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[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Date: 20010529

Dossier: 2000-2090(IT)I

ENTRE :

DENNIS WHITE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

(rendus oralement à l'audience à

Regina (Saskatchewan) le 24 avril 2001)

Le juge Beaubier, C.C.I.

[1]      Le présent appel, interjeté sous le régime de la procédure informelle, a été entendu à Regina (Saskatchewan) le 20 avril 2001. L'appelant et son épouse, Margaret ont témoigné. L'intimé a appelé à témoigner la vérificatrice affectée au dossier, Nicole Reichel.

[2]      Les paragraphes 7 à 12 inclusivement de la réponse énoncent les questions en litige en l'espèce :

                   [TRADUCTION]

7.                   Dans le calcul de son revenu pour les années d'imposition 1995 et 1996, l'appelant a déduit les montants de 8 958 $ et de 5 071 $ respectivement à titre de pertes d'entreprise (les « pertes d'entreprise » ).

8.                   Dans une nouvelle cotisation établie à l'égard de l'appelant pour les années d'imposition 1995 et 1996, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a refusé la déduction des pertes d'entreprise.

9.                   Pour établir cette nouvelle cotisation, le ministre s'est fondé sur les hypothèses de fait suivantes :

a)                   les faits admis et énoncés précédemment;

b)                   au cours de la période pertinente, l'appelant travaillait à temps plein comme technologue en génie pour W.T. McGinn & Associates;

c)                   l'appelant a déclaré un revenu d'emploi de 41 022 $ et de 34 902 $ pour les années d'imposition 1995 et 1996 respectivement;

d)                   l'appelant s'est lancé dans l'activité d'Amway (l' « activité » ) en 1986 par voie de parrainage;

e)                   l'activité consistait à vendre des produits Amway et à recruter d'autres vendeurs de produits Amway;

f)                     le temps que l'appelant pouvait consacrer à l'activité était réduit au minimum en raison de son emploi à temps plein;

g)                   l'appelant a pour la première fois déclaré l'exploitation d'une entreprise relativement à l'activité à l'égard de l'année d'imposition 1990;

h)                   au cours de la période en question, l'appelant exerçait l'activité avec sa conjointe (la « conjointe » );

i)                     la conjointe de l'appelant en a elle aussi tiré un revenu d'emploi, indiqué sur un feuillet T4, et a reçu des prestations d'assurance-emploi au cours des années d'imposition 1995 et 1996;

j)                     l'appelant a déduit le montant total des pertes découlant de l'activité dans sa déclaration de revenu;

k)                   ni l'appelant ni sa conjointe n'avaient quelque formation ou expérience que ce soit relativement à l'activité;

l)                     avant de se lancer dans l'activité, l'appelant n'a élaboré aucun plan d'affaires en vue de déterminer si l'activité pouvait devenir rentable;

m)                 l'activité ne requiert pas d'importants frais de démarrage;

n)                   l'activité ne requiert pas de contrat de location ni d'importantes dépenses en capital;

o)                   relativement aux années d'imposition 1995 et 1996, l'appelant a déclaré le revenu (la perte) suivant(e) relativement à l'activité :

ANNÉE                       REVENU          DÉPENSES       REVENU   

D'IMPOSITION           BRUT                                       (PERTE) NET

1995                             14 134 $           23 092 $           (8 958 $)

1996                             15 174 $           20 245 $           (5 071 $)

p)                   étaient inclus dans le calcul du revenu brut tiré de l'activité par l'appelant en 1995, soit 14 134 $, des frais de 4 222 $ au titre de l'utilisation d'un véhicule à des fins personnelles et des dépenses personnelles de consommation de 4 072 $;

q)                   étaient inclus dans le calcul du revenu brut tiré de l'activité par l'appelant en 1996, soit 15 174 $, des frais de 2 657 $ au titre de l'utilisation d'un véhicule à des fins personnelles, des dépenses personnelles de consommation de 3 321 $ et des revenus d'autres sources de 2 386 $;

r)                    les frais d'utilisation du véhicule à des fins personnelles, les dépenses personnelles de consommation et les revenus d'autres sources dont il est question aux alinéas p) et q) ci-avant n'ont engendré aucun potentiel de profit pour l'appelant;

s)                    l'appelant a déduit des pertes découlant de l'activité dans chacune des années d'imposition 1990 à 1996 (inclusivement);

t)                     le ministre a admis les pertes de démarrage suivantes, totalisant 16 498 $, pour les années d'imposition 1990 à 1994 :

                        ANNÉE                        PERTE

                        D'IMPOSITION           D'ENTREPRISE

                        1990                             (2 010 $)

                        1991                             (2 899 $)

                        1992                             (1 755 $)

                        1993                             (3 275 $)

                        1994                             (6 559 $)

                        TOTAL                       (16 498 $)

u)                   l'appelant a exercé l'activité dans sa résidence;

v)                   l'appelant a déduit des frais de bureau à domicile, ce qui a augmenté le montant déduit à titre de pertes d'entreprise;

w)                 les frais de bureau à domicile ne sont pas déductibles s'ils ont pour effet d'augmenter ou de créer une perte;

x)                   l'appelant n'a projeté d'effectuer aucun changement important à l'activité dans un avenir prochain;

y)                   l'appelant ne pouvait raisonnablement s'attendre à tirer un bénéfice de l'activité au cours des années d'imposition 1995 et 1996;

z)                    les dépenses déduites relativement à l'activité étaient des frais personnels ou de subsistance de l'appelant.

