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Dossier : 2005-2240(IT)I

ENTRE :

VAUGHN BARNETT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

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Appel entendu le 24 octobre 2005 à Fredericton (Nouveau-Brunswick) par

l'honorable juge Campbell J. Miller

Comparutions :

Représentant de l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Edward Sawa

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JUGEMENT

          L'appel de la décision rendue en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenupour l'année d'imposition de base 2003 est rejeté.


Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de novembre 2005.

« Campbell J. Miller »

Le juge Miller

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour d'octobre 2006.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Référence : 2005CCI719

Date : 20051104

Dossier : 2005-2240(IT)I                  

ENTRE :

VAUGHN BARNETT,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Miller

[1]      Vaughn Barnett remet en cause le caractère constitutionnel de la définition de « particulier admissible » qui est utilisée pour l'application des dispositions relatives à la prestation fiscale pour enfants de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ), au motif qu'il y a discrimination à l'égard de certains parents ayant la garde partagée, ce qui constitue une violation du paragraphe 15(1) de la Charte canadienne des droits et libertés. M. Barnett a expédié les avis requis aux provinces pour les informer de son appel devant la Cour canadienne de l'impôt. Aucun représentant des provinces n'a comparu. Je considère que la définition de particulier admissible qui figure à l'article 122.6 de la Loi ne contrevient pas au paragraphe 15(1) de la Charte.

Les faits

[2]      M. Barnett et sa femme se sont séparés en 1999. Ils ont convenu de se partager la garde de leurs quatre enfants. Deux d'entre eux ont vécu avec M. Barnett pendant un an et demi. Ce dernier a obtenu un emploi en ville et n'a pas été en mesure de maintenir cette situation. Il a versé une partie de son revenu d'emploi à son épouse pour le soin des enfants. Lorsque M. Barnett ne travaillait pas, il recevait une aide au revenu. Lui et sa femme ont obtenu une ordonnance d'un tribunal datée du 4 juin 2001 qui prévoyait qu'ils auraient la garde partagée de leurs quatre enfants et exerceraient conjointement la responsabilité parentale à leur égard.

[3]      En 2004, deux enfants sont de nouveau allés habiter avec M. Barnett mais, en l'absence de revenu, il s'est senti incapable de subvenir pleinement à leurs besoins et a convenu qu'il serait préférable qu'ils retournent vivre avec leur mère. M. Barnett a expliqué clairement à son épouse que cette situation découlait d'un impératif économique et ne devait pas porter préjudice à aucun des droits dérivés de la garde partagée. En 2004, M. Barnett a envisagé la possibilité de demander une prestation fiscale pour enfants, croyant que ces fonds supplémentaires lui permettraient de faire en sorte qu'un ou plusieurs de ses enfants aient leur résidence principale chez lui.

[4]      L'arrangement conclu au début de 2004, qui fut renouvelé en septembre 2004 et qui tient depuis lors, était qu'un des enfants passerait trois nuits chez son père, M. Barnett, et quatre nuits chez sa mère. L'ex-femme de M. Barnett, Mme Richards, n'a accepté qu'à contrecoeur que l'enfant passe autant de temps avec son père; elle tenait à ce que l'enfant demeure principalement avec elle, car elle estimait que son foyer constituait un cadre familial plus solide. Il est clair que les deux parents ont contribué au bien-être de l'enfant; néanmoins, en termes de temps, M. Barnett a reconnu que son ex-épouse était la principale pourvoyeuse de soins, bien que lui-même se soit également beaucoup occupé de l'enfant. En termes de temps consacré profitablement avec son enfant, M. Barnett soutient que le temps qu'il accordait à l'enfant était de qualité égale à celui consacré par son ex-épouse.

[5]      M. Barnett a comparé sa situation financière et ce qu'il a été en mesure de fournir à l'enfant avec la situation financière de son ex-épouse. Il était évident que son ex-épouse et le nouveau mari de celle-ci étaient en mesure d'offrir un milieu de vie plus confortable à l'enfant, si l'on considère le degré de confort d'après le nombre de commodités comme des véhicules et des téléviseurs. M. Barnett possédait peu de biens et gagnait un revenu modeste, malgré le fait qu'il avait obtenu une licence en droit et qu'il tentait d'être accepté au barreau du Nouveau-Brunswick.

[6]      M. Barnett a présenté une demande de prestation fiscale pour enfants, mais sa demande a été refusée au motif qu'il n'était pas le particulier admissible, c'est-à-dire le parent assumant principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation de l'enfant.

