Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Référence : 2004CCI147

Date : 20040213

Dossier : 2003-308(IT)G

ENTRE :

FRANK KLOTZ,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS MODIFIÉS DE JUGEMENT

Le juge en chef adjoint Bowman

[1]      Cet appel se rapporte à une cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1999 de l'appelant.

[2]      En produisant sa déclaration de revenu pour l'année en question, l'appelant a inclus dans le « total des dons » , telle que cette expression est définie au paragraphe 118.1(1) de la Loi, au sous-alinéa a)(i) de ce paragraphe, la somme de 258 400 $. L'appelant a allégué que ce montant représentait la juste valeur marchande ( « JVM » ) de 250 gravures originales qu'il avait données à la Florida State University ( « FSU » ) le 30 décembre 1999 et que ce montant était à inclure dans le calcul du « total des dons de bienfaisance » , telle que cette expression est définie au paragraphe 118.1(1) de la Loi. Il a donc demandé une déduction dans le calcul de l'impôt payable en utilisant le montant de 258 400 $ comme l'un des éléments de B dans la formule énoncée au paragraphe 118.1(3).

[3]      Le ministre du Revenu national a refusé la déduction en se fondant sur le fait que la JVM des gravures était d'au plus 300 $ pour chaque gravure, soit 75 000 $ en tout, le montant payé par l'appelant. Le ministre a également pris la position selon laquelle les gravures n'étaient pas des biens à usage personnel. Le ministre a également imposé des pénalités en application du paragraphe 163(2) de la Loi. L'intimée affirme, en tant qu'allégation distincte de fait, que la JVM des gravures n'était que de 50 $. Elle n'a pas insisté sur ce point dans l'argumentation.

[4]      Le résultat de ces diverses positions est ci-après énoncé :

a)        Si les gravures sont des biens à usage personnel de l'appelant, avec une JVM de 1 000 $ chacune, en application du paragraphe 46(1), le prix de base rajusté ( « PBR » ) est réputé être le plus élevé des montants suivants : 1 000 $ et le PBR calculé par ailleurs, et le produit de disposition calculé par ailleurs. Par conséquent, l'appelant n'a pas réalisé de gain en capital ou de gain en capital réputé parce que le PBR et le produit de la disposition s'élèvent tous deux à 1 000 $ par gravure. L'appelant aurait néanmoins droit à un crédit d'impôt pour don de bienfaisance compte tenu d'une JVM de 1 000 $ par gravure.

b)       Si les gravures ne sont pas des biens à usage personnel, mais si elles avaient néanmoins, à la date où le don a été fait, une JVM de 1 000 $ chacune, l'appelant aurait encore droit au crédit d'impôt pour don de bienfaisance, fondé sur un montant de 1 000 $ par gravure, mais il réaliserait également un gain en capital fondé sur un produit de disposition de 1 000 $ (sous-alinéa 69(1)b)(ii)) et un PBR de 300 $.

c)       Si les gravures sont des biens à usage personnel avec une JVM de 300 $ par gravure, au moment où le don a été fait, l'appelant ne réaliserait aucun gain en capital réputé à cause du paragraphe 46(1), mais le crédit d'impôt pour don de bienfaisance serait fondé sur un montant de 300 $ par gravure plutôt que sur un montant de 1 000 $. De toute évidence, le paragraphe 46(1) n'a aucun effet sur l'application de l'article 118.1.

d)       Si la position subsidiaire prise par l'intimée, à savoir que la JVM des gravures était de 50 $, était admise, le crédit d'impôt pour don de bienfaisance serait réduit encore plus et il n'y aurait de toute évidence aucun gain en capital, et ce, indépendamment de la question de savoir si les gravures étaient des biens à usage personnel. S'il s'agissait de biens à usage personnel, la perte en capital serait nulle (sous-alinéa 40(2)g)(iii)). S'il s'agissait de biens meubles déterminés, la perte pourrait être reportée prospectivement à valoir sur tout gain tiré de la disposition de biens meubles déterminés.

[5]      Les parties sont arrivées à s'entendre sur un exposé conjoint des faits; de plus, quatre témoins ont été cités par l'appelant : l'appelant lui-même, M. Klotz, Joan Krawczyk, marchande d'oeuvres d'art de New York, et deux experts en matière d'évaluation d'oeuvres d'art, Mme Kathleen Laverty et M. Richard-Raymond Alasko.

[6]      L'intimée n'a cité aucun témoin.

[7]      Je ne reproduirai pas au complet le long exposé conjoint des faits. Il fait partie du dossier en cas d'appel. Il est composé de 16 pages, plus un appendice, et 54 recueils de pièces y sont incorporés.

[8]      En résumé, les faits sont les suivants : M. Klotz est l'un d'environ 660 contribuables canadiens individuels qui ont participé à un programme appelé Art for Education ou AFE[1].

[9]      Dans le cadre du programme AFE, les contribuables canadiens acquéraient des gravures à tirage limité qu'ils donnaient à des universités et à des collèges visés par règlement pour l'application de l'alinéa 118.1(1)f) de la Loi. Les contribuables achetaient les gravures des promoteurs du programme pour environ 300 $ chacune et donnaient immédiatement les gravures aux universités ou collèges, en échange de quoi ils obtenaient un reçu de 258 400 $, ce qui correspondait à environ 1 000 $ par gravure, reçu qu'ils utilisaient pour justifier une demande de crédit d'impôt pour don de bienfaisance en application du paragraphe 118.1(3).

[10]     Les promoteurs du programme étaient Galleries Consultants Ltd., une société de l'Ontario, qui a changé de nom et est maintenant connue sous le nom de AFE Consultants Ltd. ( « AFEC » ), Empyrean Galleries Inc. ( « Empyrean » ), une société de l'Alberta, et Curated Prints Ltd. ( « Curated » ), une société du Delaware qui agissait à titre de simple fiduciaire pour Empyrean. AFEC et Curated étaient des sociétés associées.

[11]     Dans le cas de M. Klotz, voici ce qui arrivait : Curated, par l'entremise d'une personne, Hazel Hett, qui avait retenu les services de Mme Krawczyk, acquérait des gravures d'artistes ou de marchands. Selon les instructions données à Mme Krawczyk, il ne fallait pas payer plus de 50 $US et c'était le prix qui était normalement payé. Novak Graphics Ltd., une source canadienne, touchait 50, 55, 70 ou 75 $CAN par gravure. Mme Krawczyk a témoigné qu'elle pouvait parfois acquérir des gravures pour moins de 50 $US, dans certains cas pour aussi peu que 5 $US et dans d'autres cas pour 20 $. Les gravures étaient acquises en grosses quantités. En 1997, en 1998 et en 1999, lorsque le programme était mis en oeuvre, plus de 63 000 gravures ont été acquises.

[12]     Compte tenu des prix auxquels Mme Krawczyk, pour le compte de Curated, pouvait obtenir les gravures, les autres instructions données à Mme Hett peuvent sembler plus ou moins étranges. En effet, la valeur des gravures que Mme Hett acquérait devait être d'au moins 1 000 $CAN. Je dis que la chose est étrange parce qu'une personne raisonnable pourrait trouver anormal que l'on charge une personne d'acquérir des gravures d'une valeur d'au moins 1 000 $CAN à un prix n'excédant pas 50 $US. Mais en fait, la personne raisonnable ne connaîtrait probablement pas les milieux artistiques à New York dans les années 1990 ou les méthodes imaginées pour faire des dons massifs d'oeuvres d'art consentis par bienfaisance une entreprise rentable.

[13]     Il peut être utile d'examiner ce que prévoit le contrat de Hazel Hett. Ce contrat est ainsi libellé :

[traduction]

CONTRAT DE SERVICES PERSONNELS

HAZEL HETT, du 1457, Churchill Drive, WA 98281, s'engage à fournir les services suivants au profit d'Empyrean Galleries Inc., une société dûment constituée en vertu des lois de l'Alberta. Tous les services doivent être fournis dans les États de New York et de Washington.

·         Trouver des locaux acceptables à New York pour l'entreposage et la distribution d'oeuvres d'art.

·         Organiser l'achat de gravures d'une valeur d'au moins 1 000 $CAN. Ces gravures seront livrées à l'entrepôt, à New York.

·         Prendre des dispositions pour faire photographier, à New York, toutes les oeuvres d'art livrées à l'entrepôt.

·         Élaborer et mettre en application un système de contrôle des stocks pour les oeuvres d'art.

·         Élaborer et mettre en oeuvre un programme d'expédition des oeuvres d'art.

·         Trouver et embaucher :

deux évaluateurs qualifiés;

des préposés à l'emballage et à l'expédition au besoin.

·          Prendre des dispositions pour que les oeuvres d'art soient données à des organismes de bienfaisance admissibles.

·          Aider à la conception des brochures de promotion.

·          Aider à la conception de matériel d'information à l'intention de l'équipe de mise en marché.

EMPYREAN GALLERIES INC., en contrepartie de la réception des services susmentionnés, s'engage :

·         à rembourser Hazel Hett de tous les frais engagés à l'égard de la gestion de l'entreprise dans les dix (10) jours de la présentation de la facture;

·         à verser chaque année à Hazel Hett un montant de 300 000 $CAN, les paiements devant commencer à être effectués le 1er janvier 1999.

·         Les parties pourront prolonger la durée du contrat chaque année, à condition de s'être entendues à ce sujet avant chaque date anniversaire.

_______________________               ______________________

Hazel Hett                                             Date

_______________________               ______________________

Empyrean Galleries Inc.                         Date

[14]     En plus de verser 50 $US aux artistes ou aux marchands pour les gravures, Curated engageait d'autres dépenses :

a)       une commission de 5 $ par gravure était versée à la personne qui acquérait les gravures en son nom;

b)      des frais d'entreposage, d'assurance et d'expédition des gravures étaient engagés;

c)       des frais de gestion de 125 ou de 135 $ par gravure étaient versés à la société associée, AFEC. Étant donné que plus de 63 000 gravures ont été données dans le cadre du programme, les frais de gestion se seraient élevés à plus de 8 000 000 $;

d)      des frais étaient engagés aux fins de la prestation des services des évaluateurs, Kathleen Laverty et Roger Woltjen.

[15]     Curated a vendu les gravures aux 660 contribuables canadiens à des prix qui variaient en général de 290 à 320 $ par gravure. Le prix variait en fonction du nombre de gravures qui étaient achetées. L'exposé conjoint des faits renferme deux exemples de factures d'achat. Plusieurs versions étaient utilisées en 1999. Une version utilisée en 1999 est rédigée comme suit :

[traduction]

1 à 9 oeuvres :               Valeur marchande courante

                                    (prix de détail dans les galeries)

10 à 49 oeuvres :           500 $CAN chacune

50 à 99 oeuvres :           350 $CAN chacune

100 à 249 oeuvres :       320 $CAN chacune

250 oeuvres et plus :      300 $CAN chacune

Chaque oeuvre proviendra des stocks de Curated Prints Ltd. et sa juste valeur marchande, telle qu'elle sera déterminée au moyen d'une évaluation indépendante effectuée au moment de la conclusion de la vente, sera d'au moins 625 $US.

Une autre version était rédigée comme suit :

[traduction]

1 à 9 oeuvres :               Valeur marchande courante

10 à 24 oeuvres :           500 $CAN chacune

25 à 49 oeuvres :           360 $CAN chacune

50 à 99 oeuvres :           345 $CAN chacune

100 à 249 oeuvres :       320 $CAN chacune

250 oeuvres et plus :      300 $CAN chacune

On ne sait pas trop ce que veut dire la [traduction] « valeur marchande courante » .

[16]     Certains particuliers associés au programme AFE, et notamment l'évaluatrice, Mme Laverty, ont acquis des gravures dans le cadre du programme et ont obtenu des remises.

[17]     Le volume 5 des 54 recueils de documents est un document préparé par Kroll Lindquist Avey. Ce volume est désigné sous le nom de document Kroll. Il est composé de tableaux résumant les renseignements afférents aux gravures données par les Canadiens et aux gravures données par de nombreux autres donateurs dans le cadre du programme AFE en 1997, en 1998 et en 1999. Ce document renferme un résumé des documents versés dans 11 des 54 recueils de documents se rapportant à un grand nombre des oeuvres achetées dans le cadre du programme, sinon à toutes les oeuvres.

