Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossier : 2005‑3306(IT)I

ENTRE :

ZEUTER DEVELOPMENT CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appels entendus le 15 septembre 2006 à Sudbury (Ontario)

 

Devant : L’honorable juge L.M. Little

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

 

Nick Slater

Avocat de l’intimée :

Me Frederic Morand

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

Les appels interjetés à l’encontre des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2000, 2001 et 2002 sont rejetés sans frais conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

 

Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 31e jour d’octobre 2006.

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de décembre 2007.

 

 

 

Jean David Robert, traducteur


 

 

 

 

Référence : 2006CCI597

Date : 20061031

Dossier : 2005‑3306(IT)I

ENTRE :

ZEUTER DEVELOPMENT CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Little

 

A.      FAITS

 

[1]     L’appelante a été constituée en société sous le régime des lois de la province d’Ontario.

 

[2]     Nick Slater est le fondateur, président‑directeur général et unique actionnaire de l’appelante.

 

[3]     M. Slater a obtenu un baccalauréat en génie physique et une maîtrise en électrotechnique de l’Université McMaster. Il a acquis une expérience professionnelle considérable et impressionnante auprès de diverses sociétés au Canada et aux États‑Unis.

 

[4]     L’appelante interjette appel d’un avis de nouvelle cotisation établi à son égard daté du 23 janvier 2004 dans lequel le ministre du Revenu national (le « ministre ») a refusé la déduction de dépenses de recherche scientifique et de développement expérimental (la « RS&DE ») de 91 170 $, de 62 667 $ et de 58 184 $ qu’elle avait initialement demandée pour les années d’imposition 2000, 2001 et 2002 respectivement, et dans lequel il a refusé de lui accorder des crédits d’impôt à l’investissement (les « CII ») à un taux de 35 %, dont le montant s’élevait à 31 909 $ pour 2000, à 21 933 $ pour 2001 et à 20 364 $ pour 2002[1]. Il est acquis aux débats que ces dépenses comprenaient principalement des salaires versés à des étudiants participant durant l’été aux activités de l’appelante. Le ministre soutient que les dépenses ne sont pas visées par la définition de la RS&DE donnée au paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu[2], et donc que l’appelante n’a pas droit aux CII en application des paragraphes 127(5) et 127(9) et de l’article 127.1 de la Loi.

 

[5]     En 1993, M. Slater a déménagé des États‑Unis pour retourner vivre au Canada, il a vendu sa Jeep, il a acheté un ordinateur portatif, et il a fondé l’appelante. Celle‑ci a demandé et a reçu du financement de FedNor et du Fonds du patrimoine pour entreprendre des travaux sur un logiciel appelé Personal Animator 1.2, qui était un outil éducatif visant à simuler la physique et les mathématiques au moyen d’un moteur graphique générateur d’images en trois dimensions. Dans une lettre de FedNor, il était expliqué que l’appelante aurait droit à des déductions au titre de la RS&DE. Par conséquent, le financement a été réduit d’un montant correspondant aux CII qu’elle devait recevoir. À l’instruction de l’appel, M. Slater a continuellement fait valoir qu’il s’était raisonnablement fié à la déclaration de FedNor selon laquelle les dépenses de l’appelante seraient admissibles au titre de la RS&DE. Cependant, plus tard au cours du procès, il a admis que le projet portant sur le Personal Animator 1.2 avait pris fin en 1997. Il avait alors entrepris le projet de développement de logiciel qui est en cause en l’espèce. Le logiciel qu’il proposait de créer a été appelé Alien Travel Guide (le « ATG »). M. Slater soutient que le projet de développement du ATG qui est en litige était le prolongement du projet que FedNor avait initialement financé. Toutefois, aucune preuve n’a été produite à l’appui de cette allégation.

 

[6]     Le projet portant sur le logiciel ATG découle d’une réflexion à laquelle s’est livré M. Slater sur les lacunes que présente selon lui le système d’enseignement secondaire actuel. Ce projet consistait essentiellement à créer un outil d’apprentissage en ligne destiné à l’usage des élèves au niveau secondaire. M. Slater a rencontré des enseignants de la région pour leur expliquer le concept du logiciel ATG, mais il a trouvé l’expérience frustrante en raison de leur indifférence et des pesanteurs de la bureaucratie à laquelle il devait faire face.

