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Dossier : 2004-1548(IT)G

ENTRE :

236130 BRITISH COLUMBIA LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu à Vancouver (Colombie-Britannique), le 27 juillet 2005

Devant : L'honorable juge R. D. Bell

Comparutions :

Avocat de l'appelante :

Me Warren J. A. Mitchell, c.r.

Avocates de l'intimée :

Me Deborah Horowitz et

Me Wendy Burnham

____________________________________________________________________

JUGEMENT

Les parties ayant présenté un renvoi en vertu de l'article 173 de la Loi de l'impôt sur le revenu au sujet de la question de savoir si le ministre du Revenu national a validement établi les nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante avant le 3 mai 2002;

La Cour a conclu que le ministre du Revenu national n'avait pas validement établi les nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante avant le 3 mai 2002, le tout selon les motifs du jugement ci-joints.

L'appelante a droit aux dépens.

          Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour de décembre 2005.

« R. D. Bell »

Juge Bell

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de novembre 2006.

Mario Lagacé, jurilinguiste


Référence : 2005CCI770

Date : 20051208

Dossier : 2004-1548(IT)G

ENTRE :

236130 BRITISH COLUMBIA LTD.,

appelante,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Bell

GÉNÉRALITÉS

Sauf indication contraire, toutes les dispositions mentionnées figurent dans la Loi de l'impôt sur le revenu ( « la Loi » ).

RENVOI

                                                                          

[1]      Il s'agit d'un renvoi présenté en vertu de l'article 173 à l'égard des années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante. Le paragraphe 173(1) est rédigé comme suit :

173.(1) Lorsque le ministre et un contribuable conviennent, par écrit, de faire trancher par la Cour canadienne de l'impôt une question de droit, de fait ou de droit et de fait, portant sur une cotisation ou une détermination, réelles ou projetées, découlant de l'application de la présente loi, cette cour se prononce sur cette question.

[2]      Comme les parties en ont convenu, la question sur laquelle la Cour doit se prononcer est la suivante :

[TRADUCTION] Le ministre du Revenu national a-t-il validement établi les nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante avant le 3 mai 2002?

[3]      Telle qu'elle est formulée, la décision que les parties cherchent à obtenir est la suivante :

[TRADUCTION] Sa Majesté cherche à obtenir une décision portant que le ministre du Revenu national a validement établi les nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante avant le 3 mai 2002.

L'appelante cherche à obtenir une décision portant que le ministre du Revenu national n'a pas validement établi les nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante avant le 3 mai 2002.

LES FAITS

[4]      L'appelante est une société dont le siège social était situé, pendant la période pertinente, au :

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6C 3L6

[5]      Les parties ont déposé un exposé conjoint partiel des faits. De plus, l'intimée a cité quatre témoins de l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « Revenu Canada » ) et les deux parties ont versé au dossier des portions de l'interrogatoire préalable du principal actionnaire de l'appelante, Joseph Sydney Houssian. Pour ses années d'imposition 1995 et 1996, l'appelante a présenté des renonciations en date du 16 juin 1999 et du 18 mai 2000, comme le prévoit le sous-alinéa 152(4)a)(ii).

[6]      Le 2 novembre 2001, l'appelante a présenté des avis de révocation de ces renonciations.

[7]      Dans ses déclarations de revenu concernant ses années d'imposition qui ont pris fin le 31 octobre 1995 (déclaration produite le 30 avril 1996), le 31 octobre 1996 (déclaration produite le 30 avril 1997) et le 31 octobre 1997 (déclaration produite le 28 avril 1998), l'appelante a déclaré que ses adresses étaient :

Siège social

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6C 3L6

Adresse postale

a/s Coopers & Lybrand/ESZA

1111, rue Hastings ouest

Vancouver (C.-B.)

V6E 3R2

Livres et registres

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6C 3L6

[8]      Dans ses déclarations de revenu concernant ses années d'imposition qui ont pris fin le 31 octobre 1998 (déclaration produite le 30 avril 1999), le 31 octobre 1999 (déclaration produite le 28 avril 2000) et le 31 octobre 2000 (déclaration produite le 30 avril 2001), l'appelante a déclaré que ses adresses étaient :

Siège social

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6C 3L6*

Adresse postale

a/s Pricewaterhouse Coopers s.r.l./ESZA

601, rue Hastings ouest

Vancouver (C.-B.)

V6B 5A5

Livres et registres

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6B 5A5

        * Aucun code postal n'a été fourni dans la déclaration de 1998.

[9]      Le 25 février 2002, l'adresse de l'appelante inscrite dans le système des numéros d'entreprises de Revenu Canada a été remplacée par l'adresse suivante :

                                      170-13151, Vanier Place

                                      Richmond (C.-B.)

                                      V6J 2J2

Cette mauvaise adresse a été consignée par Revenu Canada.

[10]     Dans sa déclaration pour son année d'imposition qui a pris fin le 31 octobre 2001 (déclaration produite le 30 avril 2002), l'appelante a indiqué les adresses suivantes :

Siège social

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6C 3L6

Adresse postale

a/s Pricewaterhouse Coopers s.r.l./ESZA

601 , rue Hastings ouest

Vancouver (C.-B.)