[18]     En résumé, il y avait 24 bénéficiaires, dont 23 sont des établissements d'enseignement américains et l'un est un établissement dans l'État d'Israël. Dans le cadre du programme, 63 074 gravures ont été données. Il y avait un grand nombre d'artistes et de gravures. Il semble que la plupart des donateurs aient acheté suffisamment de gravures pour avoir droit aux prix moins élevés demandés par Curated.

[19]     Le don que M. Klotz a fait à la FSU était composé de 250 gravures créées par 30 artistes. Ces gravures ont été achetées pour la somme de 75 000 $ le 28 décembre 1999 et elles ont été données le 30 décembre 1999, M. Klotz ayant obtenu en échange un reçu pour don de bienfaisance de 258 400 $. M. Klotz n'a jamais vu les gravures, il ne les a jamais eues en sa possession et il n'a eu aucun rôle lorsqu'il s'est agi de les choisir. Les gravures ont été expédiées directement à la FSU. M. Klotz a également participé au programme AFE en 1998 en achetant 333 gravures, qu'il a données au Providence College, à Providence (Rhode Island), et a demandé une déduction pour don de bienfaisance, en se fondant sur une JVM de 381 350 $. Cette année n'est pas en cause devant la Cour.

[20]     M. Klotz est premier vice-président, Marchés financiers, d'une société, Prebon Yamane. En 1997, en 1998 et en 1999, il a gagné un revenu élevé et il s'y connaît fort bien en matière financière. Il fait le courtage de produits dérivés porteurs de taux d'intérêt auprès d'institutions financières.

[21]     M. Klotz a commencé à participer au programme AFE sur les conseils de son conseiller financier, M. David Brill, qui lui avait fait connaître des programmes similaires par le passé. M. Klotz a déclaré avoir confiance en M. Brill. Il n'est pas tout à fait clair que M. Klotz ait su que, sur les frais de gestion de 125 ou 135 $ par gravure que Curated versait à AFEC, cette dernière versait 10 à 15 p. 100 du prix payé aux planificateurs financiers qui recommandaient le programme AFE au contribuable.

[22]     Une chose est claire, quoique ce ne soit probablement pas pertinent aux fins qui nous occupent : c'était purement l'avantage fiscal espéré qui amenait M. Klotz à participer à ce programme. L'élargissement des horizons culturels ou intellectuels des étudiants de la FSU n'entrait pas en ligne de compte. M. Klotz n'a jamais demandé ce que la FSU allait faire des gravures. En 1999, la FSU a reçu 1 450 gravures de divers donateurs et a probablement remis des reçus s'élevant à au moins 1 450 000 $.

[23]     M. Klotz a reçu un grand nombre de documents de promotion du programme AFE. Ces documents renferment une page ou deux de verbiage idéaliste et plutôt spécieux au sujet de l'avantage social qu'offre le don d'oeuvres d'art à des établissements d'enseignement, mais dans l'ensemble, les documents traitent des avantages fiscaux. Deux avis de cabinets d'avocats bien connus ont été reçus. Les avis étaient soigneusement rédigés, mais comme la plupart des avis juridiques que j'ai vus à l'égard d'opérations dans lesquelles la réduction de l'impôt est un facteur important, ces avis sont davantage de la nature d'une dissertation sur les diverses dispositions de la Loi faisant partie de l'arsenal gouvernemental qui pourraient être utilisées aux fins de la contestation du résultat fiscal envisagé. De tels avis sont assujettis à un si grand nombre de réserves, de conditions et d'hypothèses qu'il est difficile de voir comment ils pourraient rassurer un client.

[24]     M. Klotz n'a reçu l'évaluation de Mme Laverty qu'après avoir donné les oeuvres d'art.

[25]     Il est inutile de parler plus longtemps du donateur. M. Klotz a fait un don en masse de gravures à tirage limité à la FSU. Il n'a pas vu ces gravures et il ne les a pas eues en sa possession. Ce qu'étaient ces gravures, à qui elles étaient destinées ou ce que l'on en faisait lui importait peu. Il cherchait uniquement à obtenir un reçu pour don de bienfaisance. Rien de tout cela n'est ici pertinent. Le fait d'avoir une âme charitable n'est pas une condition de l'obtention d'un crédit d'impôt pour don de bienfaisance. Les gens font des dons de bienfaisance pour bien des raisons : à des fins fiscales, commerciales, par vanité, pour des motifs d'ordre religieux, à cause de pressions sociales. Aucun motif en soi ne vicie les conséquences fiscales d'un don de bienfaisance.

[26]     La question principale est la suivante : quelle était la JVM de ces gravures à la date où elles ont été données? Il n'est pas soutenu que leur valeur a augmenté de plus de 300 p. 100 entre le 28 décembre 1999 et le 30 décembre 1999. Selon l'argument invoqué, ces gravures valaient 1 000 $ chacune au mois de décembre 1999 et il importe peu que Mme Krawczyk ou d'autres agents acheteurs aient réussi à convaincre des centaines d'artistes ou de marchands d'oeuvres d'art de se départir de milliers de gravures à tirage limité pour un montant de 50 $US chacune (ou moins, parfois aussi peu que 5 $US) ou que Curated ait pu vendre plus de 63 000 gravures à environ 660 Canadiens pour un montant d'environ 300 $ par gravure.

[27]     Le montant de 1 000 $ avancé à l'égard de la valeur de chaque gravure est fondé sur l'évaluation effectuée par Mme Laverty. Une évaluation a également été effectuée par M. Roger Woltjen. L'évaluation a été présentée en preuve, mais elle n'a pas été produite en tant que rapport d'un témoin expert et M. Woltjen n'a pas été cité pour témoigner. L'autre expert, M. Alasko, a été cité pour faire des commentaires sur les méthodes employées dans les rapports de Mme Laverty et de M. Woltjen. J'ai exclu la partie de ce rapport qui porte sur le rapport de M. Woltjen et je ne parlerai plus de M. Woltjen.

[28]     Mme Laverty fait le commerce d'oeuvres d'art et les évalue également. Le rapport qu'elle a préparé au sujet de la valeur des gravures que M. Klotz avait données à la FSU indiquait le 28 décembre 1999 comme date de prise d'effet; il y était conclu que la valeur des gravures s'élevait à 265 900 $. C'est un montant plus élevé que le montant indiqué dans le reçu qui avait été remis par la FSU, celle-ci remettant habituellement des reçus au moindre des montants établis par M. Woltjen et par Mme Laverty.

[29]     Le rapport de Mme Laverty était composé d'une lettre d'une page à laquelle étaient joints des tableaux renfermant des renseignements sur les gravures qui étaient évaluées, à savoir le nom de l'artiste, la valeur attribuée, le numéro de la gravure dans la série, s'il y avait une série et la méthode de production (sérigraphie, lithographie, gravure sur linoléum, aquatinte ou gravure sur bois). J'ai choisi au hasard comme exemple un artiste, Stephen Davis, et j'ai reproduit ci-dessous les renseignements le concernant qui figurent dans le tableau. Je ne sais pas ce que veut dire le numéro de sept chiffres qui se trouve à gauche ou le numéro de quatre chiffres qui est précédé de la lettre E. Il s'agit probablement d'un genre d'identification.

[traduction]

Davis, Stephen

Sans titre (monotypes) - E7054

- hauteur et largeur = [19,00 x 27,00 pouces] ou [48,26 x 68,58 centimètres]

sérigraphie

3 034 099

1 de 200

1 000 $

3 034 100

2 de 200

1 000 $

3 034 107

9 de 200

1 000 $

3 034 119

21 de 200

1 000 $

3 034 125

27 de 200

1 000 $

Carrés blancs et noirs avec dessin, sans titre - E6987

- hauteur et largeur = [19,00 x 27,00 pouces] ou [48,26 x 68,58 centimètres]

sérigraphie, techniques mixtes

3 033 764

Unique

1 000 $

3 033 773

Unique

1 000 $

3 033 776

Unique

1 000 $

3 033 786

Unique

1 000 $

3 033 792

Unique

1 000 $

[30]     Sur les 250 gravures données par M. Klotz qui ont été évaluées, 201 sont évaluées à exactement 1 000 $ chacune, 13 à 1 100 $, 16 à 1 200 $, 11 à 1 400 $, cinq à 1 500 $, trois à 1 800 $ et une à 2 000 $. On ne peut s'empêcher d'être frappé par le nombre de gravures qui sont évaluées à exactement 1 000 $ chacune. Les rapports de Mme Laverty qui sont remis aux donateurs semblent identiques dans chaque cas sauf en ce qui concerne les chiffres.

[31]     Étant donné qu'il s'agit ici d'une cause type, il convient de reproduire au complet l'évaluation qui a été remise à M. Klotz.

[TRADUCTION]

HORIZON ART GALLERIES (1994) LTD.

Succursale postale Denman Place, boîte postale 47055

VANCOUVER (CB) V6G 3E1 (604) 602-0440

DONATEUR : Frank Klotz

60, Chancery Lane, Oakville (ON) L6J 5P6

BÉNÉFICIAIRE : Florida State University

Inspection :

Dates : 21/11/97, 8/12/97, 20/1/98, 19/6/98, 9/11/98,                  Lieu : Vancouver (CB); New York (NY)

23/7/99, 29/10/99, 5/11/99, 4/12/99                                                   Toronto (ON)

   Date du rapport : 25/01/00                                                                                         État : bon, sauf indication contraire

Article : 250 gravures originales

Conclusion relative à la valeur : 264 900 $CAN                              Date de prise d'effet : 28/12/99

Objet : juste valeur marchande courante (JVMC) aux fins d'un don

Définition de JVMC : prix le plus élevé possible sur un marché libre non assujetti à des restrictions entre un acheteur sérieux et un vendeur sérieux, qui sont tous deux des personnes averties, informées et prudentes, et qui n'ont entre eux aucun lien de dépendance. Autres définitions : EA (épreuve d'artiste) HC (hors commerce) EI (épreuve d'imprimerie) ET (épreuve de travail) BAT (bon à tirer) EET (épreuve d'état), EES (épreuve d'essai).

Méthode : Approche fondée sur les données du marché, le marché pertinent étant représenté par les ventes au détail conclues dans les galeries d'art. Le prix attribué dépend du mode d'utilisation optimale déterminé au moyen de l'analyse de la vente au détail de biens analogues ou similaires, de l'utilisation des indices des prix courants publiés et des similarités de marché, en comparant la réputation de l'artiste et l'historique des ventes, la complexité et l'exploration artistique de la technique, les coûts de production et le chiffre de tirage. La valeur ne comprend pas les droits ou les taxes, et les événements futurs ne sont pas pris en considération.

CONDITIONS

La présente évaluation est effectuée aux conditions ci-après énoncées, qui font toutes partie de l'évaluation sauf si elles sont expressément écartées au moyen d'une mention écrite figurant dans la présente évaluation, signée par tous les intéressés.

Les valeurs ont été établies autant que l'évaluatrice pouvait en juger et ne constituent aucunement une déclaration ou une garantie que cette valeur sera atteinte si les objets en question sont mis en vente aux enchères ou autrement. Les valeurs établies sont fondées sur les renseignements existant à la date de l'évaluation et aucune opinion n'est exprimée au sujet de la valeur future ou, sauf indication contraire, au sujet de la valeur passée.

Les valeurs indiquées sont données pour chacun des objets, à moins qu'il ne soit déclaré qu'elles sont données pour un groupe d'objets. Le total des valeurs individuelles des objets ne doit pas être considéré comme représentant la valeur estimative de l'ensemble de la collection; il s'agit simplement de la somme des valeurs individuelles. Lorsque les valeurs sont données pour un groupe d'objets, la valeur attribuée au groupe est celle de l'ensemble et aucune opinion n'est exprimée au sujet de la valeur individuelle ou proportionnelle de chaque objet du groupe. Sauf indication contraire, les valeurs établies sont fondées sur l'expertise et les compétences générales de l'évaluatrice quant à la fin (valeur recherchée) et à la fonction (utilisation attribuée) en cause et ces valeurs sont celles qui existent sur le marché qui convient le mieux aux objets énumérés. Lorsque l'évaluatrice se fonde sur des renseignements particuliers précis au sujet de l'évaluation, il en sera fait mention par écrit.