 

[7]     M. Slater a affirmé que le projet de développement du ATG visait à fournir aux élèves de neuvième année et des niveaux supérieurs une source d’information qui serait plus divertissante, intéressante et commode à consulter. À cette fin, il a obtenu des photos et des diagrammes. En même temps, les données contenues dans le site Web devaient être exactes, fiables et faciles à explorer. Le site Web du ATG comprenait quatre principaux thèmes, à savoir les arts, la géographie, l’histoire et les sciences. Ces catégories étaient considérées comme englobant tous les faits connus. Les quatre thèmes étaient à leur tour subdivisés au moyen de divers intertitres.

 

[8]     L’appelante embauchait des étudiants de la région, qui recueillaient, vérifiaient et analysaient un large éventail d’informations. Ils cataloguaient les données sous la rubrique appropriée, puis les stockaient sur des pages Web en langage hypertexte (ci‑après « HTML »). Le projet était ambitieux. Bien plus de 20 000 pages Web ont été créées, traitant de plus de 1,5 million de sujets. M. Slater a dit qu’au cours d’une période de 10 ans plus de 70 étudiants avaient été embauchés l’été à raison de sept étudiants par année en moyenne. L’information recueillie provenait en grande partie de l’Encyclopædia Britannica en ligne. Cependant, M. Slater a fait valoir que, comme des élèves qui lisaient une encyclopédie [traduction] « s’ennuieraient à mourir », un site Web tel que celui du ATG était nécessaire. Après l’établissement des nouvelles cotisations en cause, l’appelante a cessé d’embaucher des étudiants parce qu’elle n’avait plus les moyens de poursuivre le projet sans les déductions au titre de la RS&DE et les CII correspondants.

 

[9]     M. Slater soutient que, comme les déductions au titre de la RS&DE ont été admises pour les années d’imposition de 1995 à 1999 inclusivement, elles doivent également l’être pour les années 2000, 2001 et 2002. Quant aux difficultés technologiques éprouvées, il a affirmé que le transfert d’un programme d’un ordinateur autonome Macintosh à un environnement réseau fonctionnant sous Linux était une opération fort délicate. Il a également fait observer que des travaux étaient effectués en vue de la conception d’un kiosque à accès public et de réseaux sans fil.

 

[10]    Finalement, M. Slater a affirmé qu’il était difficile de communiquer toute la preuve aux vérificateurs parce qu’ils ne voulaient pas signer d’entente de confidentialité[3].

 

Témoignage d’expert

 

[11]    L’intimée a cité Shankar Narayan comme témoin expert. M. Narayan est conseiller en matière de recherche et développement pour l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). Plus précisément, il examine les demandes de déduction au titre de la RS&DE et les demandes de CII. Il est titulaire d’un baccalauréat, d’une maîtrise et d’un doctorat en génie chimique. En réponse à la question de savoir quel était le domaine d’expertise de M. Narayan, l’intimée a dit qu’il était expert à déterminer si un projet est admissible en tant que RS&DE. Cependant, en termes simples, M. Narayan n’est pas un expert lorsqu’il s’agit de tirer des conclusions de droit. Bien que la Cour ne puisse affirmer avoir une expertise en matière de développement de logiciels, elle doit sans contredit décider si un projet donné est visé par la définition de la RS&DE figurant au paragraphe 248(1) de la Loi, et ce, eu égard à cette disposition en particulier et à la Loi dans son ensemble. Cela dit, M. Narayan s’est vu reconnaître la qualité d’expert en analyse d’incertitudes technologiques et de progrès dans l’industrie du logiciel. M. Slater n’a pas contesté la qualité d’expert de M. Narayan, mais, au passage, il a remis en question l’expertise de M. Narayan en ce qui a trait aux questions portant sur des logiciels.

 

[12]    À l’instruction, M. Narayan a semblé à la fois crédible et compétent. Il était direct et franc. M. Narayan a fait observer qu’un dénommé Andre Vellino, qui était titulaire d’un doctorat en informatique, avait travaillé avec lui sur la vérification fiscale de l’appelante et que M. Vellino avait avalisé le Rapport d’examen technique (le « Rapport technique ») qui avait été établi[4]. La Couronne a décidé de ne pas appeler M. Vellino à témoigner, et M. Slater ne s’est pas opposé à l’admission de cet élément de preuve en tant que ouï‑dire. Cependant, le ouï‑dire, même si aucune objection n’est soulevée à cet égard par un non-juriste, reste du ouï‑dire, auquel il ne convient pas d’accorder une valeur probante significative.

