Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

Informations sur la décision

Contenu de la décision

Dossier : 2002-823(IT)G

ENTRE :

ROBERT YOUNG,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

Appel entendu le 21 février 2005, à Saskatoon (Saskatchewan)

Devant : L'honorable juge D.W. Beaubier

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Lyle Bouvier

JUGEMENT

Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour les années d'imposition 1994 et 1995 sont rejetés.

Les dépens taxables et les débours relatifs aux appels sont adjugés à l'intimée.


Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 15e jour de mars 2005.

« D.W. Beaubier »

Juge Beaubier

Traduction certifiée conforme

ce 19e jour de septembre 2005.

Marie-Christine Gervais, traductrice


Référence : 2005CCI183

Date : 20050315

Dossier : 2002-823(IT)G

ENTRE :

ROBERT YOUNG,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Beaubier

[1]      Le présent appel, interjeté sous le régime de la procédure générale, a été entendu à Saskatoon (Saskatchewan) le 10 janvier 2005. L'appelant a témoigné et a appelé John Ostoforoff, CMA, et cité à comparaître Bill Jensen, CA, son comptable pendant 1994 et 1995, soit les années visées. L'audience du 10 janvier a été ajournée au 21 février 2005 pour permettre à M. Jensen de chercher les documents relatifs à l'affaire; aucun document n'a été trouvé. Son bureau a effectué un déchiquetage général en 2002, après que l'appelant a changé de cabinet. Le 21 février, l'appelant a aussi appelé Terrance Hanchar, CMA, et son épouse, Margaret Young, et il a témoigné une deuxième fois. L'intimée a appelé le vérificateur responsable du dossier, Timothy Murphy, B.Sc.C. Dès le début, un interprète en cantonais, Jimmy Fung, a été assermenté.

[2]      Les paragraphes 3 à 7 inclusivement de la réponse à l'avis d'appel font état des questions en litige. Les voici :

[TRADUCTION]

3.          Le ministre du Revenu national (le « ministre » ) a d'abord établi des cotisations à l'égard de l'appelant pour les années d'imposition 1994 et 1995 au moyen d'avis de cotisation datés du 22 octobre 1999.

4.          Le ministre a ajouté 52 312,92 $ au revenu de l'appelant pour les années d'imposition 1994 et 1995 en raison d'avantages versés par Chow Enterprises Ltd. ( « Chow » ).

5.          Pour établir une telle cotisation à l'égard de l'appelant pour les années d'imposition 1994 et 1995, le ministre s'est basé, entre autres choses, sur les hypothèses suivantes :

          a)          Les faits admis précédemment;

b)                   Chow a été constituée en société le 28 août 1980;

c)                   L'appelant était l'âme dirigeante de Chow;

Paiements hypothécaires du 215 Whiteswan Drive

d)          L'appelant a ordonné à Chow de déposer 2 147,41 $ par mois dans le compte de banque personnel établi à son nom et à celui de son épouse;

e)                   Ces paiements n'ont pas été comptabilisés dans les documents comptables de Chow;

f)                     Les paiements hypothécaires effectués par l'appelant à l'égard de sa résidence personnelle située au 215 Whiteswan Drive à Saskatoon étaient de 2 147,41 $ par mois;

g)                   Chow a déposé 25 768,92 $ dans le compte de banque personnel de l'appelant pour l'année d'imposition 1994 et pour l'année d'imposition 1995;

h)                   Chow a versé des avantages à l'appelant en sa qualité d'actionnaire, qui s'élèvent à 25 768,92 $ pour les années d'imposition 1994 et 1995 respectivement;

Paiements hypothécaires du 800 3rd Avenue North ( « 800, 3e avenue » )

i)           L'appelant, Margaret Young et John Young ont la propriété conjointe d'un immeuble d'habitation collectives situé au 800, 3e avenue à Saskatoon;

j)           L'hypothèque de l'immeuble d'habitation était au nom de l'appelant, de Margaret Young et de John Young;

k)          L'appelant a ordonné à Chow de payer l'hypothèque de l'immeuble d'habitation pour lui;

l)           Chow a effectué des paiements hypothécaires de 2 212,00 $ par mois à la Banque Royale pour l'appelant;

m)         Chow a versé des avantages à l'appelant en sa qualité d'actionnaire, qui s'élèvent à 26 544,00 $ pour les années d'imposition 1994 et 1995 respectivement;

