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Référence : 2007CCI124

Date : 20070309

Dossier : 2004-4726(GST)I

ENTRE :

RÉMY THERRIEN,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

(Prononcés oralement à l'audience le 25 janvier 2007 à Québec (Québec).)

Le juge Tardif

[1]      Il s'agit de l'appel d'une cotisation portant le numéro PQ-2003-7222, en date du 19 août 2003, relativement à la taxe sur les produits et services ( « TPS » ).

[2]      Les questions en litige sont les suivantes :

          a) En sa qualité d'administrateur de la compagnie, l'appelant est-il solidairement tenu avec cette dernière, de payer la taxe nette exigible ainsi que les intérêts et pénalités?

          b) L'appelant, en tant qu'administrateur de la compagnie, a-t-il agi avec autant de soin, de diligence et de compétence pour prévenir le défaut de la compagnie de remettre la taxe nette exigible que ne l'aurait fait une personne raisonnablement prudente dans les mêmes circonstances?

[3]      Pour établir et ratifier la cotisation dont il est fait appel, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) s'est fondé sur les hypothèses de fait énumérées à la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ); elles se lisent comme suit :

a)          Au cours des années 1997 et 1998, l'appelant était un administrateur de la compagnie Pro-Co Beauce Ltée (ci-après appelée « la compagnie » ).

b)          Au cours des années ci-avant mentionnées, la compagnie était un inscrit aux fins de l'application de la TPS.

c)          Suite à la vérification des déclarations de taxes de la compagnie, il fut constaté que cette dernière avait perçu la TPS sans les remettre à l'intimée pendant la période du 1er avril 1997 au 31 décembre 1998.

d)          Le 8 février 1999, un certificat a été enregistré à la Cour fédérale portant le numéro GST-463-99 contre la compagnie pour un montant de 9 880,28 $ et un bref de saisie a été rapporté insatisfait en partie à l'égard de cette somme le 13 juillet 2002.

e)          l'appelant était le seul administrateur de la compagnie aux périodes où celles-ci était tenue de verser la taxe nette à l'intimée et s'occupait de la gestion courante de cette dernière.

f)           Entre autres, l'appelant se porta caution le 24 février 2000 envers le ministère du revenu pour le paiement de la dette de la compagnie Pro-Co Beauce Ltée.

g)          De plus, le 4 avril 2000, l'appelant signait, à titre de président de la compagnie Pro-Co Beauce Ltée, un engagement de cette dernière de respecter une entente prise.

h)          Également le 29 mars 2001, l'appelant signait à titre de président de la compagnie Pro-Co Beauce Ltée la déclaration fiscale de cette dernière.

i)           L'appelant a toujours agi à titre d'administrateur de la compagnie Pro-Co-Beauce Ltée pendant les négociations avec l'intimée pour le règlement de la dette de cette dernière.

j)           L'appelant, à titre d'administrateur de la compagnie, n'a pas agi avec le degré de soin, de diligence et de compétence, pour prévenir le manquement qu'une personne raisonnablement prudente ne l'aurait fait dans des circonstances comparables.

k)          En particulier, l'appelant connaissait les défauts de remises de la compagnie durant la période en litige et n'a pris aucune mesure concrète et positive pour prévenir les manquements de la compagnie.

[4]      J'ai d'abord expliqué à l'appelant la procédure à suivre pour la présentation de son dossier. Je lui ai également mentionné qu'il avait le fardeau de preuve, c'est-à-dire qu'il devait démontrer d'une manière prépondérante que la cotisation n'était pas justifiée et qu'elle devait être annulée pour des motifs qu'il se devait d'établir.

[5]      Au soutien de son appel, l'appelant a essentiellement fait valoir que la prescription avait fait son oeuvre et que la cotisation devait pour cette seule raison être annulée.

[6]      Pour soutenir ses prétentions, il a soumis qu'il avait fait préparer par un notaire et ultérieurement signé en sa présence un document intitulé « Pro-Co Beauce Ltée - Démission » (pièce A-1).

