Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossiers : 2003-9(EI)

2003-1838(EI)

2003-1841(EI)

ENTRE :

LYSON LAVOIE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

_______________________________________________________________

Appels entendus le 25 février 2004 à Québec (Québec)

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Jérôme Carrier

Avocat de l'intimé :

Me Pierre-Paul Trottier

_______________________________________________________________

JUGEMENT

          Les appels interjetés les 5 et 6 mai 2003, en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi, à l'encontre des décisions rendues par le ministre du Revenu national en date du 2 décembre 2002, sont rejetés et les décisions sont confirmées, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour d'avril 2004.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


Dossiers : 2003-1839(CPP)

2003-1840(CPP)

ENTRE :

LYSON LAVOIE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

_______________________________________________________________

Appels entendus le 25 février 2004 à Québec (Québec)

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Jérôme Carrier

Avocat de l'intimé :

Me Pierre-Paul Trottier

_______________________________________________________________

JUGEMENT

          Les appels interjetés les 5 et 6 mai 2003 en vertu de l'alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada, à l'encontre des décisions rendues par le ministre du Revenu national sont rejetés et les décisions sont confirmées, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour d'avril 2004.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


Dossiers : 2003-1309(EI)

2003-1310(EI)

ENTRE :

SYLVAIN LAVOIE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

_______________________________________________________________

Appels entendus le 25 février 2004 à Québec (Québec)

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

Comparutions :

Avocat de l'appelant :

Me Jérôme Carrier

Avocat de l'intimé :

Me Pierre-Paul Trottier

_______________________________________________________________

JUGEMENT

          Les appels interjetés en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance-emploi à l'encontre des décisions rendues par le ministre du Revenu national en date du 14 février 2003, sont rejetés et les décisions sont confirmées, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour d'avril 2004.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


Référence : 2004CCI219

Date : 20040413

Dossiers : 2003-9(EI), 2003-1838(EI), 2003-1841(EI)

2003-1839(CPP), 2003-1840(CPP)

ENTRE :

LYSON LAVOIE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

ET ENTRE :

Dossiers : 2003-1309(EI), 2003-1310(EI)

SYLVAIN LAVOIE,

appelant,

et

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Tardif

[1]      Il s'agit de plusieurs appels qui, à la demande des parties, ont fait l'objet d'une seule preuve commune à tous les dossiers que j'énumère : Lyson Lavoie, [2003-9(EI), 2003-1838(EI), 2003-1839(CPP), 2003-1840(CPP), 2003-1841(EI)] et Sylvain Lavoie [2003-1309(EI), 2003-1310(EI)].

[2]      Les périodes en question pour chacun des appels sont les suivantes :

Numéro du dossier

Période en litige

Nom du payeur

Lyson Lavoie

2003-9(EI)

du 25 juin au 17 novembre 2001

L.C. Rioux & Son Ltd

2003-1838(EI)

du 7 août 2000 au 12 janvier 2001

Fletcher's Forestry Enterprises Ltd

2003-1839(CPP)

du 7 août 2000 au 12 janvier 2001

Fletcher's Forestry Enterprises Ltd

2003-1840(CPP)

du 19 juin au 21 juillet 2000

Jean-René Boucher Ltée

2003-1841(EI)

du 19 juin au 17 novembre 2000

Jean-René Boucher Ltée

Sylvain Lavoie

2003-1309(EI)

du 2 juillet au 24 novembre 2001

L.C. Rioux & Son Ltd

2003-1310(EI)

du 33 octobre 2000 au 12 janvier 2001

Fletcher's Forestry Enterprises Ltd

[3]      Plusieurs faits ont été admis; ils concernent les deux appelants. Ils ont été consignés par écrit. Il y a lieu de les reproduire (voir la lettre du 24 février 2004 adressée à Me Jérôme Carrier) :

1.          les payeurs exploitaient une entreprise de coupes forestières;

