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Dossier : 2002-1417(IT)I

ENTRE :

ALAIN PETIT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 11 juin 2003 à Ottawa (Ontario)

Devant : L'honorable juge Lucie Lamarre

Comparutions :

Représentante de l'appelant :

Hélène Roy

Avocate de l'intimée :

Me Marie-André Legault

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 1993 est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'octobre 2003.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.


Référence : 2003CCI713

Date : 20031003

Dossier : 2002-1417(IT)I

ENTRE :

ALAIN PETIT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

La juge Lamarre

[1]      Il s'agit d'un appel d'une cotisation établie en date du 16 février 1996 par le ministre du Revenu national ( « Ministre » ) à l'encontre de l'appelant relativement à l'année d'imposition 1993. L'appelant a réclamé une perte d'entreprise de 24 975 $ laquelle lui a été refusée. En refusant ainsi la perte, le Ministre s'est appuyé sur les faits que l'on retrouve au paragraphe 5 de la Réponse modifiée à l'avis d'appel et qui se lisent comme suit :

a)      l'appelant a signé le ou aux alentours du 15 décembre 1993 un contrat d'achat pour une licence non-exclusive (le « Contrat » ) à l'égard des produits Corps et Ame (les « Activités » ) pour un montant de 25 000 $;

b)      en vertu du Contrat, le vendeur était le Groupe Garydox Ltée;

c)      le Contrat a été signé par l'appelant et Constantin Roy pour le Groupe Garydox Ltée;

d)      en réalité, l'appelant n'a déboursé que 8 500 $;

e)      le but réel de l'appelant n'était pas l'exploitation des produits Corps et Ame;

f)       l'appelant n'avait pas l'intention de commercialiser les produits Corps et Ame;

g)      l'appelant n'a pas engagé aucune somme d'argent au-delà de son investissement de 8 500 $;

h)      l'appelant n'a pas encouru une perte de 24 975 $;

i)       au moyen de ce subterfuge, la dette de l'appelant a été effacée par le vendeur (différence entre le contrat de 25 000 $ et l'investissement de 8 500 $);

j)       au moyen de ce subterfuge, l'appelant a obtenu un allégement fiscal supérieur à son investissement;

k)      le Contrat est un subterfuge; et

l)       en raison de ce subterfuge, l'appelant n'avait aucun espoir raisonnable de profit; et

L'intimée a invoqué un fait nouveau au paragraphe 6 de la Réponse modifiée à l'avis d'appel qui se lit comme suit :

SOUS RÉSERVE DE CE QUI EST PLAIDÉ CI-HAUT, L'INTIMÉE AJOUTE CE QUI SUIT :

6.      l'appelant, tout comme plusieurs autres personnes, a en fait investi dans un abri fiscal pour lequel aucun numéro d'inscription n'a été obtenu auprès du Ministre.

[2]      Selon la pièce I-2 déposée en preuve, le 15 décembre 1993, l'appelant aurait acheté du Groupe Garydox Ltée ( « Garydox » ) une licence non-exclusive lui donnant le droit d'exploiter des produits connus sous le nom commercial de Corps et Ame. Ce contrat de vente indique que l'appelant opérait sous la raison sociale Kanico Enrg. et que la licence non-exclusive aurait été acquise pour la somme de 25 000 $ (soit une redevance forfaitaire de 5 000 $ et un investissement additionnel de 20 000 $ pour lequel l'appelant était censé augmenter, pour chaque tranche de 1 000 $ supplémentaire au coût de base de 5 000 $, son pourcentage de marge bénéficiaire par le biais d'une ristourne d'un pour cent du « prix de gros » des produits vendus). Étaient inclus dans le coût d'acquisition de la licence, le support logistique décrit comme comprenant l'administration, le marketing et le support à la promotion (voir le sommaire exécutif dans le plan d'affaires pour les licenciés « Corps et Ame » , pièce A-2, page 4). De cette somme de 25 000 $, l'appelant aurait versé un montant de 8 500 $ par chèque fait à l'ordre de Garydox, payable le 7 janvier 1994. Le solde de 16 500 $ aurait été emprunté d'une société du nom de Saxon International ( « Saxon » ). Le contrat de vente (pièce I-2) indique également que l'appelant aurait souscrit à une assurance responsabilité auprès de la société Venture Insurance. L'appelant se prévalait aussi par la même occasion de l'option d'augmenter son pourcentage de marge bénéficiaire sur la licence au cours de l'année suivante (1994), en s'engageant à verser une somme supplémentaire de 25 000 $ avant la fin de l'année 1994. Il est peut être utile de souligner ici que la convention signée le 15 décembre 1993, était conclue pour une durée d'un an et qu'elle pouvait être renouvelée selon les mêmes conditions, pour une ou des périodes respectives additionnelles d'un an à un coût additionnel de 1 $ annuellement. La deuxième option mentionnée ci-haut, de débourser un montant de 25 000 $ supplémentaire en 1994, était donc totalement facultative selon le choix de l'appelant.

