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Dossier : 2006-1149(GST)I

ENTRE :

DISTRIBUTION S.C.T. INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

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Appel entendu le 21 août 2006, à Chicoutimi (Québec)

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

Comparutions :

Représentant de l'appelante :

Pierre Pilotte

Avocat de l'intimée :

Me Louis Cliche

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JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie pour la période du 15 janvier 2005 au 31 mars 2005 relativement à la taxe sur les produits et services en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d'accise dont l'avis est daté du 3 août 2005, est rejeté selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 15e jour de septembre 2006.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


Référence : 2006CCI482

Date : 20060915

Dossier : 2006-1149(GST)I

ENTRE :

DISTRIBUTION S.C.T. INC.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Tardif

[1]      Il s'agit de l'appel d'une cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d'accise ( la « Loi » ) relativement à la taxe sur les produits et services.

[2]      Pour établir la cotisation, le ministre du Revenu national (le « ministre » ) s'est appuyé sur les hypothèses de fait suivantes énumérées dans la Réponse à l'avis d'appel (la « Réponse » ) :

a)          les faits ci-dessus admis;

b)          l'appelante est un inscrit aux fins de l'application de la TPS;

c)          l'appelante est une entreprise qui opère un réseau de machines distributrices dans la région du Saguenay Lac St Jean; la majorité des machines est concentrée dans les localités de Jonquière et de Chicoutimi;

d)          au cours du mois de février 2005, l'appelante a fait l'acquisition d'une camionnette Ford 2005, Série F, de modèle « Cab Supercrew 4X4 » , au coût de 52 784 $;

e)          il s'agit d'un véhicule à cabine allongée, c'est-à-dire un véhicule dont l'habitacle est muni de deux (2) rangées de sièges disposées l'une derrière l'autre;

f)           de plus, ce véhicule est doté d'un système de traction à quatre roues motrices (4X4);

g)          en raison de la forme de son habitacle, ce véhicule compte plus de trois (3) places assises;

h)          l'appelante a réclamé à l'égard de l'acquisition du véhicule, un crédit de taxe sur les intrants (CTI) calculé sur le prix d'achat du véhicule;

i)           le ministre a accordé à l'appelante un CTI calculé sur la valeur réputée de véhicule (30 000 $), soit la valeur autorisée par la Loi sur la taxe d'accise lorsqu'un inscrit acquiert une « voiture de tourisme » pour l'utiliser comme immobilisation dans le cadre de ses activités commerciales;

j)           dans le cadre de la vérification monsieur Mario Desbiens, président de l'appelante, a confirmé à trois reprises à la vérificatrice du ministre qu'il utilisait ce véhicule à 50 % pour la livraison des marchandises, à 25 % pour l'inspection des marchandises et à 25 % pour la recherche de nouveaux clients;

[3]      L'appelante a admis tous ces faits à l'exception de l'alinéa j).

[4]      À l'audition, monsieur Pierre Pilotte représentait l'appelante. Le président de l'appelante, Mario Desbiens, était également présent.

[5]      Messieurs Pilotte et Desbiens ont affirmé qu'aucun registre n'était tenu pour établir l'usage commercial du véhicule étant donné qu'il était utilisé à 100 % à des fins commerciales.

[6]      Ainsi, selon eux, le fait que le véhicule était utilisé à l00 % à des fins commerciales rendait la tenue d'un registre de bord tout à fait inutile puisque tous les déplacements étaient de nature commerciale.

[7]      Pour étayer ses affirmations, le président a fait valoir que, pendant la période visée par la cotisation, il possédait deux autres véhicules et sa conjointe, en possédait également un.

[8]      Tous ces véhicules étaient des véhicules de dimensions réduites et un ou deux de ceux-ci pourraient être décrits comme des voitures sport. Chose certaine, il ne s'agissait pas de voitures idéales pour des déplacements sur les routes enneigées de la région du Saguenay.

[9]      De son côté, la vérificatrice a expliqué la méthode employée pour établir la cotisation. Elle a essentiellement pris en compte deux éléments, soit la description du véhicule visé par la cotisation et l'utilisation que le président de l'appelante en a faite selon les renseignements qu'il aurait fournis et qui sont reproduits à l'alinéa 5 j) de la Réponse :

j)           dans le cadre de la vérification monsieur Mario Desbiens, président de l'appelante, a confirmé à trois reprises à la vérificatrice du ministre qu'il utilisait ce véhicule à 50 % pour la livraison des marchandises, à 25 % pour l'inspection des marchandises et à 25 % pour la recherche de nouveaux clients;

Analyse

[10]     Le président de l'appelante n'a pas nié avoir fourni lui-même les divers pourcentages utilisés par le ministre à l'appui de la cotisation. Il a essentiellement fait valoir qu'il ne comprenait pas pourquoi il avait fait une telle évaluation. Or, d'après le témoignage de la vérificatrice, il ne s'agissait pas d'une évaluation spontanée obtenue lors d'une conversation générale; il s'agissait de la réponse fournie à des questions précises communiquées bien avant l'obtention de la réponse.