2.          Il n'y avait pas de contrat écrit signé entre les appelants et leurs payeurs respectifs;

3.          La tâche des appelants (avec leur employé) consistaient à bûcher et à transporter du bois;

4.          Les payeurs n'avaient pas le choix de l'employé, c'est-à-dire le bûcheron, de chaque appelant;

5.          Les payeurs n'imposaient pas de quota de bois à couper aux appelants;

6.          Le bois coupé par les appelants était mesuré au moulin à bois;

7.          Les payeurs rémunéraient les appelants selon la quantité de bois coupé et mesuré par le moulin à scie; Autrement dit, la totalité de la rémunération versée aux appelants et à leurs employés devaient correspondre à la quantité de bois coupé et mesuré par le moulin;

8.          Les payeurs n'étaient pas propriétaires des débusqueuses utilisées par les appelants;

9.          Les payeurs ne louaient pas non plus les débusqueuses des appelants;

10.        Les payeurs ne pouvaient pas affecter un autre opérateur aux débusqueuses des appelants;

11.        Les frais d'exploitation des débusqueuses (essence, huile, assurances, entretien) étaient à la charge des appelants et non des payeurs;

12.        En cas de bris des débusqueuses, les payeurs n'attribuaient pas d'autres tâches aux appelants;

13.        Les payeurs ne comptabilisaient pas les heures de travail des appelants;

14.        Les appelants fournissaient les autres outils de travail en cause dans ces affaires, en l'occurrence les scies mécaniques, et en assumaient les coût d'entretien et de fonctionnement;

[4]      Quant aux dossiers de l'appelant Lyson Lavoie; outre les faits admis et consignés, le procureur de l'appelant a fait un certain nombre d'autres admissions parmi les faits tenus pour acquis, pour expliquer et justifier les déterminations dont il est fait appel. Ces faits ont été consignés dans le dossier 2003-9(EI) et se lisent comme suit :

a)          Le payeur, L.C. Rioux & Son Ltd, exploite une entreprise forestière;

b)          L'appelant était propriétaire d'une débusqueuse dont le coût initial était d'environ 15 000 $;

c)          Pendant la période en litige, l'appelant rendait des services au payeur à titre d'opérateur de débusqueuse;

d)          Il n'existait aucun contrat écrit entre l'appelant et le payeur;

e)          L'appelant travaillait à l'abattage du bois en équipe avec un bûcheron qu'il avait lui-même choisi;

f)           L'appelant travaillait entre 40 à 50 heures par semaine;

[...]

i)           L'appelant assumait tous les frais reliés au fonctionnement de sa débusqueuse;

j)           Lors d'un bris, l'appelant avait la responsabilité de réparer la débusqueuse et d'en défrayer les coûts, le payeur ne lui assignait alors aucune autre tâche;

k)          Le payeur ne pouvait pas assigner un autre opérateur à la débusqueuse de l'appelant;

l)           L'appelant était rémunéré en fonction de la quantité de bois coupé;

m)         Lors de l'embauche, l'appelant et le payeur ont convenu qu'une somme hebdomadaire de 750 $ soit versée à chacun des membres de l'équipe à titre d'avance;

n)          Le payeur émettait des chèques distincts pour l'avance hebdomadaire;

[...]

q)          Le 4 décembre 2001, le payeur émettait un relevé d'emploi au nom de l'appelant indiquant comme premier jour de travail le 25 juin 2001 et comme dernier jour payé le 17 novembre 2001 et que l'appelant aurait été rémunéré seulement 16 des 21 semaines de cette période pour une rémunération totale de 12 280,66 $;

[...]

[5]      Les autres faits tenus pour acquis furent niés. Il s'agit des faits suivants :

g)          Le payeur indiquait à l'appelant l'endroit où il devait travailler ainsi que la longueur du bois à couper mais il ne le contrôlait pas dans la façon dont le travail devait être effectué;

h)          L'appelant avait la liberté de s'absenter sans en demander l'autorisation au payeur;

[...]

o)          Comme l'équipe de l'appelant n'avait pas coupé suffisamment de bois pour couvrir les avances déjà versées, l'appelant a dû, pendant la période en litige, rendre des services au payeur sans rémunération pendant une période de 5 semaines;

p)          L'appelant assumait le salaire versé au bûcheron, le payeur soustrayait des sommes dues à l'appelant toutes les avances versées y compris les sommes versées au bûcheron;

[...]

r)           Le relevé ne reflète pas la réalité quant au nombre de semaines rémunérées ni quant au montant de la rémunération.

s)          Durant la période en litige, l'appelant exploitait sa propre entreprise.

