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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

97-122(IT)I

ENTRE :

ROBERT C. QUINN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

Appel entendu le 10 octobre 1997 à Toronto (Ontario), par

l'honorable juge suppléant J. F. Somers

Comparutions

Avocat de l'appelant :                          Me N. Bergstein

Avocat de l'intimée :                            Me A. Evans

JUGEMENT

          L'appel interjeté à l'encontre des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour de novembre 1997.

« J. F. Somers »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de septembre 2003.

Isabelle Chénard, réviseure


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 19971103

Dossier: 97-122(IT)I

ENTRE :

ROBERT C. QUINN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge suppléant Somers, C.C.I.

[1]      Le présent appel a été entendu à Toronto, en Ontario, le 10 octobre 1997, sous le régime de la procédure informelle de la présente cour.

[2]      Lorsqu'il a établi une nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a refusé la déduction des pertes locatives; il a décidé que l'appelant n'avait pas une attente raisonnable de profit en ce qui concerne la location de la propriété au cours des années d'imposition 1991, 1992 et 1993, que les pertes représentaient des dépenses personnelles et des frais de subsistance et que la nouvelle cotisation de l'appelant était correctement établie en vertu des alinéas 18(1)a) et 18(1)h) de la Loi de l'impôt sur le revenu.

[3]      Pour établir cette nouvelle cotisation à l'égard de l'appelant, le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes, qui ont été admises ou niées par l'appelant :

          [traduction]

a)          En juillet 1990, l'appelant a acheté la propriété située au 82, croissant Waterford, à Stoney Creek, en Ontario                         (la « propriété » ) pour une somme de 238 353,66 $; (admise)

b)          la propriété achetée a été financée grâce à un versement initial de 38 353,66 $, à une hypothèque de premier rang de 88 000 $ sur la propriété, et à une hypothèque de premier rang de 112 000 $ sur la résidence principale de l'appelant à Mississauga; (admise)

c)          en juillet 1991, l'appelant a commencé à louer la propriété; (admise)

d)          pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993, l'appelant a déclaré les revenus de location bruts, les frais de location et les pertes locatives indiqués aux annexes A, B et C; (admise)

e)          les reçus, les factures ou d'autres documents fournis au ministre par l'appelant ne justifiaient pas totalement les dépenses réclamées; (niée)

f)           l'appelant a déclaré une perte locative se rapportant à la propriété pour une autre année comme l'indique le tableau ci-dessous : (niée)

                        Année                                                   Pertes

                        1990                                                     14 132 $

g)          le loyer exigé n'était pas suffisant pour couvrir les frais d'exploitation fixes (intérêt hypothécaire et impôt foncier) liés à la propriété; (niée)

h)          l'appelant n'avait pas d'attente raisonnable de profit en ce qui concerne la location de la propriété au cours des années d'imposition 1991, 1992 et 1993; (niée)

i)           les frais de location représentaient des dépenses personnelles ou des frais de subsistance de l'appelant. (niée)

[4]      L'appelant, qui exploite sa propre entreprise depuis 1978, a décidé, à titre d'investissement, d'acheter une propriété située à Stoney Creek, en Ontario, dans le but de la louer. La propriété est située sur le bord du lac Ontario; elle a été achetée en juillet 1990 pour la somme de 238 353,66 $. L'achat a été financé grâce à un versement initial de 38 353,66 $, à une hypothèque de premier rang de 88 000 $ sur la propriété et à une hypothèque de premier rang de 112 000 $ sur la résidence principale de l'appelant à Mississauga.

[5]      La propriété est située dans une collectivité voisine de Toronto où se trouve un yatch-club destiné aux gens actifs qui aiment le plein air. Après avoir pris des renseignements, l'appelant a cru pouvoir tirer des revenus suffisants et réaliser éventuellement un profit.

[6]      Il a proposé à ses beaux-parents retraités de louer la propriété en question. Il a obtenu une entente verbale selon laquelle ils loueraient la propriété pour 2 000 $ par mois. Malheureusement, sa belle-mère est tombée malade en septembre 1990 et est décédée en février 1991. Son beau-père est décédé en mai 1991. Dès septembre 1990, ils n'avaient plus été intéressés à louer la propriété.

[7]      Il était prévu que le loyer serait de 2 000 $ à 3 000 $ par mois. Toutefois, le revenu qu'il avait prévu n'était pas fondé sur l'opinion d'un agent immobilier. L'aspect promotionnel du projet communautaire l'a influencé. Sur les conseils de son comptable depuis 15 ans, il a conclu, avec ce dernier, qu'il s'agirait d'un bon investissement.

[8]      Cependant, il y a eu une baisse dans le marché immobilier, et la propriété n'a été louée qu'en juillet 1991 à un prix beaucoup moins élevé que prévu. À partir de septembre 1990, il a mis la propriété en vente. Il s'est rendu compte qu'il ne pouvait pas louer la propriété au prix projeté. Il l'a finalement louée en juillet 1991 pour une somme de 1 200 $ par mois en vertu d'un bail de deux ans.

[9]      Lorsque ce bail de deux ans a pris fin, l'appelant a mis la propriété en vente. Entre-temps, aux termes d'un bail mensuel conclu oralement, il a loué la maison pour un loyer de 1 000 $ par mois. Les chèques postdatés du locataire au montant de 1 000 $ chacun n'ont pas été honorés. Le locataire n'a pas quitté les lieux de plein gré. Un jugement a finalement été prononcé contre le locataire et a accordé 3 000 $ plus les dépens à l'appelant.