 

[13]    M. Narayan a répondu à l’argument de l’appelante selon lequel des crédits d’impôt avaient été accordés pour des années antérieures en expliquant que ce ne sont pas toutes les demandes qui font l’objet d’un examen détaillé chaque année. De nombreuses demandes sont admises telles quelles. Si c’est le cas, bien que le crédit d’impôt soit accordé pour l’année, il ne s’ensuit pas nécessairement que le demandeur a rempli les conditions d’admissibilité préalables, et il n’est pas garanti que les demandes subséquentes seront admises, même si celles‑ci portent sur des travaux continus. Il a simplement été souligné que chaque année d’imposition est unique en son genre, et que l’argument de l’appelante n’est pas fondé en droit[5].

 

[14]    M. Narayan a témoigné qu’il avait visité les locaux de l’appelante le 18 août 2003 et qu’il avait discuté du projet avec M. Slater pendant plus de cinq heures. Dans le Rapport technique, et à l’instruction, M. Narayan a affirmé que les objectifs de l’appelante étaient louables et que le site Web du ATG pouvait être un outil d’apprentissage très précieux. Cependant, il a conclu que les dépenses pour l’ensemble du projet n’étaient pas des dépenses de RS&DE admissibles. Je traiterai ci‑dessous des diverses conclusions énoncées par M. Narayan dans le Rapport technique.

 

B.      QUESTION EN LITIGE

 

[15]    Le litige porte sur la question de savoir si le ministre a refusé à juste titre la déduction de dépenses de RS&DE de 91 170 $, de 62 667 $ et de 58 184 $ et la demande de CII correspondants de 31 909 $, de 21 933 $ et de 20 364 $ pour les années d’imposition 2000, 2001 et 2002 respectivement.

 

C.      RÉSUMÉ DES CONCLUSIONS

 

[16]    J’ai conclu que l’appelante n’avait pas réussi à démontrer que les dépenses satisfaisaient au critère énoncé dans la définition de la RS&DE donnée dans la Loi. L’appel interjeté par la contribuable est rejeté sans frais.

 

D.      ANALYSE

 

Dispositions législatives et jurisprudence

 

[17]    La RS&DE est définie ainsi aux fins d’imposition au paragraphe 248(1) de la Loi :

 

« activités de recherche scientifique et de développement expérimental » Investigation ou recherche systématique d’ordre scientifique ou technologique, effectuée par voie d’expérimentation ou d’analyse, c’est‑à‑dire :

a)          la recherche pure, à savoir les travaux entrepris pour l’avancement de la science sans aucune application pratique en vue;

b)          la recherche appliquée, à savoir les travaux entrepris pour l’avancement de la science avec application pratique en vue;

c)          le développement expérimental, à savoir les travaux entrepris dans l’intérêt du progrès technologique en vue de la création de nouveaux matériaux, dispositifs, produits ou procédés ou de l’amélioration, même légère, de ceux qui existent.

Pour l’application de la présente définition à un contribuable, sont compris parmi les activités de recherche scientifique et de développement expérimental :

d)          les travaux entrepris par le contribuable ou pour son compte relativement aux travaux techniques, à la conception, à la recherche opérationnelle, à l’analyse mathématique, à la programmation informatique, à la collecte de données, aux essais et à la recherche psychologique, lorsque ces travaux sont proportionnels aux besoins des travaux visés aux alinéas a), b) ou c) qui sont entrepris au Canada par le contribuable ou pour son compte et servent à les appuyer directement.

Ne constituent pas des activités de recherche scientifique et de développement expérimental les travaux relatifs aux activités suivantes :

[…]

g)          la recherche dans les sciences sociales ou humaines;

[…]

k)          la collecte normale de données.

 

[18]    Les principes directeurs qu’il faut suivre pour pouvoir déterminer si un projet est admissible en tant que RS&DE ont été exposés en détail en ces termes par le juge en chef Bowman dans la décision Northwest Hydraulic[6] :

 

1. Existe‑t‑il un risque ou une incertitude technologique?

a)         Lorsqu’on parle de « risque ou [d’]incertitude technologique » dans ce contexte, on laisse implicitement entendre qu’il doit exister une incertitude quelconque qui ne peut pas être éliminée par les études techniques courantes ou par les procédures habituelles. Je ne parle pas du fait que dès qu’un problème est décelé, il peut exister un certain doute au sujet de la façon dont il sera réglé. Si la résolution du problème est raisonnablement prévisible à l’aide de la procédure habituelle ou des études techniques courantes, il n’y a pas d’incertitude technologique telle que cette expression est utilisée dans ce contexte.

b)         Qu’entend‑on par « études techniques courantes »? C’est cette question (ainsi que celle qui se rapporte au progrès technologique) qui semble avoir divisé les experts plus que toute autre. En résumé, cela se rapporte aux techniques, aux procédures et aux données qui sont généralement accessibles aux spécialistes compétents dans le domaine.

