de l'année en question, bien que la facture elle-même indique qu'une quantité beaucoup plus grande a été produite. Cela semble contradictoire à première vue, mais l'appelant a expliqué qu'il avait fait une erreur, qu'il ne faisait que généraliser et qu'il avait donné une estimation approximative du nombre de brochures imprimées, mais quand il a vérifié la facture, il s'est rendu compte que ce n'était pas exact et que les dépenses s'élevaient en fait à 5 375 $.

[10]     La Cour est convaincue qu'il s'agit d'une dépense du genre qu'une personne travaillant dans une entreprise de ce genre aurait faite. En tenant compte de la facture elle-même, ainsi que du témoignage de l'appelant, la Cour estime que cet élément doit être admis. La Cour considère qu'il aurait été impossible de tirer un avantage personnel de cette publicité. L'appelant est en droit de réclamer la somme de 5 375 $ en tant que dépense.

[11]     La Cour se penche sur les frais d'automobile, qui se chiffrent à 2 160 $. Cela ne représente pas que les réparations. Comme l'appelant l'a indiqué au début, et il était évident de son témoignage, la réclamation de 2 160 $ ne visait pas des réparations, mais un pourcentage de tous les frais d'automobile, qui incluaient l'essence et l'huile. Les deux factures qu'il a présentées s'élevaient à 2 320,30 $. Celles-ci ne concernaient que les réparations et aucune autre facture n'a été présentée pour appuyer la réclamation de l'appelant relativement à 55 % de la somme totale dépensée ou pour préciser l'objet de ces dépenses.

[12]     En outre, le pourcentage qu'il a réclamé pose un problème. L'avocat de l'intimée a soutenu, à juste titre, que la réclamation de 55 % ne repose vraiment sur aucune base. Ce n'était qu'un pourcentage que son comptable et lui avait établi à la suite d'une discussion. Les frais d'automobile n'ont été consignés nulle part et on ne peut pas déterminer l'objet des dépenses de 2 160 $. La seule chose dont nous sommes certains est qu'il a dépensé 2 320,30 $ pour des réparations.

[13]     La Cour estime que l'appelant doit être autorisé à déduire quelque chose pour cette automobile. Il avait manifestement besoin d'une automobile pour exploiter son entreprise. Il serait injuste qu'il ne puisse réclamer quelque chose. Ses reçus et ses documents sont plutôt faibles. Le pourcentage de 55 % qu'il a réclamé, après en avoir discuté avec son comptable, est trop élevé. La Cour est convaincue qu'il n'a droit qu'à une partie du montant total facturé de 2 320,30 $. Selon la Cour, cela ne doit pas représenter 55 %, mais plutôt 30 %. La Cour autorisera la déduction de 30 % de la somme de 2 320,30 $, qui peut être déduite par l'appelant pour l'année en question.

[14]     Quant aux fournitures de bureau, soit 180 $, il n'avait aucun reçu. La Cour n'est pas en mesure de déterminer à quoi elles ont servi. Elle rejette cette réclamation de 180 $.

[15]     Quant aux 840 $, l'appelant a présenté une facture y afférente et le ministre a indiqué qu'il y avait une pièce justificative. La Cour est convaincue que l'appelant est en droit de déduire cette somme et il pourra le faire.

[16]     Quant aux frais de voyage réclamés qui s'élèvent à 1 360 $ pour l'année 1998, l'appelant a déclaré qu'il avait en fait dépensé 1 645,60 $. Il est allé rencontrer des personnes à Florence pour promouvoir l'entreprise. Il comptait produire des revenus dont il pourrait réclamer 25 % au cas où il réussissait. Il n'a pas réussi et cette initiative n'a produit aucun revenu, mais la Cour est convaincue qu'il n'était pas déraisonnable de se rendre là pour essayer de produire des revenus. Sur la foi de son témoignage, la Cour est convaincue qu'il n'a rencontré ni ses amis personnels ni ses parents lorsqu'il est allé à Florence. Il a déclaré que ses parents vivaient dans une autre région du pays et donc qu'il n'a passé aucun moment avec eux. La Cour est convaincue qu'il s'agissait essentiellement d'un voyage d'affaires et qu'il devrait être en droit de réclamer quelque chose pour ce voyage.