Lorsque l'évaluation porte sur un échantillon de l'ensemble, il en sera fait mention, et la chose sera fondée sur l'hypothèse cruciale selon laquelle l'échantillon est représentatif et juste. L'évaluatrice ici en cause s'engage à faire des efforts raisonnables pour s'assurer que les échantillons choisis sont représentatifs et justes, mais aucune garantie expresse ou implicite n'est donnée à ce sujet.

Lorsque l'évaluation est fondée non seulement sur l'objet (ou les objets), mais aussi sur des données ou sur des documents factuels qui auront été fournis, le rapport d'évaluation l'indiquera en y faisant référence et, le cas échéant, des copies de ces données et documents seront jointes à l'évaluation. Si, avec la présente évaluation, la prestation de services additionnels est demandée à l'évaluatrice par le client ou par le mandataire ou l'avocat du client, ou encore par un tribunal judiciaire (par exemple, pour des recherches additionnelles quant à la valeur, des conférences préparatoires, des comparutions devant le tribunal, des dépositions, la préparation à des fins judiciaires et ainsi de suite), la rémunération à verser à l'égard de ces services correspondra au taux horaire habituel exigé par l'évaluatrice à ce moment-là et cette rémunération sera due et payable par le client immédiatement sur réception d'un état de compte.

Sauf indication contraire, les estimations de la valeur sont fondées uniquement sur une inspection visuelle et aucun essai de quelque genre que ce soit n'a été fait. Sauf indication contraire, toutes les gravures sont signées et numérotées. Les dimensions ainsi que les renseignements sur la technique, le titre et les tirages sont déterminés « sur place » et ne sont donc qu'approximatifs. Toutes les données écrites fournies par Curated Prints sont réputées exactes et l'évaluatrice a pris toutes les mesures raisonnables afin d'en confirmer l'exactitude.

La personne soussignée atteste au mieux de sa connaissance que les faits énoncés dans ce rapport sont exacts et qu'il a été pleinement tenu compte de tous les faits disponibles; qu'elle a personnellement examiné les biens évalués, ou dans le cas de séries de gravures, qu'elle a examiné une gravure de la série, et qu'elle n'a aucun intérêt passé, présent ou futur dans le bien évalué; que sauf indication contraire, les estimations de la valeur sont fondées uniquement sur une inspection visuelle, sans qu'aucun essai de quelque genre que ce soit n'ait été effectué, que les frais d'évaluation ne dépendent pas de la valeur à laquelle l'évaluatrice est arrivée et que, sauf indication contraire, personne n'a fourni une aide professionnelle importante à l'évaluatrice; que l'évaluation a été préparée conformément aux AppraisalReport Writing Standard [Normes de rédaction de rapports d'évaluation] de l'International Society of Appraisers, au Code of Ethics [Code de déontologie] de l'ISA et aux Uniform Standard of Professional Appraisal Practice [Règles uniformes de pratique en matière d'évaluation professionnelle] (USPAP). Toute dérogation à ces règles, les motifs de cette dérogation et son effet sur les conclusions tirées par l'évaluatrice au sujet de la valeur ont été discutés au préalable avec le client.

Sauf indication contraire, les valeurs estimatives sont fondées sur un droit de propriété et sur un intérêt possessoire absolus, non assujettis à quelque privilège, fraction d'intérêt ou autre genre de charge ou de cession. Ce rapport est confidentiel et seule l'évaluatrice pourra le modifier. L'évaluatrice ne sera aucunement tenue responsable des modifications non autorisées. Le présent rapport, y compris la page couverture, ne peut pas être reproduit, copié ou utilisé de quelque façon que ce soit, si ce n'est par le client ou le mandataire du client ou par des tiers désignés, sans le consentement de l'évaluatrice.

La personne soussignée est une évaluatrice indépendante d'oeuvres d'art contemporaines.

(Membre agréé, International Society of Appraisers)

[32]     Le rapport d'expert qui a été produit devant la Cour est plus long. Les méthodes employées sont expliquées. La définition de la JVM utilisée est la définition habituelle.

[33]     Étant donné que je ne suis pas prêt à accepter la conclusion tirée par l'évaluatrice au sujet de la valeur, je crois qu'en bonne justice, il convient de citer certaines parties de son rapport d'expert et de donner ensuite les motifs pour lesquels je souscris à la position de la Couronne, même si celle-ci n'a pas cité de témoins. Il peut être risqué de ne citer aucun témoin expert dans une affaire d'évaluation. Néanmoins, la Cour n'est pas tenue d'accepter l'opinion d'un expert et, en fin de compte, la Cour doit en arriver à sa propre détermination de la valeur compte tenu de la preuve dans son ensemble.

[34]     Toutefois, avant de traiter du rapport de l'évaluatrice, il est bon de mentionner un point sur lequel l'avocat de l'intimée a mis l'accent, à savoir qu'en 1998, Mme Laverty a acheté 25 gravures pour la somme de 200 $ chacune et qu'en 1999, elle en a acheté dix pour la somme de 200 $. Mme Laverty a donné ces gravures à un établissement d'enseignement et a demandé un crédit d'impôt pour don de bienfaisance, crédit qui lui a été refusé, des pénalités ayant par ailleurs été imposées. Mme Laverty s'est opposée à la cotisation.

[35]     L'avocat de l'intimée affirme que la preuve présentée par Mme Laverty devrait être rejetée parce que Mme Laverty n'est pas objective et qu'elle a un intérêt dans le résultat. M. Alasko, un expert fort compétent, a adopté un point de vue plus favorable au sujet du manque de jugement de Mme Laverty lorsqu'elle a commencé à participer au programme AFE. Il estimait que Mme Laverty s'était montrée naïve, mais à son avis, cela ne compromettait pas la conclusion qu'elle avait tirée. Il a fait remarquer certains aspects du rapport qui n'étaient pas conformes aux Règles uniformes de pratique en matière d'évaluation professionnelle. Il ne souscrivait pas aux conclusions, mais il a déclaré qu'elles étaient [traduction] « fondamentalement acceptables » . Il a noté un certain nombre de lacunes et il a déclaré que [traduction] « ce n'[était] pas un rapport particulièrement bon » . Voici ce qu'il a dit : [traduction] « Fondamentalement, je crois que le rapport est valable. Il est peu étoffé, mais il est valable. » L'expression « assommer une oeuvre avec des fleurs » nous vient à l'esprit.

[36]     J'ai eu l'impression, lorsque M. Alasko était à la barre des témoins et lorsque j'ai lu la transcription, qu'il s'agissait d'un homme bienveillant qui ne voulait pas causer à Mme Laverty plus d'embarras que celui qui lui avait déjà été causé. Il pouvait tout au plus souscrire au rapport avec tiédeur. Il a clairement fait savoir qu'il ne souscrivait pas aux conclusions.

[37]     Je ne suis pas prêt à rejeter le rapport de Mme Laverty simplement à cause de sa participation peu importante au programme AFE. Mes préoccupations, en ce qui concerne l'évaluation, vont plus loin. L'avocat a remis en question l'objectivité, l'indépendance et la crédibilité de Mme Laverty. Je préfère examiner le rapport objectivement. C'est somme toute l'évaluation plutôt que l'évaluateur qui est ici en cause.

[38]     Le rapport de Mme Laverty est en partie rédigé comme suit :

[traduction]

Curated Prints ( « CP » ) a retenu mes services professionnels au mois de novembre 1997 en vue d'examiner et d'évaluer des gravures originales. CP envisageait d'acquérir des gravures originales en vue de la revente et d'un don ultérieur à des établissements qui pouvaient recevoir des dons de bienfaisance. Ma tâche se limitait à estimer la juste valeur marchande compte tenu de mon expérience (voir l'appendice B : Profil professionnel). Les normes professionnelles ont été observées. Les normes établies par l'International Society of Appraisers ont été appliquées. L'engagement ne dépendait pas des valeurs attribuées, et je n'avais aucun intérêt dans les gravures achetées par CP, y compris les gravures que M. Klotz a par la suite achetées de CP (les « gravures Klotz » ).

Dans le cadre de mon mandat, j'ai personnellement examiné et documenté plusieurs centaines de gravures. Les examens ainsi que le travail de documentation et d'évaluation connexes ont été effectués sur une période de deux ans et demi. Les examens ont eu lieu à New York aux mois de novembre et de décembre 1997, aux mois de janvier, de septembre et de novembre 1998, aux mois de novembre et de décembre 1999 ainsi qu'au mois de février 2000; à Toronto, en 1999, et à Vancouver au mois de décembre 1999. Les examens ont été effectués en présence de personnes dont CP avait retenu les services pour trouver les gravures.

Les oeuvres d'art examinées étaient habituellement des oeuvres à tirage limité et il s'agissait habituellement d'échantillons. La plupart des gravures avaient été créées par des artistes américains dont le marché primaire est situé aux États-Unis. Il a été supposé, compte tenu des garanties fournies par CP, que les autres gravures du même tirage que CP avait achetées étaient en excellent état. Les gravures qui ont été examinées n'ont pas toutes été évaluées. Quant à celles qui l'ont été, les valeurs estimatives étaient exprimées en dollars américains, puis converties en dollars canadiens, au taux de conversion en vigueur, soit un dollar américain contre 1,4 ou 1,5 dollar canadien.

Les valeurs estimatives étaient prudentes, de façon à tenir compte de la possibilité que des remises soient accordées par les marchands détaillants. Les valeurs estimatives variaient de 250 à 1 800 $CAN. Les estimations de la valeur ont été mises à jour périodiquement pendant toute la durée du mandat, de façon qu'il soit tenu compte de l'état changeant du marché. Les conclusions relatives à la valeur pour chaque gravure individuelle ont été soumises à AFE Consultants Ltd. ( « AFE » ), une société qui, selon ce que l'évaluatrice croyait comprendre, aidait les particuliers qui achetaient des gravures de CP à donner ces gravures à des établissements d'enseignement.

L'évaluation était faite à des fins de dons. La définition de la juste valeur marchande qui a été utilisée est la suivante :

Prix le plus élevé possible sur un marché libre non assujetti à des restrictions entre un acheteur sérieux et un vendeur sérieux, qui sont tous deux des personnes averties, informées et prudentes, et qui n'ont entre eux aucun lien de dépendance.

La méthode fondée sur la comparaison des ventes a été utilisée, le marché pertinent étant celui de la vente au détail. Les méthodes du coût ou du coût de remplacement (comparable) ont également été prises en considération. L'estimation de la valeur était fondée sur le mode (la valeur la plus commune ) d'utilisation optimale de biens analogues ou similaires; à cette fin, l'évaluatrice a utilisé les indices de prix courants, les prix de détail suggérés des marchands et les similarités du marché, elle a comparé la réputation de l'artiste et l'historique des ventes, la complexité et l'exploration artistique de la technique, les coûts de production et le chiffre de tirage. La juste valeur marchande ne comprenait pas les droits ou les taxes, et les événements futurs n'étaient pas pris en considération.

B. Conclusions relatives à la valeur

Les valeurs attribuées à chaque gravure Klotz individuelle sont indiquées à l'appendice A. Les valeurs variaient de 1 000 $ à 1 800 $CAN. Pour les 250 gravures Klotz :

la juste valeur marchande était de 264 900 $CAN

au 28 décembre 1999

C. Portée de l'examen

La procédure employée aux fins de l'examen, de la documentation et de la recherche en ce qui concerne les gravures Klotz consistait à examiner au départ les gravures, comme il en a été fait mention dans l'Introduction. À chacun des endroits où les gravures ont été examinées, à part Vancouver, la personne qui achetait les gravures pour le compte de CP était présente. Comme point de départ de l'analyse, CP fournissait dans la plupart des cas une liste des oeuvres, accompagnée de descriptions, de photographies de chaque oeuvre et de renseignements biographiques.