Analyse

[7]      M. Barnett n'a pas fait valoir qu'il était le particulier admissible aux fins de la prestation fiscale pour enfants. La définition de « particulier admissible » qui figure à l'article 122.6 de la Loi est ainsi formulée :

122.6    Les définitions qui suivent s'appliquent à la présente sous-section.

            « particulier admissible » S'agissant, à un moment donné, du particulier admissible à l'égard d'une personne à charge admissible, personne qui répond aux conditions suivantes à ce moment:

a)          elle réside avec la personne à charge;

b)          elle est la personne -- père ou mère de la personne à charge -- qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation de cette dernière;

[...]

f)           si la personne à charge réside avec sa mère, la personne qui assume principalement la responsabilité pour le soin et l'éducation de la personne à charge est présumée être la mère;

[8]      Sur le fondement de la preuve, je conviens que l'ex-épouse de M. Barnett, et non M. Barnett, est le particulier admissible aux fins de la prestation fiscale pour enfants.

[9]      M. Barnett remet en cause la définition de particulier admissible en invoquant qu'il s'agit d'une définition discriminatoire au sens du paragraphe 15(1) de la Charte. Son point de vue initial a été exposé dans son appel de la façon suivante :

                        [traduction]

2.          J'ai fait l'objet de discrimination fondée sur ma situation socioéconomique, ce qui va à l'encontre du paragraphe 15(1) de la Charte, car l'ADRC a omis de tenir compte de la situation sans issue créée par le fait qu'une personne recevant de l'aide sociale peut difficilement avoir les moyens de devenir le principal pourvoyeur de soins sans recevoir d'abord de PFCE, et ne peut pas recevoir de PFCE sans être d'abord le principal pourvoyeur de soins.

3.          J'ai fait l'objet de discrimination fondée sur mon statut familial, ce qui va à l'encontre du paragraphe 15(1) de la Charte, car l'omission de tenir compte de la situation susmentionnée défavorise le parent qui n'a pas la garde de fait, même si ce parent souhaite avoir la garde de son enfant et a des droits de garde partagée.

4.          J'ai fait l'objet de discrimination fondée, encore une fois, sur mon statut familial, ce qui va à l'encontre du paragraphe 15(1) de la Charte, en raison de la politique « tout ou rien » de reconnaître un seul pourvoyeur de soins principal comme étant admissible aux PFCE (plutôt que de diviser les prestations de façon égale ou de les calculer au prorata), ce qui signifie que même un parent ayant de fait la garde partagée de plusieurs enfants ne pourra pas recevoir de PFCE du tout.

Au procès, M. Barnett a abandonné son argument relatif à la discrimination fondée sur la situation socioéconomique, mais a maintenu son argument relatif à la discrimination fondée sur le statut familial.

[10]     M. Barnett soutient qu'un parent ayant la garde partagée qui pourrait être le principal pourvoyeur de soins de son enfant se voit nier cette possibilité par l'autre parent, ce qui constitue une discrimination. Le paragraphe 15(1) de la Charte prévoit que :

15(1)     La loi ne fait acception de personne et s'applique également à tous, et tous ont droit à la même protection et au même bénéfice de la loi, indépendamment de toute discrimination, notamment des discriminations fondées sur la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques.

[11]     La Cour suprême du Canada a établi dans l'arrêt Law c.Canada[1] une démarche en trois étapes fondée sur l'objet et le contexte en vue d'analyser un problème à la lumière du paragraphe 15(1) de la Charte.

A.        La loi contestée: a) établit-elle une distinction formelle entre le demandeur et d'autres personnes en raison d'une ou de plusieurs caractéristiques personnelles, ou b) omet-elle de tenir compte de la situation défavorisée dans laquelle le demandeur se trouve déjà dans la société canadienne, créant ainsi une différence de traitement réelle entre celui-ci et d'autres personnes en raison d'une ou de plusieurs caractéristiques personnelles?

B.      Le demandeur fait-il l'objet d'une différence de traitement fondée sur un ou plusieurs des motifs énumérés ou des motifs analogues?

      et

      C.    La différence de traitement est-elle discriminatoire en ce qu'elle impose un fardeau au demandeur ou le prive d'un avantage d'une manière qui dénote une application stéréotypée de présumées caractéristiques personnelles ou de groupe ou qui a par ailleurs pour effet de perpétuer ou de promouvoir l'opinion que l'individu touché est moins capable ou est moins digne d'être reconnu ou valorisé en tant qu'être humain ou que membre de la société canadienne, qui mérite le même intérêt, le même respect et la même considération?