[3]      Dans les faits, l'appelant n'a jamais eu à rembourser le montant de 16 500 $ qu'il dit avoir emprunté de Saxon. L'assurance-responsabilité qu'il avait contractée à la signature du contrat aurait, selon les témoignages de l'appelant et de son épouse Hélène Roy, épongé la dette. Cette assurance aurait été prise pour couvrir le remboursement de la dette au cas où l'appelant ne puisse plus s'approvisionner de produits Corps et Ame. Or, l'appelant et son épouse disent avoir appris au début de l'année 1994 que les produits étaient contaminés et non disponibles sur le marché. Toutefois, ils n'ont pu produire de document à cet égard. Par la suite, l'appelant et son épouse ont dit qu'ils n'ont jamais pu se procurer les produits Corps et Ame, vu qu'il y a eu saisie de biens chez monsieur Constantin Roy, le dépositaire des produits en inventaire. Cette saisie a eu lieu lors d'une enquête pénale menée par le Ministère du Revenu du Québec ( « MRQ » ) sur la vente d'abris fiscaux par différents promoteurs, dont monsieur Constantin Roy. Celui-ci est le beau-père de l'appelant et il contrôlait la société Garydox. Comme les promoteurs en question avaient un lien familial avec Constantin Roy, l'enquête a été menée sous le nom du groupe ou de la famille Roy.

[4]      En ce qui concerne l'appelant, ce dernier n'aurait recueilli que 45 $ de la vente des produits Corps et Ame en 1993 (ce qui correspond à la vente de deux ou trois produits à des membres de sa propre famille). En 1994, l'appelant n'aurait exercé aucune activité relativement aux produits Corps et Ame par suite des déboires relatés plus haut. Aucun état financier n'a été produit en 1994 relativement à cette activité. En 1993, l'état des résultats préparé par Garydox indique à la pièce I-3 un revenu brut de 54,21 $ (ventes 45 $ et ristourne 9,21 $ (voir aussi pièce I-4)), un coût des marchandises vendues de 29,25 $ et des dépenses de 25 000 $, correspondant au coût d'acquisition de la licence, avec pour résultat une perte nette de 24 975,04 $, soit le montant en litige dans le présent appel. Inutile de dire que l'appelant n'a de ce fait jamais déboursé une somme additionnelle de 25 000 $ en 1994.

[5]      Un certificat de licence non-exclusive aurait été établi au nom de Kanico Enrg. le 15 décembre 1993 (pièce I-1), et un plan d'affaires préparé par Garydox aurait été remis aux licenciés Corps et Ame (pièce A-2). Ce plan d'affaires décrit le produit, donne un marché géographique ciblé de même qu'une analyse de différents scénarios établissant des profits ou des pertes potentiels au cours de la première année, de même que les aspects fiscaux tentant à démontrer que le coût d'acquisition de la licence pouvait être considéré comme une dépense déductible aux fins de la Loi de l'impôt sur le revenu ( « Loi » ). Aucune explication n'a été donnée à l'audience sur la façon dont ont été établis ces scénarios notamment en ce qui concerne le coût des biens en inventaire ou le montant des commissions. À première vue, celles-ci ne correspondent pas nécessairement à ce qui est indiqué au contrat de vente.

[6]      Par ailleurs, le plan d'affaires indique qu'une étude de marché démontrant les profits à réaliser dès la première année est disponible pour consultation. Malgré ceci, l'appelant a mentionné à l'audition qu'il n'avait aucune idée des profits qu'il pouvait réaliser suite à cet investissement et combien d'années il faudrait compter pour récupérer la mise de fonds initiale. Ce plan d'affaires décrit également le rôle joué par la société Distribution internationale Corps et Ame ( « D.I.C.A. » ), comme étant en charge du réseau de distribution des produits Corps et Ame ainsi que celui joué par le Centre de coordination de recherche scientifique internationale ( « C.C.R.S.I. » ) comme offrant un service de recherche et développement scientifique.

[7]      De son côté, l'intimée a fait témoigner monsieur Gérard Doire, l'agent enquêteur pour le MRQ qui a mené l'enquête pénale sur la vente d'abris fiscaux dirigée par le groupe Roy. Il ressort du témoignage de monsieur Doire, que le groupe de promoteurs en question aurait vendu des abris fiscaux à 718 investisseurs qui ont réclamé au-delà de 20 millions de dollars en pertes fiscales en 1993 (voir pièces I-8 et I-9 et le Rapport de vérification de la famille Roy, pièce A-1, onglet 3). Il a été constaté lors de l'enquête que chaque investisseur ne déboursait dans les faits que 32 pour cent du montant souscrit dans un projet de recherche et développement ou dans des licences non-exclusives de commercialisation de différents produits, (dont les produits Corps et Ame à une petite échelle) (voir pièce I-6). Par l'utilisation d'un stratagème impliquant la création de plusieurs sociétés et entreprises enregistrées, l'investisseur déduisait le montant total de l'investissement auquel il prétendait avoir souscrit, réalisant ainsi un profit à même le remboursement d'impôt créé par la perte fiscale hypothétique. L'enquête a surtout porté sur les contribuables qui avaient organisé leur financement par l'intermédiaire de la société 2910161 Canada Inc., exploitant le C.C.R.S.I. Suite à cette enquête, tous les investisseurs ayant investi dans l'un des projets visés par l'enquête ont reçu une lettre de l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « ADRC » ) les avisant que leur investissement ne donnait droit à aucune déduction fiscale.

