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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

1999-5029(IT)I

ENTRE :

JOHN R. LEROUX,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 7 juillet 2000, à Halifax (Nouvelle-Écosse), par

l'honorable juge Michael J. Bonner

Comparutions

Pour l'appelant :                                   l'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :                            Me Marcel Prevost

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1997 est admis, avec frais s'il en est, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation en tenant compte du fait que l'appelant a droit au crédit en question.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de juillet 2000.

« Michael J. Bonner »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour d'octobre 2003.

Philippe Ducharme, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20000717

Dossier: 1999-5029(IT)I

ENTRE :

JOHN R. LEROUX,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bonner, C.C.I.

[1]      Il s'agit d'un appel d'une cotisation d'impôt sur le revenu établie pour l'année d'imposition 1997 de l'appelant. Dans la cotisation, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a rejeté la réclamation de l'appelant au titre du crédit d'impôt prévu à l'article 118.3 de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[2]      L'appelant a fondé sa demande sur le fait qu'il avait une déficience physique grave et prolongée qui prenait la forme d'une cardiopathie. Cette déficience avait pour effet de limiter de façon marquée sa capacité d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne, en l'occurrence le fait de marcher.

[3]      Le ministre a fondé sa cotisation sur la conclusion de fait suivante :

          [TRADUCTION]

a)          la capacité de l'appelant d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne, y compris la capacité de marcher, n'était pas toujours ou presque toujours limitée de façon marquée même avec des soins thérapeutiques et l'aide d'appareils et de médicaments;

[...]

[4]      Les dispositions de la Loi de l'impôt sur le revenu qui suivent s'appliquent en l'espèce :

118.3 : (1) Le produit de la multiplication de 4 118 $ par le taux de base pour l'année est déductible dans le calcul de l'impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d'imposition, si les conditions suivantes sont réunies :

a) le particulier a une déficience mentale ou physique grave et prolongée;

a.1) les effets de la déficience sont tels que la capacité du particulier d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée;

a.2) un médecin en titre ou, s'il s'agit d'une déficience visuelle, un médecin en titre ou un optométriste atteste, sur formulaire prescrit, que le particulier a une déficience mentale ou physique grave et prolongée dont les effets sont tels que sa capacité d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée;

b) le particulier présente au ministre l'attestation visée à l'alinéa a.2) pour une année d'imposition;

c) aucun montant représentant soit une rémunération versée à un préposé aux soins du particulier, soit des frais de séjour du particulier dans une maison de santé ou de repos, n'est inclus par le particulier ou par une autre personne dans le calcul d'une déduction en application de l'article 118.2 pour l'année (autrement que par application de l'alinéa 118.2(2)b.1)).

[...]

118.4 : (1) Pour l'application du paragraphe 6(16), des articles 118.2 et 118.3 et du présent paragraphe :

a)             une déficience est prolongée si elle dure au moins 12 mois d'affilée ou s'il est raisonnable de s'attendre à ce qu'elle dure au moins 12 mois d'affilée;

b) la capacité d'un particulier d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne est limitée de façon marquée seulement si, même avec des soins thérapeutiques et l'aide des appareils et des médicaments indiqués, il est toujours ou presque toujours aveugle ou incapable d'accomplir une activité courante de la vie quotidienne sans y consacrer un temps excessif;

c) sont des activités courantes de la vie quotidienne pour un particulier :

(i)        la perception, la réflexion et la mémoire,

(ii)       le fait de s'alimenter et de s'habiller,

(iii)       le fait de parler de façon à se faire comprendre, dans un endroit calme, par une personne de sa connaissance,

(iv)      le fait d'entendre de façon à comprendre, dans un endroit calme, une personne de sa connaissance,

(v)       les fonctions d'évacuation intestinale ou vésicale,

(vi)      le fait de marcher;

d) il est entendu qu'aucune autre activité, y compris le travail, les travaux ménagers et les activités sociales ou récréatives, n'est considérée comme une activité courante de la vie quotidienne.

L'alinéa 118.3(1)a.2) a été modifié en 1998. Le changement apporté ne revêt aucune importance en l'espèce.

[5]      La seule question à trancher dans l'affaire qui nous occupe est celle de savoir s'il a été établi, selon la prépondérance des probabilités, que la conclusion de fait sur laquelle s'appuie la cotisation est erronée. À mon sens, cette preuve a été faite.