A - Distinction formelle

[12]     Le point de départ consiste à déterminer si la loi contestée établit une distinction formelle entre M. Barnett et d'autres personnes en raison de caractéristiques personnelles. M. Barnett prétend que son statut de parent ayant la garde partagée, empêché d'être le principal pourvoyeur de soins, le distingue d'autres personnes. Il ajoute qu'un tel statut, fondé sur le statut de parent en général, est dans son essence même une caractéristique personnelle.

[13]     La définition de « particulier admissible » établit une distinction entre le parent qui s'occupe principalement des soins et de l'éducation de l'enfant et l'autre parent. La caractéristique personnelle qui consiste à être un conjoint ayant la garde partagée ne fonde pas une distinction. C'est le niveau de soins qui marque la distinction. M. Barnett expose les deux motifs pour lesquels il n'a pas été en mesure de devenir le principal pourvoyeur de soins. Premièrement, son ex-femme n'était pas prête à lui accorder ce statut. Deuxièmement, il n'en avait pas les moyens. Ces raisons font-elles de la distinction entre le pourvoyeur de soins principal et celui que j'appellerai le pourvoyeur de soins secondaire une distinction fondée sur des caractéristiques personnelles? Je ne le crois pas. Il ne s'agit pas d'une caractéristique personnelle que d'être démuni ou d'avoir une ex-épouse peu disposée à collaborer. Ainsi, bien que le statut de gardien puisse être une caractéristique personnelle, la définition de « particulier admissible » figurant dans la Loi de l'impôt sur le revenu n'établit pas de distinction entre le conjoint ayant la garde partagée et les autres, elle établit une distinction entre le principal pourvoyeur de soins et le pourvoyeur de soins secondaire. La distinction n'est pas fondée sur des caractéristiques personnelles. Je tiens à préciser que M. Barnett n'a pas argué qu'il faisait l'objet d'une discrimination en raison de la présomption de l'alinéa f) de la définition de particulier admissible, laquelle est effectivement établie en faveur de la mère. Je n'ai donc pas traité de cet aspect de la définition contestée.

[14]     La deuxième partie de la première étape de cette démarche consiste à se demander si la loi omet de tenir compte de la situation défavorisée dans laquelle M. Barnett se trouve déjà, créant ainsi une différence de traitement réelle entre lui et d'autres personnes en raison de caractéristiques personnelles. M. Barnett soutient que ces « autres personnes » sont les parents ayant la garde partagée qui, en raison de leur statut de principal pourvoyeur de soins, sont admissibles à recevoir la prestation fiscale pour enfants. C'est vrai, on ne peut nier que le parent ayant la garde partagée, et à plus forte raison s'il est pauvre, se trouve dans une situation défavorisée. Mais, encore une fois, aucune distinction n'est établie entre les deux parents ayant la garde partagée sur le fondement de caractéristiques personnelles.

[15]     J'estime que les arguments de M. Barnett sont insuffisants pour franchir la première étape de l'analyse et qu'il n'est donc pas nécessaire de la poursuivre. Néanmoins, à des fins d'exhaustivité, je tiens à examiner ses arguments relatifs à la deuxième et à la troisième étape de l'analyse.

B - Motifs analogues

[16]     L'appelant fait-il l'objet d'une différence de traitement fondée sur un ou plusieurs des motifs énumérés ou des motifs analogues?

[17]     M. Barnett s'appuie sur la décision rendue par la Cour suprême du Canada dans l'arrêt Thibodeau c. Canada[2] pour soutenir que le statut de parent séparé ou divorcé ayant la garde de ses enfants a été reconnu comme étant un motif analogue de discrimination aux termes du paragraphe 15(1). Cependant, M. Barnett ne fait pas l'objet de cette différence de traitement (ne pas recevoir de prestation fiscale pour enfants) en raison de son statut de parent ayant la garde partagée, mais en raison de son statut de parent ayant la garde partagée qui est le pourvoyeur de soins secondaire car il n'a pas suffisamment d'argent et que son épouse ou ex-épouse ne veut pas collaborer. Si un tel statut particulier était considéré comme une caractéristique personnelle (et j'ai conclu que ce n'est pas le cas), s'agirait-il d'un motif analogue de discrimination? La Cour suprême du Canada dansl'arrêt Corbiere c. Canada[3] peut nous guider dans une certaine mesure à l'égard de cet aspect de l'analyse :