V6B 5A5

Livres et registres

800 - 200, rue Burrard

Vancouver (C.-B.)

V6C 3L6

[11]     Le 8 avril 2002 ou auparavant, Revenu Canada a envoyé par la poste à l'appelante deux colis distincts à la mauvaise adresse ci-dessus mentionnée, à Richmond :

          (1)      des déclarations d'intérêt pour les années 1995 à 1998 inclusivement et des avis de nouvelle cotisation pour les années 1993 à 2000 inclusivement ont été envoyés depuis le Centre de technologie d'Ottawa;

(2)      des déclarations d'intérêt similaires pour les années 1995 à 1998 inclusivement ont été envoyées depuis le Centre fiscal de Surrey.

Les avis de nouvelle cotisation et les déclarations d'intérêt étaient tous datés du 8 avril 2002.

[12]     Des formulaires T7WC[1] datés du 8 avril 2002, renfermant des explications au sujet des nouvelles cotisations concernant les années 1995 et 1996, ont été envoyés à l'appelante, a/s Pricewaterhouse Coopers s.r.l./ESZA, 601, rue Hastings ouest, Vancouver (C.-B.), V6B 5A5. Les T7WC ont été reçus à cette adresse le 10 avril 2002.

[13]     Le 29 avril 2002, l'adresse de l'appelante inscrite dans le système des numéros d'entreprises de Revenu Canada a été remplacée par l'adresse suivante :

                                      800 - 200, rue Burrard

                                      Vancouver (C.-B.)

                                     V6B 5A5

[14]     Le premier témoin de l'intimée, Vikky Chan ( « Mme Chan » ), a déclaré être commis à la sélection à Revenu Canada. Elle a témoigné qu'elle apporte à son bureau le courrier retourné et introduit le numéro d'entreprise dans le système pour vérifier si [TRADUCTION] « l'envoi retourné est à jour » . Mme Chan a présenté un témoignage embrouillé, mais elle semble avoir dit que, si l'adresse postale est la même que celle qui figure sur l'envoi retourné, elle doit changer l'adresse. Elle a déclaré que s'il existe une adresse valide pour les livres et registres ou pour le siège social, elle remplace l'adresse postale par l'une ou l'autre de ces adresses, c'est-à-dire qu'elle change l'adresse inscrite à l'ordinateur. Elle a affirmé qu'habituellement, elle met ensuite la lettre retournée dans une enveloppe. Elle ne se rappelle pas avoir changé l'adresse de l'appelante le 29 avril 2002.

[15]     Pendant le contre-interrogatoire, le témoin a dit qu'elle ne se rappelait pas l'envoi particulier contenant les avis de nouvelle cotisation. Elle a ajouté qu'elle ne savait pas s'il y avait quelque chose dans le système qui avertissait Revenu Canada qu'un envoi particulier retourné devait être envoyé avant une date donnée. Elle a déclaré qu'habituellement, elle n'examinait pas la substance de l'envoi, qu'elle ne regardait pas de quoi il s'agissait, mais qu'elle se contentait de le réadresser. Elle a dit qu'une déclaration de revenu de société comporte trois adresses : l'adresse commerciale, l'adresse postale et l'adresse pour les livres et registres. Elle a déclaré que si l'adresse postale est inexacte, elle vérifie l'adresse commerciale ou l'adresse pour les livres et registres inscrite dans le système. Elle a ensuite affirmé que, si l'envoi était retourné, elle introduisait dans le système le numéro d'entreprise et que, si l'adresse était la même que celle figurant sur l'envoi retourné, elle savait que l'adresse était inexacte. Elle a dit que, lorsqu'elle voulait trouver la bonne adresse :

[TRADUCTION] [...] [elle] introdui[sait] dans le système le numéro d'entreprise et [qu']il y a[vait] à l'écran l'adresse du siège social, puis l'adresse postale, puis l'adresse pour les livres et registres.

Le témoin a déclaré choisir la dernière adresse apparaissant à l'écran. Elle a ajouté que :

[TRADUCTION] [...] (i) si les deux adresses sont datées du même jour, [elle] choisi[t] l'adresse commerciale.

[16]     L'intimée a ensuite cité Valerie Kirton ( « Mme Kirton » ), qui a déclaré être directrice, Section du traitement des déclarations des sociétés, au Centre fiscal de Surrey. Le témoin a déclaré que sa section s'occupe du traitement des déclarations des sociétés et établit de nouvelles cotisations à leur égard. Mme Kirton a déclaré que, comme c'est ici le cas, les nouvelles cotisations multiples sont délivrées le même jour et qu'elles sont envoyées par la poste dans une enveloppe avec les déclarations d'intérêt. Elle a dit que toutes les communications sont envoyées dans un seul colis depuis le Centre de technologie d'Ottawa, mais que les déclarations d'intérêt peuvent également être envoyées depuis le Centre fiscal où la cotisation a été établie, par exemple, le Centre fiscal de Surrey. Elle a brièvement décrit les modalités d'établissement des nouvelles cotisations et elle a ajouté que les nouvelles cotisations et les déclarations d'intérêt étaient datées du 8 avril 2002. Elle a dit que les T7WC avaient été envoyés par la poste au 601, rue Hastings ouest :

[TRADUCTION] [...] parce que le vérificateur qui avait préparé le formulaire y avait inscrit cette adresse.