[8]      Dans le cas de l'appelant, la lettre qu'il a reçue est datée du 20 septembre 1995 et se lit comme suit :

ALAIN JM PETIT

213, DES CENSITAIRES

VARENNES, QC

J3X 2C4

Object: Partnership loss: KANICO

           Year ended December 31, 1993

Sir/Madam,

We have conducted an audit of the above mentioned partnership. The partnership sub-contracted with 2910161 Canada Inc (C.C.R.S.I.) in order to carry out on behalf of the partnership, a scientific research and experimental development ("SR & ED") project and/or, in order to buy a non-exclusive licence. Following a series of transactions, the partners/investors actual disbursement was, at the most, only 32% of the subscription price.

We have concluded that:

1) The partnership did not carry on a business with an expectation of profit.

2) The expenses of the partnership are not deductible for income tax purposes and the loss is disallowed.

3) The loss attributed to each member has been revised to nil.

Based on our review of the facts involved in this case, we contend that the investments by the partners were primarily tax-motivated. The investors immediately received an offset equivalent to 68% of the subscription amount. The tax refund expected by the taxpayer exceeded the actual 32% cash investment and as such, met the taxpayers' primary tax-motivated intention of investing in the partnership.

If a capital gain has been declared by you pursuant to the sale of the shares of CTM Development Ltd, this capital gain is not recognized for Income Tax purposes since the transactions lack commercial reality, and offend the "object and spirit" of the relevant provisions of the ITA. The gain will be annulled and accordingly, the capital gains exemption will be restored.

Furthermore, the Department is relying on anti-avoidance doctrines of "substance over form" and "commercial reality" to disallow these expenses.

Jurisprudence to support this position include:

1) Colgate Palmolive - Peet Co Ltd v. The King 1933 1 DTC 238 at 241 (SCC)

2) Dominion Taxicab Association v. M.N.R. 54 DTC 1020 at 1021 (SCC)

3) The Queen v. P.B. Bronfman Trust 87 DTC 5059, at 5067 (SCC)

4) Richard Stursberg v. M.N.R., 1990 1 CTC 2335, at 2344 (TCC)

5) Bowes & Cocks Limited v. M.N.R. 89 DTC 341 (TCC)

6) Maurice Moloney v, Her Majesty the Queen, 92 DTC 6570 (FCA)

A 30 day delay is allowed in order to submit written representations. At the expiration of the delay, a notice of reassessment will be mailed to you covering the above mentioned points. The taxes payable resulting from these changes are subject to interest at the prescribed rate.

If you are in disagreement with the notice of reassessment, you may file a notice of objection within one year of the due date for filing your return or 90 days from the date on the notice of reassessment, whichever is later. If a notice of objection has already been filed for this taxation year, the issuance of a notice of reassessment will have the effect of rendering your previous notice of objection void. If this is the case, we recommend that you file a new notice of objection immediately after reception of the reassessment.

Yours truly,

Revenue Canada Taxation

Specialized Audit

[9]      L'appelant qui dit ne pas avoir compris la teneur de cette lettre puisqu'il n'avait jamais contracté avec le C.C.R.S.I. et n'avait jamais acheté d'actions de CTM Development Ltd., n'a présenté aucune observation à l'ADRC à ce moment. Dans le rapport de vérification sur la famille Roy complété en date du 5 février 1996 pour l'année 1993 par monsieur Gabriel Caponi et un autre vérificateur de l'ADRC, ceux-ci concluent que les investisseurs visés par l'enquête avaient acheté des abris fiscaux pour lesquels aucun numéro d'inscription n'avait été octroyé conformément à la Loi. Ils concluent également que l'objectif principal des investisseurs était d'ordre fiscal et qu'il n'y avait aucune réalité commerciale associée à leur investissement (voir pièce A-1, onglet 3). L'appelant a ainsi reçu un avis de cotisation daté du 16 février 1996 (pièce A-1, onglet 2) dans lequel on lui refusait la perte en litige pour l'année d'imposition 1993. Il s'est opposé à cette cotisation en date du 14 mai 1996.

[10]     Monsieur Caponi a expliqué que l'appelant avait été inclus dans le groupe des investisseurs visés par l'enquête puisqu'il avait investi dans l'achat de produits Corps et Ame par l'intermédiaire de Garydox, qui était contrôlé par Constantin Roy. Toutefois, comme l'appelant n'avait pas utilisé le même canal de financement que les autres investisseurs, soit le C.C.R.S.I., l'appelant n'a pas fait l'objet d'une vérification spécifique. Cependant, la cotisation a été maintenue puisque l'appelant avait suivi le même modèle que les autres investisseurs en ne déboursant qu'une partie, soit 34 pour cent, du montant de l'investissement alors que la perte réclamée était égale à 100 pour cent de ce montant.

[11]     L'appelant soutient qu'il n'a jamais investi dans un abri fiscal et que ce n'était pas son intention. Il soutient qu'il a investi dans une licence de commercialisation de produits pour la peau dans le but de gagner un revenu. Son épouse avait déjà de l'expérience dans la vente de produits similaires, les produits Nuskin, (n'ayant toutefois aucun lien avec les produits Corps et Ame), et tous deux pensaient ajouter une nouvelle gamme de produits à cette activité. Il est à noter que selon les déclarations de revenu produites par l'appelant en 1993 et 1994, l'activité de vente de produits Nuskin a généré des pertes au cours de ces deux années (voir pièces I-3 et I-5).

