Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Dossier : 2000-4389(IT)G

ENTRE :

WORLD CORP.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

________________________________________________________________

Appel entendu le 9 juin 2003 à Toronto (Ontario)

Devant : L'honorable juge R. D. Bell

Comparutions :

Avocats de l'appelante :

Me L. David Roebuck et

Me Ronald J. Farano, c.r.

Avocates de l'intimée :

Me Kathryn Philpott et

Me Tamara Sugunasiri

________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1990 est admis, et la cotisation est déférée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, selon les motifs du jugement ci-joints.

          Les dépens sont adjugés à l'appelante.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 17e jour de juillet 2003.

« R. D. Bell »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 22e jour d'août 2005.

Yves Bellefeuille, réviseur


[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Référence : 2003CCI494

Date : 20030717

Dossier : 2000-4389(IT)G

ENTRE :

WORLD CORP.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bell, C.C.I.

QUESTIONS EN LITIGE

[1]

1.        Quelle était la valeur d'une « commission » d'un montant de 3,9 millions de dollars payable à l'appelante le 29 décembre 1989, date à laquelle l'appelante a, pour un « prix d'achat de 35 000 $ américains » , soit 41 300 $ canadiens, cédé ladite commission à une société des îles Caïmans, dans les Antilles britanniques, avec laquelle elle avait un lien de dépendance?

Le ministre du Revenu national (le « MRN » ) a calculé que le montant de la commission non déclaré par l'appelante était de 2 458 700 $ (soit, apparemment, son estimation d'une valeur de 2,5 millions de dollars, moins le montant susmentionné de 41 300 $ reçu par l'appelante).

2.        En vertu de la partie XIII de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), l'appelante devait-elle retenir et verser au MRN 614 675 $ d'impôt, soit 25 p. 100 du montant susmentionné de 2 458 700 $, ainsi que des intérêts et des pénalités?

3.        L'appelante était-elle une « société privée sous contrôle canadien » et, de ce fait, une société admissible à une « déduction accordée aux petites entreprises » en vertu de l'article 125 de la Loi?

FAITS

[2]      L'appelante était, en 1989, une société autorisée par la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario à agir comme courtier en valeurs mobilières. Son président, Alexander O ( « M. O » ), était autorisé par la Commission des valeurs mobilières de l'Ontario à vendre des valeurs mobilières par l'intermédiaire de l'appelante. Toutes les actions émises et en circulation de l'appelante appartenaient à la 616483 Ontario Limited (la « 616483 » ). Monsieur O, qui était un résident des îles Caïmans durant toute la période pertinente, était propriétaire de 49 p. 100 des actions émises de la 616483. Rose Rende ( « Mme Rende » ), chef de bureau de l'appelante et résidente canadienne, était propriétaire de 51 p. 100 des actions émises de la 616483.

[3]      En octobre ou novembre 1989, M. O a été contacté par Gerry Farantatos ( « M. F » ), un constructeur et promoteur qui avait déjà eu des relations avec M. O et l'appelante. Monsieur O a témoigné qu'il avait eu plusieurs discussions avec M. F. Il a dit que M. F voulait construire une tour de bureaux sur un terrain qu'il contrôlait et qu'il voulait réunir environ 100 millions de dollars, dont un montant de 49 millions de dollars représenterait un investissement, par des commanditaires, dans des unités d'une société en commandite à laquelle le terrain serait vendu. Le reste serait obtenu en hypothéquant le terrain. Monsieur O a déclaré qu'il avait déjà agi comme mandataire lors de la vente d'unités de sociétés en commandite d'autres consortiums immobiliers dont M. F était le promoteur. Il a également dit qu'il avait offert, au nom de l'appelante, d'agir comme mandataire lors de la vente de ces unités en contrepartie d'une commission de 3,9 millions de dollars, à condition que la commission soit payable par versements sur une période de deux ans et demi, de manière que cela coïncide avec les paiements devant être faits par les commanditaires. Le dossier n'indique pas si, à cette époque, la société en commandite avait été créée, ou si M. F avait le pouvoir de la lier dans la mesure où elle avait été créée. En réponse à des questions posées lors du contre-interrogatoire, M. O a témoigné qu'il ne faisait affaire avec M. F qu'en sa qualité de promoteur. Cette position n'a pas été contestée au cours du contre-interrogatoire.

[4]      Lors des discussions tenues en octobre ou novembre 1989, M. F avait parlé à M. O d'une débenture de 70 millions de dollars enregistrée à l'encontre du terrain au bénéfice de la Banque de Nouvelle-Écosse. Monsieur F avait dit à M. O que, si la constitution du consortium était couronnée de succès et si les capitaux nécessaires étaient réunis, M. F négocierait alors avec la banque pour que la débenture fasse l'objet d'une mainlevée. Monsieur O a également témoigné que M. F n'entendait soulever cette question auprès de la banque qu'après la clôture de la vente d'unités de la société en commandite.

[5]      Monsieur O a témoigné qu'il n'y avait pas de notice d'offre ( « notice » ) à l'époque de ses discussions initiales avec M. F. Il a dit que le cabinet d'experts-comptables Touche Ross avait établi un résumé décrivant la structure et l'avait remis à Howard Kutner ( « Me Kutner » ), un avocat agissant pour les investisseurs, et que Me Kutner avait rédigé la notice en décembre 1989. Monsieur O a également témoigné qu'il n'existait pas d'ébauche de convention en matière de commission en 1989.

[6]      Il est question d'une « convention en matière de commission » dans la notice, sous la rubrique [TRADUCTION] Contrats importants de la société EN COMMANDITE / COPROPRIÉTÉ. Les deux premiers paragraphes se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

World Corp., à savoir la mandataire, et Alexander O concluront la convention en matière de commission datée du 30 novembre 1989. La mandataire a accepté de fournir tous les services nécessaires pour commercialiser et coordonner la vente des unités selon la notice d'offre, en contrepartie de quoi la mandataire recevra de la société en commandite une commission de 3 900 000 $.

Cette commission sera entièrement acquise à la clôture de la vente des unités. Sous réserve des modalités décrites ci-après, la mandataire a accepté de retarder la réception de la commission selon un calendrier coïncidant, du point de vue des montants et des dates, avec les versements au titre du principal en vertu du billet III.

Monsieur O a témoigné qu'il avait discuté de cela avec M. F.

[7]      Les autres CONTRATS IMPORTANTS décrits dans la notice étaient :

Convention de vente à commission - Cette convention concernait la vente d'une partie quelconque du terrain et de l'immeuble après la « date de clôture relative au terrain » . Cette expression est définie dans la notice comme désignant la date à laquelle Asia Pacific et la société en commandite conviendront de conclure l'achat du terrain conformément à la convention d'achat, soit le 30 juin 1990 au plus tard.

Convention relative au dépôt

Cette convention était décrite comme une convention en vertu de laquelle les documents fiduciaires seraient détenus en fiducie par un fiduciaire jusqu'à ce qu'il soit satisfait aux conditions relatives à la clôture de l'opération. Cette convention prévoyait que, s'il n'était pas satisfait à toutes les conditions relatives à la clôture de l'opération au plus tard à la date de clôture, le fiduciaire remettrait promptement aux investisseurs tous les documents fiduciaires, sans intérêt. L'expression « document fiduciaire » était définie dans la notice comme incluant la convention de souscription, le produit des chèques fiduciaires, le premier prêt sous forme de prise de participation, le troisième prêt sous forme de prise de participation, le billet I, le billet II, le billet III, les chèques postdatés, l'accord de garantie I et l'accord de garantie II. L'expression « date de clôture » était définie comme désignant la date de clôture de la vente des unités qui, selon la notice, devait être déterminée par le commandité, mais ne pouvait être ultérieure au 31 décembre 1989.

Convention d'achat

Cette convention décrivait l'entente en vertu de laquelle la société achèterait le terrain des propriétaires inscrits. Si l'opération n'était pas conclue avant le 1er juillet, prévoyait cette convention, les investisseurs auraient le droit de revendre leurs unités à Asia Pacific ou cette dernière aurait le droit de racheter les unités des investisseurs à un prix d'achat prescrit.

Contrat de construction

Contrat de cession-bail

Prêt sur capacité d'autofinancement

Coût de projet rajusté et prolongation de la période de garantie

Loyers hypernets

Convention de services

Convention de gestion

Accord de garantie I et accord de garantie II

Contrat de société en commandite.

[8]      Pour revenir à la convention en matière de commission, la notice prévoyait ceci sous la rubrique [TRADUCTION] CONDITIONS PRÉALABLES À L'OFFRE, à l'alinéa c) :

[TRADUCTION]

La mandataire, agissant raisonnablement, devra être satisfaite des dispositions de la convention en matière de commission et de la convention de vente à commission, laquelle convention [...] devra avoir été signée et délivrée, et la commission de la mandataire devra avoir été garantie d'une manière satisfaisante de l'avis de la mandataire, agissant raisonnablement;

L'alinéa b) se lit comme suit :

[TRADUCTION]

b)          l'avocat de la société en commandite, agissant raisonnablement, devra :

(i)          soit être satisfait des dispositions des contrats importants, lesquels devront avoir été signés et délivrés et lieront les parties auxdits contrats;

(ii)         soit être convaincu qu'Asia Pacific a délivré son engagement à la société et à l'avocat de celle-ci pour que tous les contrats importants soient mis au point le plus tôt possible après la clôture, et au plus tard le 31 mars 1990;

[9]      En réponse à une question de l'avocat de l'appelante quant à savoir s'il avait vu la convention en matière de commission ou s'il avait été satisfait du libellé de celle-ci, M. O a dit qu'aucune convention en matière de commission n'avait été établie mais que son avocat, Donald Milner, en préparait des ébauches à la fin de décembre 1989.