[6]      L'appelant Sylvain Lavoie a essentiellement affirmé qu'il fournirait les mêmes réponses que l'appelant Lyson Lavoie, son père, si les mêmes questions lui étaient adressées. L'appelant Lyson Lavoie a expliqué que les frais de déplacement de sa débusqueuse étaient la responsabilité du payeur. Le payeur se rendait sur le chantier quelques fois par semaine. Il lui arrivait de formuler certaines exigences dont, notamment, celle de couper un arbre particulier dont le diamètre était supérieur à celui déterminé lors des instructions à l'ouverture du chantier.

[7]      Quant à la rémunération, la preuve a démontré qu'elle était essentiellement fonction du bois coupé et du prix obtenu à la livraison auprès de l'acheteur. La prétendue rémunération hebdomadaire était essentiellement une avance maquillée en rémunération et présentée comme s'il s'agissait d'un salaire pour une semaine de travail de 40 heures. En réalité, la rémunération était établie exclusivement en fonction du bois coupé, livré et vendu.

[8]      La façon de comptabiliser les heures et surtout la manière de les enregistrer n'était en réalité qu'un stratagème pour donner l'impression qu'il s'agissait d'un emploi, dans le sens courant à terme exécuté suivant un horaire bien défini. D'ailleurs, il est intéressant de constater dans les relevés d'emploi que, chaque semaine, l'appelant accumulait toujours le même nombre d'heures bien que, certains jours, il ne travaillait pas à cause de la pluie ou de l'extrême chaleur qui rendaient le chantier dangereux.

[9]      Même si, en apparence, il s'agissait d'un emploi régulier permettant à l'appelant de toucher un salaire hebdomadaire, il est très facile d'imaginer des situations où le travail n'aurait pas été rémunéré, le bris mécanique étant la situation la plus évidente. L'importance des revenus était essentiellement en fonction de la mécanique, de la température, de la qualité du sol, du genre de boisé, etc. Tous ces aléas étaient assumés exclusivement par l'appelant. À la fin du contrat, les parties ont fait les comptes et l'appelant aurait pu se trouver dans la situation où il aurait eu à rembourser des montants payés en trop. Le monde forestier et l'activité économique qu'il génère regroupent de véritables spécialistes pour qui il n'existe aucun secret. Il leur est très facile de prévoir les revenus à l'avance et de déguiser un contrat d'entreprise en contrat de louage de services. Les risques sont multiples, le temps incertain et les travailleurs forestiers veulent maximiser la profitabilité de leur travail.

[10]     En l'espèce, le critère le plus susceptible de justifier l'existence d'un possible contrat de louage de services était le contrôle ou le pouvoir de contrôle. Tous les autres, à savoir la propriété des instruments de travail, l'intégration, la chance de profit et le risque de perte, nous amènent à conclure que l'appelant exploitait sa propre entreprise.

[11]     Pour ce qui est du contrôle, les faits susceptibles de nous amener à conclure que le travail était contrôlé par le payeur ou assujetti au pouvoir de contrôle du payeur ne sont pas déterminants. Il s'agit de faits et gestes normaux, légitimes et courants d'un individu qui donne un contrat d'entreprise à quelqu'un et qui veut s'assurer que le résultat soit conforme à ses attentes. Le propriétaire du boisé expliquait au début ce qu'il désirait comme genre de coupes, sélectives ou à blanc, et le propriétaire de la débusqueuse, en collaboration avec le bûcheron qu'il embauchait, prenait les dispositions pour effectuer le travail le plus rapidement possible avant de passer à un autre lot. Il s'agit d'un dossier semblable, voire identique, à d'autres qui ont fait l'objet d'une décision de la Cour d'appel fédérale.

[12]     Je ne pousserai pas l'analyse plus loin étant donné que ce genre de travail, ses modalités d'exécution et la façon dont sont établis les revenus, ont été traités dans plusieurs décisions, notamment dans l'affaire Charbonneau c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [1996] A.C.F. no 1337 (Q.L.), où l'honorable juge Décary de la Cour d'appel fédérale affirmait :

4.          Par ailleurs, s'il est certain que l'appréciation de la nature juridique de relations contractuelles soit affaire d'espèce, il n'en reste pas moins qu'à espèces sensiblement semblables en fait devraient correspondre en droit des jugements sensiblement semblables. Aussi, lorsque cette Cour s'est déjà prononcée sur la nature d'un certain type de contrat, point n'est besoin par la suite de refaire l'exercice dans son entier: à moins que n'apparaissent dans les faits des différences vraiment significatives, le Ministre, puis la Cour canadienne de l'impôt ne devraient pas s'écarter de la solution retenue par cette Cour.