[12]     Quant aux produits Corps et Ame, l'appelant dit avoir été approché par son beau-père, monsieur Constantin Roy, qu'il connaît depuis l'âge de 16 ans, et il n'avait aucune raison de ne pas lui faire confiance. Il reconnaît toutefois que Constantin Roy lui a fait part du fait qu'en investissant dans les produits Corps et Ame, il aurait droit à un remboursement d'impôt qui couvrirait possiblement l'investissement de base.

[13]     Par ailleurs, monsieur Caponi a également mentionné lors de son témoignage qu'il n'avait jamais trouvé trace de la société Saxon et qu'il n'avait pas vu non plus le contrat de prêt entre Saxon et l'appelant. De plus, il ressort du rapport de l'inspecteur général des institutions financières, déposé sous la pièce I-10, que Kanico Enrg. n'a été enregistrée que le 7 janvier 1994 et a été radiée d'office le 8 octobre 1997. Il y est également indiqué que la date du début des opérations est le 7 janvier 1994. Par ailleurs, monsieur Doire a dit qu'il y avait eu deux perquisitions, l'une en mai 1993 pour l'année d'imposition 1992 et l'autre en février 1996 pour l'année d'imposition 1993. Aucune saisie n'a été effectuée en 1994, contrairement au témoignage de l'appelant et de celui de sa conjointe, madame Hélène Roy. Finalement, on constate à la pièce I-3, page 10, que l'appelant et sa conjointe ont déclaré des revenus de 11 172 $ provenant de la société Placements Etteloc Inc. Or, selon le témoignage de monsieur Doire, cette dernière société, contrôlée également par Constantin Roy, faisait la gestion de toutes les sociétés créées par le groupe Roy dans le stratagème utilisé pour la vente des abris fiscaux (voir transcription, page 110).

[14]     Ce n'est que le 20 juin 2000, que l'ADRC a avisé l'appelant qu'elle avait l'intention de confirmer la cotisation établie pour l'année d'imposition 1993, et ce, suite à son opposition du 14 mai 1996. Le dossier de l'appelant avait été mis en attente du règlement d'autres dossiers considérés similaires au sien. Il ne semble pas que l'appelant ait été avisé de la raison de la mise en attente de son dossier en opposition avant la lettre du 20 juin 2000.

Arguments des parties

[15]     L'intimée soutient en premier lieu que la perte réclamée par l'appelant n'est pas déductible au motif qu'il a investi dans un abri fiscal pour lequel aucun numéro d'inscription n'a été obtenu auprès du Ministre, tel que requis par les paragraphes 237.1(1), 237.1(2) et 237.1(6) de la Loi. Ces dispositions se lisent comme suit :

ARTICLE 237.1: Définitions.

            (1) Les définitions qui suivent s'appliquent au présent article.

« abri fiscal » -- « abri fiscal » Bien pour lequel il est raisonnable de considérer, à la lumière de déclarations ou annonces faites ou envisagées en rapport avec ce bien, que, si une personne acquérait une part dans ce bien, le montant visé à l'alinéa a) excéderait le montant visé à l'alinéa b) à la fin d'une année d'imposition donnée se terminant dans les quatre ans après cette acquisition :

            a) le total des montants dont chacun représenterait :

(i) une perte qui est annoncée comme étant déductible dans le calcul du revenu, au titre de cette part, et qui pourrait être subie par la personne ou attribuée à celle-ci pour l'année donnée ou pour une année d'imposition antérieure,

(ii) un montant qui est annoncé comme étant déductible dans le calcul du revenu ou du revenu imposable, au titre de cette part, et qui pourrait être engagé par la personne ou attribué à celle-ci pour l'année donnée ou pour une année d'imposition antérieure, à l'exclusion d'un montant inclus dans le calcul d'une perte visée au sous-alinéa (i);

b) l'excédent éventuel du coût de cette part pour la personne à la fin de l'année donnée sur la valeur totale des avantages visés par règlement que la personne ou toute personne avec laquelle elle a un lien de dépendance pourrait recevoir, directement ou indirectement, au titre de cette part.

Les actions accréditives et les biens visés par règlement ne sont toutefois pas considérés comme des abris fiscaux.

4237.1(2)3

          (2) Demande de numéro d'inscription. Tout promoteur doit, quant à un abri fiscal, demander au ministre, sur le formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits, d'attribuer un numéro d'inscription à cet abri fiscal, sauf si demande en a déjà été faite.

4237.1(6)3

          (6) Indication du numéro par l'acquéreur. Un contribuable ne peut demander ou déduire de montant au titre d'une part dans un abri fiscal dans le calcul, en application de la présente loi, de son revenu, de son revenu imposable ou de son revenu imposable gagné au Canada ou de l'impôt, ou d'un autre montant payable par celui-ci ou d'un montant qui lui est remboursable, pour une année d'imposition, ou de tout montant à prendre en compte dans ce calcul, que s'il présente au ministre un formulaire prescrit contenant les renseignements prescrits, incluant le numéro d'inscription attribué à l'abri fiscal.

[16]      Les avantages visés par règlement auxquels il est fait référence à l'alinéa 237.1(1)b) ci-haut, sont énumérés au paragraphe 231(6) du Règlement de l'impôt sur le revenu qui se lit comme suit :

RENSEIGNEMENTS SUR LES ABRIS FISCAUX

          231. [...]