Chaque oeuvre (ou un échantillon provenant du même tirage) a été examinée et les qualités et renseignements suivants ont été notés :

artiste, titre, date de la production, format du papier, format de l'image, qualité du papier, technique d'impression (voir l'appendice C), chiffre de tirage, état et qualité de l'image.

Il a été tenu compte de la complexité de la gravure. La biographie de l'artiste, l'historique des prix, les listes de prix (courants et passés) ont été étudiés. Pendant les deux années et demie où les examens ont été effectués, l'évaluatrice a consacré beaucoup de temps à se rendre dans des galeries d'art, à assister à des ventes aux enchères et à des expositions d'oeuvres d'art, à vérifier le marché de revente, à consulter des publications spécialisées et à effectuer des recherches générales. À l'appendice D figure un tableau résumant par artiste et par gravure toutes les recherches que l'évaluatrice a effectuées en vue de déterminer la valeur marchande des gravures Klotz.

L'évaluatrice a utilisé de nombreuses sources pour procéder à la recherche requise afin d'estimer la juste valeur marchande des gravures Klotz :

1)       Galeries d'art et marchands représentant l'artiste : Des feuilles d'inventaire au détail ont été examinées et les ventes récentes d'oeuvres des artistes qui ont créé les gravures Klotz ont été confirmées verbalement.

2) Listes de prix publiées : Des sources fiables, lorsqu'il s'agit de déterminer les prix de détail, se trouvent dans les listes de prix de détail suggérés de l'éditeur ou du distributeur. Le consommateur individuel peut facilement obtenir les listes de prix dans de nombreuses expositions d'oeuvres d'art partout aux États-Unis, sur Internet et dans les galeries d'art qui représentent exclusivement un artiste. Aux fins de la recherche de la valeur des gravures Klotz, les listes de prix publiées ont été consultées.

3) Oeuvres de référence : Lorsque les qualités d'une oeuvre sont comparées à celles d'oeuvres similaires créées par les mêmes artistes ou à des oeuvres similaires créées par d'autres artistes, les valeurs des oeuvres de référence sont utiles aux fins de l'estimation de la valeur. On a cherché des oeuvres de référence pour toutes les gravures Klotz.

4) Biographies : Les titres de compétence de l'artiste ont été examinés, de façon à connaître le niveau de formation pertinent et le degré de représentation dans les galeries d'art. Les dates et lieux de présentation d'expositions, les listes de collections publiques ou de collections de sociétés, et les sources bibliographiques ont été examinés, de façon à aider à associer un artiste à son groupe de pairs. Ces associations permettent d'établir plus facilement une fourchette de prix raisonnable pour les oeuvres d'un artiste.

5)       Expositions d'oeuvres d'art : L'évaluatrice a régulièrement visité des expositions internationales d'oeuvres d'art en vue de maintenir et de perfectionner sa connaissance du marché des gravures, qui servait à l'évaluation des gravures Klotz.

6) Revues professionnelles : Certaines publications comme Art in Print, Art Business News, ainsi que les catalogues de galeries d'art constituent de bonnes sources de prix pour la plupart des oeuvres récentes des artistes. D'autres revues professionnelles telles que Art in America confirment l'importance d'un artiste au moyen de critiques et d'articles. Ces revues, publiées et examinées chaque mois, ont aidé à l'acquisition des connaissances qui ont été appliquées à l'évaluation des gravures Klotz.

À l'appendice E figure une liste des sources utilisées aux fins de l'évaluation des gravures Klotz.

[39]     Mme Laverty a tenu compte de trois méthodes d'évaluation : à savoir les méthodes fondées sur le revenu, sur le coût et sur les données du marché. Elle a rejeté la méthode du revenu et la méthode du coût et elle a choisi la méthode des données du marché ou méthode fondée sur la comparaison des ventes. En employant cette méthode, elle a expliqué pourquoi elle s'était arrêtée à ce qu'elle a appelé le marché [traduction] « de détail » plutôt qu'au marché [traduction] « de gros » .

[traduction]

La recherche, en ce qui concerne les données du marché ou les ventes comparables, a commencé au moyen de l'examen des marchés de gros et de détail. Il existe un marché de gros de gravures, mais comme c'est le cas pour d'autres marchandises, les opérations sont conclues sur le marché de gros uniquement lorsqu'il existe des conditions spéciales, dont l'une se rapporte à la quantité de gravures qui sont achetées. Les opérations de gros se rapportant à un grand nombre de gravures sont conclues avec des marchands d'oeuvres d'art, à des prix que les membres du grand public qui veulent acquérir une seule gravure ne peuvent pas obtenir. Les éditeurs de gravures, les artistes et les marchands qui continuent à promouvoir les oeuvres des artistes ont directement intérêt à faire en sorte que l'acheteur en gros ne nuise pas au marché qui existe pour les oeuvres des artistes en cause. Toute opération de gros serait fondée sur la protection de la valeur marchande que l'éditeur, l'artiste ou le marchand a cherché, par de pénibles efforts, à établir et à maintenir.

Les gravures Klotz devaient être données à un établissement d'enseignement au profit de ses usagers. L'examen des principales entreprises d'édition et de distribution de gravures indiquait clairement que des centaines de milliers de gravures sont créées et offertes chaque année sur le marché de détail américain. Lorsqu'il est comparé au nombre total de gravures qui se sont vendues dans des points de vente au détail entre les mois de décembre 1997 et 1999, le nombre de gravures que CP a vendues en gros ne représentait qu'un petit pourcentage du marché et ne serait pas suffisant pour avoir des répercussions sur le marché de détail. M. Klotz et d'autres personnes peuvent avoir acheté leurs gravures au prix de gros, mais il existe un marché beaucoup plus étendu pour les gravures au détail.

Le coût et la valeur sont deux notions différentes. Le coût est le prix payé; selon les circonstances entourant l'achat, ce prix peut être fort différent de la juste valeur marchande. En effet, la juste valeur marchande est le prix le plus élevé possible sur un marché libre non assujetti à des restrictions entre un acheteur sérieux et un vendeur sérieux, qui sont tous deux des personnes averties, informées et prudentes, et qui n'ont entre eux aucun lien de dépendance. Le marché le plus commun, aux fins de la détermination de la juste valeur marchande, est le marché de détail et non le marché de gros. L'utilisation optimale de chacune des gravures Klotz individuelles se situe au niveau du détail.

La méthode des données du marché ou de la comparaison des ventes, qui consiste à analyser des biens semblables qui ont été vendus, était la méthode d'évaluation considérée comme la plus utile lorsqu'il s'agissait d'estimer la valeur des gravures Klotz. La valeur attribuée à chaque gravure était fondée sur le mode (la valeur la plus commune) d'utilisation optimale de biens analogues ou similaires; l'évaluatrice a utilisé à cette fin les indices de prix courants et les similarités du marché et elle a comparé la réputation de l'artiste et l'historique des ventes, la complexité et l'exploration artistique de la technique, les coûts de production et le chiffre de tirage. Le marché de détail des gravures du mois de décembre 1997 au mois de décembre 1999 était stable.

3. Marchés pertinents étudiés dans l'application de la méthode fondée sur la comparaison des ventes

Les marchés de détail qui ont été étudiés étaient ceux de la vente au détail ainsi que des ventes aux enchères internationales sur le marché secondaire et des ventes conclues par les marchands sur le marché secondaire. L'étude des ventes aux enchères n'a pas fourni suffisamment de renseignements au sujet de la valeur des gravures Klotz. Les listes de prix des marchands étaient utiles aux fins de la comparaison des ventes. L'étude a permis d'établir que les artistes dont les oeuvres sont facilement disponibles dans des points de vente au détail avaient créé la plupart des gravures Klotz.

Le marché américain de détail des gravures est très étendu; il est défini par de nombreuses structures commerciales différentes. La plus pertinente, pour la plupart des gravures Klotz, qui sont toutes des gravures originales, est la structure commerciale allant de l'imprimeur à l'éditeur au distributeur. Cette structure peut créer et soutenir le marché des gravures, de sorte que si ces oeuvres sont distribuées de façon ordonnée sur quelques années, les prix maximaux peuvent être obtenus.

Les artistes qui ont créé les gravures Klotz appartiennent principalement à deux groupes fondamentaux, mais il y a un certain chevauchement. Les artistes suivants voient ou ont vu leurs oeuvres imprimées, publiées et commercialisées par d'autres : Asmar, Bratt, Diamond, Hall, Hardy, Jian, Jones, Kidder, King, Izquerdo, Morris, Nesic, Slonem, Sonfist, Saito, Tobey, Walker et Zox. Les sociétés qui impriment, distribuent et vendent les oeuvres de leurs artistes par l'entremise d'un réseau de galeries d'art et de ventes aux enchères, soit un système par ailleurs connu comme une distribution ordonnée, régulent le marché pour ces artistes. Il existe également une expectative raisonnable qu'un pourcentage élevé des gravures d'un tirage soient vendues en quelques années. Lorsque ces expectatives ne se concrétisent pas, c'est entre autres à cause de conditions imprévues sur le marché et de circonstances commerciales inhabituelles. Ces éditeurs ou distributeurs utilisent une liste de prix de détail suggérés, que le consommateur peut facilement se procurer. Les artistes de ce groupe produisent plus de six images chaque année, en général tirées en grande quantité, afin de répondre à la demande d'une chaîne de galeries variant de deux ou trois galeries à cinquante ou soixante. La durée économique des gravures dans ce système peut uniquement être de cinq ou six ans avant que celles qui restent soient mises au rancart et que des oeuvres plus récentes soient promues dans les galeries d'art. Les qualités de ces gravures continuent à être les mêmes qu'au moment où elles étaient vendues à leur dernier prix de détail suggéré, de sorte que leur valeur ne diminue pas. Leur prix est soutenu au moyen des ventes continues d'oeuvres similaires créées par les mêmes artistes, par l'entremise des installations du marchand ou de l'éditeur.

Les artistes du second groupe s'occupent eux-mêmes de l'impression, mais ce sont principalement des marchands ou des distributeurs qui distribuent et commercialisent les gravures. Ces artistes sont Consagra, Davis, Hewitt, Kent, Marca-Relli, Mock, Poloukhine, Porter et Storey. Leurs prix sont également soutenus par le marchand ou par le distributeur, mais sur une échelle plus petite. Ces marchands vendent au détail ou à rabais à d'autres marchands, en utilisant un barème mobile lié à la quantité achetée. Ces artistes produisent généralement des tirages plus petits principalement parce que la demande initiale perçue n'est pas aussi forte que dans le cas d'oeuvres promues par l'entremise de grosses sociétés.

Les renseignements obtenus par suite des études de marché effectuées pour les ventes de gravures de Labrie, de Szkola et de Walker étaient minimes. Étant donné qu'aucun renseignement direct sur les ventes n'a été trouvé, on a cherché à les comparer avec des oeuvres comportant des caractéristiques matérielles, une complexité de la technique et une qualité de l'image similaires.

Dans les cas où il y avait un historique des prix auprès d'un éditeur ou d'un distributeur établi, les listes de prix publiées, les listes de prix des galeries d'art et les listes de prix de l'artiste ont été examinées. Pour arriver à une conclusion au sujet de la valeur de chacune des gravures Klotz, l'évaluatrice a accordé plus d'importance aux valeurs obtenues pour la même gravure, puis aux valeurs obtenues pour des oeuvres similaires de l'artiste (dimensions, technique, méthode d'impression, image). Lorsque aucune valeur n'a été trouvée pour une gravure, on a cherché à connaître la valeur d'oeuvres comparables et une valeur raisonnable a été attribuée. Certains artistes produisent et vendent également des oeuvres créées selon d'autres techniques, comme des dessins, des peintures et des sculptures. Les renseignements concernant les prix courants d'oeuvres créées selon d'autres techniques ont été utilisés pour aider à déterminer la valeur courante d'une gravure créée par le même artiste.