[10]     Monsieur O a également déclaré que, le 28 décembre 1989, il avait reçu de John McKellar, c.r. ( « Me McKellar » ), de Weir & Foulds, l'avocat agissant pour M. F et les sociétés de ce dernier, un document intitulé « CONVENTION » adressé à Asia Pacific Foreign Securities Traders Inc. ( « Asia Pacific » ), une société liée à M. F, ainsi qu'à The Senate Congress Partnership ( « Senate » ), à Weir & Foulds et à Me Howard Kestner (sic); cette convention se lit comme suit :

[TRADUCTION]

À TITRE ONÉREUX, les soussignés conviennent que si l'achat du terrain mentionné dans la notice et dans l'acte de vente au commandité n'a pas été conclu et que ledit acte de vente n'a pas été enregistré d'ici le 30 juin 1990, pour quelque raison que ce soit, et qu'une ou plusieurs parties soient ou non en défaut à cet égard, les soussignés et leurs sous-mandataires, leurs successeurs et leurs ayants droit n'auront droit à aucune commission, convention d'inscription ou droit de préemption relativement au projet; ils feront en sorte que les commissions, conventions, sommes d'argent, billets et garanties ou autres sûretés concernant le projet soient remis et remettront une décharge à Asia Pacific, à la société, à World U.S. Corp. et à toutes les autres parties en cause.

Dans la présentation de la preuve, cela était appelé la « renonciation » . On prévoyait que la renonciation serait signée par World Corp. et par World Canada Corp. Monsieur O a dit qu'il n'était pas disposé à signer ces documents, et ceux-ci n'ont pas en fait été signés. Il a déclaré que 100 p. 100 des unités avaient été vendues au 28 décembre 1989. Il a témoigné que l'appelante avait accepté de payer la somme de 834 000 $ à des sous-mandataires. Il a également déclaré que M. F ne leur avait pas dit que le paiement de la commission à l'appelante dépendrait de la clôture de l'acquisition du terrain par la société. Monsieur O a déclaré qu'aucune convention en matière de commission ou autre convention n'avait été signée en 1989.

[11]     Au sujet d'une convention « conclue en date du 29 décembre 1989 » par l'appelante et World International Financial Century Corp., une société des îles Caïmans, M. O a dit qu'il avait lui-même établi cette convention en utilisant comme modèle une convention relative à une autre opération. Il s'agissait de la convention en vertu de laquelle la « commission payable » , également appelée la « créance » , était cédée à la société des îles Caïmans contrôlée par M. O. Ce document traite d'une entente conclue le 29 décembre 1989 :

[TRADUCTION]

par, entre autres, Senate Congress Partnership (l' « entente de représentation » ); la société en commandite accepte de payer à World la commission visée dans l'entente de représentation [...]

Monsieur O a déclaré qu'une telle entente n'existait en fait pas. Il a dit que l'expression « entente de représentation » venait d'un autre document. Il a dit qu'aucune somme n'était payable à l'appelante au titre d'une commission parce que Me McKellar voulait que tout l'argent soit placé en fiducie.

[12]     L'avocat de l'appelante a renvoyé M. O à une lettre en date du 28 décembre 1989 à World U.S. Corp., World Corp. et World Canada Corp., à l'attention du président, M. Alex O, qui se lit comme suit :

[TRADUCTION]

Objet : Senate Congress Partnership

Nous confirmons qu'il a aujourd'hui été convenu de ce qui suit relativement à l'affaire susmentionnée :

1.          Tous les fonds reçus d'investisseurs et détenus en vertu des conventions relatives au dépôt ont été investis dans des dépôts à terme auprès de Citibanque Canada et sont détenus au bureau de cette dernière situé à Islington (Ontario). Pendant la période d'investissement, toutes les sommes d'argent seront investies et détenues en Ontario de façon similaire.

2.          Si un investisseur fait défaut de paiement, il n'y aura pas deux actions : Asia Pacific Foreign Securities Traders Inc. ( « Asia Pacific » ) s'occupera plutôt avec vous d'intenter une action, à ses frais, pour recouvrer les paiements non effectués.

Veuillez agréer nos salutations distinguées.

WEIR & FOULDS

Par :

« signature »

J. D. McKellar

Divers documents déposés en preuve, y compris des lettres de Citibanque, confirmaient le dépôt de fonds décrit précédemment.

[13]     A également été produite en preuve une lettre de l'appelante au directeur de la vérification de Deloitte & Touche en date du 24 mars 1990 signée par M. O et dans laquelle il était dit notamment ce qui suit :

[TRADUCTION]

Les conventions suivantes doivent être signées :

1.          Convention en matière de commission

2.          Convention de vente à commission

3.          Billet relatif à la commission

4.          Garantie

5.          Convention d'achat-vente conclue par PHI International Inc. et Churchill Estates Development Corporation Ltd. (propriétaire inscrit / venderesse) et Senate Congress Partnership (acheteuse).

[14]     Une lettre de World Corp. à Deloitte & Touche disait que Me Kutner, l'avocat de la société, avait informé M. O que, au 27 avril 1990, il n'avait pas encore reçu de documents de qui que ce soit.

[15]     L'avocat de l'appelante a renvoyé M. O à une copie d'une offre d'achat signée par deux des sociétés de M. F, dont une était le commandité de la société en commandite, concernant l'achat du terrain mentionné précédemment. Ce document n'était pas daté, mais M. O a témoigné qu'il l'avait reçu en juin 1990. Monsieur O a également témoigné que l'opération immobilière, c'est-à-dire l'acquisition par la société du terrain en cause, avait été conclue le 29 juin 1990.

[16]     Monsieur O a également déclaré que ni l'appelante ni World International n'avaient reçu de commission avant le 17 juillet 1990.

[17]     Lors du contre-interrogatoire, M. O a témoigné que la convention relative au dépôt, qui aurait prétendument été signée le 30 novembre 1989, a été établie de manière à indiquer cette date-là, mais n'a été signée qu'en juin 1990. Il a également déclaré que l'on était encore en train de rédiger ce document en mai et en juin. Lorsqu'on l'a interrogé quant à savoir si la question des modalités concernant la commission qu'il devait recevoir était réglée le 29 décembre 1989, M. O a répondu que Me McKellar refusait d'apposer sa signature si l'appelante ne signait pas la renonciation relative à la commission. A également été déposée en preuve une copie d'une lettre de l'appelante à Me McKellar, du cabinet Weir & Foulds, en date du 19 juin 1990 incluant des copies signées des documents suivants : la convention en matière de commission conclue par l'appelante, la société et le commandité, le billet relatif à la commission qui devait être délivré par la société, la garantie devant être délivrée par Asia Pacific, et la convention de vente à commission conclue par World Canada Corp., la société, le commandité et M. O. En outre, cette lettre soulignait que l'on avait demandé à l'appelante et à World Canada Corp. d'accepter des modifications à deux des contrats initiaux et elle disait que ces documents seraient signés :

[TRADUCTION]

[...] seulement s'il est satisfait aux conditions suivantes :

1.          les contrats initiaux doivent être signés et délivrés immédiatement;

2.          l'achat du terrain doit être conclu à la date de clôture relative au terrain;

3.          le billet III et les chèques postdatés des investisseurs concernant le billet III doivent être endossés et cédés à World Corp. et libérés de toute fiducie en vertu de la convention relative au dépôt;

4.          le montant du premier versement de la commission payable à World Corp. concernant la vente des unités doit être payé à World Corp. et libéré de toute fiducie en vertu de la convention relative au dépôt.

[18]     Maître McKellar a témoigné que, au 29 décembre 1989, M. F n'était pas arrivé à une entente avec la Banque de Nouvelle-Écosse pour obtenir une mainlevée relativement à la débenture de 70 millions de dollars. Maître McKellar a également dit que M. F n'avait pas compris de la même manière que M. O ce qu'il en était concernant la commission de 3,9 millions de dollars. Il a dit que ce que M. F avait compris, c'était qu'aucune commission ne serait payable si la vente éventuelle du terrain à la société n'était pas conclue.

[19]     Richard M. Wise, F.C.A., C.A., I.F.A., S.C.V.B., A.S.A., M.C.B.A. ( « M. Wise » ), a été accepté comme expert en évaluation d'entreprises, et notamment comme expert en évaluation d'actifs financiers et en évaluation du risque afférent aux possibilités de recouvrement d'instruments financiers. Ses références universitaires et professionnelles remarquables - postes, expérience, publications, conférences, comités professionnels - ainsi que d'autres activités incluant des missions professionnelles importantes occupent six pages et demie de son C.V. Son rapport sur la juste valeur marchande de la commission à recevoir le 28 décembre 1989 ou vers cette date indique son opinion comme suit :

[TRADUCTION]

À notre avis, selon l'information et les documents que nous avons examinés, selon les explications qui nous ont été fournies, et compte tenu des restrictions, des hypothèses et des réserves mentionnées dans le présent document, la juste valeur marchande de la commission à recevoir (déduction faite des commissions des sous-mandataires) à la date d'évaluation était de l'ordre de 60 000 $ à 390 000 $, comme nous l'avons déterminé dans le présent document.

La liste des documents examinés par le cabinet de M. Wise inclut la notice d'offre, le contrat de société en commandite, la convention en matière de commission, la convention modifiée et révisée en matière de commission, la convention relative au dépôt concernant les responsabilités et les fonctions du fiduciaire, une convention - qui n'a jamais été signée - en date de décembre 1989 conclue par Asia Pacific, SCP, Weir & Foulds, Me Howard Kutner, la mandataire et World Canada Corp., la « renonciation » , un contrat de vente conclu par la mandataire et l'acheteuse établi au 29 décembre 1989 relativement à la commission à recevoir et de nombreux autres documents.