          (6) Pour l'application de l'alinéa b) de la définition d' « abri fiscal » au paragraphe 237.1(1) de la Loi, l'avantage à recevoir au titre d'une part dans un abri fiscal est un montant que, compte tenu des déclarations ou annonces faites au sujet de cet abri fiscal, la personne qui acquiert cette part - appelée « l'acheteur » au présent paragraphe - ou une personne avec laquelle l'acheteur a un lien de dépendance peut raisonnablement s'attendre à recevoir ou à avoir à sa disposition, ce qui a pour conséquence de réduire l'effet d'une perte que l'acheteur pourrait subir en acquérant ou en détenant cette part ou encore en en disposant. Sont notamment des avantages:

a) le montant que l'acheteur ou une personne avec laquelle il a un lien de dépendance doit, immédiatement ou dans le futur, à une autre personne dans la mesure où, selon le cas:

(i) l'obligation de rembourser ce montant est conditionnelle,

(ii) le remboursement de ce montant est ou sera garanti, une sûreté est ou sera fournie ou une convention en vue d'indemniser l'autre personne est ou sera conclue, par l'une des personnes suivantes:

(A) un promoteur quant à l'abri fiscal,

(B) une personne avec laquelle celui-ci a un lien de dépendance,

(C) toute personne qui doit recevoir un paiement (à l'exception d'un paiement fait par l'acheteur) au titre de la garantie, de la sûreté ou de la convention,

(iii) les droits que cette autre personne peut exercer à l'encontre de l'acheteur ou de la personne avec laquelle celui-ci a un lien de dépendance, à l'égard du recouvrement de tout ou partie du prix d'achat, sont limités à un montant maximum, ne peuvent être exercés que sur certains biens ou sont autrement limités par convention,

(iv) le montant doit être payé en devises étrangères ou d'après sa valeur en devises étrangères et il est raisonnable de croire, compte tenu de l'historique des taux de change entre ces devises étrangères et la monnaie canadienne, que le montant total du remboursement, une fois converti en monnaie canadienne au taux de change en vigueur au moment de chaque paiement, sera considérablement inférieur au montant total qui serait payé s'il était converti en monnaie canadienne au moment où chaque paiement est devenu exigible;

b) le montant que l'acheteur ou une personne avec laquelle il a un lien de dépendance a à un moment donné le droit de recevoir ou d'avoir à sa disposition, directement ou indirectement:

(i) soit à titre d'aide fournie par un gouvernement, une municipalité ou un autre organisme public, sous forme de prime, de subvention, de prêt à remboursement conditionnel, de déduction d'impôt ou d'allocation de placement ou sous toute autre forme,

(ii) soit à cause d'une garantie de recettes ou d'une autre convention selon laquelle l'acheteur ou la personne avec laquelle il a un lien de dépendance peut gagner des recettes, dans la mesure où il est raisonnable de croire que la garantie de recettes ou cette convention assurera à cet acheteur ou à cette personne un rendement sur la totalité ou une partie des dépenses de l'acheteur relatives à l'abri fiscal;

c) le produit de disposition auquel l'acheteur peut avoir droit aux termes d'une convention ou d'un arrangement qui lui confère le droit, conditionnel ou non, de disposer de sa part dans l'abri fiscal - autrement que par suite de son décès --, y compris la juste valeur marchande d'un bien dont l'acquisition est prévue dans la convention ou l'arrangement, en échange de tout ou partie de la part dans l'abri fiscal;

d) le montant que doit l'acheteur ou la personne avec laquelle il a un lien de dépendance au promoteur ou à la personne avec laquelle il a un lien de dépendance, au titre de l'acquisition d'une part dans l'abri fiscal.

Sous réserve du sous-alinéa b)(ii), ne sont toutefois pas des avantages les bénéfices gagnés relativement à un abri fiscal.

[17]     Ainsi, un abri fiscal existe si un contribuable acquiert un bien et que le montant de la perte annoncée comme étant déductible dans le calcul du revenu d'un contribuable au titre de ce bien est plus élevé que l'excédent du coût du bien sur la valeur des avantages visés par règlement. L'intimée suggère que si le remboursement de l'argent emprunté n'a pas à être effectué en vertu d'une convention visant à indemniser le prêteur sous certaines conditions, tel qu'on essaie de le faire sous-entendre ici, il s'agit là d'un avantage visé par règlement. Ainsi dans le cas présent, l'intimée soutient qu'un montant de 25 000 $ aurait été annoncé comme perte déductible dans le calcul du revenu de l'appelant. L'appelant n'a eu à débourser qu'une somme de 8 500 $ et n'a pas eu à rembourser la différence de 16 500 $ par suite de la clause d'assurance-responsabilité prévue au contrat. L'intimée suggère donc que le montant de la perte annoncée (25 000 $) excède le coût réel pour l'appelant (8 500 $) et qu'en conséquence, il s'agit d'un abri fiscal pour lequel aucun numéro d'inscription n'a été obtenu.