[7]      J'ai dès lors demandé, voire répété à l'appelant s'il s'agissait là du seul point qu'il voulait soumettre au tribunal. Ce dernier a affirmé qu'il s'agissait là du seul argument qu'il soumettait au soutien de son appel.

[8]      L'intimée a fait une preuve très convaincante à l'effet que l'appelant n'avait jamais cessé de s'occuper des affaires de la société dans laquelle il était le seul actionnaire. Il avait négocié et signé des engagements quant au paiement des montants dus. Bien plus, il s'est engagé personnellement à payer ces montants conférant ainsi des droits contractuels au ministre pour la perception des montants décrits à l'engagement.

[9]      Bien qu'il m'apparaît évident que cet engagement écrit confère des droits à l'intimée, il n'appartient pas à ce tribunal de définir les droits inhérents à cet engagement.

[10]     En l'espèce, l'appelant n'a jamais démontré le bien-fondé de ses prétentions quant à la prescription. En effet, le document qu'il a signé chez le notaire n'a aucune valeur juridique face à l'intimée qui n'est aucunement liée par ce document; il s'agit essentiellement d'un document privé n'ayant aucun impact ou effet quant aux droits des tiers. D'autre part, la preuve a établi que l'appelant n'avait jamais mis fin d'une manière véritable aux affaires de la société Pro-Co Beauce Ltée.

[11]     Pour mettre fin à une société, il est impératif de respecter certaines règles, il ne suffit pas de se rendre chez un professionnel du droit et lui indiquer être prêt à signer une déclaration à l'effet qu'il n'y a plus d'activités. Déclarer démissionner de son poste d'une façon privée et unilatérale n'a pas pour effet de libérer le démissionnaire de toutes ses obligations.

[12]     En l'espèce, l'appelant n'a rien fait de tel, bien au contraire, après avoir attesté par sa seule signature qu'il démissionnait et que l'entreprise avait mis fin à ses activités, il a manifestement fait comme s'il n'avait jamais rien signé de tel.

[13]     L'appelant n'a soumis aucune preuve quant aux fondements juridiques de la cotisation, et cela, même si le tribunal lui a indiqué l'importance de cet aspect.

[14]     De son côté, l'intimée a fait la preuve que toutes les hypothèses de fait présumées mentionnées à la Réponse étaient exactes validant ainsi totalement le bien-fondé de la cotisation.

[15]     L'appelant a essentiellement fait valoir que la cotisation était mal fondée et devait être annulée par l'effet de la prescription. Selon l'appelant, les délais quant à la prescription ont commencé à courir à partir du moment où il a signé devant le notaire le document que ce dernier avait préparé sur ses instructions.

[16]     Non seulement ce document n'a aucune valeur face aux tiers dont l'intimée, il n'a également aucun effet quant au moment de la fin des activités, puisque la prépondérance de la preuve est à l'effet que l'appelant a continué, après la signature de ce fameux document, à s'occuper des affaires de la société comme si rien n'était.

[17]     Bien que l'appelant n'ait soumis aucune preuve quant au fondement de la cotisation, l'intimée a fait une preuve très convaincante et très bien étoffée, à l'effet que l'appelant avait agi d'une manière négligente, insouciante et même abusive en ce qu'il avait financé les affaires de la société avec les montants qu'il aurait normalement du remettre au ministre. Il a agi ainsi sciemment et sans aucune excuse au point qu'il n'y a aucun doute qu'il a engagé sa responsabilité personnelle, fondement de la cotisation.

[18]     Pour toutes ces raisons, l'appel est rejeté, avec dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 9e jour de mars 2007.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


RÉFÉRENCE :                                   2007CCI124

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2004-4726(GST)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               RÉMY THERRIEN ET LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Québec (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 25 janvier 2007

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :                    le 7 février 2007

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant:

l'appelant lui-même

Avocat de l'intimée:

Me Roberto Clocchiatti

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

       Pour l'appelant:

                     Nom :                            

                 Cabinet :

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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