Toutefois, elle a dit que les avis de cotisation avaient été envoyés par la poste à l'adresse de la Vanier Place, à Richmond.

[17]     En ce qui concerne l'adresse de la Vanier Place, voici ce que Mme Kirton a dit :

[TRADUCTION] [...] cette adresse ne se rapportait pas du tout à cette société. Il s'agissait d'une erreur qu'un membre de mon personnel avait faite et on a erronément mis à jour le système en y inscrivant l'adresse d'une autre société.

Mme Kirton a témoigné que des déclarations d'intérêt avaient été envoyées depuis Surrey et qu'il y avait des déclarations d'intérêt qui avaient été envoyées depuis Ottawa avec les avis de nouvelle cotisation. Elle a dit que son bureau ne pouvait pas délivrer des avis de nouvelle cotisation, mais qu'il pouvait imprimer des déclarations d'intérêt et les envoyer [TRADUCTION] « au client » . Elle a déclaré que l'adresse de l'appelante avait été remplacée par celle de la Vanier Place le 25 février 2002 et qu'elle avait été remplacée par une adresse autre que la Vanier Place, à savoir le 800 - 200, rue Burrard, Vancouver, le 29 avril 2002. En procédant à des recherches informatisées, son bureau a constaté qu'un certain nombre de sociétés utilisaient cette adresse; à la suite d'une recherche, on a conclu que le propriétaire était « Joe Houssian » .

[18]     Pendant le contre-interrogatoire, Mme Kirton a dit qu'elle ne s'occupait pas personnellement du courrier retourné et qu'elle ne se rappelait pas expressément que les nouvelles cotisations en question avaient été retournées ou qu'elles avaient de nouveau été délivrées, mais qu'elle savait uniquement [TRADUCTION] « que c'[était] dans le système » . Elle a ensuite dit, en réponse à une question précise, que le seul renseignement figurant dans le système était que l'adresse avait été changée le 29 avril. Les propos suivants ont ensuite été échangés :

[TRADUCTION]

Q.         [...] mis à part le changement d'adresse, vous ne disposez d'aucun renseignement précis indiquant qu'ils avaient été retournés et s'ils avaient été renvoyés?

R.         C'est bien cela.

[19]     Pendant le réinterrogatoire, l'avocat de l'appelante a posé des questions à Mme Kirton au sujet des déclarations d'intérêt qui avaient été envoyées depuis le Centre fiscal de Surrey et de 29 pages, soit les avis de nouvelle cotisation, envoyées depuis Ottawa. Mme Kirton a témoigné qu'il y avait un [TRADUCTION] « numéro de téléphone » en dessous de l'adresse des documents envoyés à la Vanier Place depuis Surrey et que :

[TRADUCTION] [...] Il est probable que le client qui a[vait] ouvert l'envoi par erreur a[vait] composé le numéro et a[vait] demandé où le courrier devait être retourné.

Elle a dit qu'il y avait des tampons de retour sur l'envoi de Surrey, mais qu'il n'y en avait aucun sur les 29 pages envoyées depuis Ottawa et qu'elle ne savait pas si ces pages avaient été retournées avec les autres pages qui étaient revenues de Surrey. Mme Kirton a ensuite déclaré que l'adresse qui avait été inscrite le 29 avril était le 800 - 200, rue Burrard, Vancouver (C.-B.), V6B 5A5.

[20]     Mme Kirton a déclaré que ce code postal était différent de celui qui avait initialement été attribué au 800 - 200, rue Burrard. Elle a dit qu'il s'agissait du mauvais code postal. Elle a également dit que la seule erreur qui avait été faite lors de la production des déclarations concernant les années 1999 et 2000 était que la mauvaise adresse avait été donnée pour les livres et registres; les propos suivants ont ensuite été échangés :

[TRADUCTION]

Q.         Et en consultant le système, on aurait pu constater qu'il y avait une différence entre la bonne adresse pour les documents commerciaux et la - - pardon, bonne adresse commerciale et la mauvaise adresse pour les livres et registres. Est-ce exact?

R.         Je ne travaillais pas dans ce secteur, de sorte que je ne voudrais pas vraiment donner des renseignements sur ce qu'ils feraient, selon moi.

Q.         D'accord, d'accord, mais ils avaient les trois adresses devant les yeux?

R.          Oui. Ces adresses figuraient au système...

Q.         Connaissez-vous, dans le système - - ou y a-t-il un système qui traite des documents périmables? Par exemple, il me semble que, si une nouvelle cotisation doit être délivrée le 27 juillet - - si une nouvelle cotisation doit être délivrée d'ici le 8 août, il y aurait un système spécial qui ferait savoir que ce document est périmable, qu'il faut réagir. Savez-vous s'il existe un tel système?

