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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20020108

Dossier: 2001-3066(IT)I

ENTRE :

BARRY BISSONNETTE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

(Rendus oralement à l'audience à

Cranbrook (Colombie-Britannique) le 8 janvier 2002.)

Le juge Miller, C.C.I.

[1]      M. Bissonnette interjette appel relativement à son année d'imposition 1999. L'appel concerne certains paiements qui, prétend M. Bissonnette, représentent des frais qui sont admissibles en tant que frais médicaux conformément à l'alinéa 118.2(2)a) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[2]      En décembre 1999, M. Bissonnette et son épouse étaient allés au Mexique faire un séjour de deux semaines dans un centre appelé Sanoviv. Celui-ci était annoncé comme étant un centre de santé, mais consistait en partie en un hôpital privé agréé. Voici comment il est décrit dans une brochure publicitaire qui a été déposée comme pièce au procès :

[TRADUCTION]

Le centre Sanoviv a été construit dans un esprit de tranquillité élégante. Situé dans la baie du repos de la Basse-Californie, sur un promontoire donnant sur le Pacifique, Sanoviv offre un milieu optimal pour se ressourcer et se régénérer. Une combinaison de facteurs atmosphériques, électromagnétiques et géographiques favorables fait de Sanoviv l'un des endroits les plus sains sur la terre. Les invités utilisent la bibliothèque, la salle à manger et le salon du manoir Lévi-Strauss, qui ont été restaurés authentiquement. Le spectaculaire grand hall mène à un magasin de produits santé, à des installations psychospirituelles et à une cuisine éducative. Les tours Sanoviv comprennent 47 suites luxueuses, une salle à manger, 20 salles d'évaluation de santé et de thérapie, un hôpital agréé, un laboratoire, une salle de conférences et des installations thermales.

[3]      Les Bissonnette avaient appris l'existence de Sanoviv parce que Mme Bissonnette avait eu des relations d'affaires avec le fondateur de Sanoviv, un certain docteur Wenz. Pour le séjour de deux semaines des Bissonnette, le centre Sanoviv avait demandé un tarif forfaitaire de 10 000 $ américains, ce qui représente environ 15 000 $ canadiens. De ce montant, Revenu Canada a admis environ 5 500 $ canadiens au titre de services médicaux légitimes. Le solde d'environ 9 500 $ a été refusé, tout comme les frais de déplacement de 1 064 $ des Bissonnette pour le voyage aller-retour au Mexique.

[4]      Dans leurs autorisations de sortie, on avait diagnostiqué ce qui suit à M. et Mme Bissonnette : obésité exogène accompagnée de troubles de régulation du taux de glucose et de diabète de type 2 dans le cas de M. Bissonnette; obésité exogène, douleur lombaire, incontinence urinaire et hernie hiatale dans le cas de Mme Bissonnette.

[5]      Les Bissonnette ont reçu à Sanoviv une grande variété de traitements faisant appel aussi bien à la médecine officielle qu'à la médecine dite « douce » ou « parallèle » . J'énumérerai simplement certains de ces traitements : vitamines et suppléments minéraux, biorésonance, thermes et massages, lavement de l'intestin, hydrothérapie, recommandations en matière de régime alimentaire et de mode de vie. En outre, les Bissonnette ont suivi des cours en guérison, nutrition, humour et méditation. On n'a présenté aucune preuve indiquant que les vitamines et les suppléments avaient été délivrés sur ordonnance. On a cherché à ventiler les coûts de ces divers traitements, mais c'était difficile, car il était clair qu'il s'agissait d'un forfait de 10 000 $ américains.

[6]      Il était également clair que, malgré ce qui semblait être un gîte de premier ordre, les traitements n'étaient pas particulièrement agréables. M. Bissonnette a dit que le régime alimentaire consistait seulement en des légumes et de l'eau, mais le « festin quotidien » dont parlent les documents publicitaires a l'air un peu plus tentant que cela. Si c'était seulement des légumes, ils étaient assurément bien apprêtés.

[7]      M. et Mme Bissonnette ont tous deux reconnu que le coût de la chambre et de la pension était d'environ 6 000 $ américains, mais ils maintenaient que tout cela faisait partie de l'ensemble des services médicaux fournis. Le montant relatif à la chambre et à la pension représente, avec le montant des frais médicaux effectivement admis par l'Agence des douanes et du revenu du Canada, la quasi-totalité du tarif de 10 000 $, puisque le montant admis par l'ADRC est d'environ 3 700 $ américains. La principale prétention de l'appelant est donc que les 6 000 $ américains au titre de la chambre et de la pension représentent des services médicaux.