13       En conséquence, quels sont les critères qui permettent de qualifier d'analogue un motif de distinction? La réponse est évidente, il s'agit de chercher des motifs de distinction analogues ou semblables aux motifs énumérés à l'art. 15 -- la race, l'origine nationale ou ethnique, la couleur, la religion, le sexe, l'âge ou les déficiences mentales ou physiques. Il nous semble que le point commun entre ces motifs est le fait qu'ils sont souvent à la base de décisions stéréotypées, fondées non pas sur le mérite de l'individu, mais plutôt sur une caractéristique personnelle qui est soit immuable, soit modifiable uniquement à un prix inacceptable du point de vue de l'identité personnelle. Ce fait tend à indiquer que l'objet de l'identification de motifs analogues à la deuxième étape de l'analyse établie dans Law est de découvrir des motifs fondés sur des caractéristiques qu'il nous est impossible de changer ou que le gouvernement ne peut légitimement s'attendre que nous changions pour avoir droit à l'égalité de traitement garantie par la loi. Autrement dit, l'art. 15 vise le déni du droit à l'égalité de traitement pour des motifs qui sont immuables dans les faits, par exemple la race, ou qui sont considérés immuables, par exemple la religion. D'autres facteurs, que la jurisprudence a rattachés aux motifs énumérés et analogues, tel le fait que la décision produise des effets préjudiciables à une minorité discrète et isolée ou à un groupe qui a historiquement fait l'objet de discrimination, peuvent être considérés comme émanant du concept central que sont les caractéristiques personnelles immuables ou considérées immuables, caractéristiques qui ont trop souvent servi d'ersatz illégitimes et avilissants de décisions fondées sur le mérite des individus.

[18]     Le statut familial particulier invoqué par M. Barnett n'est pas une caractéristique personnelle immuable : la situation financière d'une personne peut changer[4], tout comme l'attitude d'une ex-épouse. Il ne s'agit pas du type de caractéristiques immuables qui sont logiquement associées à celles énumérées au paragraphe 15(1). Si j'avais jugé nécessaire de poursuivre l'analyse à cette deuxième étape, j'aurais conclu qu'il n'existait aucun motif analogue de discrimination.

C - Discrimination réelle

[19]     Finalement, même si M. Barnett avait réussi à me convaincre du bien-fondé de ses arguments aux deux premières étapes de l'analyse, il aurait échoué à la dernière. De quel avantage M. Barnett a-t-il donc été privé d'une manière ayant pour effet de perpétuer le stéréotype du père « mauvais payeur » et négligent? L'avantage en question, soit la prestation fiscale pour enfants, est, comme son nom l'indique, un avantage destiné à l'enfant. Le parent n'est que l'intermédiaire, et non le bénéficiaire ultime de cet avantage. La prestation vise à subvenir aux besoins de l'enfant en allouant à un de ses parents des fonds qui sont destinés à l'enfant. Le fait que ce soit l'ex-épouse de M. Barnett qui reçoive l'argent plutôt que M. Barnett n'a pas pour effet de priver l'enfant de cet avantage. M. Barnett affirme que l'enfant en est privé lorsqu'il se trouve sous sa garde puisqu'il n'est pas en mesure de lui fournir autant de soins que son ex-épouse. La loi permet pourtant aux parents ayant la garde partagée de déterminer, chaque mois, qui est le principal pourvoyeur de soins de l'enfant et, conséquemment, qui doit recevoir la prestation fiscale. Elle vise à assurer que l'enfant puisse bénéficier de cet avantage en accordant l'argent au parent qui assume la plus grande part de responsabilité pour son éducation. La loi ne dépeint nullement l'autre parent d'une manière dénigrante ou stéréotypée et n'affecte en rien sa dignité. Il s'agit d'une solution pratique qui tient compte, avant tout, des meilleurs intérêts de l'enfant.

[20]     L'appelant soutient que le calcul au prorata de la prestation fiscale pour enfants serait un moyen plus juste de faire parvenir l'argent à l'enfant. Ce pourrait fort bien être le cas, mais il s'agit là d'une question qu'il incombe aux législateurs de trancher. Ce n'est pas un élément déterminant permettant de conclure que la disposition actuelle est discriminatoire au point de contrevenir au paragraphe 15(1) de la Charte.


[21]     Pour les motifs qui précèdent, l'appel est rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 4e jour de novembre 2005.

« Campbell J. Miller »

Le juge Miller

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour d'octobre 2006.

Mario Lagacé, jurilinguiste



[1]           [1999] 1 R.C.S. 497.

[2]           95 DTC 5273.

[3]           [1999] 2 R.C.S. 203.

[4]           Bailey c. La Reine, page 8 du mémoire de l'intimée.

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