2. La personne qui prétend se livrer à de la RS&DE a‑t‑elle formulé des hypothèses visant expressément à réduire ou à éliminer cette incertitude technologique? La chose comporte un processus à cinq étapes :

a)         l’observation de l’objet du problème;

b)         la formulation d’un objectif clair;

c)         la détermination et la formulation de l’incertitude technologique;

d)         la formulation d’une hypothèse ou d’hypothèses destinées à réduire ou à éliminer l’incertitude;

e)         la vérification méthodique et systématique des hypothèses.

Il est important de reconnaître que, bien qu’une incertitude technologique doive être définie au départ, la détermination de nouvelles incertitudes technologiques au fur et à mesure que les recherches avancent et l’emploi de la méthode scientifique, et notamment l’intuition et la créativité, et parfois l’ingéniosité en découvrant, en reconnaissant et en mettant fin à de nouvelles incertitudes, font partie intégrante de la RS&DE.

3. Les procédures adoptées sont‑elles conformes aux principes établis et aux principes objectifs de la méthode scientifique, définis par l’observation scientifique systématique, la mesure et l’expérimentation ainsi que la formulation, la vérification et la modification d’hypothèses?

a)         Il est important de reconnaître que même si la méthodologie susmentionnée décrit les aspects essentiels de la RS&DE, la créativité intuitive et même l’ingéniosité peuvent avoir un rôle crucial dans le processus aux fins de la définition de la RS&DE. Toutefois, ces éléments doivent exister dans le cadre de la méthode scientifique dans son ensemble.

b)         Ce qui peut sembler habituel et évident après coup ne l’était peut‑être pas au début des travaux. Ce n’est pas uniquement l’adhésion à des pratiques systématiques qui distingue l’activité courante des méthodes nécessaires selon la définition de la RS&DE figurant à l’article 2900 du Règlement, mais l’adoption de la méthode scientifique décrite ci‑dessus dans son ensemble, en vue d’éliminer une incertitude technologique au moyen de la formulation et de la vérification d’hypothèses innovatrices non vérifiées.

4. Le processus a‑t‑il abouti à un progrès technologique, c’est‑à‑dire à un progrès en ce qui concerne la compréhension générale?

a)         Je veux dire par là quelque chose que les personnes qui s’y connaissent dans le domaine savent ou qu’elles peuvent de toute façon savoir. Je ne parle pas d’un élément de connaissance que quelqu’un, quelque part, peut connaître. La collectivité scientifique est étendue, et elle publie des documents dans de nombreuses langues. Un progrès technologique au Canada ne cesse pas d’être tel simplement parce qu’il existe une possibilité théorique qu’un chercheur, disons, en Chine, a peut‑être fait le même progrès, mais que ses travaux ne sont généralement pas connus.

b)         Le rejet, après l’essai d’une hypothèse, constitue néanmoins un progrès en ce sens qu’il élimine une hypothèse jusque‑là non vérifiée. Une bonne partie de la recherche scientifique vise justement à cela. Le fait que l’objectif initial n’est pas atteint n’invalide ni l’hypothèse qui a été émise ni les méthodes qui ont été employées. Au contraire, il est possible que l’échec même renforce le degré d’incertitude technologique.

5. La Loi et son règlement d’application ne le prévoient pas expressément, mais il semble évident qu’un compte rendu détaillé des hypothèses, des essais et des résultats, doive être fait, et ce, au fur et à mesure de l’avancement des travaux[7].

 

[19]    La Cour d’appel fédérale a expressément adopté le critère en cinq parties et l’a résumé ainsi dans l’arrêt C.W. Agencies[8] :

 

1.        Existait‑il un risque ou une incertitude technologique qui ne pouvait être éliminé par les procédures habituelles ou les études techniques courantes?

2.        La personne qui prétend faire de la RS&DE a‑t‑elle formulé des hypothèses visant expressément à réduire ou à éliminer cette incertitude technologique?

3.        La procédure adoptée était‑elle complètement conforme à la discipline de la méthode scientifique, notamment dans la formulation, la vérification et la modification des hypothèses?

4.        Le processus a‑t‑il abouti à un progrès technologique?

5.        Un compte rendu détaillé des hypothèses vérifiées et des résultats a‑t‑il été fait au fur et à mesure de l’avancement des travaux[9]?