R.          Oui. Il y en a un, à l'étape initiale, dans mon secteur de travail, où l'on détermine si un dossier est prioritaire. S'il doit y avoir prescription dans les 30 jours... nous inscrivons un code prioritaire et nous traitons le dossier comme tel.

Q.         Et ces nouvelles cotisations n'étaient pas visées par ce système. Elles sont tombées dans une brèche du système, n'est-ce pas?

R.          Eh bien, il fallait un certain temps pour le traitement de la nouvelle cotisation dans le système.

Q.         Par conséquent, il y a un système qui traite des documents périmables. Il s'agissait d'un document périmable, mais il n'a pas été traité dans ce système, n'est-ce pas? ...

R.          Mais il n'y a aucune procédure permettant de vérifier la chose.

Q.         Il n'y a aucune procédure à l'interne pour vérifier la chose, est-ce bien ce que vous dites?

R.          Pour le courrier retourné.

Q.         Merci. S'ils ont été reçus, ils sont revenus le 22 avril, n'est-ce pas?

R.          Oui. Nous avons ce timbre-dateur...

Q.         Et l'adresse a été changée le 29 avril, n'est-ce pas?

R.          Oui...

Q.         Les documents ont été reçus - - s'ils ont été reçus, ils l'ont été le 22 avril?

R.          Oui. À la salle du courrier du Centre fiscal de Surrey.

Q.         Oui, et le 29 avril, l'adresse a été changée?

R.          Oui, dans le secteur du courrier retourné.

Q.         Il y a donc eu une période d'une semaine entre le premier et le deuxième événement?

R.          Oui.

            [...]

Q.         Indépendamment du changement d'adresse, le 29 avril, disposez-vous d'autres éléments de preuve montrant que ces nouvelles cotisations ont été reçues ou qu'elles ont été envoyées à une date précise?

R.          La seule indication que nous avons, c'est l'imprimé qui indique le courrier retourné - - qu'un envoi a été retourné, comme l'indique le « Y » , que l'adresse a été changée le 29 avril et que le courrier a de nouveau été mis à la poste.

Q.         Et qu'il a de nouveau été mis à la poste, mais vous n'avez pas la date précise à laquelle il l'a été?

R.          Selon notre procédure, le courrier est envoyé par la poste le même jour.

Q.         Ce sont vos procédures, et y a-t-il quelqu'un qui puisse dire que ces procédures ont été suivies?

R.          Oui. Je crois qu'ils seront cités.

[21]     Le troisième témoin de l'intimée, Joanne Kathleen Way ( « Mme Way » ) était chef d'équipe aux Services du courrier et de la messagerie, Centre fiscal de Surrey. Elle a déclaré qu'elle s'occupait de superviser les activités liées au courrier et à la livraison de celui-ci partout dans les immeubles. Elle a ajouté qu'elle supervisait jusqu'à 28 employés, selon l'époque de l'année, dans tous les secteurs des activités liées au courrier, qu'il s'agisse du courrier d'entrée, du tri du courrier, de l'ouverture ou du traitement ainsi que de tout le courrier de départ. Elle a déclaré qu'elle avait collaboré étroitement avec le personnel aux fins de l'élaboration d'instructions de travail ainsi que du maintien et de la mise à jour de celles-ci au besoin. Cela comportait des vérifications par échantillonnage sur une base continue. Elle a dit que les envois non distribuables sont reconnus comme tels parce qu'ils se trouvent dans une enveloppe de Revenu Canada. Voici ce qu'elle a dit :

[TRADUCTION] La Société canadienne des postes appose en fait un tampon à choix multiples et indique ensuite la raison pour laquelle le courrier nous est retourné.

Le témoin a déclaré qu'aucun tampon n'était apposé sur le courrier non distribuable.

[22]     On a ensuite référé le témoin à la pièce contenant quatre pages de déclarations d'intérêt et des nouvelles cotisations pour un certain nombre d'années, dont les années 1995 et 1996, de l'appelante. Un timbre dateur indiquait que la salle du courrier l'avait reçue, par l'entremise de Postes Canada, le 22 avril 2002. Mme Way a déclaré qu'on ne retirait pas de l'enveloppe un envoi non distribuable et qu'un document [TRADUCTION] « de ce genre serait envoyé aux Retours, Entreprises » . Elle a ajouté qu'un tel document serait envoyé à cette direction au plus tard le 23 avril. Elle a dit que les normes selon lesquelles la livraison devait être effectuée le lendemain sont respectées et que, partout dans l'immeuble, il y a des postes de dépôt pour le courrier de départ. Elle a ajouté que les messagers :

[TRADUCTION] [...] font trois tournées par jour, [qu']ils font la ronde et ramassent le courrier de départ et le livrent au commis du bureau de poste pour traitement.

Elle a dit que l'horaire de ramassage est respecté sur une base quotidienne et que si cela n'était pas fait, elle en entendrait parler.