[20]     En décrivant la nature et l'historique de la commission à recevoir, M. Wise dit que SCP, la société en commandite, a été constituée pour acquérir un terrain et y construire un immeuble, le promoteur et gestionnaire étant Asia Pacific. Monsieur Wise a déclaré que le commandité et Asia Pacific étaient des coquilles vides qui n'avaient aucun élément d'actif et aucune capacité de financement et qui étaient dirigées et contrôlées par M. F. Il a dit que, à la date d'évaluation, toutes les unités de la société en commandite avaient été vendues. Il a dit que les investisseurs étaient tenus de faire un paiement comptant initial de 1 431,49 $ par unité et qu'ils devaient obtenir des prêts sous forme de prise de participation d'Asia Pacific pour financer le solde du prix d'achat. Il a également déclaré que les investisseurs avaient en outre signé trois billets (les « billets I, II et III » ) couvrant les intérêts payables à l'égard desdits prêts. Il a ensuite décrit le billet III comme étant un billet dont le capital correspondait aux versements de la commission à recevoir, soit une somme de 9 289,82 $ par unité. Ces billets étaient datés du 1er mars 1990, du 1er juin 1990, du 1er décembre 1990, du 1er juin 1991, du 1er décembre 1991 et du 1er juin 1992. Monsieur Wise a déclaré que le billet III et le paiement comptant des investisseurs, d'un montant total de 548 260,67 $, étaient détenus en fiducie par le fiduciaire en attendant qu'ils soient remis à SCP lorsqu'il serait satisfait à toutes les conditions préalables.

[21]     Monsieur Wise a dit qu'à la date d'évaluation, aucune convention en matière de commission n'avait été signée ou n'était prête à l'être, ajoutant que la convention en matière de commission et la renonciation se présentaient sous forme d'ébauches et n'étaient pas signées. Il a dit que la convention modifiée et révisée n'avait été rédigée que plusieurs mois après la date d'évaluation, soit à la fin de juin 1990. Il a déclaré que son cabinet avait donc examiné la convention en matière de commission, c'est-à-dire :

[TRADUCTION]

le seul document qui, quoique non signé, ait été rédigé à la date d'évaluation.

Ce document prévoyait que la société en commandite était responsable, envers la mandataire, du paiement d'une commission de vente s'élevant à 3 900 000 $. La commission devait être payée par versements le 29 décembre 1989, le 1er mars 1990 et le 1er juin 1992, soit des versements dont les montants et les dates correspondaient à ce qu'il en était dans le cas des versements relatifs au billet III devant être reçus des investisseurs.

[22]     Monsieur Wise a déclaré que, à ce qu'il avait compris, la convention en matière de commission avait été signée le 28 ou le 29 juin 1990. Il a ensuite dit que, le 28 décembre 1989, l'avocat d'Asia Pacific avait envoyé à l'appelante la renonciation susmentionnée, pour signature, en vue de mettre au point la convention en matière de commission. La renonciation, en date du 28 décembre 1989, prévoyait que la mandataire n'aurait pas droit à une commission relativement à SCP et ferait en sorte que soient remis les commissions, conventions, sommes d'argent, billets, etc., jusqu'à ce que l'achat du terrain soit officiellement conclu. Monsieur Wise a déclaré que la seule différence entre la convention en matière de commission et la convention modifiée et révisée était que la commission à recevoir dépendait de ce que l'achat du terrain soit conclu avant le 1er juillet 1990; de plus, les dates des versements avaient été modifiées en ce que le premier paiement était reporté à juin 1990.

[23]     Monsieur Wise a déclaré que la clôture de l'offre des unités était assujettie à un certain nombre de conditions. S'il n'était pas satisfait à l'une quelconque de ces conditions, les investisseurs étaient en droit d'annuler leur souscription et de se faire remettre leur argent. En outre, si la société n'avait pas acquis le terrain avant le 1er juillet 1990, les investisseurs étaient en droit de revendre leurs unités à Asia Pacific, qui s'était engagée à les racheter pour un prix égal à la mise de fonds de l'investisseur.

[24]     Monsieur Wise a ensuite traité des conditions préalables mentionnées précédemment et énoncées dans la notice, qu'il a décrite comme étant le seul document final qui existait à la date d'évaluation; ces conditions étaient :

[TRADUCTION]

a)          la vente d'au moins 60 p. 100 des unités offertes;

b)          l'avocat de SCP, agissant raisonnablement, devra :

(i)          soit être convaincu que les dispositions des contrats importants ont été signées et délivrées et lieront les parties,

(ii)         soit être convaincu qu'Asia Pacific a délivré à SCP et à l'avocat de celle-ci son engagement que tous les contrats importants seront mis au point le plus tôt possible après la clôture, et au plus tard le 31 mars 1990;

c)          la mandataire, agissant raisonnablement, devra être satisfaite des dispositions de la convention en matière de commission;

d)          Touche Ross & Co. devra avoir fourni sa lettre en matière fiscale;

e)          le cabinet juridique Weir & Foulds, agissant pour Asia Pacific, devra avoir communiqué son opinion à Touche Ross & Co. quant au fait que la vente d'unités était conforme aux exigences de la Loi sur les valeurs mobilières (Ontario) et aux règlements d'application de celle-ci.

[25]     Monsieur Wise disait ensuite dans son rapport :

[TRADUCTION]

Par conséquent, comme on n'avait pas respecté les délais concernant la mise au point des modalités des contrats importants et la condition c) ci-dessus, l'achèvement et la réalisation de l'offre sont demeurés incertains jusqu'à la fin de juin 1990.

Bien que n'ayant été signée qu'à la fin de juin 1990, la convention relative au dépôt (soit l'un des contrats importants mentionnés dans la notice d'offre) existait sous forme de version préliminaire à la date d'évaluation. L'article 2.02, qui prévoyait que les documents fiduciaires devaient être détenus par le fiduciaire jusqu'à ce que le terrain de Mississauga soit acheté par SCP, était inclus dans la convention préliminaire.

En résumé, étant donné que les investisseurs étaient en droit d'exiger qu'Asia Pacific rachète leurs unités pour un prix égal à leur mise de fonds si le terrain de Mississauga n'était pas acquis par SCP au plus tard le 30 juin 1990, et étant donné qu'Asia Pacific était une coquille vide qui n'aurait pas eu la capacité financière pour verser la commission à recevoir si elle avait été tenue de racheter les unités des investisseurs, nous doutons qu'Asia Pacific aurait accepté de payer la commission avant de pouvoir conserver l'argent des investisseurs inconditionnellement et irrévocablement.

[26]     Monsieur Wise a renvoyé au contrat relatif à la vente, par l'appelante, de la commission à recevoir et il a déclaré qu'il n'y avait aucune garantie quant à un recouvrement par l'acquéreur de la commission à recevoir parce que l'achat du terrain n'avait pas été approuvé par la Banque de Nouvelle-Écosse et que le commandité et Asia Pacific étaient des coquilles vides, sans aucun avoir net important.

[27]     Monsieur Wise a ensuite traité des sept versements relatifs à la commission payable et a dit que la convention en matière de commission n'était pas signée à la date d'évaluation, que la renonciation relative à la commission n'avait pas été signée et que le paiement initial de 341 998,94 $ dû à la « date de clôture » par SCP n'avait pas été fait à l'appelante.

[28]     Le rapport de M. Wise disait ensuite :

[TRADUCTION]

La notice d'offre prévoyait que la commission de la mandataire serait « entièrement acquise à la clôture de la vente des unités » . Il semble clair que la mandataire avait acquis sa commission en ce sens qu'elle avait rempli ses obligations envers SCP, car toutes les unités avaient été vendues; toutefois, à la date d'évaluation, il était douteux que la commission puisse être recouvrée, en partie parce que, à la date d'évaluation, la question de savoir si la mandataire avait droit à la commission à recevoir n'était pas claire.

[29]     Le principal point en litige dans le présent appel étant une question d'évaluation, je citerai une partie importante de l'opinion de M. Wise.

[TRADUCTION]

5.2        Possibilités de recouvrement de la commission à recevoir

Comme nous l'avons mentionné précédemment, la convention en matière de commission n'avait pas été signée à la date d'évaluation et n'a en fait été signée que lorsque le terrain de Mississauga a été acquis (c'est-à-dire à la fin de juin 1990).

Comme la Cour décidera de toutes les questions juridiques applicables, nous n'avons pas basé notre rapport sur une opinion juridique quant au droit, s'il en était, de la mandataire de contraindre au paiement de la commission à recevoir à la date d'évaluation. Aux fins de notre opinion comme évaluateurs d'entreprises, nous avons plutôt présumé que, vu un certain nombre de facteurs, la mandataire n'avait pas, à la date d'évaluation, le droit légal de contraindre au paiement de la commission à recevoir. Les facteurs pertinents à l'appui de cette hypothèse de droit incluent ce qui suit :

a)          la notice d'offre ne contenait aucune ébauche de convention en matière de commission;

b)          une condition préalable à l'offre était que la mandataire soit « satisfaite des dispositions de la convention en matière de commission [...] lesquelles conventions [...] devront avoir été signées [...] » ;

c)          quoiqu'une ébauche de convention en matière de commission ait existé à la date d'évaluation, elle n'avait pas été signée par SCP à cette date-là;

d)          SCP ne voulait apparemment pas signer l'ébauche de convention en matière de commission si la mandataire ne signait pas une renonciation qui modifiait considérablement les modalités de la convention en matière de commission en indiquant que le paiement à la mandataire dépendait de la clôture de l'acquisition du terrain de Mississauga;

e)          la mandataire a refusé de signer la renonciation;

f)           à la date d'évaluation, non seulement il n'y avait aucune convention signée obligeant SCP à verser la commission à recevoir, mais la mandataire et SCP n'avaient apparemment conclu aucune entente verbale quant aux modalités d'une telle convention.