Pénalités selon le paragraphe 163(2)

n)                   L'appelant est un homme d'affaires chevronné;

o)                   L'appelant est l'administrateur et l'âme dirigeante de Chow depuis sa constitution en société;

p)                   L'appelant a ordonné à Chow de déposer un montant correspondant à ses paiements hypothécaires mensuels dans son compte;

q)                   L'appelant a déclaré un revenu de location net de 6 685,00 $ en 1994 et de 5 797,00 $ en 1995 pour l'immeuble situé au 800, 3e avenue;

r)                    Les paiements effectués par Chow pour l'immeuble situé au 800, 3e avenue sont de 26 544,00 $ par année;

s)                    Le montant des paiements hypothécaires est important par rapport au montant de revenu gagné;

t)                     L'appelant a sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, dans l'exécution d'un devoir ou d'une obligation imposé par la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), fait un faux énoncé ou une omission dans les déclarations de revenus produites pour les années d'imposition 1994 et 1995, ou y participe, y consent ou y acquiesce, de sorte que l'impôt qui aurait dû être payable d'après les renseignements fournis dans les déclarations de revenus de l'appelant produites pour ces années était inférieur à l'impôt payable, soit un manque de 10 043,11 $ et de 10 452,48 $ respectivement.

B.         QUESTIONS EN LITIGE

6.          Voici les questions :

a)          l'appelant a-t-il reçu un avantage de 52 312,92 $ au cours de l'année d'imposition 1994 et de 52 312,92 $ au cours de l'année d'imposition 1995 de la société en sa qualité d'actionnaire?;

b)          une prescription empêche-t-elle le ministre d'établir une cotisation pour les années d'imposition 1994 et 1995?;

c)          le ministre a-t-il établi à juste titre les pénalités applicables selon le paragraphe 163(2) de la Loi pour ces années?.

C.         DISPOSITIONS INVOQUÉES

7.          Il invoque les paragraphes 15(1), 163(2) et 248(1) de la Loi de l'impôt sur le revenu, L.R.C. 1985, ch. 1 (5e suppl.), telle qu'elle a été modifiée (la « Loi » ).

[3]      Les hypothèses 5 a), b), c), d), e), f), g), h), i), j), k), l), m), n), o), p), q), r) et s) n'ont pas été réfutées par la preuve. La question de la prescription soulevée à l'alinéa 6 b) a été réfutée par la preuve fournie par le vérificateur.

[4]      L'appelant est né en Chine vers 1930 et est venu s'installer en Californie en 1947 sans toutefois parler anglais. Il a déménagé au Canada au milieu des années 1950 et il s'est alors lancé en affaires. Il parle généralement assez bien l'anglais, mais de façon quand même approximative, et il connaît un peu l'anglais écrit. Pour 1994 et 1995, son comptable, un CA, a établi ses documents comptables et fiscaux et l'appelant les a signés. Les déclarations de revenus de 1994 et 1995 ont été produites le 11 juin 1996, avec les déclarations de 1992 et 1993.

[5]      Une partie de la preuve de l'appelant repose sur le témoignage de M. Ostoforoff à l'effet que l'appelant était dévasté lorsque son fils est décédé des suites d'un cancer en Californie en 1993, après avoir été hospitalisé pendant environ trois ans, ainsi que sur l'importance qu'il accorde à son fils. La Cour croit cette partie de la preuve. Cependant, dans une partie des explications de l'appelant concernant l'argent dont il est question, celui-ci a mentionné qu'il avait reçu en 1994 et en 1995 de l'argent de son fils, qui était décédé à ce moment-là. Dans son témoignage, l'appelant a indiqué avoir perçu les loyers de son fils après le décès de celui-ci. Toutefois, son épouse Margaret a dit que leur fille, Jean, percevait ces loyers. Il s'agissait de l'héritage que Jean avait reçu de son frère. Par conséquent, la Cour ne croit pas l'appelant.

[6]      Lors de l'interrogatoire de M. Jensen, le témoin de l'appelant, l'appelant a présenté des éléments de preuve montrant que les déclarations de revenus de M. Young pour les années 1992 à 1995 inclusivement ont toutes été produites ensemble. Deux états financiers différents de « Chow » ont été établis pour 1992 et 1995, et M. Jensen les a examinés à la barre des témoins. Il n'a pu donner aucune explication pour ces états, si ce n'est que les états financiers produits auprès de Revenu Canada étaient corrects et que les autres étaient peut-être des ébauches. En bref, M. Jensen a témoigné que les déclarations de Chow avaient été établies selon les instructions de M. Young et que son cabinet a cessé de représenter M. Young lorsque celui-ci n'a pas fourni au cabinet les renseignements nécessaires pour répondre à la proposition de Revenu Canada. Il a indiqué que les ébauches ont peut-être été présentées à M. Young, qui les a alors fait corriger - les états et les déclarations produits font état d'un revenu moins élevé.