[23]     Pendant le contre-interrogatoire, le témoin a dit qu'elle ne se rappelait pas expressément [TRADUCTION] « ce courrier en particulier » . Mme Way a témoigné que, si une enveloppe scellée est apportée à la salle du courrier, l'enveloppe sort immédiatement. Elle a ensuite témoigné que le moment où une enveloppe est scellée ne dépend pas d'elle lorsqu'on lui demande d'aller la chercher.

[24]     Le quatrième témoin de l'intimée était Susan Marie Ellis ( « Mme Ellis » ), qui était chef d'équipe intérimaire à l'ADRC, au sein de l'Unité des services de numéros d'entreprises. Elle a affirmé que, fondamentalement, ils changeaient les adresses. Elle a décrit le courrier retourné comme ayant été :

[TRADUCTION] [...] envoyé par la poste au client et ayant été retourné par le bureau de poste, parce qu'il ne pouvait pas être livré à cette adresse, du fait que le destinataire avait déménagé ou pour une autre raison.

[25]     Mme Ellis a témoigné qu'en ce qui concerne le courrier de sociétés qui est retourné, tout [TRADUCTION] « est de nouveau envoyé par la poste au client si l'on trouve une adresse » . Elle a dit qu'ils identifiaient le courrier comme étant adressé à une société et qu'ils vérifiaient dans le système si l'adresse avait été mise à jour. Selon le témoin, on procédait comme suit :

[TRADUCTION] Il y a un écran qui indique toutes les adresses, les dernières adresses et la dernière, si l'adresse inscrite dans le système est différente de l'adresse figurant sur le courrier, de toute évidence, il y a eu changement, mais nous pouvons faire l'historique et voir si l'ancienne adresse était là [...] Si l'adresse a été mise à jour, nous envoyons de nouveau cette lettre par la poste [...] Si elle n'a pas été mise à jour, nous procédons à une recherche pour voir si nous pouvons trouver une adresse valide à ce moment-là.

[26]     Le témoin a déclaré qu'il se pouvait que l'on communique d'abord [TRADUCTION] « par téléphone » avec le contribuable :

[TRADUCTION] [...] et sinon, nous cherchons les adresses. L'adresse commerciale, si elle est différente, est bien souvent une bonne adresse à utiliser, parce que la plupart du temps, les entreprises ne déménagent pas. C'est simplement l'adresse postale qui change. L'adresse pour les livres et registres est habituellement une adresse plus récente. Si elle est différente, nous remplacerons l'adresse par l'adresse pour les livres et registres. Si nous ne pouvons pas trouver d'adresse valide de cette façon, nous cherchons un administrateur et nous l'envoyons à un administrateur de la société à son adresse domiciliaire.

Le témoin a ajouté qu'une fois qu'une adresse valide est trouvée :

[TRADUCTION] Nous mettons le système à jour en y inscrivant cette adresse, nous enlevons l'ancienne adresse et nous inscrivons la nouvelle, puis nous envoyons les documents par la poste à la nouvelle adresse et nous insérons un encart disant que la lettre a été retournée et que nous l'envoyons maintenant de nouveau par la poste.

[27]     Le témoin a également dit que l'adresse serait rédigée à la main et que l'enveloppe serait mise dans le panier du courrier de départ, où on la prendrait. Elle a dit que les membres du personnel enlevaient chaque jour le panier du courrier de départ [TRADUCTION] « de leur bureau » et qu'ils ne conservaient rien [TRADUCTION] « à leur bureau » . Lorsqu'on lui a demandé comment elle pouvait savoir que les procédures énoncées dans le manuel étaient suivies par tous les employés au sein de son unité, Mme Ellis a répondu ce qui suit :

[TRADUCTION] Parce qu'il faut se conformer au manuel, à cause des procédures de sécurité.

Le témoin a également décrit la procédure qui était suivie pour les vérifications ponctuelles.

[28]     Le témoin a ensuite fait référence à un certain nombre de documents figurant à l'écran que l'on avait imprimés et elle a pu dire que le 29 avril 2002, Mme Chan avait remplacé l'adresse de la Vanier Place par l'adresse de la rue Burrard. Le code à l'écran indiquait que le courrier retourné venait de l'adresse de la Vanier Place et que c'était la raison pour laquelle Mme Chan avait corrigé l'adresse et l'avait remplacée par celle de la rue Burrard.

[29]     Mme Ellis a ensuite témoigné que les procédures énoncées dans le Manuel de l'inscription des entreprises étaient celles qui étaient suivies par l'Unité des numéros d'entreprise, au Centre fiscal de Surrey, et elle a ajouté :

[TRADUCTION] À notre connaissance, tout le monde suit le manuel.

[30]     Pendant le contre-interrogatoire, Mme Ellis a dit qu'elle ne se rappelait pas expressément avoir reçu ou avoir envoyé les déclarations d'intérêt et les avis de nouvelle cotisation en question. Elle a également dit que le Manuel de l'inscription des entreprises n'énonçait pas d'exigences quant aux délais. Elle a déclaré qu'aucun journal n'était tenu pour le courrier qui était retourné. Elle a affirmé ne pas savoir si quelqu'un avait téléphoné au destinataire.