[8]      Dans des documents de Sanoviv, l'établissement lui-même semble répartir ses traitements entre des services hospitaliers et médicaux ordinaires d'une part et, d'autre part, des services comme les massages, la chélation, la thérapie à l'ozone, les lavements de l'intestin et la biorésonance. Les Bissonnette ont tous deux déclaré qu'ils se sentaient tous deux en meilleure santé grâce à l'expérience qu'ils ont vécue à Sanoviv. En fait, Mme Bissonnette a déclaré qu'aucun traitement prescrit par un médecin du Canada n'avait donné d'aussi bons résultats. Elle a fourni des lettres datées de mai 2001 dans lesquelles deux médecins canadiens disent que, à leur connaissance, aucun centre semblable n'existe au Canada.

[9]      La question est simplement de savoir ce qui est inclus ou non dans l'expression « services médicaux » . Cette expression est définie à l'alinéa 118.2(2)a), qui se lit en partie comme suit :

Pour l'application du paragraphe (1), les frais médicaux d'un particulier sont les frais payés : à un médecin, à un dentiste, à une infirmière ou un infirmier, à un hôpital public ou à un hôpital privé agréé, pour les services médicaux ou dentaires fournis au particulier, à son conjoint [...]

[10]     Ni l'une ni l'autre des parties n'a pu fournir une définition juridique concise des termes « services médicaux » , mais l'avocate de l'intimée a présenté de la jurisprudence qui aide à déterminer ce qui n'est pas des services médicaux et elle soutenait bien catégoriquement que le coût de la chambre et de la pension dans un agréable centre de santé mexicain ne représente absolument pas des services médicaux. Je suis d'accord avec elle.

[11]     Je suis heureux que M. et Mme Bissonnette se soient vraiment sentis mieux après leur séjour de deux semaines au Mexique. Je n'ai assurément pas besoin que l'on me convainque qu'un certain nombre de traitements qui font appel à la médecine parallèle et qui sont combinés à de bonnes habitudes en matière de régime alimentaire et d'exercice peuvent avoir une influence remarquablement favorable sur la santé de quelqu'un. Toutefois, la Loi de l'impôt sur le revenu indique d'une manière très précise au paragraphe 118.2(2) ce qui est admissible comme frais médicaux et, pour que des frais soient considérés comme admissibles en vertu de l'alinéa 118.2(2)a), il doit s'agir de frais pour des services médicaux.

[12]     À ce stade-ci dans l'évolution de la pratique de la médecine au Canada, les traitements relevant de la médecine parallèle commencent tout juste à jouir d'une certaine reconnaissance en tant que traitements médicaux justifiés et bien documentés. Je crois que la jurisprudence qui sera établie au cours des prochaines années élargira notre compréhension de ce qui peut légitimement être considéré comme des services médicaux. Je crois toutefois aussi que, selon l'interprétation la plus libérale des termes « services médicaux » , les frais de 6 000 $ américains pour la chambre et la pension dans un centre de santé ne sont pas admissibles. Il ne s'agit pas d'un cas permettant d'élargir la définition de « services médicaux » . Pour ce qui est de leur voyage au Mexique, M. et Mme Bissonnette devraient être heureux que, premièrement, ils se soient sentis beaucoup mieux et, deuxièmement, que l'ADRC ait admis environ 5 500 $ canadiens au titre de certains des frais engagés à Sanoviv. Comme il s'agit de frais qui ont été payés pour obtenir des services médicaux qui, j'en suis convaincu, pourraient être obtenus dans cette région de la Colombie-Britannique, je ne peux non plus admettre les frais de déplacement de 1 064 $; en vertu de l'alinéa 118.2(2)h), il faudrait qu'il ne soit pas possible d'obtenir dans cette localité des services médicaux sensiblement équivalents, ce qui n'était clairement pas le cas.

[13]     Il peut n'y avoir au Canada aucun centre de santé semblable qui offre des services médicaux et des services relevant de la médecine parallèle. Sincèrement, c'est dommage. Je conviens avec Mme Bissonnette qu'un centre polyvalent comme Sanoviv est précurseur. Toutefois, les frais engagés en 1999 et non admis ne sont tout simplement pas admissibles en vertu du paragraphe 118.2(2) comme frais payés pour des services médicaux.

[14]     L'appel est donc rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de février 2002.

« Campbell J. Miller »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de juin 2003.

Yves Bellefeuille, réviseur

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