[...]

10.        La surveillance des travaux aux deux jours et le mesurage du volume aux quinze jours ne créent pas en l'espèce de lien de subordination et sont tout à fait compatibles avec les exigences d'un contrat d'entreprise. Rares sont les donneurs d'ouvrage qui ne s'assurent pas que le travail est exécuté en conformité avec leurs exigences et aux lieux convenus. Le contrôle du résultat ne doit pas être confondu avec le contrôle du travailleur.

11.        Il en va de même des normes imposées en matière d'heures et de jours de travail, de jours fériés, de mode d'opération et de sécurité. Les normes sont communes à tous les travailleurs en forêt publique dont les activités sont « encadrées » par le ministère des Ressources naturelles. Elles s'appliquent peu importe que le travailleur soit un simple employé ou un entrepreneur.

[...]

[13]     En l'espèce, les appelants étaient chacun propriétaire-opérateur d'une débusqueuse. Ils travaillaient en collaboration avec un bûcheron qu'ils choisissaient eux-mêmes. Ils exécutaient le travail sur un site déterminé par le propriétaire des droits de coupe et recevaient certaines instructions de ce dernier quant aux résultats souhaités.

[14]     De nombreux facteurs influaient sur leurs revenus et, à la fin du chantier, les parties faisaient les comptes et assumaient les conséquences financières. Si le bois vendu avait rapporté moins que les avances déboursées, le travailleur forestier devait rembourser la différence. Inversement, si le bois vendu représentait des montants supérieurs aux avances, des jours, voire des semaines, étaient ajoutés en fonction des montants.

[15]     Le fait que le tout ait été présenté comme un contrat de louage de services n'a aucune pertinence pour la qualification juridique de l'entente verbale à l'origine des appels. Il s'agit de dossiers semblables à celui de l'affaire Charbonneau (précitée). Il n'y a aucune raison de les traiter différemment. Je conclus donc que le travail exécuté par l'appelant était effectué non pas en vertu d'un contrat de louage de service, mais d'un contrat d'entreprise.

[16]     Quant à l'appelant Sylvain Lavoie[2003-1309(EI), 2003-1310(EI)], il n'a fait état d'aucun fait ou élément particulier; il a affirmé qu'il aurait fourni les mêmes réponses que son père, Lyson Lavoie, si les mêmes questions lui avaient été adressées, le tout ayant pour effet d'écourter considérablement son témoignage. Conséquemment, tous les faits et motifs du jugement dans les dossiers Lyson Lavoie, [2003-9(EI), 2003-1838(EI), 2003-1839(CPP), 2003-1840(CPP), 2003-1841(EI)], sont reproduits pour les dossiers Sylvain Lavoie [2003-1309(EI) et 2003-1310(EI)].

[17]     Pour ces motifs, les appels sont donc rejetés.

Signé à Ottawa, Canada, ce 13e jour d'avril 2004.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


RÉFÉRENCE :

2004CCI219

NosDES DOSSIERS DE LA COUR :

2003-9(EI), 2003-1838(EI), 2003-1839(CPP), 2003-1840(CPP),

2003-1841(EI), 2003-1309(EI) et 2003-1310(EI)

INTITULÉ DES CAUSES :

Lyson Lavoie et Sylvain Lavoie

et le ministre du Revenu national

LIEU DE L'AUDIENCE :

Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE

le 25 février 2004

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :

l'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :

le 13 avril 2004

COMPARUTIONS :

Avocat des appelants:

Me Jérôme Carrier

Avocat de l'intimé:

Me Pierre-Paul Trottier

AVOCAT INSCRIT AUX DOSSIERS :

Pour les appelants :

Nom :

Étude :

Ville :

Me Jérôme Carrier

Rochon, Belzile, Carrier, Auger

Québec

Pour l'intimé :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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