[31]     Le témoin a déclaré que, lorsqu'une personne change une adresse, elle dispose de l'adresse commerciale, de l'adresse postale ainsi que des adresses pour les livres et registres et qu'elle consulte toutes ces adresses. Les propos suivants ont été échangés :

[TRADUCTION]

Q.         D'accord. Si elles sont - - si à l'écran il y avait l'adresse commerciale, l'adresse postale, l'adresse pour les livres et registres, est-ce que vous vérifiriez toutes ces adresses?

R.          Que voulez-vous dire par « vérifier » ?

Q.         Eh bien, les vérifier - - l'un des problèmes sur lesquels nous reviendrons, si je ne me trompe, est que je suppose qu'ils ont regardé, qu'ils ont constaté que l'adresse commerciale ainsi que l'adresse pour les livres et registres étaient les mêmes, mais que les codes postaux étaient différents.

R.          Mm-hmm.

Q.         La personne qui effectuait le changement aurait-elle remarqué cela?

R.          Pas nécessairement.

Q.         Elle aurait pu le remarquer et elle aurait pu ne pas le remarquer.

R.          Ouais.

Q.         Et si elle avait été plus vigilante, elle aurait pu - - elle aurait pu s'en apercevoir ou elle aurait pu ne pas s'en apercevoir. Est-ce bien cela?

R.          Peut-être bien.

Q.         D'accord. Y a-t-il un système au sein du ministère pour - - et je crois que nous conviendrons que certains documents que l'ADRC envoie sont périmables.

R.          Mm-hmm.

Q.         Les avis de nouvelle cotisation doivent être envoyés au plus tard à une date donnée. Y a-t-il un système, à votre connaissance, qui traite du courrier retourné qui est périmable?

R.          Non, pas que je sache.

Q.         Par exemple, si un avis de nouvelle cotisation a été envoyé, qu'il a été envoyé à la mauvaise adresse et qu'il revient, il n'y aurait pas d'avertissement indiquant qu'il vaut mieux envoyer ce document d'ici mardi, à défaut de quoi nous allons avoir des ennuis?

R.          Non.

Q.         Non, pas du tout. Je crois que vous dites que Mme Chan aurait changé l'adresse.

R.          Mm-hmm.

Q.         Et vous dites que si elle a changé l'adresse, certaines choses se sont probablement produites. Vous faites des suppositions au sujet de ce qui s'est passé, n'est-ce pas? Dans le système?

R.          Le système aurait changé l'adresse.

Q.         Non. Si elle a suivi le système, vous dites que si cela est arrivé, vous supposez que si l'adresse avait été changée, certaines choses se seraient produites.

R.          Voulez-vous dire que, si elle avait changé l'adresse, elle aurait de nouveau mis l'enveloppe à la poste?

Q.         Oui.

R.          Oui, elle l'aurait de nouveau mis à la poste.

Q.         D'accord. S'il y a un document ou un élément interne qui indique que l'adresse est changée, il faut immédiatement mettre le document dans une enveloppe et l'envoyer?

R.          Rien n'est consigné par écrit, non.

Q.         Merci beaucoup.

R.          Il faut simplement que nous le fassions.

[32]     L'avocate de l'intimée a ensuite « versé au dossier » certaines portions de l'interrogatoire préalable de Joseph Sydney Houssian ( « M. Houssian » ). M. Houssian a déclaré que, lorsqu'il était revenu, après avoir été absent pendant un certain temps, il était allé chercher le courrier à son bureau le 17 mai 2002 et qu'il l'avait apporté chez lui pour la longue fin de semaine. Il a déclaré qu'il avait pris le courrier à son bureau, mais qu'il s'était d'abord rendu au bureau de sa secrétaire. Il a affirmé que, lorsqu'il avait initialement regardé l'envoi, il avait simplement vu des calculs d'intérêts, que cela ne l'intéressait pas particulièrement et qu'il avait continué à ouvrir ses autres lettres. Il a déclaré que le mardi suivant, lorsque son comptable lui avait demandé s'il avait reçu quelque chose, il avait répondu qu'il avait uniquement reçu des renseignements au sujet des intérêts. Lorsqu'il a remis les documents au comptable, il a découvert que de nouvelles cotisations y étaient jointes. Sur la déclaration de 1995, il y avait la note suivante :

[TRADUCTION] Ouvert par erreur, courrier retourné, Services des sociétés.

[33]     M. Houssian a déclaré avoir été absent pendant plusieurs semaines avant son retour, le 17 mai. Il a affirmé qu'il s'était absenté vers la première semaine du mois d'avril, qu'il était revenu un jour vers la mi-avril, et qu'il était ensuite reparti pour revenir le jeudi 16 mai en soirée. Il a dit que sa secrétaire aurait mis sur son bureau le colis de Revenu Canada et les autres lettres qu'il avait reçues pendant son absence. Les propos suivants ont été échangés :

[TRADUCTION]

Q.        D'accord. Et savez-vous comment Mme Brady a reçu le colis?

R.          En fait, elle n'a pas physiquement vu le colis. Le jeudi soir, le 16, lorsqu'elle a rassemblé les lettres, qu'elle les a mises dans différentes chemises et ainsi de suite, elle n'a pas vu le colis.