L'évaluatrice a également cherché à faire des comparaisons entre les ventes (gravures comportant des qualités similaires créées par le même artiste ou par d'autres artistes) en examinant les prix courants dans les galeries d'art représentant l'artiste ou les listes de prix fournies par des galeries d'art, par des artistes, par des imprimeurs, par des éditeurs ou encore les guides de prix communément utilisés. Ces sources sont énumérées à l'appendice E. L'évaluatrice a cherché à confirmer et à noter les prix de vente au détail auprès de galeries d'art et d'artistes ainsi que dans des expositions internationales d'oeuvres d'art. Certaines normes de l'industrie ont été confirmées lors de recherches effectuées dans des expositions d'oeuvres d'art : les oeuvres du même artiste sont disponibles au même prix par l'entremise de tous les marchands sur le marché primaire de détail, et des prix plus élevés sont attribués aux oeuvres de dimensions plus grandes créées par le même artiste lorsque la technique et la complexité sont par ailleurs similaires. Il y a toutefois une exception lorsque l'artiste décide de ses propres prix et vend ses oeuvres par l'entremise d'un petit nombre de marchands. Il en est ainsi pour les gravures de Mock qui font partie des gravures Klotz.

Lorsqu'ils étaient disponibles, les renseignements biographiques concernant les artistes ont été examinés afin de vérifier le niveau de professionnalisme. Les oeuvres d'artistes ayant une meilleure formation professionnelle et des antécédents crédibles en ce qui concerne les expositions et les collections ont plus de chances de conserver leur valeur ou d'augmenter de valeur que les oeuvres d'artistes de moindre calibre. La plupart des gravures Klotz étaient exécutées par des artistes qui avaient participé à de nombreuses expositions et qui étaient représentés par des marchands.

4. Résultats de l'analyse

Toutes les gravures Klotz se sont vu attribuer des valeurs individuelles, étant donné que l'analyse confirmait que si elles étaient distribuées d'une façon ordonnée, l'utilisation optimale des gravures Klotz consistait à les vendre sur le marché de détail américain, où les gravures sont généralement vendues individuellement. La valeur sur le marché de détail est la valeur la plus pertinente parce que c'est le marché auquel ont accès le plus grand nombre de consommateurs, de sorte que le prix de détail est le prix le plus commun.

M. Klotz a acheté ces gravures de CP à prix réduit compte tenu de la quantité achetée. Le prix de gros est uniquement offert aux consommateurs qui achètent de grandes quantités et le consommateur moyen ne peut pas obtenir ce prix. Le vendeur qui veut obtenir le prix le plus élevé choisirait le marché de détail.

Tels sont les principes sur lesquels la conclusion a été tirée, à savoir que le marché le plus commun pour les gravures Klotz était le marché de détail, où les gravures pouvaient être vendues d'une façon ordonnée au prix le plus élevé sur une période raisonnable de quelques années.

[40]     J'ai reproduit de longs passages du rapport de Mme Laverty parce que, en bonne justice, il est important d'énoncer les motifs pour lesquels je ne le retiens pas. Le rapport semble à première vue plausible. Toutefois, je le rejette, et ce, pour plusieurs raisons :

a)         Même s'il est reconnu que le marché de « détail » est le marché dont il convient de tenir compte, c'est-à-dire les galeries d'art au détail, et principalement celles qui sont situées à New York, la preuve ne permet pas de conclure que le recours à ce marché justifie la JVM déterminée dans le rapport :

(i)                 il n'existe presque aucune preuve de ventes réelles de gravures identiques ou similaires;

(ii)               les listes de prix des marchands ne constituent pas une indication digne de foi du prix sur lequel un acheteur sérieux et un vendeur sérieux s'entendraient;

(iii)             je ne crois pas que ce qu'un marchand d'oeuvres d'art de New York pourrait demander pour une gravure similaire créée par l'un des artistes dont les oeuvres sont visées par le programme prouve quoi que ce soit au sujet de ce que rapporteraient un grand nombre de ces oeuvres si elles étaient toutes mises sur le marché en même temps;

(iv)             la conclusion selon laquelle plus de 80 p. 100 des gravures en cause dans le don Klotz (et probablement dans ceux de tous les autres donateurs) ont été évaluées à exactement 1 000 $CAN (ce qui est une coïncidence extraordinaire puisque c'est le montant mentionné au paragraphe 46(1)) est pour le moins suspecte. Il m'est difficile de croire qu'il n'y a pas de différences dans la myriade de gravures qui ont été évaluées;

(v)               aucune distinction n'était faite à l'égard de l'identité de l'artiste, de la technique utilisée, du nombre de gravures dont était composé un tirage, de l'âge des gravures, du temps pendant lequel les gravures étaient demeurées invendues;

(vi)             la preuve de Mme Laverty selon laquelle les gravures de certains artistes rapporteraient les prix auxquels elle est arrivée si elles étaient mises en vente pendant un certain nombre d'années ne prouve rien au sujet de leur JVM au 30 décembre 1999. En outre, cette conjecture n'est pas étayée par la preuve. Je veux bien supposer, en l'absence d'une preuve réelle, que si nous avions tout le temps voulu, une gravure quelconque d'un artiste particulier pourrait finalement rapporter 1 000 $. Toutefois, je ne suis pas prêt à passer de cette conjecture à la conclusion selon laquelle, le 30 décembre 1999, une centaine de gravures de cet artiste se seraient vendues au prix de 100 000 $ sur le marché libre;

(vii)           certaines des gravures que Curated a obtenues par l'entremise de Mme Krawczyk avaient été acquises chez des marchands comme Szoke Gallery, Novak Graphics et Alex Rosenberg Fine Arts aux prix de faveur autorisés par son mandat. Il est étrange que des marchands aient vendu les gravures à Curated ou à Mme Krawczyk pour la somme de 50 $US ou moins s'il existait un marché de détail où les gravures pouvaient se vendre au prix de 1 000 $ chacune. La preuve de ventes réelles de gravures identiques ou comparables est fort peu abondante, pour ne pas dire inexistante, mais je suis prêt à supposer qu'une des gravures d'un artiste particulier peut être mise en vente dans une galerie d'art de New York au prix de 1 000 $ et que quelqu'un paierait peut-être bien même ce montant. Toutefois, une hirondelle ne fait pas le printemps et je n'en ai certes pas vu une foule;

b)       Le rapport de Mme Laverty pose un problème peut-être plus fondamental : en effet, Mme Laverty a choisi, à mon avis, le mauvais marché. Au cours de la présentation de la preuve et des arguments, on a consacré énormément de temps à identifier et à définir le marché dont un évaluateur devrait tenir compte en déterminant la valeur de ces oeuvres d'art. Arrêtons-nous un instant pour nous demander exactement ce que nous essayons ici de faire. Nous n'évaluons pas une gravure individuelle. Nous évaluons 250 gravures données en masse à une université. C'est la totalité de ce don qui doit être évaluée et il faut chercher à savoir ce que ces 250 gravures rapporteraient sur le marché libre. La meilleure preuve du prix auquel se vendraient 250 gravures est la preuve du prix auquel elles se sont en fait vendues, soit 75 000 $. On rétorquera que cela est contraire à la décision rendue par le juge Beaubier dans l'affaire Malette v. The Queen, 2003 DTC 1078. Cette décision a été portée en appel devant la Cour d'appel fédérale et je devrais peut-être m'abstenir d'en parler, mais étant donné que l'avocat y a accordé énormément d'importance, j'en ferai brièvement mention. Il s'agissait d'un don de 981 tableaux à une galerie d'art publique. Le contribuable évaluait le don à 879 714 $ et la Commission canadienne d'examen des exportations de biens culturels l'avait évalué à 293 246 $. L'évaluatrice de la Commission avait évalué chaque tableau individuellement et avait ensuite appliqué une remise quantitative de 90 p. 100 en se fondant sur la prémisse selon laquelle la disposition avait été faite sur le « marché des abris fiscaux » où la valeur représentait 8 à 15 p. 100 de la JVM des objets. Le dossier ne montre pas clairement d'où venait cette idée. Le fondement sur lequel l'appelant et le peintre avaient déterminé le prix est également mystifiant. Le prix convenu représentait apparemment 25 p. 100 du montant qui devait figurer dans le certificat de la Commission.

[41]     Le juge Beaubier a rejeté la remise quantitative, en se fondant sur la décision Pustina, Whent and Zelinski v. The Queen, 96 DTC 1594, où le juge Mogan avait rejeté l'application d'une remise de ce genre. Ce jugement a été confirmé par la Cour d'appel fédérale.

[42]     Dans l'affaire Pustina, il s'agissait notamment de savoir si l'acquisition et la vente de tableaux de Morrisseau étaient un projet comportant un risque de caractère commercial. Cette position a été rejetée et elle n'est pas ici avancée. Les tableaux avaient été rassemblés sur une période de deux ans pour un montant de 129 350 $, mais pas en grande quantité; les évaluateurs du contribuable les avaient évalués à 992 900 $ et l'intimée avait établi une cotisation en se fondant sur une valeur de 255 155 $. Le juge Mogan a évalué les tableaux à 660 000 $. Sa conclusion de fait a été confirmée par la Cour d'appel fédérale. Toutefois, le juge Mogan faisait face au propre témoin expert de l'intimée, qui évaluait les tableaux à 510 000 $. Il a décidé de ne pas en tenir compte (96 DTC 1609-1610), mais il a tenu compte de toutes les évaluations et il est arrivé à un chiffre qui différait de tous les autres.

[43]     Aucune de ces deux décisions n'est vraiment utile dans ce cas-ci. Je n'applique pas une remise quantitative à une valeur de détail. De fait, je ne saurais pas à quel chiffre appliquer une remise quantitative. Je ne considère pas la valeur de 1 000 $ ou plus par gravure à laquelle est arrivé l'appelant comme une valeur suffisamment digne de foi pour être utilisée comme point de départ à appliquer à une remise quantitative, et ce, même si j'étais porté à le faire.

[44]     J'examine simplement la meilleure preuve disponible pour déterminer la JVM du don de 250 gravures. Le chiffre le plus récent et le plus comparable est celui que M. Klotz a versé à Curated pour ces gravures. On peut se demander si ce chiffre même est trop élevé étant donné que M. Klotz a payé une telle somme parce qu'il croyait qu'une dépense de 300 $ lui donnerait droit à un crédit d'impôt fondé sur un montant de 1 000 $. C'est une question intéressante que je n'ai pas ici à examiner, à savoir si le prix payé pour quelque chose indique vraiment la JVM lorsque l'élément prédominant du prix payé est l'avantage fiscal que l'acheteur s'attend à obtenir par suite de l'acquisition de l'objet. Je n'ai pas à poursuivre l'examen de cette question parce que la Couronne n'a pas proposé un chiffre moins élevé. Dans l'argumentation, on n'a pas insisté sur le chiffre de 50 $US (soit le prix maximum de Mme Krawczyk) qui a été mentionné dans la réponse.

[45]     L'argument principal de la Couronne était que l'ampleur du programme de dons d'oeuvres d'art en grande quantité (Curated à elle seule a vendu 63 000 gravures entre 1997 et 1999) a créé son propre marché.

[46]     À mon avis, l'approche de l'intimée est plus réaliste. M. Alasko a qualifié la vente que Curated avait conclue avec l'appelant d'opération en gros ou d'opération en vrac. L'intimée aurait sans doute préféré que le témoin qualifie l'opération de vente au détail, mais en fin de compte, le nom attribué à la vente importe peu. Elle est ce qu'elle est. Il s'agissait de la vente de 250 gravures pour une somme de 75 000 $ entre deux personnes sans lien de dépendance. Le don de ces 250 gravures a été fait presque en même temps. Quelle meilleure preuve y a-t-il au sujet de la valeur des 250 gravures à ce moment-là? Pourquoi aller à la recherche d'une JVM élusive et dans une bonne mesure hypothétique dans les galeries d'art haut de gamme en vogue à New York lorsque la meilleure preuve nous crève les yeux? Le problème qui se pose en l'espèce est le suivant : un bien est acquis pour une somme de 5 à 50 $, il est vendu à l'appelant pour une somme de 300 $ et on affirme deux jours plus tard que la JVM du bien est de 1 000 $; la chose n'a aucun sens et n'a rien à voir avec la réalité ordinaire du monde commercial.