À la date d'évaluation, les faits suivants étaient connus, de sorte qu'une analyse et une évaluation des risques résultants doivent être effectuées quant aux possibilités de recouvrement définitif de la commission à recevoir :

a)          SCP, Asia Pacific et le commandité n'avaient aucun actif important ou avoir net; par conséquent, ils n'avaient pas la capacité financière pour verser la commission à recevoir à la date d'évaluation et ne l'auraient pas acquise à moins que l'acquisition du terrain de Mississauga soit conclue au plus tard le 30 juin 1990.

b)          La convention en matière de commission n'était pas signée à la date d'évaluation.

c)          La commission à recevoir était payable par versements sur une période de deux ans et demi (d'après la convention non signée en matière de commission) et, à chaque date de versement, il y avait un risque que le paiement requis ne soit pas effectué.

d)          La commission à recevoir ne portait pas d'intérêt (jusqu'à ce qu'il y ait un défaut de versement).

e)          Le payeur n'avait pas payé le montant du premier versement de la commission à recevoir, c'est-à-dire le montant exigible à la date de clôture.

f)           Par suite de la renonciation qui a été imposée par SCP immédiatement avant la date d'évaluation, et comme l'a confirmé la convention modifiée et révisée, une condition d'exigibilité de la commission à recevoir était l'acquisition du terrain de Mississauga au plus tard le 30 juin 1990.

g)          Quoique les paiements de la commission à recevoir aient été garantis par tous les billets III signés par les investisseurs au cas où l'acquisition du terrain de Mississauga ne serait pas conclue au plus tard le 30 juin 1990, cette garantie avait peu de valeur. Cela tient au fait que les investisseurs étaient en mesure d'exiger qu'Asia Pacific rachète leurs unités en contrepartie d'une somme égale à leur mise de fonds. De plus, dans un tel cas, tous les documents fiduciaires - y compris la convention de souscription, le produit des chèques fiduciaires, les billets, les chèques postdatés (correspondant aux paiements relatifs aux billets), l'accord de garantie I et l'accord de garantie II - devaient être remis aux investisseurs.

Donc, si l'acquisition du terrain de Mississauga n'était pas conclue le 30 juin 1990, les investisseurs avaient le premier droit à l'égard du billet III en vertu de l'article 11.01 du contrat de société en commandite. La clôture de l'opération relative au terrain de Mississauga était également prévue dans la renonciation demandée par SCP et dans la convention modifiée et révisée.

h)          Il y avait de nombreuses autres conditions concernant la clôture de l'opération (voir la section 4.3 ci-dessus) à cause desquelles toute l'opération aurait pu s'effondrer. De plus, comme nous l'avons fait remarquer précédemment, nous avons présumé aux fins de notre opinion que, à la date d'évaluation, la mandataire n'avait pas le droit légal de contraindre au paiement de la commission à recevoir. Si cette hypothèse de droit est bien fondée, il s'ensuit que, à la date d'évaluation, la mandataire n'avait pas de droit légal exécutoire qu'elle pouvait céder à l'acquéreur.

i)           À la date d'évaluation, il y avait des risques importants quant à l'acquisition du terrain de Mississauga, notamment : (i) l'obtention du financement nécessaire; (ii) l'obtention d'une mainlevée de la Banque de Nouvelle-Écosse; (iii) la détérioration de la situation économique; (iv) la détérioration des possibilités sur le marché immobilier en Ontario à l'époque de l'évaluation, notamment dans le cas de projets immobiliers sous forme de consortiums en 1989.

Il est également à noter que, selon un principe d'évaluation important et fondamental, l'information après coup ou rétrospective est inadmissible. Lors de la négociation d'opérations sur le marché libre, ni le vendeur ni l'acheteur n'ont l'avantage de connaître les événements postérieurs à la date d'évaluation. Les tribunaux statuent systématiquement que l'information rétrospective est inadmissible dans la détermination de la valeur sur le marché théorique, sauf qu'elle peut être admise pour confirmer les hypothèses qui avaient été faites et les conclusions qui avaient été tirées à la date d'évaluation.

[30]     Monsieur Wise faisait ensuite référence aux définitions acceptées du terme « juste valeur marchande » et poursuivait en disant :

[TRADUCTION]

Pour déterminer quelle était, à la date d'évaluation, la juste valeur marchande de la commission à recevoir, nous avons, quant à la valeur actualisée de la commission à recevoir (c'est-à-dire la valeur actualisée pour prendre en considération la valeur temporelle de l'argent), appliqué des facteurs de risque de manière à tenir compte des incertitudes suivantes :

a)          à la date d'évaluation, le terrain de Mississauga, sur lequel était basée toute l'opération, n'avait pas été acquis, et les sources de financement n'étaient pas garanties;

b)          entre la date d'évaluation et le 30 juin 1990, il y avait une nette possibilité que la Banque de Nouvelle-Écosse fasse valoir sa garantie sur le terrain de Mississauga, car les débiteurs étaient en défaut à l'égard d'une débenture de 70 millions de dollars;

c)         les apports des investisseurs dépendaient de ce que SCP conclue l'acquisition du terrain de Mississauga. Par conséquent, comme le commandité, Asia Pacific et SCP étaient des coquilles vides (sans actifs), il n'y avait aucune autre source de financement pour s'acquitter de l'obligation relative à la commission à recevoir;

d)          vu le nombre d'échecs enregistrés sur le marché immobilier à la date d'évaluation ou vers cette date, notamment dans le cas d'opérations par voie de consortiums et de sociétés en commandite, la seule rédaction de nombreuses conventions [non signées] concernant l'opération prévue n'était pas suffisante pour garantir que la commission à recevoir serait finalement recouvrée, comme en fait foi le défaut d'effectuer le premier paiement;

e)          il fallait que certains événements se produisent après le 30 juin 1990 pour que le projet soit couronné de succès. L'un ou l'autre de ces événements (approbation de plans par la ville de Mississauga, obtention d'un permis de construction, achèvement de la construction, location des unités de l'immeuble, etc.) pouvait ne pas se produire, de sorte que le recouvrement des versements futurs au titre de la commission à recevoir n'était pas assuré.

5.3.2.    Évaluation de la commission à recevoir

Pour déterminer quelle était, à la date d'évaluation, la juste valeur marchande de la commission à recevoir, nous avons d'abord déterminé la valeur actualisée de cette commission, en tenant compte de la valeur temporelle de l'argent. Nous avons ensuite appliqué des facteurs de risque pour prendre en compte les risques liés aux possibilités de recouvrement de la commission à recevoir.

5.3.2.1. Valeur actualisée de la commission à recevoir

Comme nous l'avons décrit dans la section 5.1, la commission à recevoir devait être reçue, en supposant que toutes les conditions soient réunies, sur une période allant de la date de clôture au 1er juin 1992 (la « période de recouvrement » ). Pour déterminer la valeur actualisée de la commission à recevoir, nous avons choisi un taux d'actualisation relatif à la valeur temporelle de l'argent, en tenant compte des divers taux de rendement suivants qui étaient offerts à la date d'évaluation ou vers cette date :

Bons du Trésor de 90 jours du gouvernement du Canada

12,22 %

Rendement moyen des obligations du gouvernement du Canada :

1-3 ans

10,84 %

3-5 ans

10,19 %

5-10 ans

9,68 %

10 ans et plus

9,69 %

Obligations de sociétés (rendements moyens à long terme pondérés)

10,75 %

Taux préférentiels des banques à charte pour les prêts aux entreprises

13,5 %

Dépôt à terme de sociétés de fiducie - 5 ans

10,46 %

Taux afférents aux prêts hypothécaires ordinaires - 5 ans

12 %

En nous fondant sur ce qui précède, nous estimons que, à la date d'évaluation ou vers cette date, le taux d'actualisation (hors risque) qu'il convient d'appliquer à la commission à recevoir aux fins de l'évaluation était un taux allant de 10 p. 100 à 12 p. 100.

En appliquant de tels facteurs d'actualisation à la commission à recevoir pendant la période de recouvrement, nous avons déterminé une valeur allant de 3 492 000 $ à 3 422 000 $ (annexe II).

5.3.2.2. Juste valeur marchande de la commission à recevoir

Comme nous l'avons fait remarquer précédemment, divers risques étaient liés au recouvrement définitif de chaque versement de la commission à recevoir. Afin de déterminer la juste valeur marchande de la commission à recevoir, nous avons appliqué des facteurs de risque de manière à prendre en compte ces risques.

Pour prendre en compte le degré d'incertitude relatif au recouvrement définitif de la commission à recevoir durant la période de recouvrement, nous avons appliqué les facteurs de risque suivants à la commission à recevoir actualisée qui a été déterminée dans la section 5.3.2 :

a)          Nous avons appliqué un facteur de risque allant de 35 p. 100 à 37,5 p. 100 pour prendre en compte les risques liés au fait que l'offre était encore incertaine à la date d'évaluation, puisque le terrain de Mississauga n'avait pas été acquis et l'approbation de la Banque de Nouvelle-Écosse n'avait pas été reçue.

À l'appui du facteur de risque lié au terrain de Mississauga, nous avons examiné diverses publications et divers articles concernant les opérations immobilières sous forme de consortium et autres à l'époque de l'évaluation.

De plus, nous avons interrogé divers consultants, analystes financiers, courtiers en valeurs mobilières et promoteurs de consortiums au sujet du climat d'investissement en 1989 ou vers cette année, notamment pour ce qui était des facteurs de succès et de risque liés à la création de sociétés de personnes et de consortiums immobiliers.

Comme observation générale, la plupart des personnes interrogées étaient d'accord pour dire que, en 1989, de nombreuses opérations immobilières ont échoué à cause des facteurs suivants : (i) le ralentissement du marché immobilier; (ii) les taux d'intérêt élevés; (iii) l'apparition, sur le marché, d'investisseurs, de courtiers et de promoteurs qui n'avaient pratiquement aucune expérience dans le secteur immobilier (comme c'était le cas pour SCP). Ainsi, des investisseurs et d'autres parties ne faisaient pas le contrôle préalable nécessaire et, dans bien des cas, on concevait des opérations qui, au départ, n'étaient pas bien fondées financièrement.

La plupart des personnes interrogées estimaient que les projets de construction d'immeubles neufs étaient intrinsèquement plus risqués que les projets « en cours » , car il y avait eu (et continuait d'y avoir) plus de parties qui ne respectaient pas leurs engagements, plus de promoteurs inexpérimentés qui n'offraient pas de garanties suffisantes aux investisseurs et plus d'investisseurs qui prenaient des décisions basées sur des considérations fiscales, sans vérifier la valeur sous-jacente des biens immobiliers.