[7]      Le témoignage de M. Jensen cadre avec ce que M. Young a révélé devant la Cour : aucun document ou témoin ne permet de prouver le bien fondé des allégations relatives aux affaires ou aux biens de M. Young. Comme M. Jensen l'a indiqué dans son témoignage, si M. Young a choisi de produire ses déclarations de revenus de 1992 à 1995 en juin 1996, c'est la responsabilité de M. Young. M. Young a eu la possibilité de répondre aux exigences de Revenu Canada à l'étape de la vérification, à celles de M. Jensen à l'étape de la proposition et à celles de la Cour le 10 janvier 2005. Le 21 février 2005, M. Young a fourni des explications appuyées sur le fait qu'il aurait pris de l'argent tiré du bien de location de son fils et des paiements de son épouse selon une convention de vente. Aucun document ne vient justifier l'utilisation alléguée de cet argent et rien ne prouve que l'argent a été déclaré aux fins de l'impôt sur le revenu par une des parties, y compris M. Young. Compte tenu de toutes ces circonstances, les explications sont rejetées par la Cour.

[8]      M. Young a admis au vérificateur que les hypothèses 5 d) à h) et 5 i) à m) étaient exactes, et les états financiers de Chow relatifs aux années en question confirment ce qui a été admis. De plus, les faits admis par M. Young ont servi de fondement pour l'établissement des cotisations. La Cour n'accepte pas les nombreuses protestations de M. Young affirmant le contraire, avancées sans documents justificatifs, qui visent à annuler ses aveux initiaux et les états financiers de Chow.

[9]      M. Jensen a témoigné qu'après avoir discuté avec M. Young de la proposition de Revenu Canada à l'égard de la vérification, celui-ci n'a pas fourni les documents à l'appui pour ses déclarations de revenus et a plutôt dit [TRADUCTION] « Je vais parler à mon député pour qu'il voie ce qu'il peut faire pour moi. » M. Young a déjà reçu chez lui plusieurs députés importants, dont Paul Martin. M. Jensen a aussi témoigné que M. Young, un homme d'affaires chevronné, comprenait l'anglais et comprenait M. Jensen, ainsi que les divers états financiers et les déclarations de revenus de Chow Enterprises Ltd. En se fondant sur le comportement et le témoignage de M. Young, la Cour conclut que les allégations de M. Jensen sont vraies. Une fois, pendant que M. Young témoignait en anglais, son épouse s'est levée et lui a dit, en chinois, de parler en chinois.

[10]     En se basant sur les faits qui précèdent et sur toutes les raisons fournies, la Cour conclut que le témoignage de M. Young n'est en général pas crédible.

[11]     M. et Mme Young ont tous les deux témoigné que M. Young était profondément touché et déprimé par le décès de son fils, John, en 1993 et que c'est pour cette raison qu'il n'a pas produit ses déclarations de revenus. Toutefois, dans son témoignage, M. Young a indiqué avoir continué de s'occuper de la gestion de Chow et de l'immeuble d'habitation, et avoir continué de percevoir son argent et de s'occuper du lave-auto de Chow. Il a également allégué avoir perçu les loyers de son fils et de Jean. Il affirme donc avoir continué de mener ses affaires commerciales courantes malgré le décès de John. Pour cette raison, la Cour n'accepte pas les explications fournies. Elles ne justifient pas le défaut de production des déclarations de revenus de 1992 à 1995 inclusivement.

[12]     En se basant sur les mêmes raisons et sur les faits qui précèdent, la Cour conclut que M. Young savait quel était son revenu et les sources de celui-ci et qu'il était au courant que ses déclarations de revenus devaient être exactes et produites dans les délais. Sachant cela, il a sciemment fait de faux énoncés et des omissions dans ses déclarations de 1994 et 1995 et les a produites pour ces années. Ses connaissances, selon les conclusions de la Cour, découlent également du fait qu'il a déjà fait l'objet d'une vérification, à l'égard de laquelle il y a eu jugement sur consentement et qui concernait des paiements effectués par Chow pour le « 800, 3e avenue » à Saskatoon. Et qui plus est, le montant non déclaré est au moins neuf fois plus élevé que le montant déclaré par M. Young en 1994 et en 1995. Les pénalités sont donc confirmées et l'appelant est tenu de les payer.

[13]     Les appels sont rejetés dans leur intégralité.

[14]     Les dépens taxables et les débours relatifs aux appels sont adjugés à l'intimée.

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 15e jour de mars 2005.

« D.W. Beaubier »

Juge Beaubier

Traduction certifiée conforme

ce 19e jour de septembre 2005.

Marie-Christine Gervais, traductrice

 Vous allez être redirigé vers la version la plus récente de la loi, qui peut ne pas être la version considérée au moment où le jugement a été rendu.