[47]     L'argumentation a dans une large mesure porté sur un certain nombre de décisions de la United States Tax Court, qui avait eu à statuer sur des arrangements fort similaires. Comme je l'ai fait remarquer dans la décision Aikman v. R., [2000] 2 CTC 2211, confirmé par [2002] DTC 6874, on doit faire preuve de prudence en examinant les arrêts étrangers faisant autorité, mais il faut néanmoins les considérer avec respect et ils peuvent être riches en enseignements s'ils traitent essentiellement du même problème.

[48]     L'affaire Lio v. Commissioner, 85 T.C. 56, se rapproche énormément de la présente espèce. L'avocat de l'intimée a longuement cité la décision rendue dans cette affaire-là et, selon moi, le raisonnement qui y est fait est convaincant.

[traduction]

[...] nous devons d'abord identifier le marché sur lequel les lithographies qui sont ici en cause étaient habituellement achetées par les consommateurs ultimes et déterminer le prix payé sur ce marché [...] Les requérants affirment que les lithographies sont habituellement vendues au public par des galeries et par des marchands d'oeuvres d'art au prix de détail et que les prix demandés par ces galeries et marchands pour les lithographies Nelson et Nierman individuelles sont donc déterminants en ce qui concerne leur juste valeur marchande. Ils maintiennent qu'étant donné que les galeries d'art ont vendu un nombre indéterminé de lithographies Nierman non encadrées provenant du même tirage que celles qui sont ici en cause au prix de 300 $ chacune en 1979 et puisque certaines lithographies non encadrées Nelson similaires se vendaient par correspondance au prix de 150 $ chacune, de 1975 à 1980, et que des lithographies encadrées étaient vendues par une galerie à des prix variant de 260 à 325 $ chacune entre le mois de décembre 1979 et le 28 février 1980, ils ont droit à des déductions pour dons de bienfaisance de 300 $ pour chacune des lithographies Nierman qui ont été données et à des déductions de 150 $ pour chacune des lithographies Nelson qui ont été données. Nous ne souscrivons pas à la définition du marché approprié que les requérants préconisent.

Les particuliers peuvent acheter des lithographies dans les galeries ou chez les marchands qui vendent chaque lithographie séparément, mais ce ne sont pas là les seules sources. De fait, les faits de la présente affaire démontrent que la plupart des lithographies du type ici en cause n'ont pas été achetées à ces endroits. En 1976, en 1977 et en 1978, AAA était le distributeur exclusif des lithographies Nelson et en 1977 (soit l'année d'imposition de M. Lio ici en cause), AAA a vendu 12 225 lithographies. Ces lithographies, dans une proportion de 98 p. 100, ont été vendues à des particuliers en lots de 50 à 400 lithographies. De même, en 1978 et en 1979, Lublin, qui était le distributeur américain exclusif des lithographies Nierman, a vendu 63 p. 100 des lithographies (1 473) à Greenwich, qui a vendu toutes ces lithographies en grosses quantités à des particuliers. Par conséquent, les ventes de ces lithographies par des galeries et par de petits marchands constituaient une partie minuscule du marché; la plupart des ventes ont été conclues par AAA et par Greenwich. En outre, la plupart des ventes conclues par les galeries et par les petits marchands ne visent qu'une lithographie ou quelques lithographies, alors que M. Lio a acheté 150 lithographies et M. Orth en a acheté 100. Les requérants ont acheté les lithographies en question en vrac, mais rien ne montre que les lithographies individuelles n'auraient pas pu être achetées au même prix chez AAA et Greenwich. Il faut donc tenir compte des ventes conclues par AAA et par Greenwich pour déterminer le prix habituellement payé par les particuliers qui achètent de telles lithographies pour leur usage personnel ou afin de les donner à des musées.

À coup sûr, eu égard aux faits qui nous ont été soumis, AAA et Greenwich agissaient à titre de marchands d'oeuvres d'art et les requérants ont acheté les lithographies à titre d'acheteurs individuels. Les lithographies vendues aux requérants étaient vendues à des « consommateurs ultimes » au même titre que les ventes que les galeries d'art et les marchands ont conclues avec d'autres particuliers et sur lesquelles les requérants se fondent. Il est reconnu qu'un consommateur peut payer des prix de détail fort différents pour le même objet selon l'endroit où il décide d'effectuer l'achat et les recherches qu'il fait en vue de trouver les diverses sources d'un objet particulier. [...] Nous n'interprétons pas le mot « détail » tel qu'il est employé dans ce contexte comme voulant dire que lorsqu'un consommateur a le choix entre plusieurs sources, seule la source la plus coûteuse effectue des ventes au détail, toutes les autres sources effectuant des ventes en gros. La vente au consommateur ultime s'entend plutôt de la vente à des personnes qui n'acquièrent pas l'objet en vue de le revendre [...] et le marché qui convient le mieux aux fins de l'évaluation est le marché le plus actif pour l'objet particulier en cause. Or, en l'espèce, le marché le plus actif en ce qui concerne les lithographies Nelson et Nierman était le marché sur lequel les requérants avaient acheté ces lithographies.

[49]     Il importe de noter qu'aux États-Unis, il existe un règlement précis dans lequel il est fait mention du marché sur lequel l'objet est [traduction] « le plus communément vendu au public » . Un tel critère n'est pas imposé par la loi au Canada. En déterminant la JVM, nous n'avons pas à analyser un marché particulier.

[50]     La décision rendue par la United States Tax Court dans l'affaire Samuel E. Hunter v. Commissioner, 51 TCM (CCH) 1533 est également instructive. On y lit ce qui suit à la page 1537 :

[traduction]

Selon les explications que les requérants ont données au sujet de l'écart entre le montant que les gravures leur ont coûté et la juste valeur marchande alléguée des gravures, M. Ackerman, à cause des liens étroits qu'il entretenait avec Marlborough, pouvait obtenir une forte remise sur le prix de détail, remise dont il faisait de son côté bénéficier les requérants. Selon les requérants, Sovereign, par l'entremise de M. Ackerman, achetait les gravures de Marlborough pour un montant correspondant à environ un sixième du prix de détail. Sovereign transférait les gravures à Rocquencourt, qui les vendait ensuite aux requérants pour environ le tiers du prix de détail publié.

Sovereign, par l'entremise de M. Ackerman, a pu obtenir une forte remise sur le prix de détail publié de Marlborough parce qu'il s'agissait de vieilles gravures qui faisaient partie du stock excédentaire de Marlborough. Il est clair à nos yeux que l'opération conclue entre Rocquencourt et les requérants avait été conclue par des parties sans lien de dépendance, étant donné que Rocquencourt avait majoré les prix de 100 p. 100. Le dossier ne renferme aucune explication au sujet de la raison pour laquelle Rocquencourt aurait vendu les gravures aux requérants à un prix inférieur à leur juste valeur marchande. Ni Sovereign ni Rocquencourt ne prétendaient être une organisation sans but lucratif. Si Rocquencourt vendait les gravures pour un montant représentant environ le tiers de ce qu'elle aurait par ailleurs pu obtenir, comme l'affirment les requérants, cela est insensé sur le plan économique. Comme nous l'avons conclu dans la décision Chiu v. Commissioner, précitée, nous concluons également dans ce cas-ci qu'il n'existe aucune explication crédible au sujet de la raison pour laquelle les requérants pourraient obtenir une forte remise. Nous croyons donc que la juste valeur marchande des gravures au mois d'octobre 1978 (ainsi qu'au mois de décembre 1979) était le prix que les requérants ont payé.

[51]     L'avocat a également mentionné la décision Goldstein v. Commissioner, 89 T.C. 38, et la décision Chiu à l'appui de la thèse selon laquelle les listes de prix et quelques ventes isolées conclues par des galeries d'art n'établissent pas la JVM. Ces thèses me semblent plutôt évidentes et n'ont pas à être étayées d'une façon plus détaillée.

[52]     Les arrêts américains et canadiens qui font autorité montrent clairement que la meilleure preuve de la valeur est celle qui se rapporte à la vente réelle du bien en cause.

[53]     Dans la décision Chiu v. Commissioner, à la page 2960, la Cour a dit ce qui suit :

[traduction]

Toutefois, en l'espèce, nous avons ce qui a été décrit comme la preuve la plus fiable de la valeur, à savoir les ventes des mêmes biens conclues peu de temps avant la date d'évaluation. Dans un autre contexte, la Cour d'appel du sixième circuit, soit le tribunal judiciaire devant lequel notre décision peut être portée en appel, a récemment dit que « [l]orsque la détermination de la juste valeur marchande d'un bien est en cause, rien ne saurait être aussi probant que la vente directe du bien en question » .

Dans la décision Hunter, précitée, la Tax Court américaine a dit ce qui suit, à la page 1537 :

[traduction]

Les requérants ont présenté une multitude d'éléments de preuve, notamment des évaluations écrites de l'oeuvre de chaque artiste et le témoignage de trois témoins experts. Ni les évaluations ni les témoins experts n'étaient convaincants. Les experts ont tous omis de tenir compte du prix auquel les requérants avaient acquis les gravures.

La preuve la plus convaincante de la juste valeur marchande des gravures se rapporte au montant que les requérants ont payé pour les acquérir, étant donné en particulier que l'acquisition a eu lieu un an seulement avant la date à laquelle le don a été fait.

[54]     Dans l'arrêt Global Communications Limited, 99 DTC 5377, aux pages 5385 et 5386, la Cour d'appel fédérale a dit ce qui suit :

[...] De plus, il faut présumer que le montant de la vente faite par Petroseis à Karon [pour 2 millions de dollars en espèces] représentait la juste valeur marchande puisque les parties n'étaient manifestement pas liées. Comment les soi-disant experts sont-ils donc arrivés à une juste valeur marchande se situant entre 15 millions de dollars et 19 millions de dollars pour les données? Il est évident que les évaluateurs mandatés par Global n'étaient pas prêts à examiner le prix payé pour les données sismiques sur le marché libre. Selon les éléments de preuve non contredits qui ont été présentés par le ministre, les données sismiques se vendent à environ 10 % de la valeur de leur évaluation.

J'estime que les évaluations qui ne tiennent pas compte des transactions en argent comptant ne sont que des opinions intéressées qui visent à gonfler la valeur des données sismiques et qui doivent donc être rejetées pour les fins fiscales [...]

* * *

Global réplique en affirmant que seuls ses quatre évaluateurs (trois ont été mandatés avant l'achat et le quatrième pour le procès) avaient une expérience pratique en matière d'évaluation tandis que le témoin-expert du ministre n'avait pas ce point de vue pratique. J'estime que la preuve d'évaluation présentée par Global est irrémédiablement viciée. Le fait que les évaluateurs de Global aient été d'avis que le prix auquel Petroseis a vendu les données à Karon n'avait aucun effet sur la valeur à laquelle ils estimaient les données va à l'encontre tant du sens des affaires que du bon sens.

[55]     Dans la décision Aikman, précitée, j'ai dit ce qui suit :

L'intention ou l'espoir d'obtenir un avantage fiscal n'entache pas de nullité le don de bienfaisance. Néanmoins, un appelant court alors le risque que la Commission ou la Cour puisse conclure que la meilleure preuve de la juste valeur marchande est le prix auquel l'objet a été acheté.

[56]     Je n'ai pas changé d'avis. Le fait d'acheter par un heureux hasard dans une vente-débarras, pour un montant de 10 $, un chef-d'oeuvre depuis longtemps perdu, de le donner à une galerie d'art et d'obtenir un reçu pour la valeur véritable du chef-d'oeuvre est une chose. Le fait pour Curated d'acheter des milliers de gravures pour un montant de 50 $, de créer pour ces gravures un marché à 300 $ et de faire ensuite miroiter l'espoir d'une déduction fiscale sur la base d'une valeur de 1 000 $ est tout autre chose. M. Mathew a présenté la cause de l'appelant avec énormément de compétence et d'une façon fort convaincante, mais en fin de compte, le bon sens l'a emporté.