Nous avons obtenu de l'information indiquant que, en dépit du fait que des offres et que plusieurs documents et accords connexes ont été conclus, plus de 50 p. 100 des opérations avaient échoué en 1989 parce que les parties revenaient sur leurs engagements « à la dernière minute » , sans laisser suffisamment de temps pour que les promoteurs puissent trouver un nouveau financement rentable, vu les taux d'intérêt élevés.

D'après les résultats de notre enquête, les échecs enregistrés en 1989 étaient attribuables aux facteurs suivants : il s'agissait d'opérations mal structurées, surévaluées (vu les taux d'intérêt de l'époque) ou élaborées par des courtiers et promoteurs n'ayant guère d'expérience dans le domaine immobilier ou il s'agissait de projets présentant des défauts fondamentaux. Dans bon nombre des cas qui ont été rapportés, les documents (notices d'offre et documents connexes) avaient été rédigés mais non mis au point, de sorte que les opérations étaient abandonnées. On comptait trop sur le fait que les promoteurs accompliraient un travail de mise en valeur approprié, obtiendraient un financement adéquat et fourniraient des garanties suffisantes aux investisseurs. Les investisseurs et autres intéressés ne faisaient pas le contrôle préalable voulu et n'obtenaient pas d'avis indépendant concernant la valeur du placement, le parrainage, les promoteurs et, ce qui est plus important, la valeur des engagements du prêteur. Dans bien des cas, les prêteurs ne s'étaient pas engagés définitivement et, en l'absence d'un marché secondaire, bon nombre d'opérations immobilières ont été abandonnées ou ont échoué à cause d'un manque de confiance dans le marché immobilier, qui était en perte de vitesse.

b)          Nous avons appliqué un facteur de risque allant de 10 p. 100 à 12,5 p. 100 pour prendre en compte le fait que le commandité, Asia Pacific et SCP n'avaient pas les avoirs nets financiers nécessaires pour garantir, à la date d'évaluation, la commission à recevoir.

c)          Nous avons appliqué un facteur de risque allant de 10 p. 100 à 12,5 p. 100 pour refléter le risque de non-réalisation des modalités du billet III des investisseurs, duquel dépendaient entièrement les versements futurs (par exemple, le risque lié à la capacité financière de payer de chaque investisseur, le risque d'opposition aux chèques postdatés relatifs au billet III, le risque lié au fait que le billet III n'était pas garanti et ne serait endossé qu'après la clôture de l'opération, etc.). Dans d'autres cas, de nombreux investisseurs ont dit qu'ils avaient eu des difficultés financières parce qu'ils n'avaient pas été bien conseillés et parce qu'ils n'avaient pas la capacité financière pour assumer les responsabilités inhérentes à l'opération d'aménagement immobilier en cause. En 1989 ou vers cette année, de nombreux investisseurs ont dû se retirer à cause des taux d'intérêt élevés et parce qu'ils étaient incapables d'obtenir un financement avantageux.

d)          Nous avons appliqué un facteur de risque de 5 p. 100 pour refléter le fait que des contrats importants n'existaient que sous forme de versions préliminaires à la date d'évaluation.

e)          Vu les échecs enregistrés sur le marché en 1989 ou vers cette année, il y avait un risque que les paiements par versement ne soient pas effectués conformément au calendrier préalablement convenu, comme en fait foi le défaut de paiement relatif au premier versement. Nous avons donc appliqué un facteur de risque de 5 p. 100 à 7,5 p. 100.

f)           Il est à noter que nous n'avons appliqué aucun facteur de risque particulier relativement à l'hypothèse de droit que nous avons faite comme évaluateurs et selon laquelle la mandataire n'avait aucun droit légal exécutoire de contraindre au paiement de la commission à recevoir à la date d'évaluation.

Par conséquent, nous avons déterminé que la juste valeur marchande de la commission à recevoir était de l'ordre de 851 000 $ à 1 222 000 $ (annexe I) à la date d'évaluation, soit la valeur actualisée prenant en compte la valeur temporelle de l'argent et les divers risques décrits précédemment.

[31]     Monsieur Wise a ensuite traité des commissions des sous-mandataires, en disant qu'il avait déduit des montants pour tenir compte des commissions de 833 635 $ payables par l'appelante à des sous-mandataires à la date d'évaluation. Il a fait remarquer que, bien qu'aucune entente écrite n'ait été établie concernant les commissions ainsi payables par l'appelante, il y avait toujours eu, à ce qu'il avait compris, des relations d'affaires de bonne foi entre l'appelante et les sous-mandataires. Il a également déclaré que la mandataire n'avait jamais contesté le fait qu'elle était obligée de payer les sous-mandataires.

[32]     Enfin, les déclarations de M. Wise figurant sous la rubrique HYPOTHÈSES se lisent comme suit :

[TRADUCTION]

7.          HYPOTHÈSES

En nous formant une opinion quant à la juste valeur marchande, nous avons fait les hypothèses suivantes, outre les hypothèses mentionnées tout au long du présent rapport :

·                     le fiduciaire ne pouvait remettre de fonds à la mandataire si l'opération relative au terrain de Mississauga n'était pas conclue;

·                     SCP, le commandité et Asia Pacific n'avaient aucune source de financement autre que le projet d'aménagement pour verser à la mandataire la commission à recevoir;

·                     il était difficile (vu le marché de l'époque et vu le manque de confiance des prêteurs) d'obtenir du financement pour le terrain de Mississauga à la date d'évaluation;

·                     il n'existait aucun contrat ou accord qui était en vigueur ou en voie de négociation à la date d'évaluation et qui aurait un effet important sur la commission à recevoir, autre que ceux indiqués dans le présent rapport;

·                     la mandataire reconnaissait qu'elle avait l'obligation de payer les commissions des sous-mandataires;

·                     d'un point de vue juridique, la mandataire n'avait pas le droit de contraindre au paiement de la commission à recevoir à la date d'évaluation;

·                     en parvenant aux conclusions dont nous faisons état dans le présent document, nous n'avons omis aucun facteur important influant sur la juste valeur marchande de la commission à recevoir à la date d'évaluation.

OBSERVATIONS DE L'AVOCAT DE L'APPELANTE

[33]     Après avoir souligné les faits saillants, l'avocat de l'appelante a dit qu'il y avait un risque que la Banque de Nouvelle-Écosse ne coopère pas à la mainlevée de la débenture de 70 millions de dollars relative au terrain, créant ainsi un obstacle à la constitution du consortium. Il a fait valoir que les commanditaires n'allaient pas assumer la responsabilité de cette dette s'il fallait que la débenture fasse l'objet d'une mainlevée avant la clôture de la vente du terrain. Il soutenait que M. O et M. F n'étaient pas d'accord dans leurs discussions de 1989 quant aux conséquences qu'entraînerait le fait que l'achat du terrain ne soit pas conclu. Il a renvoyé au témoignage de M. O selon lequel M. F n'avait jamais dit que la commission dépendait de la conclusion de l'opération relative au terrain. À cet égard, il a renvoyé au témoignage de Me McKellar selon lequel ce que M. F avait compris, c'était qu'aucune commission ne serait payable si l'opération n'était pas conclue.

[34]     L'avocat de l'appelante a dit ensuite que cette question « n'était pas évidente dans la notice d'offre » . Il a fait valoir que la première ébauche de la notice était basée sur un résumé de l'opération préparé par Touche Ross. Il a poursuivi en disant que ce résumé indiquait la structure d'entreprise de base et que Me Kutner avait rédigé une ébauche de notice et avait reçu des commentaires de Touche Ross, de Me McKellar pour M. F et de Me Milner pour l'appelante. L'avocat de l'appelante disait que la notice pourrait être considérée comme une tentative de Touche Ross, les conseillers fiscaux de la société en commandite, pour « avoir le beurre et l'argent du beurre » . Il a renvoyé à une annexe du rapport de Touche Ross, concernant l'année 1989, qui faisait état d'une perte pour la société, de sorte que les investisseurs pouvaient demander une déduction pour l'année d'imposition 1989.

[35]     L'avocat de l'appelante a également renvoyé aux conditions préalables à la clôture de l'opération qui étaient énoncées dans la notice et qui, disait-il, indiquaient clairement que Me Kutner, au nom de la société, devait approuver tous les contrats importants, y compris l'entente de représentation. Il a aussi renvoyé à la disposition selon laquelle la mandataire devait être convaincue que la future convention écrite en matière de commission, ainsi que le droit de la mandataire, étaient également mentionnés comme conditions préalables à la clôture de l'opération. Il a déclaré que la notice indiquait clairement que non seulement les dispositions devaient être approuvées par Me Kutner, agissant raisonnablement, et par la mandataire, agissant raisonnablement, mais qu'elles devaient également être signées et délivrées à la date de clôture relative aux unités, sous réserve du droit du promoteur de s'engager à mettre au point les contrats importants après la date de clôture relative aux unités, mais avant le 31 mars 1990. Il a renvoyé au témoignage de Me McKellar voulant que M. F ait pris un tel engagement, mais qu'aucun des contrats importants en cause n'ait été approuvé ou signé à cette date-là.

[36]     L'avocat de l'appelante a ensuite renvoyé à la partie de la notice qui portait sur certaines dispositions contractuelles éventuelles que la mandataire avait accepté d'inclure. Il a lu la partie suivante de la notice :

[TRADUCTION]

Pour garantir toute partie de la commission non payée à la mandataire à la date de clôture, la société a accepté de céder le billet III de chaque investisseur et les chèques postdatés correspondants à la mandataire à la date de clôture [...]