[6]      Seul l'appelant a témoigné à l'audition de l'appel. Il a déclaré qu'il avait eu deux crises cardiaques en 1996. Il a produit un diagramme du coeur humain sur lequel son médecin avait indiqué l'étendue des dommages cardiaques. Les dommages prenaient la forme d'artères obstruées en totalité ou en partie et de tissus malades. L'appelant a témoigné que son cardiologue lui avait dit qu'il avait une déficience totale[1] et qu'il ne pouvait plus travailler. Il prend des médicaments qui lui sont prescrits par ses médecins pour soulager des problèmes respiratoires et des problèmes de pression artérielle. Il affirme que, en 1997, il ne pouvait marcher que sur de courtes distances, à pas très lents. Il a constaté, et il constate encore, qu'il ne peut monter plus de six à huit marches à la fois sans s'arrêter pour se reposer. Des efforts plus vigoureux déclenchent des crises d'angine, ce qui l'oblige à prendre de la nitroglycérine. L'appelant a été contre-interrogé au sujet de la distance sur laquelle il pouvait marcher durant l'année en cause. Selon lui, il est et était incapable de faire plus de soixante-quinze pieds sans s'arrêter pour se reposer.

[7]      Il avait subi une épreuve d'effort. Il a témoigné qu'il n'avait pas tenu longtemps sur le tapis roulant, une minute et demie peut-être, en marchant lentement.

[8]      Deux certificats pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées ont été produits en preuve; le premier était daté du 29 avril 1997 et portait la signature du médecin de famille de l'appelant, le Dr Mahaney, et le second était daté du 26 mars 1998 et portait la signature d'un certain Dr MacDonald, le cardiologue de l'appelant.

[9]      Sur le premier certificat, le médecin indique que l'appelant souffre d'une grave maladie coronarienne, qu'il fait facilement des crises d'angine et qu'il faut peu de choses pour provoquer un « CHE » [2]. Le médecin poursuit en précisant que ces déficiences limitent de manière générale la capacité de l'appelant d'accomplir les activités courantes de la vie quotidienne. Il répond par l'affirmative à la question no 2 : « Votre patient peut-il marcher, à l'aide d'un appareil si nécessaire? » Plus loin, il répond par la négative à la question no 9 : « La déficience est-elle suffisamment grave pour limiter toujours ou presque toujours les activités courantes de la vie quotidienne ci-dessus mentionnées même avec des soins thérapeutiques et avec l'aide des appareils et médicaments indiqués? »

[10]     Sur le second certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées, il est indiqué que l'appelant souffre de [TRADUCTION] « trois maladies coronariennes inopérables avec dysfonctionnement du    "LV"[3] » . À la question no 2, qui porte sur la capacité du patient de marcher, le médecin a coché la case « oui » , mais il précise que l'appelant peut avoir des crises d'angine. À la question no 9, qui vise à déterminer si la déficience est suffisamment grave pour limiter l'activité courante de la vie quotidienne mentionnée précédemment, le médecin a tracé une flèche dans les cases « oui » et « non » et a ajouté ceci : [TRADUCTION] « à l'occasion, très limitée par des crises d'angine » . On prendra note du fait que ce formulaire a été rempli juste après la fin de l'année d'imposition 1997, et je suis convaincu qu'il fait état de l'opinion du Dr MacDonald en 1997. La réponse à la question no 9 satisfait donc aux exigences de l'alinéa 118.3(1)a.2) en ce qui concerne la production d'un certificat[4].

[11]     L'appelant fonde sa demande sur le sous-alinéa 118.4(1)c)(vi), soit l'incapacité de marcher. Les dispositions de la Loi se rapportant au crédit d'impôt pour personnes handicapées doivent être interprétées avec humanité et compassion[5]. Selon moi, les problèmes cardiaques de l'appelant expliquent sa conviction, subjective mais sincère, que le moindre effort peut provoquer une crise d'angine ou, ce qui est pis encore, une crise cardiaque caractérisée et peut-être même fatale. Cette conviction ou cette crainte régit ou limite continuellement la capacité de l'appelant de marcher sur une distance acceptable. C'est de cette manière que j'interprète la preuve, ainsi que la tentative du Dr MacDonald de fournir des renseignements sur le formulaire rigide qu'est le certificat pour le crédit d'impôt pour personnes handicapées. La conclusion de fait sur laquelle est fondée la cotisation est donc erronée. J'appuie ma conclusion sur ce que j'ai observé des déplacements de l'appelant durant l'audition de son appel.


[12]     L'appel sera admis et la cotisation sera déférée au ministre pour nouvelle cotisation en tenant compte du fait que l'appelant a droit au crédit d'impôt en question.

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour de juillet 2000.

« Michael J. Bonner »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour d'octobre 2003.

Philippe Ducharme, réviseur



[1] Voir l'alinéa 118.4(1)d). Même si le travail n'est pas une activité courante de la vie quotidienne, le point de vue du médecin donne une idée de la gravité du problème de santé et de ses effets.

[2] Le sigle anglais n'a pas été expliqué.

[3] Le sigle anglais n'a pas été expliqué.

[4] Je suppose que la flèche se voulait un moyen de cocher les deux cases. En ce qui concerne l'excédent de crochets, comparer avec l'affaire Kenneth G. Morrison c. SMR (97-2334(IT)I), un jugement daté du 19 mai 2000.

[5] Johnston c. La Reine, C.A.F., nos A-347-97 et A-348-97, 6 février 1997 (98 DTC 6169).

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