[57]     J'examinerai maintenant la question de savoir si les gravures étaient des biens à usage personnel. Il s'agit d'une question importante parce que si j'avais souscrit à la valeur de 1 000 $ attribuée à chaque gravure par l'appelant, tout en concluant que les gravures n'étaient pas des biens à usage personnel, l'appelant n'aurait pas pu se prévaloir de l'alinéa 46(1)a) et aurait réalisé un gain en capital correspondant à la différence entre son coût réel de 75 000 $ et le produit réputé de 258 400 $. Cette question n'était pas pertinente aux fins de l'établissement de la cotisation parce que, étant donné que la valeur attribuée aux gravures par le ministre (75 000 $) était égale à ce qu'il en avait coûté à l'appelant, il n'y aurait aucun gain en capital ou aucune perte en capital selon la thèse du ministre. Je soulève entre parenthèses la question plutôt intéressante de savoir ce que la Cour aurait pu faire si elle avait souscrit à la valeur avancée par l'appelant (de sorte que cela aurait justifié le crédit d'impôt demandé en application du paragraphe 118.1(3)) tout en concluant que les gravures n'étaient pas des biens à usage personnel, de façon qu'un gain en capital de 183 400 $ aurait été réalisé. Je n'ai pas calculé l'avantage que comporte le crédit d'impôt par rapport à la perte de la protection fournie par le paragraphe 46(1). Bien sûr, il est de droit constant que la Cour ne peut pas augmenter le montant de l'impôt établi dans la cotisation. Compte tenu de la conclusion que j'ai tirée, je n'ai pas à trancher la question.

[58]     Le bien à usage personnel n'est pas défini d'une façon exhaustive. Toutefois, les versions française et anglaise de l'article 54 de la Loi prévoient ce qui suit :



« biens à usage personnel » Sont compris parmi les biens à usage personnel :

a) les biens qui appartiennent au contribuable et qui sont affectés principalement à l'usage ou à l'agrément personnels du contribuable ou à l'usage ou à l'agrément personnels d'une ou plusieurs personnes qui sont :

(i) le contribuable,

(ii) une personne liée au contribuable,

(iii)    lorsque le contribuable est une fiducie, un bénéficiaire de cette fiducie ou toute personne liée au bénéficiaire;

b) toute créance du contribuable relative à la disposition de biens qui étaient réservés à son usage personnel;

c) tout bien du contribuable qui consiste en une option relative à l'acquisition de biens qui seraient, si le contribuable les acquérait, des biens réservés à son usage personnel.

Dans le cas d'une société de personnes, le terme vise également les biens de la société de personnes qui sont affectés principalement à l'usage ou à l'agrément personnels d'un ou plusieurs associés de la société de personnes ou d'une personne liée à cet associé.

"personal-use property" of a taxpayer includes

(a) property owned by the taxpayer that is used primarily for the personal use or enjoyment of the taxpayer or for the personal use or enjoyment of one or more individuals each of whom is

(i) the taxpayer,

(ii) a person related to the taxpayer, or

(iii) where the taxpayer is a trust, a beneficiary under the trust or any person related to the beneficiary,

(b) any debt owing to the taxpayer in respect of the disposition of property that was the taxpayer's personal-use property, and

(c) any property of the taxpayer that is an option to acquire property that would, if the taxpayer acquired it, be personal-use property of the taxpayer,

and "personal-use property" of a partnership includes any partnership property that is used primarily for the personal use or enjoyment of any member of the partnership or for the personal use or enjoyment of one or more individuals each of whom is a member of the partnership or a person related to such a member;

L'expression « biens meubles déterminés » est définie comme suit à l'article 54 :

« biens meubles déterminés » Biens à usage personnel du contribuable, constitués par l'un ou plusieurs des biens suivants qui lui appartiennent, en totalité en partie, ou sur lesquels il détient un droit :

a)     estampes, gravures, dessins, tableaux, sculptures ou autres oeuvres d'art de même nature;

b)     bijoux;

c)      in-folios rares, manuscrits rares ou livres rares;

d)     timbres;

e)      pièces de monnaie.

[59]     On peut au départ se demander à quoi servent les mots qui suivent les mots « sont compris » étant donné que les biens à usage personnel doivent à tout le moins comprendre un bien qui est affecté à l'usage ou à l'agrément personnels du contribuable.

[60]     Ces mots ont pour fonction d'étendre la portée du sens ordinaire des mots « biens à usage personnel » , (ce qui comprendrait certes des biens qu'un contribuable affecte à son usage et à son agrément personnels) en vue de les appliquer :

a)                  aux biens affectés à d'autres fins, par exemple à des fins commerciales, mais affectés principalement à l'usage et au profit personnels;

b)                 aux biens utilisés par des personnes liées ou par les bénéficiaires d'une fiducie;

c)                  aux créances relatives à la disposition de biens à usage personnel;

d)                 aux options relatives à l'acquisition de biens à usage personnel;

e)                  aux biens d'une société de personnes, affectés principalement à l'usage ou à l'agrément personnels d'associés ou de personnes liées.

Le rédacteur de lois se préoccupait apparemment de ce que les biens à usage personnel en tant que tels ne visent pas un certain nombre de biens énumérés.

[61]     Il reste donc à savoir si un bien à usage personnel en soi et indépendamment du sens étendu qui lui est attribué à l'article 54 se limite à un bien appartenant à un contribuable et affecté à l'usage ou à l'agrément personnels du contribuable.

[62]     Selon moi, deux approches sont possibles. Il s'agit en premier lieu de se demander ce qui n'est clairement pas compris dans l'expression « biens à usage personnel » . De toute évidence, cette expression exclut les stocks, les fonds de terre ou les biens amortissables ou encore les immobilisations admissibles utilisées dans le cadre de l'exploitation d'une entreprise ou pour gagner un revenu; de fait, tout bien utilisé ou détenu en vue de réaliser un revenu, et ce, que le revenu soit tiré d'un bien, d'une entreprise, d'un emploi ou d'une quelconque des sources expressément énumérées dans la Loi. J'appellerai cette catégorie générale de biens des « biens à revenu » .

[63]     Selon la première approche, nous aurions des « biens à revenu » et tout le reste serait constitué de biens à usage personnel.

[64]     La seconde approche, préconisée par la Couronne, comporte une définition plus restrictive, c'est-à-dire que le bien doit réellement être affecté à l'usage et à l'agrément du contribuable. L'intimée pose une question de pure forme : [traduction] « Comment ces gravures peuvent-elles être affectées à l'usage ou à l'agrément personnels de M. Klotz, puisqu'il ne les a jamais vues, qu'il n'en a jamais eu l'usage et qu'il ne les a jamais eues en sa possession? » Essentiellement, l'approche de l'intimée envisage donc trois catégories d'immobilisations : les biens à revenu, les biens qui sont réellement en la possession du contribuable au sens matériel du terme et qui sont affectés à son usage ou à son agrément personnels et tous les autres biens. L'intimée affirme que les gravures appartiennent à la catégorie composée de « tous les autres biens » .

[65]     Il s'agit d'une question plutôt difficile d'interprétation de la loi; il faut, entre autres choses, décider si les mots « biens à usage personnel » , en plus de se voir attribuer un sens élargi en raison des mots qui suivent les mots « sont compris » , peuvent également se voir attribuer un sens restreint compte tenu de ces mots, de sorte que le bien doit être affecté à l'usage ou à l'agrément personnels du contribuable. Je ne crois pas que, sur le plan de l'interprétation, il convienne d'attribuer pareille fonction à une disposition « d'inclusion » . Tel n'est pas l'objet habituel de pareilles dispositions. Dans l'ouvrage intitulé Maxwell on The Interpretation of Statutes, 12e éd., à la page 270, il est question de ce genre de dispositions :

[traduction]

   Il arrive souvent qu'une loi renferme une disposition prévoyant qu'un sens particulier est attribué à certains mots et à certaines expressions, lorsqu'ils figurent dans la loi.

   Dans certains cas, on dit qu'un mot « signifie » ce que la définition dit qu'il signifie : dans ces cas, le mot a le sens restreint que lui donne la définition. Cependant, dans d'autres cas, on emploie l'expression « comprend » afin « d'étendre le sens des mots ou expressions contenus dans le corps du texte législatif; ces mots et expressions doivent alors être interprétés comme signifiant non seulement ce qu'ils signifient normalement, mais aussi ce que la disposition d'interprétation dit qu'ils comprennent » . Autrement dit le mot dont on dit qu'il « comprend » quelque chose conserve, outre le sens élargi que lui donne ainsi sa définition dans la loi, « son sens ordinaire, courant et naturel, chaque fois qu'il se déduit normalement du contexte » .

   Ainsi, selon le paragraphe 10(1) de la Income Tax Ordinance de la République de Trinité-et-Tobago : « Afin de déterminer le revenu imposable d'une personne, sont déduits tous les débours et frais entièrement et exclusivement engagés par cette personne pendant l'année précédant l'année de la cotisation dans le cadre de la réalisation du revenu, y compris [...] f) les rentes ou autres versements annuels, payables dans la colonie ou ailleurs. » Le Comité judiciaire a statué qu'un versement annuel pouvait être déduit en vertu de l'alinéa f) même s'il ne s'agissait pas d'une dépense engagée dans le cadre de la réalisation du revenu, les mots « y compris » ayant pour effet d'inclure dans les « débours et frais engagés dans le cadre de la réalisation du revenu » les paiements qui ne seraient pas visés par ces mots selon le sens qui leur est naturellement attribué.

   Selon le paragraphe 74(1) de la Shops Act 1950 : « "commerce de détail" comprend l'entreprise d'un barbier ou d'un coiffeur, la vente de boissons alcooliques ou autres, le prêt de livres ou de journaux lorsqu'il est consenti en vue de réaliser un gain et la vente aux enchères au détail, mais ne comprend pas la vente de programmes et de catalogues et autres ventes semblables dans des théâtres et des lieux de divertissement. » Voici ce que lord Somervell a dit : « Je crois qu'il est clair que les mots qui suivent le mot "comprend" décrivent des activités qui, de toute façon, auraient pu prêter à controverse pour ce qui est de la question de savoir si elles sont visées par les mots "commerce de détail". » Les mots en question englobaient donc ce qu'ils voulaient naturellement dire (principalement à cause du mot « détail » , soit la fourniture de marchandises plutôt que de services) et les activités expressément mentionnées dans la disposition renfermant les définitions.

[66]     Je préfère l'interprétation de l'appelant, qui inclurait les gravures dans les biens à usage personnel, et ce, pour les raisons suivantes :

a)      Selon l'approche qu'elle a adoptée, l'intimée emploie les mots qui suivent les mots « sont compris » d'une façon qui ne convient pas, selon moi, en ce sens que cette approche a pour effet de restreindre les mots auxquels la disposition vise à attribuer une portée élargie. Le législateur, s'il voulait restreindre le sens des mots « biens à usage personnel » et en élargir également le sens, pourrait libeller la disposition en vue d'exprimer cette intention. On peut supposer que puisqu'il ne l'a pas fait, il ne voulait pas en restreindre le sens. Somme toute, il n'est pas facile de déterminer le sens de l'expression « biens à usage personnel » , de lui attribuer un sens qui est commun dans le langage de tous les jours;

b)     L'interprétation de l'appelant est plus conforme au texte de la Loi (Highway Sawmills Ltd. v. M.N.R., [1966] S.C.R. 384, à la page 393; Glaxo Wellcome Inc. v. R., [1996] 1 C.T.C. 2904 confirmé par [1999] 4 C.T.C. 371). Les biens à usage personnel ne sont pas limités au paragraphe 46(1). Une fonction importante de la Loi est de prévoir que les pertes en capital subies lors de la disposition de biens à usage personnel ne sont pas admises à titre de déductions. Il est difficile de comprendre pourquoi la Couronne voudrait donner à ces termes un sens restrictif;

c)      La définition restrictive de la Couronne entraînerait une anomalie. Cela voudrait dire qu'un bijou dont un contribuable hérite et qu'il met dans un coffre bancaire ou un tableau dont le contribuable hérite et qu'il entrepose dans un grenier ou dont il se départit ne serait pas un bien à usage personnel, mais que si le contribuable portait le bijou ou accrochait le tableau au mur, il s'agirait d'un bien à usage personnel. Il faudrait déterminer dans chaque cas ce que le contribuable a fait d'un tel bien. Quel que soit le bien-fondé de la position de la Couronne sur le plan conceptuel, cette position suscite certaines problèmes pratiques;

d)     La définition du bien meuble déterminé comprend les objets mêmes qui sont ici en cause. Il est vrai que de tels objets doivent néanmoins être des biens à usage personnel et il serait contraire aux règles de logique et d'interprétation de la loi de faire un raisonnement à rebours en allant de la définition du bien meuble déterminé à la conclusion selon laquelle les gravures sont des biens à usage personnel. La définition des biens meubles déterminés indique uniquement que les gravures peuvent être des biens à usage personnel.