[37]     L'avocat de l'appelante a ensuite déclaré que M. O, comme profane, avait de la difficulté quand il a été contre-interrogé sur ce point parce que, comme homme d'affaires, il avait compris qu'en vertu de la notice il n'allait avoir ces billets qu'une fois conclue l'opération immobilière - ce qui a en fait été le cas. Puis il a dit :

[TRADUCTION]

Et c'est peut-être là le meilleur exemple d'une notice dans laquelle on essaie de tout faire pour tous et, comme je l'ai dit, d'avoir le beurre et l'argent du beurre.

[38]     L'avocat de l'appelante a déclaré que, lue dans son ensemble, la notice portait sur des obligations éventuelles qui n'avaient pas été établies et signées à la date d'évaluation. Il a fait valoir que, en dépit du libellé de la notice selon lequel la commission serait entièrement acquise par l'appelante à la clôture de la vente des unités, M. O avait dit que c'était un libellé sur lequel avait insisté M. Tsi, un associé au cabinet Touche Ross. L'avocat de l'appelante a déclaré qu'il s'agissait d'un « libellé évocateur, motivé par des considérations fiscales » . Il a ensuite parlé de contrats qui n'avaient pas été signés et de conditions préalables qui n'avaient pas été remplies. Il a traité du fait que, si la société n'avait pas acheté le terrain à la date de clôture de l'opération relative aux unités, alors les conventions de souscription, les versements initiaux, le billet III et les chèques postdatés devaient être détenus en fiducie. Il a également traité du fait que, si l'acquisition du terrain n'était pas conclue le 30 juin 1990, tous les investisseurs avaient droit au remboursement de leur mise de fonds, qui était définie comme incluant les versements initiaux, les versements subséquents et les billets III. Puis il a dit :

[TRADUCTION]

En bref, donc, bien que ceci ne soit pas indiqué aux pages 23 et 24, où les comptables traitent de déductibilité pour 1989, le document, lu dans son ensemble, prévoit un mécanisme pour défaire complètement le consortium des investisseurs.

[39]     L'avocat de l'appelante a ensuite renvoyé aux parties de la notice qui indiquaient que, nonobstant la conclusion de la vente d'unités à la date de clôture définie, le fiduciaire était obligé de conserver les chèques fiduciaires et les paiements faits en vertu des billets jusqu'à ce que l'achat du terrain soit conclu et que le terrain soit enregistré au nom du commandité. Il a ensuite fait valoir que, lorsque le contrat de société en commandite a vu le jour, il était clair que les commanditaires avaient un mécanisme pour exercer leur droit de se dégager de leurs obligations, la notice d'offre étant un « exposé sommaire de contrats importants qui n'existaient pas encore » . Il a ensuite souligné qu'il ressortait clairement de l'ensemble de la notice qu'il n'y avait aucun droit et qu'il n'y avait aucune possibilité de recouvrement parce que tout l'argent - le versement initial, les billets, l'argent futur - devait être détenu en fiducie sous réserve d'un événement futur incertain. Il a renvoyé au témoignage de Me McKellar selon lequel ce dernier s'attendait à ce que, si le terrain n'était pas acquis le 30 juin, tous les investisseurs exigent le rachat de leurs unités. Il a poursuivi en disant que cette assertion de Me McKellar n'avait pas été contestée. Il a ensuite renvoyé au témoignage de Me McKellar selon lequel M. F n'allait pas signer une ébauche de convention en matière de commission si la renonciation mentionnée précédemment n'était pas également signée.

[40]     L'avocat de l'appelante a ensuite renvoyé au témoignage de M. O selon lequel l'Agence des douanes et du revenu du Canada (l' « ADRC » ) n'avait pas admis pour l'année d'imposition 1989 la perte de la société attribuable aux frais de commission, alors qu'elle a admis une telle perte pour des années ultérieures. L'échange suivant concernant l'appelante a ensuite eu lieu - le pronom « il » que j'utilise désigne M. O, au nom de l'appelante :

[TRADUCTION]

M. LE JUGE : Est-ce que l'agence gouvernementale même qui n'avait pas admis cette demande de déduction de frais des investisseurs est celle qui a dit ensuite qu'il avait droit à une déduction?

ME ROEBUCK : Oui. Je ne pense pas pouvoir en dire plus là-dessus.

[41]     Concernant ce qu'il appelait une « convention en matière de commission et une commission inconditionnelle » et une « convention modifiée et révisée conditionnelle en matière de commission » , l'avocat de l'appelante a soulevé la question de savoir pourquoi il y avait eu deux conventions. Sa réponse a été :

[TRADUCTION]

Parce que tout dépend de l'interlocuteur. Si l'interlocuteur est l'ADRC, vous lui remettez la convention inconditionnelle et lui dites que la société était obligée de payer et que les paiements sont différés. Par contre, si l'interlocuteur est World Corp., c'est-à-dire M. O, et que ce dernier veut être payé, vous lui remettez la convention conditionnelle et lui dites qu'il n'a aucun droit tant que l'opération relative au bien immeuble n'est pas conclue.

[42]     L'avocat de l'appelante a ensuite fait état du témoignage selon lequel Me McKellar avait rencontré M. O et lui avait remis une copie des deux conventions - la convention conditionnelle et la convention inconditionnelle -, mais avait fait signer à l'appelante l'engagement disant que, si l'opération immobilière devant être conclue le lendemain n'était pas conclue, M. O s'engageait à remettre la convention en matière de commission et la convention modifiée et révisée en matière de commission, ainsi que les billets relatifs à la commission. Il a ensuite dit que Me Kutner, l'avocat de la société, n'avait approuvé le libellé de la convention en matière de commission que le 25 juin 1990 au plus tôt et que cette convention a été signée le 28 juin. Il a également rappelé à la Cour que la débenture de 70 millions de dollars n'avait fait l'objet d'une mainlevée que le 29 juin 1990.

[43]     Au sujet de la convention en matière de commission, l'avocat de l'appelante a déclaré :

[TRADUCTION]

Selon ma prétention, si M. O avait choisi d'intenter une action, il n'aurait pas pu s'appuyer sur une entente verbale avec la société et il n'aurait pas eu ce qui était prévu dans une notice d'offre, à savoir un contrat écrit approuvé par les deux parties.

Toutefois, il est absolument clair qu'aucun contrat, verbal ou écrit, n'avait été conclu par la mandataire et la société au 29 décembre 1989.

J'affirme donc qu'il s'agit là d'une question qui relève entièrement de vous, Monsieur le juge, et non de l'évaluateur. Si vous souscrivez à ce point de vue, alors, à mon humble avis, il convient que vous appliquiez un autre facteur de risque à l'évaluation de M. Wise, car ce dernier n'a traité que des possibilités de recouvrement.

L'avocat de l'appelante a ensuite dit que, si des gens d'affaires examinaient les risques relatifs au recouvrement et y surimposaient un risque ou une certitude en matière d'exigibilité, ils ne paieraient qu'un montant symbolique ou spéculatif. Il a ensuite fait valoir que le montant ne serait pas supérieur à 35 000 $ américains, ainsi que la prise en charge de l'obligation envers les sous-mandataires. Il a ajouté que le préambule de la cession de la commission à la société des îles Caïmans décrivait le droit à la commission comme étant un accord avec Senate Congress Partnership et que ce document ne portait cession que de droits relatifs à un prétendu accord ou arrangement avec la société en commandite. Il a ensuite souligné que M. O avait établi ce document sans consulter d'avocat et que ce que M. O prétendait céder, c'était ses droits envers la société en commandite et non ses droits envers toute autre personne.

OBSERVATIONS DE L'AVOCATE DE L'INTIMÉE

[44]     Après avoir présenté des observations au sujet du sens de l'expression « juste valeur marchande » , l'avocate de l'intimée a fait référence à l'affaire Hallatt c. La Reine, C.C.I., n ° 97-3094(IT)G, 28 décembre 2000, 2001 D.T.C. 128, au paragraphe 30, où le juge en chef adjoint Bowman, de notre cour, a dit :

[...] Il faut toutefois garder à l'esprit que ce que la Cour doit faire dans une cause d'évaluation de ce genre, c'est de tenter d'arriver au prix sur lequel s'entendraient des vendeurs et des acheteurs sérieux et bien informés. C'est une tâche relativement banale dans laquelle le bon sens et la réalité commerciale jouent nécessairement un grand rôle. [...]

L'avocate de l'intimée a ensuite dit :

[TRADUCTION]

Le rôle de la Cour est d'examiner les faits présentés en preuve qui étaient connus à la date d'évaluation et d'attribuer cette pleine connaissance à l'acheteur et au vendeur pour déterminer la juste valeur marchande de la commission à recevoir.

[45]     L'avocate de l'intimée soutenait que les faits concernant les possibilités de recouvrement et l'exigibilité de la commission à recevoir permettent de conclure que l'appelante avait pris des mesures pour organiser l'opération de manière à éliminer pratiquement le risque de non-recouvrement. Elle soutenait que, dans les circonstances, le vendeur et l'acheteur pleinement informés conviendraient que les facteurs de risque sont minimes.

[46]     L'avocate de l'intimée soutenait que la notice était le document fourni aux investisseurs potentiels pour promouvoir l'opération et qu'il faut présumer que le vendeur et l'acheteur connaissaient ce document, ainsi que les faits qui y étaient décrits. Elle a déclaré que la preuve documentaire indique que les modalités énoncées dans la notice reflétaient les ententes (elle voulait manifestement parler d' « ententes verbales » ) existant entre les parties à la date d'évaluation. Elle a ensuite dit :

[TRADUCTION]

En outre, il n'est pas suffisant d'affirmer que les dispositions de la notice disant que la commission avait été entièrement acquise étaient en fait inexactes et représentaient simplement des considérations fiscales de comptables malavisés. La notice est un document sérieux que régit la Loi sur les valeurs mobilières. Elle ne doit pas contenir de présentation inexacte des faits, comme l'indique l'article 130 de cette loi. En fait, la notice donne aux investisseurs un droit légal d'action en cas de présentation inexacte des faits.