Q.         Elle ne s'était donc pas rendu compte qu'il était là? Est-ce bien ce que vous voulez dire lorsque vous dites qu'elle ne l'avait pas vu ou voulez-vous dire qu'en fait, le colis n'était pas arrivé?

R.          Elle ne l'avait pas vu, nous pouvons donc uniquement supposer qu'il n'était pas arrivé.

Q.         D'accord, vous supposez donc qu'il est arrivé le vendredi?

R.          Oui, le vendredi.

Q.         Et comment s'est-il retrouvé sur votre bureau?

R.          Le messager l'a apporté et l'a mis dans son - - dans mon panier d'arrivée dans son bureau. Je l'ai sorti de son panier, de mon panier d'arrivée, avec les autres documents qui étaient arrivés pendant la journée et je l'ai mis sur ma pile.

Q.         D'accord. Par conséquent, le colis n'était pas sur votre bureau lorsque vous avez initialement regardé? Il était en fait dans votre panier d'arrivée, sur le bureau de Mme Brady, n'est-ce pas?

R.          Il est allé de mon panier d'arrivée, dans son bureau, à mon panier d'arrivée dans mon bureau, puis dans mon porte-documents.

Q.         D'accord. Et c'est vous qui l'avez pris sur son bureau pour le mettre sur votre bureau et qui l'avez ensuite mis dans le porte-documents, pour l'apporter chez vous, est-ce exact?

R.          C'est ce qui est selon nous arrivé, ouais... Lorsque nous avons trouvé le colis, ou lorsque nous avons découvert ce qu'était le colis, le mardi, nous avons demandé à la salle du courrier ce qu'ils savaient à ce sujet.

Q.         Que vous ont-ils dit?

R.          Ils ont dit qu'ils avaient reçu une enveloppe brune et qu'ils l'avaient mise dans mon panier d'arrivée, dans le bureau d'Irene...

Q.         Et la salle du courrier est-elle mise au courant de la chose? Je crois comprendre qu'il s'agit d'une salle de courrier d'Intrawest, est-ce exact?

R.          C'est exact.

Q.         Sont-ils au courant de l'existence d'autres destinataires qui pourraient recevoir du courrier à cette salle de courrier?

R.          Ouais, je possède plusieurs sociétés de portefeuille privées et si - - et ils ont un document indiquant que c'est adressé à telle ou telle société, de sorte qu'ils savent qu'il s'agit de moi, de sorte qu'ils me le remettraient ou qu'ils le remettraient à Irene.

Q.         Et y a-t-il réellement une liste de ces sociétés dans la salle de courrier, des diverses sociétés qui reçoivent cela?

R.          Je crois que oui. Ce messager particulier, qui était un employé temporaire, a demandé de qui il s'agissait et ils ont dit : « Oh, c'est à Joe » , de sorte qu'il l'a apporté au bureau d'Irene.

Conformément à un engagement qui avait été pris au sujet de ce qui précède, on a fourni des renseignements montrant qu'en 2002, il n'y avait pas de procédure formelle à la salle du courrier et qu'en bonne partie par suite de l'événement en question, une procédure a été mise en place.

[34]     Après qu'un certain nombre d'autres questions eurent été posées, les propos suivants ont été échangés :

[TRADUCTION]

Q.         Nous avons déjà parlé de cette déclaration solennelle établie par M. Power. Il déclare avoir mis - - il dit :

                        Le 17 mai 2002, trois enveloppes brunes sont arrivées à la salle du courrier. Toutes les enveloppes étaient adressées à des sociétés à numéro. J'ai demandé à un compagnon de travail à qui l'enveloppe devait aller. Il m'a répondu que Joe Houssian possédait des sociétés à numéro, que ces enveloppes lui étaient fort probablement adressées,

            ce qui est le témoignage que vous avez également fourni.

                        J'ai ensuite mis les trois enveloppes sur le coin du bureau d'Irene Brady.

            Savez-vous ce qui est arrivé aux autres enveloppes qui ont été reçues et qui étaient adressées à des sociétés à numéro?

R.          Non, je ne le sais pas.

Q.         Savez-vous à quelles sociétés elles étaient adressées?

R.          Non.

Conformément à l'engagement qui avait été pris, on a fourni des renseignements montrant que M. Power était un employé temporaire.

[35]     Me Mitchell a ensuite présenté les portions suivantes de l'interrogatoire préalable pour qu'elles soient versées au dossier :

[TRADUCTION]

Q.         ... lorsque vous êtes absent et que le courrier arrive, Mme Brady prend-elle connaissance du courrier pour voir s'il y a quelque chose d'important?