 

[20]    Les dispositions de la Loi prévoient un critère à deux volets. D’abord, il faut décider si le projet, dans son ensemble, remplit les conditions énoncées au paragraphe 248(1). S’il ne satisfait pas à ces exigences, la question est réglée. Cependant, si le projet, dans son ensemble, est admissible, les dépenses et les activités particulières doivent être examinées à la lumière des objectifs du projet. En l’espèce, l’intimée fait valoir que le projet, dans son ensemble, n’est pas admissible et donc qu’il n’est pas nécessaire de passer au second volet du critère. La question de savoir si une dépense est engagée pour de la RS&DE est une question de fait qui doit être tranchée au cas par cas.

 

[21]    La Circulaire d’information 86‑4R3[10] présente des lignes directrices techniques qui ont pour objet de clarifier ce qui constitue de la RS&DE. La Circulaire d’information 97‑1[11] contient une analyse plus précise de la RS&DE dans le contexte du développement de logiciels. En particulier, cette circulaire énonce que trois conditions doivent être réunies pour que le développement d’un logiciel constitue de la RS&DE, à savoir l’existence d’un avancement de la science ou de la technologie, la présence d’une incertitude scientifique ou technologique et l’existence d’un contenu scientifique et technique.

 

Application du droit aux faits de la présente affaire

 

Existait‑il une incertitude scientifique ou technologique en 2000, en 2001 ou en 2002?

 

[22]    Le développement de logiciels peut certainement représenter une activité de RS&DE admissible s’il vise l’avancement de l’informatique ou de la technologie de l’information. Tout au long des témoignages de M. Slater et de M. Narayan, les incertitudes scientifiques ou technologiques suivantes auxquelles l’appelante aurait pu faire face ont été relevées :

          1.        La technologie utilisée pour le téléchargement de l’information collectée vers le site Web du ATG.

M. Slater a admis à l’audience que ces travaux constituaient de la [traduction] « programmation de pages Web habituelle ». En contre‑interrogatoire, il a affirmé que le téléchargement en amont des fichiers de pages Web était effectué au moyen du protocole FTP courant et que [traduction] « c’était conçu pour permettre aux étudiants de le faire à partir de la maison [...] donc aucune technologie avancée n’était nécessaire pour le téléchargement des informations vers le site [...] je dirais que c’est lors des travaux préalables de recherche et de conception du site qu’a été employée la technologie avancée »[12]. Les difficultés éprouvées lors du téléchargement d’informations vers le site Web sont illustrées par l’affirmation suivante de M. Slater :

[traduction]

Non, cela posait de réels problèmes parce que si vous – par exemple, si vous avez l’élément ou la molécule « eau » dans une catégorie et que vous avez aussi des lacs et des océans, qui sont constitués d’eau, il plane une certaine incertitude quant à la façon dont vous allez relier ces sujets. La multiplicité des embranchements pose aussi problème[13].

 

À mon avis, cette déclaration indique qu’il n’existait pas d’incertitude « technologique » ou « scientifique ».

 

2.     La technologie utilisée pour combiner le logiciel Personal Animator 1.2 avec le ATG.

 

Dans la réponse à l’avis d’appel, l’intimée a formulé l’hypothèse de fait selon laquelle les données recueillies pendant les périodes en cause n’avaient aucune utilité par rapport à quelque projet futur que ce soit[14]. L’appelante n’a pas présenté d’éléments de preuve pour réfuter cette hypothèse. M. Slater a affirmé vaguement qu’il avait l’intention de combiner les deux idées de logiciels, mais il n’a produit aucun élément de preuve à l’égard de la façon dont ce serait fait ou de la nature des incertitudes technologiques qui en résulteraient.

 

3.     L’outil d’auto‑indexation et de recherche pour le site Web du ATG ainsi que le transfert d’un serveur MacIntosh à un serveur Linux.

 

M. Narayan a témoigné qu’il s’agissait de problèmes assez courants. Encore une fois, M. Slater n’a pas expliqué quel genre de difficultés d’ordre technologique l’appelante avait éprouvé. En fait, M. Slater a bien spécifié que :

 

[traduction]

 

Le fait que c’était – je ne veux pas dire une procédure « habituelle », mais quelque chose que nous étions capables de faire en tant qu’ingénieurs en logiciel ne signifiait pas que nous, vous savez, téléchargions des logiciels de série[15].