À partir de cela, il serait raisonnable de la part d'un vendeur et d'un acheteur prudents et bien informés à la date d'évaluation de croire que les modalités de la notice étaient exactes, notamment les modalités donnant aux investisseurs certains avantages fiscaux. Les investisseurs se fonderaient sur ces dispositions pour réclamer leurs déductions légitimes.

[47]     En ce qui a trait à l'exigibilité, l'avocate de l'intimée a déclaré que, à la date d'évaluation, un vendeur et un acheteur hypothétiques auraient l'avantage de savoir grâce à la notice que M. F contrôlait les sociétés qui étaient le promoteur, le commandité et le commanditaire initial. Elle a ensuite dit :

[TRADUCTION]

Ils pourraient présumer à partir de cela que, lorsqu'il a négocié la notice, il parlait également pour la société.

[48]     L'avocate de l'intimée a fait les observations supplémentaires suivantes :

[TRADUCTION]

La notice dit que la commission sera entièrement acquise à la clôture de la vente des unités et que la mandataire a accepté que le paiement de la commission soit différé.

[...] parmi les documents déposés en preuve, il n'y en a aucun qui existait à la date d'évaluation et que M. Farantatos pourrait invoquer pour prouver que la commission n'était acquise que lorsque l'achat du terrain de Mississauga était conclu [...]

Même la convention en matière de commission, qui se présentait sous forme préliminaire à la date d'évaluation, faisait écho à la notice et ne disait pas que les billets III devaient être remis ou annulés si l'opération relative au terrain [...] n'était pas conclue ou que la mandataire n'avait pas droit à la commission si ladite opération n'était pas conclue.

La seule disposition de la notice qui traitait de ce qui arriverait si l'opération relative au terrain [...] n'était pas conclue disait que les investisseurs pourraient revendre leurs unités à un prix ÉQUIVALANT à leur « mise de fonds » .

Selon la notice, la « mise de fonds » inclut les sommes que les investisseurs payaient au titre du billet III.

Toutefois, cette disposition de la notice dit seulement que le promoteur doit payer à l'investisseur l'équivalent de ces sommes. Elle ne dit pas que le billet III serait remis ou annulé.

Le contrat de société en commandite n'a été mis par écrit qu'au printemps 1990. Il n'existait pas à la date d'évaluation. Il n'y avait à la date d'évaluation aucune affirmation verbale ou écrite selon laquelle les billets III devaient être remis à l'investisseur si l'opération relative au terrain [...] n'était pas conclue. Tout ce qui existait, c'était le sommaire du contrat de société en commandite.

Il n'y a aucune preuve que, à la date d'évaluation, il y avait eu des discussions quant au fait que les billets III seraient remis.

[49]     L'avocate de l'intimée a dit que la notice indique que les billets III et les chèques postdatés correspondants étaient destinés à payer la commission et que la société avait accepté de céder les billets III et les chèques postdatés à la mandataire à la date de clôture. Elle a dit ensuite :

[TRADUCTION]

Diverses dispositions de la notice informaient les investisseurs que les obligations qu'ils acceptaient concernant les paiements au titre des billets III représentaient un risque particulier et ne donneraient pas lieu à un droit de compensation ou à d'autres droits en equity.

[...]

Le billet III lui-même contient une disposition sur la priorité qui dit que les modalités de l'annexe « F » l'emportent sur toute autre convention.

[50]     L'avocate de l'intimée soutenait qu'un vendeur et un acheteur prudents connaissant les faits susmentionnés ne craindraient pas trop qu'il y ait un litige si M. F niait que la commission à recevoir eût été entièrement acquise à la date d'évaluation.

[51]     L'avocate de l'intimée a également dit qu'il était très probable que le terrain serait acquis au 30 juin 1990. Elle a renvoyé au fait que M. F avait beaucoup d'expérience en matière de consortiums immobiliers, qu'il était le seul actionnaire et l'âme dirigeante du promoteur (Asia Pacific), qu'il contrôlait les deux sociétés qui étaient propriétaires du terrain, qu'il était le seul administrateur du commandité et du commanditaire initial et que, à la date d'évaluation, il prenait activement toutes les mesures nécessaires pour faire en sorte que le terrain eût été transféré à la date prévue dans la notice. Elle a terminé cette partie de son argumentation en disant que le vendeur et l'acheteur pouvaient conclure que M. F avait l'expérience, la capacité et les compétences personnelles nécessaires pour négocier avec succès le transfert du terrain par sa société à la société en commandite. Elle soutenait qu'en tant que personnes intelligentes, les acheteurs considéreraient comme minime le risque de manquement et que le facteur de risque devrait être très peu élevé. Elle soutenait qu'il y avait un différend entre M. F et M. O, mais qu'il était possible que la présentation de la renonciation à la dernière minute « n'ait été qu'un faux-semblant ou une tentative pour faire une meilleure affaire » . Elle a dit que la question de savoir ce que croyait M. Farantatos et quelles étaient ses intentions pourrait être quelque chose qu'un vendeur ou un acheteur aurait cherché à déterminer à la date d'évaluation, mais que M. Farantatos n'a pas été appelé à témoigner.

[52]     L'avocate de l'intimée a affirmé que les investisseurs avaient fait leurs paiements selon ce qui était requis et que les paiements relatifs à la commission à recevoir devaient être financés à partir de l'acompte et des chèques postdatés des investisseurs. Elle a déclaré que, à la date d'évaluation, il n'y avait eu de manquement à l'égard d'aucun de ces paiements. Elle a ensuite dit que ces paiements avaient été effectués, mais étaient détenus par le fiduciaire. Elle a poursuivi en disant que, quoique M. Wise ait appliqué un facteur de risque pour prendre en compte le fait que le commandité, Asia Pacific et la société en commandite n'avaient pas l'avoir net suffisant pour garantir la commission à recevoir à la date d'évaluation, la preuve indiquait que les billets III avaient été prévus pour garantir les versements de la commission. Elle soutenait qu'un vendeur et un acheteur prudents n'accorderaient guère de poids, voire aucun, au risque de manquement, car aucune preuve n'indiquait que les investisseurs étaient susceptibles de manquer à leurs engagements.

[53]     L'avocate de l'intimée a de nouveau fait valoir qu'aucun investisseur n'avait manqué à ses engagements et que les paiements relatifs aux billets avaient été effectués. Elle a déclaré que l'opération relative au terrain a été conclue comme prévu dans la notice.

[54]     Pour ce qui est de la déduction accordée aux petites entreprises, l'avocate de l'intimée soutenait que l'appelante n'était pas une société privée sous contrôle canadien au sens du paragraphe 125(7) de la Loi, car elle était en fait contrôlée par M. O, quoique ce dernier ait détenu seulement 49 p. 100 des actions de la société. Elle disait que l'activité commerciale de la société cesserait sans M. O, celui-ci étant un courtier en valeurs mobilières inscrit, et que ce secteur d'activité représentait la seule entreprise de l'appelante.

ANALYSE ET CONCLUSION

Première question en litige

[55]     J'admets les observations de l'avocat de l'appelante et j'y souscris. Contrairement aux observations de l'intimée, les observations de l'appelante tenaient compte d'une analyse des faits pertinents qui est bien fondée et qui reflète ce que le juge Bowman a appelé « le bon sens et la réalité commerciale » . De plus, je souscris à la logique de l'analyse de M. Wise et j'admets les conclusions de ce dernier, sous réserve d'une légère modification. Je traiterai de cette modification plus loin, en parlant de la question du caractère exécutoire du droit de recouvrer la commission. Les observations de l'appelante et l'opinion de M. Wise m'ont amené à conclure que le fondement de la notice était l'octroi de déductions de pertes de société aux investisseurs pour l'année d'imposition 1989 et que le désir de se prévaloir de ces déductions l'emportait sur la prise en compte des nombreuses mesures devant être complétées pour que les opérations prévues dans la notice soient conclues.

[56]     L'avocate de l'intimée n'a pas produit de preuve ordinaire ni de preuve d'expert. Il n'y avait donc aucune explication quant à savoir comment le ministre avait déterminé ou pouvait étayer l'évaluation de 2,5 millions de dollars relative à la commission à recevoir. L'avocat de l'appelante n'a pas traité de ce que j'ai dit à l'audience au sujet du fait que l'ADRC a refusé aux investisseurs la déduction de leur part de la perte de la société créée par la commission qui aurait été due en 1989, alors que, pour la même période[1], l'ADRC a, paradoxalement, établi à l'égard de l'appelante une cotisation au titre d'une partie importante de la commission à recevoir.

[57]     Monsieur Wise a déclaré dans son rapport qu'aucune opinion juridique n'avait été obtenue quant au droit, s'il en était, de l'appelante de contraindre au paiement de la commission à recevoir à la date d'évaluation. Il disait, comme je l'ai cité précédemment :

[TRADUCTION]

Aux fins de notre opinion comme évaluateurs d'entreprise, nous avons plutôt présumé que, vu un certain nombre de facteurs, la mandataire n'avait pas, à la date d'évaluation, le droit légal de contraindre au paiement de la commission à recevoir.

[58]     Quoique l'avocate de l'intimée ait cherché à persuader la Cour qu'il convient de ne guère tenir compte ou de faire carrément fi du rapport de M. Wise et qu'il convient de prendre en considération principalement la notice, cela ne tient pas compte de la réalité des événements qui ont été décrits en preuve d'une manière détaillée. On ne peut faire fi du fait que la convention en matière de commission devait être conclue par la société en commandite et l'appelante. Cela n'a été fait que lorsque la société a acquis le terrain, soit en juin 1990. On ne peut faire fi du fait que la société pourrait ne jamais avoir acquis le terrain, notamment parce qu'il était assujetti à une débenture de 70 millions de dollars au bénéfice de la Banque de Nouvelle-Écosse. On ne peut faire fi de l'existence des conditions préalables décrites précédemment. On ne peut faire fi des situations financières des entités pertinentes, décrites précédemment, qui n'avaient absolument aucun actif. On ne peut faire fi du point de vue de M. F selon lequel aucune commission ne serait payable jusqu'à ce que la société acquière le terrain. On ne peut faire fi du fait que des contrats importants indiqués dans la notice n'existaient pas à la date d'évaluation. On ne peut faire fi de ce que Me McKellar a dit au sujet de la renonciation à l'appui de la position de M. F, qu'il a décrite clairement comme étant qu'aucune commission n'était payable jusqu'à ce que le terrain soit acquis. On ne peut faire fi du fait que, dans l'ensemble, les conventions n'ont été achevées et signées qu'à la fin de juin 1990. Le fait est que, à la date d'évaluation, aucun des documents prévus dans la notice n'avait été signé et aucune des mesures prévues dans la notice n'avait été prise.