[11]     En d'autres termes, la vérificatrice a communiqué avec monsieur Desbiens et lui a fait comprendre qu'il devait fournir des explications et des évaluations sur l'usage des véhicules. Sur le coup, monsieur Desbiens a indiqué qu'il n'était pas en mesure de répondre adéquatement. La réponse est venue plus tard, ce qui nous amène à conclure que l'évaluation a été le résultat d'une réflexion rendant ainsi la réponse obtenue, de toute évidence, vraisemblable.

[12]     En vertu des articles 169 et 201 de la Loi, il est possible de demander des crédits sur intrants (les « CTI » ) à la suite de l'acquisition d'un véhicule. Il s'agit là d'une mesure dont le but est essentiellement d'obtenir des CTI à la suite de l'acquisition d'un bien dont le but est de gagner un revenu. En matière de véhicules automobiles, il peut exister des situations où l'acquisition d'un véhicule moteur peut servir à deux fins, soit à des fins commerciales et personnelles.

[13]     Il n'est pas nécessairement facile, dans de telles situations, d'évaluer adéquatement l'usage personnel et l'usage commercial. Il est donc très important pour toute personne se trouvant dans une telle situation de faire le nécessaire pour être en mesure, lors d'une vérification, de fournir, avec le plus d'exactitude possible, des renseignements concernant l'utilisation d'un véhicule.

[14]     Certes, il est possible d'affirmer qu'un véhicule a servi exclusivement à des fins commerciales. Cependant, une telle affirmation doit être plausible et vraisemblable.

[15]     Le fardeau de la preuve sera plus lourd s'il s'agit d'un véhicule qui se prête bien à un usage personnel. Des questions peuvent alors surgir :

·         Pourquoi l'appelante aurait-elle fait l'acquisition d'un véhicule de luxe doté de caractéristiques non essentielles mais coûteuses et fort agréables pour une utilisation personnelle?

·         Le véhicule a-t-il été acquis par une personne physique ou morale dont l'objectif ultime est la réalisation de profits?

·         Pourquoi un véhicule attrayant et pratique n'aurait-il pas été utilisé à des fins personnelles?

[16]     Lorsqu'une personne décide de faire l'acquisition d'un véhicule possédant des caractéristiques pouvant soulever des questions, elle se doit d'être prudente, vigilante et disciplinée en ce qui concerne l'utilisation du véhicule de manière à pouvoir éventuellement faire la preuve d'une manière convaincante que le véhicule en question a servi exclusivement à des fins commerciales.

[17]     Pour ce faire, le recours à un registre peut s'avérer fort utile, particulièrement si l'utilisation alléguée peut être confirmée par une preuve documentaire.

[18]     En l'espèce, la seule preuve soumise fut essentiellement verbale et les explications fournies furent fort différentes des faits révélés lors de l'analyse du dossier.

[19]     Pour le motif que tout le kilométrage était effectué à des fins commerciales, aucun registre n'était tenu.

[20]     Les explications soumises pour justifier les options du véhicule, une camionnette à quatre portes et à deux banquettes, qui étaient que l'on voulait y placer certaines denrées pour les tenir à l'abri de la chaleur ou du froid, n'étaient pas très convaincantes.

[21]     Quant au fait que le président de l'appelante possédait deux autres véhicules, encore-là, les explications n'étaient pas très convaincantes, si ce n'est qu'il avait manifestement un intérêt certain pour les véhicules automobiles.

[22]     Comme les deux véhicules en question n'étaient pas adaptés à la longue saison hivernale de la région, il me semble tout à fait invraisemblable que la camionnette n'ait pas été utilisée à des fins personnelles pendant une partie importante de l'année.

[23]     De façon globale, les explications vagues et contradictoires de la partie appelante ne sont certainement pas suffisantes et adéquates pour amener la Cour à conclure que l'appelante s'est acquittée du fardeau de la preuve qui lui incombait.

[24]     La preuve de la description du véhicule, les premières explications soumises, le genre de véhicules que possédait le président de l'appelante et la réalité du climat de la région où étaient utilisés les véhicules amènent la Cour à conclure qu'il est invraisemblable, voire même tout à fait impossible, que le véhicule acquis pour l'appelante pour le prix 52 784 $, soit la camionnette Ford 2005, Série F, modèle « Cab Supercrew 4X4 » , à quatre portes, deux banquettes et quatre roues motrices, ait servi et serve exclusivement à des fins commerciales.

[25]     Les calculs quant à l'utilisation personnelle du véhicule étant raisonnables, il n'y a pas lieu de les modifier.

[26]     Pour toutes ces raisons, l'appel est donc rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 15e jour de septembre 2006.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


RÉFÉRENCE :                                   2006CCI482

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2006-1149(GST)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               Distribution S.C.T. inc. et Sa Majesté la Reine

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Chicoutimi (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 21 août 2006

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :        l'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :                    le 15 septembre 2006

COMPARUTIONS :

Représentant de l'appelante :

Pierre Pilotte

Avocat de l'intimée :

Me Louis Cliche

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

       Pour l'appelante:

                   Nom :                             

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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