[67]     J'ai conclu que les gravures sont des biens à usage personnel. Même si l'interprétation plus étroite avancée par la Couronne avait été retenue, j'aurais néanmoins statué que les gravures sont des biens à usage personnel. Une façon d'utiliser un objet consiste à le donner, que ce soit pour des motifs altruistes, par esprit de charité ou pour des raisons d'ordre fiscal.

[68]     J'arrive enfin à la question des pénalités. Les pénalités étaient fondées sur la prémisse selon laquelle la demande de l'appelant a été faite dans des circonstances équivalant à faute lourde. J'ai déjà statué que la valeur du don à la FSU avait été gonflée de beaucoup. Cela constitue-t-il un faux énoncé attribuable à une faute lourde? L'avocat a soutenu que l'appelant n'a pas demandé le genre de renseignements qu'il aurait dû demander et qu'il savait ou aurait dû savoir que les gravures étaient surévaluées. Il est important de souligner que le fait qu'une personne n'a pas fait preuve d'une diligence raisonnable ne veut pas pour autant dire qu'elle a commis une faute lourde. La faute lourde dénote une faute beaucoup plus grave, une insouciance répréhensible.

[69]     Dans une décision récente, Urpesz v. The Queen, 2001 C.T.C. 2256, la Cour a dit ce qui suit, aux pages 2259 à 2261 :

Il se trouve que la jurisprudence portant sur cette branche du droit est abondante. On peut débuter avec les nombreuses pages suivant le paragraphe 163(2) de la Loi dans le Canadian Tax Reporter de CCH ou le Canada Tax Service de DeBoo. Une affaire récente est celle intitulée Farm Business Consultants Inc. c. La Reine, C.A.F., no A-542-94, 18 janvier 1996 (96 DTC 6085), dans laquelle la Cour d'appel fédérale a confirmé une décision de cette cour (C.C.I., no 92-2597(IT)G, 16 septembre 1994 (95 DTC 200)). Aux pages 11, 12 et 13 (DTC : aux pages 205 et 206), cette cour a déclaré ceci :

Je suis conscient que le sous-alinéa 152(4)a)(i) a pour objet d'ouvrir les déclarations qui s'appliquent à des années frappées de prescription quand, pour toutes sortes de raisons, les éléments de revenu sont omis ou présentés de façon erronée, alors que le paragraphe 163(2) est une disposition pénale et que, si, au moment de l'appliquer, le type de conduite à laquelle est attribuable la présentation erronée des faits soulève un doute, il faudrait accorder le bénéfice du doute au contribuable. Dans l'affaire Udell v. M.N.R., 70 D.T.C. 6019, le juge Cattanach déclare ce qui suit, à la page 6025 du recueil :

[traduction]

Il ne fait aucun doute que le paragraphe 56(2) est une disposition de nature pénale. Lorsque l'on interprète une telle disposition, il convient de tenir compte des propos inattaquables de lord Esher dans l'affaire Tuck & Sons v. Priester, (1887) 19 Q.B.D. 629 : lorsque le libellé d'une disposition de nature pénale est susceptible à la fois d'une interprétation qui mènerait à l'imposition de la pénalité prévue, et d'une autre qui n'y mènerait pas, c'est cette dernière qui prévaut. Voici ce qu'il dit à la page 638 :

Il faut interpréter cette disposition avec grand soin car elle mène à l'imposition d'une pénalité. S'il existe une interprétation raisonnable qui permettra d'éviter la pénalité dans une cause particulière, c'est celle-là qu'il faut retenir.

et, ajoute-t-il, à la page 6026 du recueil :

   Il est clair selon moi que lorsqu'il est question d'imposer un impôt ou un droit, et plus encore une pénalité, s'il existe un doute raisonnable il faut interpréter la loi de manière à accorder le bénéfice du doute à la partie à qui l'on cherche à imputer le montant en question.

       Voir aussi Holley v. M.N.R., 89 DTC 366, à la p. 369; De Graaf v. The Queen, 85 DTC 5280.

       Une cour doit faire preuve d'une prudence extrême lorsqu'elle sanctionne l'imposition de pénalités prévues au paragraphe 163(2). Une conduite qui légitime l'établissement d'une nouvelle cotisation à l'égard d'une année frappée de prescription ne justifie pas d'office l'imposition d'une pénalité, et l'imposition systématique de pénalités, par le ministre, est une pratique qui est à déconseiller. Une conduite du genre de celle qui est envisagée au sous-alinéa 152(4)a)(i) peut, dans certaines circonstances, servir aussi de fondement à l'imposition d'une pénalité prévue au paragraphe 163(2), qui implique la pénalisation d'une conduite plus répréhensible. Dans un tel cas, une cour doit, même en appliquant une norme de preuve civile, étudier soigneusement la preuve et chercher un degré de probabilité supérieur à celui auquel on s'attendrait dans les situations où l'on cherche à établir le bien-fondé d'allégations moins sérieuses3. Par ailleurs, quand une pénalité est imposée en vertu du paragraphe 163(2) même si une norme de preuve civile est exigée, lorsque la conduite d'un contribuable cadre avec deux hypothèses viables et raisonnables, l'une qui justifie la pénalité et l'autre pas, il convient d'accorder le bénéfice du doute au contribuable, et de supprimer la pénalité4. Je crois qu'en l'espèce, l'intimée a fait la preuve du degré de probabilité requis, et qu'au vu de la preuve produite, aucune hypothèse incompatible avec celle que l'intimée a avancée ne peut être défendue.

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       3 Voir Continental Insurance Co. v. Dalton Cartage Co., [1982] 1 R.C.S. 164; 131 D.L.R. (3rd) 559; 25 C.P.C. 72, le juge en chef Laskin, p. 168-171; D.L.R. 562-564; C.P.C. 75-77). Baterv. Bater, [1950] 2 All E.R. 458, p. 459; Pallan et al v. M.N.R. 90 D.T.C. 1102, p. 1106; W. Tatarchuk Estate v. M.N.R., [1993] 1 C.T.C. 2440, p. 2443.

       4 Il ne s'agit pas simplement d'une extrapolation de la règle énoncée dans l'affaire Hodge's Case (1838) 2 Lewin 227; 168 E.R. 1136, qui se rapporte à des questions de nature criminelle comme celle que vise, par exemple, l'article 239 de la Loi de l'impôt sur le revenu, qui requiert une preuve au-delà du doute raisonnable. Il s'agit simplement d'une application du principe selon lequel une pénalité ne peut être imposée que dans les cas où la preuve le justifie clairement. Si cette dernière est compatible avec, à la fois, l'état d'esprit qui justifie une pénalité en vertu du paragraphe 163(2) et l'absence de cet état d'esprit - j'hésite à employer les mots innocence ou culpabilité dans ces circonstances - cela voudrait dire que la Couronne ne s'est pas acquittée du fardeau qui pesait sur ses épaules.

Deux décisions rendues par le juge Strayer dans les affaires Venne c. La Reine, C.F. 1re inst., no T-815-82, 9 avril 1984 (84 DTC 6247) et De Graaf c. La Reine, C.F. 1re inst., no T-5291-80, 3 mai 1985 (85 DTC 5280) m'ont été très utiles sur cette question. Aucune de ces affaires n'a été mentionnée par l'avocat.

À la page 19 (DTC : à la page 6256) de l'affaire Venne, le juge Strayer déclare ce qui suit :

       Quant à la possibilité d'une faute lourde, j'ai conclu, après hésitation, qu'elle n'a pas non plus été établie ici. La « faute lourde » doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu'un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi. Je ne conclus pas à l'existence d'un tel degré de négligence en rapport avec les faux énoncés de revenus commerciaux. Certes, le contribuable n'a pas fait preuve de la prudence d'un homme raisonnable et, comme je l'ai déjà fait remarquer, il aurait au moins dû réviser ses déclarations de revenus avant de les signer. Ce faisant, un homme raisonnable, eu égard aux autres renseignements dont il disposait, aurait été amené à croire que quelque chose n'allait pas et aurait cherché à en savoir plus long auprès de son teneur de livres.

[70]     J'ai conclu qu'en l'espèce il ne convient pas d'imposer une pénalité en application du paragraphe 163(2). Le programme AFE était certes agressif. L'avocat a soutenu que M. Klotz avait agi d'une façon cavalière lorsqu'il s'était agi de vérifier les valeurs. Cette description est peut-être bien exacte. L'avocat a fait remarquer que M. Klotz n'avait pas demandé de conseils indépendants et n'avait pas suffisamment porté attention au conseil donné dans les avis juridiques qu'il a examinés, à savoir qu'il devait procéder à une vérification indépendante des évaluations.

[71]     Les critiques formulées par l'avocat au sujet de M. Klotz sont dans une certaine mesure fondées. M. Klotz a fait preuve d'insouciance lorsqu'il s'est agi de vérifier la valeur. Néanmoins, imposer une pénalité pour faute lourde en application du paragraphe 163(2), c'est imposer une punition pour un comportement répréhensible. Dans ce cas-ci, M. Klotz s'en est remis à son conseiller financier, M. Brill. Il disposait de ce qui semblait à première vue être une évaluation effectuée par un évaluateur qualifié. Il disposait de deux avis juridiques qui, indépendamment des réserves qui y étaient faites, seraient considérés par le profane moyen comme indiquant implicitement l'assentiment de deux gros cabinets d'avocats au programme.

[72]     Compte tenu de ces considérations, l'appel est admis et la cotisation est déférée au ministre pour nouvelle cotisation, de façon uniquement à annuler les pénalités imposées en application du paragraphe 163(2).

[73]     Le prononcé du jugement formel est reporté de deux semaines afin de permettre aux avocats de soumettre des observations au sujet des dépens. La Couronne a eu gain de cause pour ce qui est de la question de l'évaluation, mais non pour ce qui est de la question des biens à usage personnel ou des pénalités. En outre, j'aimerais que des observations soient soumises au sujet de la question de savoir qui devrait supporter les frais de préparation de 54 recueils de documents. Les avocats devront communiquer avec la Cour afin de déterminer les modalités de présentation des observations, à savoir si la chose doit être faite devant la Cour, par écrit ou au moyen d'une conférence téléphonique.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour de février 2004.

« D.G.H. Bowman »

Juge Bowman

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de mars 2005.

Jacques Deschênes, traducteur



[1] J'emploie le mot « programme » à cause de son caractère neutre. Cependant, d'autres personnes ne se montrent pas aussi réservées. Dans la revue « Canadian Current Tax » , le professeur Vern Krishna qualifie d'[traduction] « escrocs » ou de [traduction] « filous » les individus qui s'arrangent pour acheter un objet à bas prix et pour gonfler sa valeur lorsqu'ils le donnent. Dans le Canadian Tax Journal, les professeurs Daniel Sandler et Tim Edgar, de la faculté de droit de l'Université de Western Ontario, parlent de la [traduction] « revente en douce » d'oeuvres d'art et emploient des termes tels que [traduction] « cynisme » et [traduction] « abus » . Revenu Canada (maintenant ADRC), qui n'est généralement pas connu pour l'emploi d'un langage hyperbolique ou peu mesuré, parle dans un communiqué de presse [traduction] d' « escroqueries » . Un langage de ce genre donne un peu de couleur à un sujet par ailleurs plutôt sec, mais il contribue peu à une analyse impartiale des questions juridiques et factuelles en cause. De fait, je ne suis pas sûr de savoir exactement ce qu'est une « escroquerie » dans le contexte fiscal, mais je suppose que ce terme laisse entendre quelque chose de malhonnête ou de frauduleux. Contrairement aux mots « stratagème frauduleux » , nous ne disposons pas encore d'une définition judiciaire.

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