[59]     La déclaration suivante de l'avocate de l'intimée ne tient pas compte de la preuve verbale qui a été présentée :

[TRADUCTION]

[...] parmi les documents déposés en preuve, il n'y en a aucun qui existait à la date d'évaluation et que M. Farantatos pourrait invoquer pour prouver que la commission n'était acquise que lorsque l'achat du terrain de Mississauga était conclu [...]

[60]     L'avocate de l'intimée soutenait qu'en tant que personnes intelligentes, les acheteurs considéreraient comme minime le risque de manquement et qu'un facteur de risque minime devrait être appliqué à cet égard. Comme l'intimée n'a pas présenté de preuve d'expert, je considère cette assertion comme une tentative pour banaliser l'opinion de M. Wise, l'un des meilleurs évaluateurs de notre pays.

[61]     De plus, l'affirmation de l'avocate de l'intimée selon laquelle [TRADUCTION] « l'opération relative au terrain a été conclue comme prévu dans la notice » se rapporte à un fait qui s'est produit environ six mois après la date d'évaluation, ce qui n'a absolument aucun rapport avec le processus d'évaluation.

[62]     Je traite maintenant de la modification susmentionnée concernant l'opinion de M. Wise. Tout en fondant ses observations sur une interprétation de la notice sans admettre la masse d'éléments de preuve indiquant des faits commerciaux pertinents, l'avocate de l'intimée traitait seulement des dispositions à partir desquelles elle cherchait à faire valoir la position du ministre. Par exemple, la convention en matière de commission mentionnée dans la notice sous la rubrique CONTRATS IMPORTANTS stipulait :

[TRADUCTION]

[...] la mandataire recevra de la société en commandite une commission de 3 900 000 $.

En traitant de la question du caractère exécutoire, l'avocate de l'intimée a dit que M. F était responsable des sociétés du promoteur et qu'il était responsable du commandité. Cette observation est superficielle. Elle faisait fi de la disposition précitée du document même sur lequel se fondait son argumentation. À quel titre M. F serait-il poursuivi? L'avocate de l'intimée a ainsi fait une affirmation de légalité générale sans faire valoir un point précis. L'acte en vertu duquel l'appelante cédait la commission à recevoir n'était certes pas un document juridique bien rédigé, mais il prévoyait clairement le paiement de la commission à l'appelante par « la société en commandite » . Aucune preuve n'indique qu'une telle convention ait existé le 29 décembre 1989.

[63]     L'avocate de l'intimée a dit :

[TRADUCTION]

La notice est un document sérieux que régit la Loi sur les valeurs mobilières. Elle ne doit pas contenir de présentation inexacte des faits, comme l'indique l'article 130 de cette loi. En fait, la notice donne aux investisseurs un droit légal d'action en cas de présentation inexacte des faits. [...] À partir de cela, il serait raisonnable de la part d'un vendeur et d'un acheteur prudents et bien informés à la date d'évaluation de croire que les modalités de la notice étaient exactes, notamment les modalités donnant aux investisseurs certains avantages fiscaux.

Cela ne tient absolument pas compte du fait que ce qui est en litige, c'est la valeur de la commission à recevoir et non le caractère sacré de la notice et ce que les investisseurs peuvent avoir pensé. De plus, le fait que les investisseurs avaient un certain droit légal d'action n'est pas pertinent.

[64]     L'avocate de l'intimée a dit qu'il était « très probable » que le terrain serait acquis au 30 juin 1990. Elle a ensuite déclaré que M. F en était responsable, puis elle a énoncé des faits concernant l'expérience de M. F et la relation de ce dernier avec les sociétés en cause. C'était de la pure spéculation qui n'amenait à aucune conclusion solide indiquant que tout ce qui avait été prévu serait réalisé. L'avocate de l'intimée soulignait que M. F n'avait pas été appelé à témoigner, mais l'intimée aurait pu y voir elle-même.

[65]     L'avocate de l'intimée a déclaré que M. O avait refusé de signer la renonciation, puis elle a dit :

[TRADUCTION]

Cela prouve tout au plus qu'il y a eu un différend, mais il est également possible que le fait que M. Farantatos a présenté la renonciation à la dernière minute n'ait été qu'un faux-semblant ou une tentative pour faire une meilleure affaire.

Ces propos étaient destinés à étayer la déclaration suivante de l'avocate de l'intimée :

[TRADUCTION]

Il est inexact de dire qu'à la date d'évaluation, la commission n'était acquise que lorsque l'achat du terrain de Mississauga était conclu.

Encore là, c'est de la spéculation, et cela ne tient pas compte des faits réels relatifs à la valeur de la commission à recevoir qui a été cédée.

[66]     Bien qu'il ait fait une hypothèse selon laquelle l'appelante n'avait aucun droit juridique, à la date d'évaluation, de contraindre au paiement de la commission à recevoir, M. Wise, n'étant pas avocat et n'ayant pas reçu d'avis juridique à cet effet, n'était pas en mesure de conclure qu'un tel droit n'existait pas. Comme je souscris aux commentaires de l'un des plus grands évaluateurs du Canada, comme je reconnais le caractère sensé des observations présentées par l'avocat de l'appelante et comme j'ai remarqué le caractère limité du point de vue adopté par l'avocate de l'intimée, qui s'est fondée sur la notice sans tenir compte des réalités commerciales, j'ai déterminé - et non présumé comme M. Wise - que le droit de contraindre au paiement de la commission à la date d'évaluation était improbable au point de n'avoir aucune valeur. Monsieur O a fait référence à des exigences de la Commission des valeurs mobilières, mais il n'y avait aucune preuve quant à savoir comment la valeur de 41 300 $ avait été fixée relativement à la cession de ce droit. Dans les circonstances, je suis incapable d'attribuer à ce droit une valeur supérieure à la somme de 41 300 $. J'estime franchement que, dans les circonstances, cette somme était beaucoup trop élevée.

Deuxième question en litige

[67]     Il s'ensuit que je n'ai pas à traiter des observations quant au montant de l'impôt qui aurait dû être retenu et des pénalités et intérêts y afférents.

Troisième question en litige

[68]     Concernant la déduction accordée aux petites entreprises et concernant la question de savoir si l'appelante était une société privée sous contrôle canadien, l'avocate de l'intimée cherchait à persuader la Cour d'accepter un argument basé sur le paragraphe 256(5.1), qui traite du contrôle de fait. Maître Ronald Farano, avocat de l'appelante, a contesté à juste titre le fait que l'intimée s'appuie sur ce paragraphe, car celui-ci n'avait pas été soulevé dans la réponse à l'avis d'appel et n'a été soulevé que lors de la présentation des observations de l'intimée, après que l'appelante eut complété sa présentation. Le paragraphe 152(9) de la Loi est ainsi libellé :

(9)         Nouvel argument à l'appui d'une cotisation. Le ministre peut avancer un nouvel argument à l'appui d'une cotisation après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation, sauf si, sur appel interjeté en vertu de la présente loi :

a)          d'une part, il existe des éléments de preuve que le contribuable n'est plus en mesure de produire sans l'autorisation du tribunal;

b)          d'autre part, il ne convient pas que le tribunal ordonne la production des éléments de preuve dans les circonstances.

[69]     L'intimée n'a présenté des observations relatives au paragraphe 256(5.1) que le quatrième et dernier jour de l'audition du présent appel. Au cours de la présentation de la preuve, l'avocat de l'appelante n'a pas été préalablement avisé que cet argument serait soulevé. Cet argument a en fait été soulevé vers la fin d'un vendredi après-midi. Quel que soit l'effet des éléments de preuve pertinents que l'appelante pourrait avoir présentés, il n'était pas, selon moi, approprié dans ces circonstances d'ordonner la présentation de tels éléments de preuve. Cela aurait occasionné un ajournement et retardé la conclusion de l'audience. J'ai donc statué que l'argument basé sur ce paragraphe était irrecevable.

[70]     Comme le soutenait l'avocat de l'appelante, sans ce paragraphe, la question du contrôle se ramenait à un « jeu de nombres » . L'avocat de l'appelante faisait valoir que l'on n'avait guère contre-interrogé M. O concernant le contrôle et quant à savoir quelles fonctions étaient remplies par Mme Rende. La preuve a établi que Mme Rende était signataire autorisée aux fins bancaires et qu'elle s'occupait du bureau en l'absence de M. O. Il n'y a eu aucune question au sujet de l'influence de Mme Rende sur la société. De plus, non seulement l'avocate de l'intimée n'a pas contre-interrogé M. O à cet égard, mais elle n'a présenté aucune preuve selon laquelle M. O avait une influence directe ou indirecte qui, si elle était exercée, donnerait lieu à un contrôle de fait de la société. J'ai donc déterminé que la 616483 était une société privée sous contrôle canadien qui avait droit à la déduction qu'elle avait demandée en vertu de l'article 125 de la Loi.

[71]     Par conséquent, l'appel est admis, avec dépens payables par l'intimée à l'appelante.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 17e jour de juillet 2003.

« R. D. Bell »

J.C.C.I.

Traduction certifiée conforme

ce 22e jour d'août 2005.

Yves Bellefeuille, réviseur



[1]           La date d'évaluation se situait dans l'année d'imposition 1990 de l'appelante.

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.