 

J’en conviens, mais lorsque les incertitudes peuvent être éliminées par des études techniques courantes ou des procédures habituelles, le projet ne répond pas aux critères d’admissibilité au titre de la RS&DE. Comme l’a souligné le juge en chef Bowman dans la décision Northwest Hydraulic, si la résolution du problème est raisonnablement prévisible à l’aide de la procédure habituelle ou des études techniques courantes, il n’y a pas d’incertitude technologique au sens retenu dans ce contexte. Si des spécialistes compétents dans le domaine peuvent régler les problèmes de façon prévisible, il n’y a pas d’incertitude technologique. C’est exactement la situation en l’espèce. Sans vouloir déprécier après coup les travaux entrepris par l’appelante, la Cour constate qu’il était clair qu’en utilisant les techniques courantes et établies l’appelante allait être capable de surmonter les difficultés technologiques. La réelle difficulté du projet de développement du logiciel ATG se rapportait à la collecte, à la vérification et au catalogage des diverses données rassemblées par les étudiants. Les incertitudes associées au projet étaient peut‑être considérables, mais elles ne constituent pas des incertitudes technologiques ou scientifiques ouvrant droit aux CII. En fait, la Circulaire d’information 97‑1 présente un exemple semblable à la présente affaire. Il y est souligné que le transfert de données d’un ordinateur central à un système UNIX est une activité courante de développement de logiciels. En d’autres termes, bien que cette activité ait peut‑être été complexe, les difficultés qui y étaient associées pouvaient être résolues par des spécialistes compétents dans le domaine. C’est bien ce qui s’est produit en l’espèce.

 

4.     Un système de distribution interactif sur PC, dont seules certaines frappes devaient être accessibles à l’utilisateur, et la distribution de l’information au moyen d’un réseau sans fil.

 

Là encore, dans la réponse à l’avis d’appel, l’intimée a formulé une hypothèse de fait selon laquelle les données recueillies pendant les périodes en cause ne se rapportaient pas à quelque projet futur que ce soit[16]. L’appelante n’a pas réfuté cette hypothèse. M. Slater a évoqué des plans d’intégration de ces technologies dans le site Web du ATG, mais le projet semblait être uniquement rendu à l’étape initiale de planification et de mappage. M. Slater n’a présenté aucun élément de preuve pour montrer que des travaux avaient réellement été effectués à cette fin.

 

[23]    En résumé, les travaux entrepris par l’appelante constituent peut‑être un progrès pour elle, mais ils ne représentent pas un avancement de la technologie sous‑jacente. M. Slater a fait valoir que le progrès technologique réalisé consistait essentiellement dans la présentation d’information sous une forme que peuvent utiliser des élèves ou d’autres personnes. Cependant, il n’en a pas fait la preuve au regard de la définition de la RS&DE donnée dans la Loi. L’utilité du produit final n’est pas un facteur déterminant lorsqu’il s’agit de décider s’il y a un progrès technologique. La question qu’il faut se poser est plutôt de savoir quelle sorte de difficultés technologiques il a fallu surmonter lors du développement de cet outil, et l’appelante n’a fourni aucun élément de preuve pour démontrer qu’elle avait éprouvé une quelconque difficulté technologique qui ne pouvait être résolue à l’aide des études techniques courantes.

 

[24]    M. Slater a fait valoir que le logiciel représentait une innovation utile et précieuse. La Cour en convient. Cependant, ce ne sont pas tous les projets utiles qui ouvrent droit à la déduction des dépenses de RS&DE. La recherche scientifique doit remplir les conditions expressément énoncées dans la Loi. Le fait qu’un produit soit nouveau ou innovateur ne suffit pas à prouver qu’un progrès technologique a été réalisé. Il s’agit plutôt de savoir comment il en vient à présenter ces caractéristiques, c’est‑à‑dire si elles découlent ou non d’activités de RS&DE.

 

[25]    Il y a lieu de signaler que la preuve de l’appelante est tout simplement insuffisante. Le témoignage de M. Slater était vague. Aucune preuve ni aucun document à l’appui n’a été déposé pour établir l’existence de quelque hypothèse innovatrice que ce soit visant expressément à réduire ou à éliminer des incertitudes technologiques, ni pour établir la nature de la méthodologie et des procédures utilisées pour la vérification de ces hypothèses ou la nature de l’avancement qui en a résulté, consistant soit à accepter ou à rejeter les hypothèses initiales. M. Slater n’a pas défini les objectifs du projet en des termes scientifiques ou technologiques. Dans la décision Sass Manufacturing[17], le juge Sarchuk a dit ce qui suit :

 

[…] À mon avis, le règlement 2900 exige que l’appelante produise des preuves convaincantes des expériences ou des analyses effectuées. Les mots « recherche systématique » impliquent l’existence d’expériences surveillées, la prise de mesures extrêmement précises et la confrontation des théories du chercheur à des preuves empiriques. La recherche scientifique doit s’entendre d’une entreprise visant à expliquer et à prédire, ainsi qu’à approfondir les connaissances relatives au domaine dont relève l’hypothèse formulée. Ce processus doit nécessairement s’accompagner d’expériences répétées pendant lesquelles on note avec soin les étapes suivies, les changements apportés et les résultats obtenus. En l’espèce, on n’a pas prouvé qu’un tel processus a été observé, que ce soit dans le contexte de la recherche appliquée ou dans celui de la mise au point. Je ne saurais faire droit à l’appel relativement à cette question[18].