[18]     L'intimée soutient également que l'appelant n'a pas exploité d'entreprise avec les produits Corps et Ame et que la perte réclamée n'est donc pas déductible. L'intimée invoque que le contrat de vente est un pur subterfuge et que l'appelant n'a jamais eu l'intention réelle de commercialiser ces produits. Selon l'intimée, tous les documents entourant la vente des produits Corps et Ame par l'appelant sont un montage pour donner l'impression d'un semblant d'activités, de la même façon qu'avait été conçu le stratagème entourant les investissements dans les projets vendus par le groupe Roy. Lorsque le principal motif d'investissement est d'obtenir un avantage fiscal, on ne peut parler d'exploitation d'une activité de façon commerciale (voir Moloney c. Canada, [1992] A.C.F. no 905 (Q.L.), citée avec approbation par la Cour Suprême du Canada dans Walls c. Canada, [2002] A.C.S. no 47 (Q.L.)).

[19]     L'intimée suggère que l'appelant n'encourait aucun risque financier puisque le remboursement d'impôt qu'il pensait récupérer du gouvernement fédéral et du gouvernement provincial lui aurait rapporté 12 500 $ (soit 50 pour cent de la perte réclamée puisque les revenus de l'appelant étaient assez élevés pour être assujettis à un taux maximum combiné de 50 pour cent), alors qu'il n'a investi que 8 500 $, réalisant ainsi un profit de 4 000 $ grâce au remboursement d'impôt.

[20]     De son côté, l'appelant invoque qu'il n'a jamais eu l'intention d'investir dans un abri fiscal. Il dit avoir acheté la licence de bonne foi dans le but de vendre les produit Corps et Ame. Il soulève l'affaire Jarvis c. La Reine, 2002 C.S.C. 73, 295 N.R. 201, pour soutenir que la preuve obtenue par l'ADRC lors de l'enquête pénale menée sur le groupe Roy et relatée par le témoignage de monsieur Doire ne devrait pas être versée au dossier dans le présent appel. Il soutient finalement que l'ADRC n'a pas fait diligence pour traiter son dossier puisqu'il s'est écoulé une période d'au moins quatre ans entre le moment où il a logé son avis d'opposition et la réponse donnée par l'ADRC.

Analyse

[21]     En ce qui concerne l'argument soulevé par l'intimée, à savoir que l'appelant a investi dans un abri fiscal pour lequel il n'a obtenu aucun numéro d'inscription, le fardeau de preuve appartient à l'intimée, puisque ce sont de nouveaux faits qui ont été soulevés après l'établissement de la cotisation et qui n'ont été allégués que lors de la production de la Réponse modifiée à l'avis d'appel (voir ordonnance de cette Cour en date du 27 mai 2003).

[22]     La preuve à cet égard est ambiguë. Monsieur Constantin Roy, le promoteur, n'était pas présent à l'audition. L'appelant a dit qu'on lui avait parlé d'une déduction fiscale qui possiblement viendrait compenser son investissement. Toutefois, la preuve documentaire fournie dans le cadre de la vente de la licence pour les produits Corps et Ame n'est pas prépondérante pour établir que le montant de la perte annoncée, comme étant déductible dans le calcul du revenu de l'appelant au titre de l'acquisition de cette licence non-exclusive, serait plus élevée que le coût réel pour l'investisseur. De plus, monsieur Caponi a clairement dit qu'aucune vérification spécifique n'avait été menée à l'égard de l'appelant pour établir qu'il avait investi dans un abri fiscal. Dans les circonstances, je considère que l'intimée n'a pas démontré selon la prépondérance des probabilités que l'appelant a investi dans un abri fiscal, tel que défini au paragraphe 237.1(1) de la Loi.

[23]     En ce qui concerne l'admissibilité du témoignage de monsieur Doire, je suis d'avis que l'arrêt Jarvis, cité plus haut par l'appelant, ne peut servir à écarter cette preuve en l'instance. En effet, cette affaire portait, entre autres, sur l'exclusion d'éléments de preuve par application du paragraphe 24(2) de la Charte canadienne des droits et libertés dans le cadre d'un procès relatif à des infractions d'ordre pénal visées par l'article 239 de la Loi. Dans un tel cas, la Loi prévoit une procédure d'autorisation préalable au paragraphe 231.3(1) lorsqu'un examen a pour objet prédominant d'établir la responsabilité pénale du contribuable. Ainsi, l'agent du fisc doit obtenir un mandat de perquisition pour mener cette enquête. C'est semble-t-il ce qui fut fait lors de l'enquête pénale menée par monsieur Doire sur le groupe Roy. Ceci n'a pas été mis en doute par l'appelant à l'audition, pas plus que la légalité de la méthode utilisée pour obtenir les éléments de preuve dont a fait état monsieur Doire, lors de son témoignage dans la présente affaire. Ce que dit la Cour suprême du Canada dans l'affaire Jarvis est que si l'ADRC mène simultanément une vérification administrative (comme c'est le cas lorsqu'elle procède à l'établissement de nouvelles cotisations en vertu de la Loi pour établir un montant d'impôt payable par un contribuable) et une enquête criminelle, l'enquêteur ne peut utiliser les renseignements obtenus conformément aux pouvoirs de vérification suite au début de l'enquête sur la responsabilité pénale, aux fins d'établir cette responsabilité pénale. Autrement dit, dès qu'il y a enquête pénale, l'enquêteur doit obtenir les autorisations nécessaires pour procéder à son enquête sur la responsabilité pénale d'un contribuable.