10.               Subsidiairement, s'il est déterminé que l'appelant pouvait raisonnablement s'attendre à tirer un bénéfice de l'activité et qu'il pouvait donc déduire les pertes de son revenu tiré d'une autre source, ce qui n'est pas admis mais plutôt nié, la proportion des dépenses déduites était incorrecte et, de fait, déraisonnable dans les circonstances.

11.               Les questions en litige sont les suivantes :

a)                   l'appelant pouvait-il raisonnablement s'attendre à tirer un bénéfice de l'activité dans les années d'imposition 1995 et 1996?

b)                   si l'appelant pouvait raisonnablement s'attendre à tirer un bénéfice de l'activité, ce qui n'est pas admis mais plutôt nié, la proportion des dépenses déduites était-elle juste dans les faits et raisonnable dans les circonstances?

12.               Il invoque les articles 3, 4, 9 et 67, le paragraphe 248(1) et les alinéas 18(1)a) et h) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1, (5e suppl.) (la « Loi » ), et ses modifications, pour les années d'imposition 1995 et 1996.

[3]      Les hypothèses énoncées aux alinéas 9 b), c), d), e), f), g), h), i), j), k), m), n), o), p), q), r), s), t), u) et v) n'ont pas été réfutées.

[4]      La question essentielle est de savoir si, compte tenu des faits de l'affaire, l'appelant pouvait raisonnablement s'attendre à tirer un bénéfice de l'activité d'Amway au cours des années 1995 et 1996. Il a entrepris cette activité et l'a exercée dans sa maison, rue Harvey, à Regina. En 1995, la période de démarrage, s'il y en a eu une, était terminée.

[5]      L'appelant a invoqué l'arrêt Tonn c. R., [1996] 2 C.F. 73 (96 D.T.C. 6001) à l'appui de sa thèse. Cet arrêt constitue, de façon générale, un recueil de droit sur le sujet.

[6]      Suivant les critères énoncés dans l'affaire Moldowan c. R., [1978] 1 R.C.S. 480 (77 D.T.C. 5213) à la page 5215, l'appelant n'avait aucune expérience des affaires lorsqu'il a commencé; il n'avait aucune formation, si ce n'est celle qu'il a reçue d'Amway, et l'apport de capitaux requis était minime, ce qui est l'une des raisons pour lesquelles il s'est lancé dans cette activité. Les pertes subies en 1995 et en 1996 incluaient des déductions pour amortissement de 3 229 $ et de 2 261 $ respectivement. Le plan initial de l'appelant se résumait pour l'essentiel aux documents relatifs au plan qu'Amway lui avait remis, à quoi venaient s'ajouter divers documents du gouvernement et de la BDC.

[7]      Les états financiers de l'appelant ont été dressés par un cabinet d'experts-comptables de Regina, probablement sur le fondement des principes comptables généralement reconnus. Toutefois, aux fins de déterminer la rentabilité réelle, ils comportent un certain nombre de lacunes. Voici à cet égard un extrait des états financiers de 1996 :

Revenu :

               « ventes, commissions, droits »                                 8 949 $

               « autre revenu »                                  6 225 $

               c'est-à-dire primes de PV                      247 $

               Rajustement - Frais d'utilisation d'un

               véhicule à des fins personnelles           3 321 $

               Rajustement - Frais d'utilisation d'un

               véhicule à des fins personnelles           2 657 $

Le revenu réel est par conséquent de 247 $ seulement. Donc,

                                                                                                  247 $

                                                                                               9 196 $

On déduit ensuite le montant suivant au

Titre des stocks                                                                       - 12 590

Ce qui donne un résultat négatif                                               - 3 394 $

[8]      De même, les dépenses énumérées incluent un certain nombre de postes qui sont douteux dès le premier regard :

               Véhicule à moteur                        2 167 $

               DPA                                           2 261 $

               Frais non déduits liés à

               l'utilisation de la maison                 749 $

[9]            L'existence même des deux postes intitulés « Rajustement - Frais d'utilisation d'un véhicule à des fins personnelles » de 3 321 $ et de 2 657 $ sous la rubrique « revenu » pour 1996 constitue l'admission d'un usage à des fins personnelles ou d'un intérêt personnel. De même, l'écart entre le montant des ventes, etc. (8 949 $), et le coût des produits (12 590 $), jumelé à l'omission de décrire dans les états financiers en quoi consistaient les dépenses personnelles de consommation de 3 321 $, soulève de nouveau la question de l'usage à des fins personnelles. Ni le témoignage de M. White, ni celui de son épouse, n'ont permis de répondre à l'une ou l'autre de ces questions.

[10]          Le plus important, cependant, est que, au cours des trois dernières années pour lesquelles une preuve a été produite, les pertes déclarées ont augmenté par rapport à celles qui ont été déclarées pour les années précédentes. Les White ont déclaré que des ventes commerciales et la mise en place d'un programme en ligne permettraient de résoudre ce problème. Cependant, aucun élément de preuve relativement au déroulement récent de l'activité d'Amway n'a été présenté à la Cour pour établir la véracité de ces déclarations.

[11]          Mis à part tout intérêt personnel possible, la preuve révèle que les pertes de l'appelant ont, en moyenne, augmenté au fil des ans. De plus, l'appelant n'a pu prouver qu'il existait une possibilité d'augmenter le nombre ou le montant des ventes ou le revenu de commission en aval pouvant permettre de redresser la situation.

[12]          L'appelant n'avait, en 1994 et 1995, aucune attente raisonnable de profit en tant que franchisé d'Amway. Pour ces motifs, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 29e jour de mai 2001.

« D. W. Beaubier »

        J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de février 2002.

Mario Lagacé, réviseur

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