 

[26]    Comme il a été souligné dans la décision Appareils neurosensoriels Tacto Inc.[19], dans des cas comme celui dont la Cour est saisie en l’espèce, le fardeau de la preuve repose sur l’appelante :

 

L’appelante avait le fardeau de démontrer, selon la balance des probabilités, que les dépenses qu’elle a engagées correspondent à des activités de recherche scientifique et de développement expérimental et, pour ce faire, elle devait démontrer qu’il y avait un risque ou une incertitude technologique qui ne pouvait pas être éliminée par les techniques courantes ou par les procédures habituelles. Si la résolution d’un problème est raisonnablement prévisible à l’aide des procédures habituelles ou des études techniques courantes, il n’y a pas d’incertitude technologique. Donc, tous les travaux effectués pour résoudre un problème qui peut être résolu par des techniques, des procédures et des données qui sont généralement accessibles aux spécialistes compétents dans le domaine ne peuvent, à mon avis, constituer des activités de recherche scientifique et de développement expérimental puisqu’il n’y a pas de risque ou d’incertitude technologique[20]. [Non souligné dans l’original.]

 

[27]    L’appelante ne s’est pas déchargée du fardeau qui lui incombait de démontrer l’existence d’incertitudes technologiques. À mon avis, les dépenses engagées pour le développement du logiciel ATG ne sont pas des dépenses de RS&DE admissibles.

 

[28]    Au passage, il convient de souligner en l’espèce l’absence de documents à l’appui adéquats déposés par l’appelante. Bien que ceux‑ci ne soient pas absolument nécessaires, il ne fait aucun doute qu’un contribuable qui présente une demande accompagnée de pièces justificatives appropriées facilitera la tâche de décider si une activité est admissible en tant que RS&DE. Comme il a été affirmé dans l’arrêt RIS‑Christie[21], le seul moyen fiable de prouver que la recherche scientifique a été effectuée de façon systématique consiste à produire des preuves documentaires. L’appelante n’a pas fourni suffisamment de faits pour appuyer son allégation voulant qu’elle ait effectué de l’investigation ou de la recherche systématique d’ordre scientifique ou technologique conformément à l’exigence expresse établie dans la définition de la RS&DE.

 

Domaines autres que les sciences et la technologie

 

[29]    Il peut être soutenu qu’un des avancements réalisés en l’espèce consistait à rendre accessible aux utilisateurs du logiciel ATG une quantité importante d’information dans une seule base de données d’une manière intéressante et interactive. Comme l’avait affirmé M. Slater, de la recherche devait être effectuée [traduction] « pour l’élimination de ces incertitudes de sorte que l’information présentée soit exacte et sensée, et admise par la majorité des experts dans le monde[22] ». Il a également fait observer que [traduction] « beaucoup de temps et d’efforts avaient été consacrés à la vérification de l’exactitude des données et à la préservation de leur intégrité[23] ». Cependant, la vérification et la présentation d’une information déjà connue ne constitue pas un avancement par rapport à l’ensemble de connaissances scientifiques actuelles. Manifestement, de tels travaux peuvent aider d’autres personnes dans la réalisation de leurs propres recherches, mais ils ne constituent pas de l’expérimentation ou de l’analyse en soi. De plus, la création d’un outil éducatif est comparable à l’établissement d’une nouvelle méthode d’enseignement. S’il est possible que cet outil corresponde à un avancement dans le domaine de l’enseignement, sa création serait exclue des activités de recherche scientifique et de développement expérimental en tant qu’activité de recherche dans les sciences sociales ou humaines[24]. Essentiellement, à mon avis, l’appelante utilisait des outils de programmation d’applications offerts sur le marché pour créer un programme d’instruction assisté par ordinateur.