[24]     Ici ce n'est pas du tout la situation. L'appelant en appelle d'une cotisation établie dans le cadre d'une vérification administrative. Le Ministre peut donc obtenir des informations de tiers selon les pouvoirs étendus que lui confère le paragraphe 231.1(1) de la Loi (voir Jarvis, précité page 3 et page 20, paragraphe 53). Dans l'affaire Donovan c. Canada, [2000] A.C.F. no 809 (Q.L.), paragraphe 11, la Cour d'appel fédérale a jugé que le pouvoir discrétionnaire d'une cour d'écarter un élément de preuve entaché de vice était restreint dans une instance civile, où la liberté n'est pas menacée et où l'obligation de payer des impôts constitue le seul enjeu. A fortiori, il n'y a pas d'interdiction, selon moi, de se servir de la preuve obtenue légalement lors d'une enquête pénale sur des transactions similaires du même promoteur aux fins d'établir l'obligation fiscale d'un contribuable, dans la mesure où cette preuve est pertinente à la question en litige. Ici, l'intimée veut se servir d'une preuve obtenue légalement lors de l'enquête pénale sur la famille Roy pour démontrer que l'appelant a utilisé un stratagème semblable à celui proposé par le groupe Roy à d'autres investisseurs, dans le but de discréditer la prétention d'authenticité de la transaction mettant en cause l'appelant. À mon avis, cette preuve apportée par le témoignage de monsieur Doire est tout à fait pertinente et recevable en preuve puisque c'est monsieur Constantin Roy, un des membres influents du groupe Roy, qui a contracté directement avec l'appelant pour qu'il s'engage dans la transaction qui nous occupe aujourd'hui. D'ailleurs, en matière d'admissibilité de la preuve, l'article 2857 du Code civil du Québec énonce le principe général suivant :

Art. 2857. La preuve de tout fait pertinent au litige est recevable et peut être faite par tous moyens.

[25]     Aussi, je considère que la preuve apportée a un lien suffisant avec la question en litige pour être admissible (voir à cet égard Sopinka, Lederman et Bryant, The Law of Evidence in Canada, Toronto, Butterworths, 1992, chapitre 11, pages 515-516 et la décision rendue par le juge Sarchuk de cette Cour dans Erlich c. Canada, [1998] A.C.I. no 1124 (Q.L.)). Je n'ai d'ailleurs retenu du témoignage de monsieur Doire que les éléments concernant le modus operandi des promoteurs du groupe Roy. C'est pourquoi, à ma suggestion, l'avocate de l'intimée a retiré la preuve spécifique se rattachant au cas particulier d'autres contribuables (lesquels de toute façon n'étaient pas présents à l'audience) ayant investi dans les produits Corps et Ame en passant par le groupe Roy.

[26]     Ceci m'amène à traiter de l'autre argument de l'intimée, à savoir que le contrat d'acquisition de la licence non-exclusive de commercialisation des produits Corps et Ame était un subterfuge. Cette fois, il revient à l'appelant de démontrer le contraire, puisque ce fait est un fait allégué dans la Réponse modifiée à l'avis d'appel sur lequel le Ministre s'est fondé pour refuser la perte réclamée au moment d'établir la cotisation.

[27]     Je suis d'avis que la preuve présentée à l'audience démontre amplement que l'appelant n'avait aucune intention réelle de commercialiser les produits Corps et Ame. Lui-même n'avait aucune expérience dans le domaine. Il ne s'est aucunement enquis des profits qu'il pouvait éventuellement réaliser avec la vente de ces produits. En 1993, deux ou trois produits auraient été vendus à des membres de la famille. Aucune autre démarche n'a été entreprise de façon sérieuse pour tenter de faire connaître ce produit. L'appelant n'avait aucun bien en inventaire disant se fier entièrement à monsieur Constantin Roy.

[28]     De plus, la crédibilité de l'appelant et de sa conjointe Hélène Roy est mise en doute à plusieurs égards. Ainsi, la question des produits contaminés n'a pas été soulevée par eux au moment de loger l'avis d'opposition en mai 1996, mais seulement le 6 juillet 2000 dans une lettre envoyée à l'ADRC en réponse à leur décision du 20 juin 2000 de maintenir la cotisation (voir documents joints à l'Avis d'appel). De plus, selon monsieur Doire, personne ne l'a jamais avisé de ceci lors de son enquête qui a pourtant été menée en 1996 pour l'année 1993 (voir transcription, page 191).

[29]     L'appelant a aussi dit qu'il n'avait pu s'approvisionner des produits Corps et Ame en 1994 par suite de la perquisition effectuée chez monsieur Constantin Roy. Or, il y avait déjà eu perquisition de biens chez monsieur Roy en mai 1993, soit avant que l'appelant n'acquière la licence. La deuxième perquisition n'a eu lieu qu'en février 1996. Les témoignages de l'appelant et de sa conjointe n'apparaissent pas crédibles sur ce point.