[10]     En raison de la baisse du marché immobilier, des attentes moins élevées en ce qui a trait au prix de location et des pertes subies en 1994 et 1995, il a vendu la propriété en février 1996 pour une somme de 144 000 $. Entre le moment de l'achat et celui de la vente, il a réduit le montant du prêt hypothécaire afin de faire baisser les frais d'intérêt.

[11]     Avant d'acheter la propriété, l'appelant et son comptable agréé avaient examiné les différents facteurs et conclu que l'achat serait un investissement profitable. Le comptable agréé a témoigné pour le compte de l'appelant et a admis qu'en 1990, il ne possédait aucune expertise dans le domaine du marché immobilier. Toutefois, il a indiqué que le marché immobilier était en plein essor en 1990, mais qu'en 1991, les prix ont chuté considérablement.

[12]     Le comptable agréé a préparé les prévisions de revenus de location suivantes pour les années 1991 à 1998 (pièce A-5) :

            [traduction]

Robert C. Quinn

Revenu de location prévu

82, croissant Waterford

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Revenus

14 400 $

15 120 $

15 876 $

16 670 $

17 504 $

18 379 $

19 298 $

20 263 $

Dépenses

Impôt foncier

3 700

3 885

4 079

4 283

4 497

4 722

4 958

5206

Intérêt

22 038

16 153

14 109

13 602

12 687

11 699

10 632

9 480

Assurance

450

473

497

522

548

575

604

634

Réparations et autres

500

525

551

579

608

638

670

704

26 688

21 036

19 236

18 986

18 340

17 634

16 864

16 024

Revenu net(perte)

-12 288 $

- 5 916 $

- 3 360 $

- 2 316 $

-836 $

745 $

2 434 $

4 239 $

Robert C. Quinn

Prévisions de location révisées

82, croissant Waterhouse

1991

1992

1993

1994

1995

1996

1997

1998

Revenus

13 200 $

13 200 $

13 860 $

14 553 $

15 281 $

16 045 $

16 847 $

17 689 $

Dépenses

Impôt foncier

3 700

3 885

4 079

4 283

4 497

4 722

4 958

5 206

Intérêt

22 038

16 153

14 109

13 602

12 687

11 699

10 632

9 480

Assurance

450

473

497

522

548

575

604

634

Réparations et autres

500

525

551

579

608

638

670

704

26 688

21 036

19 236

18 986

18 340

17 634

16 864

16 024

Revenu net (perte)

-13 488 $

-7 836 $

-5 376 $

-4 433 $

-3 059 $

-1 589 $

- 17 $

1 665 $

[13]     En fait, les revenus de location pour les années 1991, 1992 et 1993 étaient de 6 600 $, de 13 200 $ et de 6 600 $ respectivement. Mis à part l'impôt foncier, l'entretien, les réparations et les frais d'assurance, l'intérêt sur le prêt hypothécaire était en soi plus élevé que le revenu de location. Pour les mêmes années, soit 1991, 1992 et 1993, l'intérêt sur le prêt hypothécaire était de 22 039 $, de 16 153,60 $ et de 14 609,95 $ respectivement. Les sommes déduites pour ces années au titre des pertes locatives sont de 18 911 $, de 7 704,43 $ et 13 284,73 $ respectivement.

[14]     Dans l'arrêt inédit Zahid Mohammad et Sa Majesté la Reine,

A-652-96, daté du 28 juillet 1997, la Cour d'appel fédérale a indiqué ce qui suit :

Dans bon nombre de cas, la composante intérêts est si importante qu'une perte locative est enregistrée avant même que d'autres dépenses locatives autorisées soient prises en compte dans l'état des résultats. Les faits sont tels qu'il n'est pas nécessaire d'avoir l'expérience d'un analyste du marché immobilier pour comprendre qu'un bénéfice ne peut être réalisé tant que les frais d'intérêts ne sont pas réduits en remboursant le capital du prêt.

[15]     Dans l'affaire en l'instance, la preuve a montré que les frais d'intérêts étaient plus élevés que le capital du prêt. Selon les chiffres présentés à la Cour, l'appelant a le fardeau de prouver qu'il y avait une attente raisonnable de profit. On n'a appelé aucun témoin expert qui aurait pu éclairer la Cour sur la valeur marchande de la propriété avant et après l'achat de cette dernière. Bien que l'emplacement d'un projet communautaire sur la rive du lac Ontario puisse, compte tenu de toutes les activités récréatives qu'il offre, sembler assez attrayant pour y établir une résidence personnelle, rien ne prouve toutefois qu'il serait attrayant pour exercer des activités locatives et produire un revenu qui justifierait une attente raisonnable de profit.

[16]     L'appelant n'a pas prouvé qu'il avait une attente raisonnable de profit dans les circonstances. L'appelant n'a présenté aucune preuve expliquant pourquoi il espérait tirer des revenus de location de 14 400 $ à 20 263 $ pour les années d'imposition 1991, 1992 et 1993. Le revenu de location prévu, comme l'indique l'annexe préparée par le comptable agréé, ne constituait qu'un calcul comptable. Ni l'appelant ni le comptable agréé n'ont pu fournir une explication raisonnable en ce qui concerne l'exactitude des revenus de location prévus.

[17]     En raison de toutes les circonstances de l'affaire en l'instance, l'appelant n'avait pas d'attente raisonnable de profit en ce qui concerne la location de la propriété au cours des années d'imposition 1991, 1992 et 1993.

[18]     L'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour de novembre 1997.

« J. F. Somers »

J.S.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de septembre 2003.

Isabelle Chénard, réviseure

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