 

[30]    Comme je l’ai déjà expliqué, le projet dans son ensemble n’est pas admissible, et, donc, la question est réglée. Dans un argument subsidiaire, l’intimée a fait valoir que les travaux en cause consistaient simplement dans la « collecte normale de données » et qu’ils seraient donc exclus des activités de recherche scientifique et de développement expérimental en application de l’alinéa k) de la définition de la RS&DE. Comme les deux parties au litige ont débattu cette question, elle devrait être brièvement abordée. Je suis d’accord avec M. Slater pour dire que la collecte d’information pour le projet n’a vraiment rien de « normal », tout au contraire. Non seulement une quantité importante d’information a été collectée, mais elle a aussi été analysée, vérifiée, et cataloguée dans diverses sous‑rubriques. En outre, des travaux ont été effectués pour faire ressortir l’interdépendance de faits apparemment disparates. À ce titre, l’argument de l’intimée est mal fondé. Pour que la collecte de données représente une activité de RS&DE admissible, elle doit être proportionnelle aux besoins du projet admissible dans son ensemble et servir à les appuyer directement. Toutefois, comme je l’ai déjà mentionné, j’ai conclu que le projet dans son ensemble n’était pas admissible au titre de la RS&DE et, donc, que les dépenses particulières engagées pour la collecte de données n’étaient pas non plus admissibles.

 

[31]    En conclusion, je tiens à souligner que les travaux qu’effectuent l’appelante sont louables. Le projet a créé des emplois pour de nombreux étudiants. M. Slater est un entrepreneur véritable au dynamisme, à l’énergie et à la créativité apparemment illimités. Toutefois, l’activité de recherche entreprise doit être conforme à la définition de la RS&DE donnée dans la Loi.

 

[32]    Les appels sont rejetés sans frais.

 

Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 31e jour d’octobre 2006.

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 3e jour de décembre 2007.

 

 

 

Jean David Robert, traducteur


 

 

 

RÉFÉRENCE :

 

 

 

2006CCI597

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2005‑3306(IT)I

 

INTITULÉ :

Zeuter Development Corporation et

Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Sudbury (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 15 septembre 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 31 octobre 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

Nick Slater

 

Avocat de l’intimée :

Me Frederic Morand

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous‑procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 



[1] À l’instruction, il y avait divergence quant aux montants exacts en cause. Le représentant de l’appelante a renvoyé aux dépenses de RS&DE de 89 044 $, de 57 721 $ et de 53 195 $ déclarées à la ligne 400 du formulaire T661 de l’appelante. L’avocat de l’intimée a affirmé que ses chiffres provenaient du formulaire T401 de l’appelante. Le représentant de l’appelante a affirmé qu’il ne se souciait pas de cette divergence mineure.

[2] L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), modifiée (la « Loi »).

[3] Bien que je prenne acte de la préoccupation de M. Slater et que je la comprenne, les vérificateurs sont liés par des ententes de confidentialité, et il doit, d’une façon ou d’une autre, trouver un moyen de prouver que l’appelante était admissible aux CII.

[4] Pièce R‑1, version préliminaire du Rapport d’examen technique de la RS&DE.

[5] Lunn v. R., [1998] 4 C.T.C. 2466 (C.C.I.), aux paragr. 24 et 25 (procédure informelle).

[6]  Northwest Hydraulic Consultants Limited v. The Queen, 98 DTC 1839 (C.C.I.) (ci‑après « Northwest Hydraulic »).

[7] Ibid., au paragr. 16.

[8] C.W. Agencies Inc. c. La Reine, 2001 CAF 393, 2002 DTC 6740 (ci‑après « C.W. Agencies »).

[9] Ibid., au paragr. 17.

[10] « Recherche scientifique et développement expérimental », datée du 24 mai 1994.

[11] « Recherche scientifique et développement expérimental – Lignes directrices administratives pour le développement de logiciels », datée du 28 février 1997.

[12] Contre‑interrogatoire de M. Slater, à la page 73 de la transcription.

[13] Ibid., à la page 74.

[14] Réponse à l’avis d’appel, à l’alinéa 9i).

[15] Page 60 de la transcription.

[16] Précitée, note 14.

[17] Sass Manufacturing Limited. v. M.N.R., 88 DTC 1363 (C.C.I.) (ci‑après « Sass Manufacturing »).

[18] Ibid., au paragr. 28.

[19] Appareils neurosensoriels Tacto Inc. c. La Reine, 2004 CCI 341, 2004 DTC 2884 (ci‑après « Appareils neurosensoriels Tacto Inc »).

[20] Ibid., au paragr. 11.

[21] RIS‑Christie Ltd. v. The Queen, 99 DTC 5087 (C.A.F.) (ci‑après « RIS‑Christie Ltd. »).

[22] Transcription, page 24.

[23] Ibid.

[24] L’intimée a renvoyé à l’Interprétation technique 2001‑0096075 intitulée [traduction] « Recherche scientifique et développement expérimental » datée du 8 novembre 2001 qui décrit la position de l’Agence du revenu du Canada sur la définition des sciences sociales.

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