[17]     La pièce A-4 était une facture de 1 645,60 $. Le ministre a rejeté la réclamation de 1 360 $. La Cour est convaincue qu'il était déraisonnable que le ministre n'admette pas cette réclamation. La Cour est convaincue qu'il a dépensé ce montant. Il était lié à son entreprise et devait produire des revenus, donc il devrait être en droit de réclamer la somme de 1 360 $.

[18]     Il y avait une réclamation de 1 280 $ pour le téléphone. L'avocat de l'intimée a soutenu que ces factures n'étaient pas bien réparties selon les numéros appelés et la date des appels. La Cour est convaincue, en substance, par la preuve de l'appelant relativement à ces appels téléphoniques et au lien entre les numéros appelés et son entreprise. La Cour est arrivée à la conclusion que les documents qu'il a fournis, ainsi que son propre témoignage, sont suffisants pour établir la réclamation de 1 280 $. Ces dépenses seront admises.

[19]     Quant à la déduction pour amortissement, la Cour estime qu'il n'y a aucune preuve sur ce plan. L'appelant ne savait pas à quoi elle servait. La Cour ne l'admettra pas.

[20]     Quant à l'année d'imposition 1999, l'appelant a réclamé la somme de 1 825 $ pour des achats qui ont été admis. Ce fait n'est pas contesté.

[21]     La question en litige touche aux frais de publicité qui s'élèvent à 4 888 $ selon la facture. L'appelant a présenté une facture comme pièce A-6. Cela posait un problème pour l'avocat de l'intimée mais, en fin de compte, la Cour est convaincue qu'il est raisonnable de s'attendre à ce que l'appelant se serve de ce genre de publicité dans son entreprise. Elle n'était pas déraisonnable. La Cour est convaincue, sur la foi de la facture et du témoignage de l'appelant, que la somme a été dépensée; par conséquent, elle admettra sa déduction.

[22]     Les frais d'automobile réclamés s'élevaient à 1 850 $. L'appelant a présenté les factures de la pièce A-7. Le ministre a rejeté le montant total de 1 850 $ qui a été réclamé. La Cour estime que le montant que l'appelant est en droit de réclamer au cours de cette année équivaut à 30 % du montant total établi, qui est de 2 101,63 $. La Cour lui accordera donc 30 % de cette somme.

[23]     Quant aux fournitures de bureau, soit 275 $, il n'y a aucun reçu à cet égard, donc ces dépenses ne seront pas admises. La somme de 788 $ aurait été payée pour l'achat d'un instrument qu'il a fourni, selon lui, aux salons de coiffure. Il n'en a aucun reçu, donc la Cour ne peut pas accéder à sa demande sur ce plan. Cette somme ne sera pas admise.

[26]     La somme de 214 $ a été réclamée pour des frais de comptabilité. Il ne fait aucun doute que cette somme est raisonnable. La Cour est convaincue qu'il l'a dépensée. Elle est conforme à la déclaration de revenus et aux frais de l'année précédente que le ministre avait admis.

[27]     Quant aux frais de voyage qui s'élèvent à 1 585 $, il n'y avait aucune facture pour justifier cette somme. Il s'agissait d'un montant global. Il est évident que l'appelant est allé à New York et qu'il y a rencontré quelqu'un, mais les frais qu'il a indiqués pour le voyage, l'hébergement, les repas, et ainsi de suite, ne sont que des estimations et elles ne sont pas suffisantes dans ce cas. La somme de 1 585 $ n'est pas admise.

[28]     La Cour estime qu'il y a assez de preuve pour appuyer une réclamation de 975 $ pour le téléphone.

[29]     Les déductions pour amortissement sont rejetéespuisqu'il n'y a aucune preuve pour appuyer la réclamation.


[30]     L'appel est admis relativement aux cotisations des années d'imposition 1998 et 1999, sans dépens, et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations en tenant compte de la conclusion de la Cour selon laquelle l'appelant a droit aux déductions supplémentaires déjà indiquées dans le présent jugement. L'appelant n'a droit à aucune autre mesure de redressement.

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de novembre 2002.

« T. E. Margeson »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de septembre 2003.

Yves Bellefeuille, réviseur

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