[30]     De plus, l'appelant n'a pas apporté de preuve tangible quant à l'existence réelle de l'emprunt effectué auprès de Saxon. Le vérificateur de l'ADRC, monsieur Caponi, n'a d'ailleurs jamais retracé cette société. Aucune preuve non plus n'a été apportée sur l'existence réelle de la société Venture Insurance qui aurait couvert le prêt de Saxon. L'appelant a simplement dit que tout ceci avait été organisé par monsieur Constantin Roy. L'appelant ne se rappelait même pas d'un quelconque échange de documents avec ces deux sociétés. Or, compte tenu de la preuve au dossier sur les stratagèmes organisés par le groupe Roy (dont monsieur Constantin Roy) par l'intermédiaire du C.C.R.S.I., pour 718 investisseurs qui se sont fait proposer différents mécanismes pour réaliser un profit à même le remboursement d'impôt espéré, l'on peut inférer que les deux sociétés en question (Saxon et Venture Insurance) n'étaient qu'un paravent destiné à faire profiter l'appelant du même genre de stratagème que les autres investisseurs. D'ailleurs, l'appelant reconnaît qu'il n'a jamais eu à rembourser l'emprunt de 16 500 $. De plus, le C.C.R.S.I. n'était pas inconnu de l'appelant puisqu'on en parlait directement dans le plan d'affaires qui lui avait été remis (pièce A-2). Il est donc possible d'en inférer que l'appelant était au courant de ce stratagème en acceptant de signer un contrat avec Garydox. D'autant plus que Garydox était contrôlé par Constantin Roy qui contrôlait également une autre société, Placements Etteloc Inc., qui faisait la gestion de toutes les sociétés créées par le groupe Roy dans la vente des abris fiscaux. Or, l'on constate que l'appelant a déclaré des revenus de 11 172 $ provenant de la société Placements Etteloc Inc. dans sa déclaration de revenus 1993 (pièce I-3, page 10). À mon avis, ceci est un autre élément qui tend à démontrer que l'appelant était fort probablement au courant de tout le stratagème proposé par monsieur Constantin Roy et qu'il a voulu en bénéficier au même titre que les autres investisseurs.

[31]     Enfin, Kanico Enrg. n'a été enregistrée qu'en janvier 1994 et n'existait pas encore en 1993. Par ailleurs, le rapport de l'inspecteur général des institutions financières indique le 7 janvier 1994 comme la date du début des opérations. Or, en 1994, la preuve a révélé qu'il n'y a eu aucune activité relativement aux produits Corps et Ame. Ceci est un autre élément qui permet de douter sérieusement de l'intention réelle de l'appelant de faire la mise en marché les produits Corps et Ame proposés par son beau-père, Constantin Roy.

[32]     Par ailleurs, le fait que la conjointe de l'appelant avait une certaine expérience avec les produits Nuskin ne me convainc pas que l'appelant se soit engagé dans une nouvelle aventure commerciale avec les produits Corps et Ame. Ils exploitaient déjà à perte avec les produits Nuskin et je doute que sans l'avantage fiscal, l'appelant aurait investi une somme supplémentaire de 25 000 $ dans une gamme de produits similaires.

[33]     Il est reconnu en jurisprudence que lorsque le seul but d'une activité consiste à obtenir des remboursements d'impôt, on ne peut parler de l'exploitation d'une activité commerciale (voir les affaires Moloney et Walls, précitées).

[34]     À mon avis, l'appelant n'a pas démontré selon la prépondérance des probabilités qu'il avait l'intention réelle de commercialiser les produits Corps et Ame. La thèse d'un subterfuge m'apparaît fondée. En l'occurrence, l'appelant ne peut prétendre avoir subi une perte d'entreprise de 24 975 $, puisqu'il n'a pas démontré l'existence réelle d'une telle entreprise. La cotisation est donc bien fondée quant au refus de cette perte.

[35]     Finalement, l'appelant a mentionné que l'ADRC n'a pas fait diligence pour traiter son dossier puisqu'il s'est écoulé une période de quatre ans entre le moment où il a logé son avis d'opposition et la réponse de l'ADRC. L'appelant aurait pu s'adresser à la Cour canadienne de l'impôt après l'expiration des 90 jours qui ont suivi la signification de son avis d'opposition sans que le Ministre lui eût notifié quoi que ce soit et ce, en vertu de l'article 169 de la Loi. Il n'a rien fait. Je note toutefois que l'ADRC a reconnu, dans une lettre adressée à l'appelant le 7 septembre 2001, qu'il y avait eu des délais dans le traitement de son dossier (pièce A-1, onglet 6). L'ADRC proposait à ce moment d'annuler une partie des intérêts sur arriérés découlant de la nouvelle cotisation en vertu des dispositions d'équité une fois que tous les recours en appel seraient expirés. L'appelant pourrait dès lors faire une demande au Ministre aux termes du paragraphe 220(3.1) de la Loi pour qu'il exerce sa discrétion aux fins de renoncer à une partie des intérêts découlant de sa dette fiscale.

[36]     Pour tous ces motifs, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 3e jour d'octobre 2003.

« Lucie Lamarre »

J.C.C.I.


RÉFÉRENCE :

2003CCI713

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-1417(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Alain Petit c. La Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :

Ottawa (Ontario)

DATE DE L'AUDIENCE :

le 11 juin 2003

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

l'honorable juge Lucie Lamarre

DATE DU JUGEMENT :

le 3 octobre 2003

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant(e) :

Hélène Roy

Pour l'intimé(e) :

Me Marie-André Legault

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER:

Pour l'appelant(e) :

Nom :

Étude :

Pour l'intimé(e) :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

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