R.          Oui, elle prend chaque jour connaissance du courrier. ...

Q.         Vous informe-t-elle lorsqu'il y a quelque chose d'important dans le courrier?

R.          Ouais, lorsque je - - pour ce voyage particulier et lorsque je suis à Phoenix, lorsque je travaille là, nous communiquons plusieurs fois par jour au sujet de toute une série de choses, et notamment des renseignements qui arrivent par la poste. [...]

Q.         Par conséquent, si une contravention impayée arrivait ou si vous n'aviez pas payé le montant dû sur votre carte de crédit ou quelque chose du même genre, vous le sauriez rapidement?

R.          Malheureusement, oui.

Q.         D'accord.

R.          Non, nous - - lorsque je suis à Phoenix je suis en contact avec Irene plusieurs fois par jour et il y a les courriels ainsi que les télécopies.

ANALYSE ET CONCLUSIONS

[36]     L'avocate de l'intimée a souscrit à l'argument de l'avocat de l'appelante, à savoir qu'il incombe au ministre d'établir que les nouvelles cotisations avaient été envoyées par la poste en temps opportun à la bonne adresse. Dans l'arrêt Aztec Industries Inc. v. R., 95 DTC 5235, page 5237, la Cour d'appel fédérale a dit ce qui suit :

Lorsque, comme en l'espèce, le contribuable affirme non seulement qu'il n'a pas reçu l'avis de cotisation, mais encore que cet avis n'a jamais été émis, c'est au ministre qu'il incombe de prouver l'existence de l'avis et la date de sa mise à la poste; lui seul est en possession de ces faits et lui seul peut en administrer la preuve.

[37]     Le paragraphe 152(4.1) est rédigé comme suit :

Lorsque le ministre aurait, sans le présent paragraphe, le droit d'établir une nouvelle cotisation, une cotisation supplémentaire ou une cotisation concernant l'impôt, les intérêts ou les pénalités en vertu seulement de la présentation d'une renonciation selon le sous-alinéa (4)a)(ii), le ministre ne peut établir une telle nouvelle cotisation [...] plus de six mois suivant la date de présentation, selon le formulaire prescrit, de l'avis de révocation de la renonciation.

Les renonciations que l'appelante a présentées pour les années d'imposition 1995 et 1996 ont été révoquées par l'appelante dans les avis de révocation du 2 novembre 2001. La date de prescription dont il est question dans la disposition précitée est le 2 mai 2002.

[38]     Les passages pertinents du paragraphe 244(14) prévoient ce qui suit :

Pour l'application de la présente loi, la date de mise à la poste d'un avis [...] est présumée être la date apparaissant sur cet avis [...]

[39]     Les passages pertinents du paragraphe 244(15) prévoient ce qui suit :

Lorsqu'un avis de cotisation [...] a été envoyé par le ministre comme le prévoit la présente loi, la cotisation est réputée avoir été établie [...] à la date de mise à la poste de l'avis de cotisation [...]

[40]     Les passages pertinents du paragraphe 248(7) sont ainsi libellés :

Pour l'application de la présente loi [...] tout envoi en première classe ou l'équivalent [...] est réputé reçu par le destinataire le jour de sa mise à la poste [...]

[41]     Dans la décision Scott v. M.N.R., 60 DTC 1273 (Cour de l'Échiquier du Canada), l'avis de nouvelle cotisation, qui avait été mis à la poste le 28 mai 1957, tout en étant adressé à l'appelant, n'avait pas été envoyé à sa véritable adresse, et n'avait pas non plus été envoyé aux adresses figurant dans la déclaration de revenu de 1952. À la page 1281, le juge Thurlow a dit ce qui suit :

[TRADUCTION] [...] le législateur n'a jamais voulu qu'un tel avis puisse être effectivement donné au moyen de son « envoi par la poste » au contribuable à une mauvaise adresse ou à une adresse fictive et je ne trouve rien dans la loi qui donne à entendre que le législateur ait voulu que le contribuable soit lié par un avis de cotisation au moment de la mise à la poste d'un avis y afférent qui lui est adressé ailleurs qu'à sa véritable adresse ou à une adresse qu'il a d'une façon ou d'une autre autorisée ou adoptée comme adresse à cette fin.

[...] En l'espèce, l'avis de nouvelle cotisation qui a été mis à la poste le 28 mai 1957, tout en étant adressé à l'appelant, n'avait pas été envoyé à la véritable adresse de celui-ci et n'avait pas non plus été envoyé à l'une ou l'autre des adresses indiquées dans sa déclaration de revenu de 1952. [...] À mon avis, un tel envoi n'était pas valide au sens du paragraphe 46(2) de la Loi et il s'ensuit que la nouvelle cotisation n'a pas été établie dans le délai de quatre ans prévu au paragraphe 46(4).

Les avis de nouvelle cotisation étaient datés du 8 avril 2002. Le paragraphe 244(14) prévoit que la date de mise à la poste d'un avis de cotisation est présumée être la date apparaissant sur cet avis. Cette présomption a été clairement réfutée parce que, le 8 avril 2002, l'avis n'avait pas été envoyé par la poste à l'adresse de l'appelante et qu'il ne peut donc pas être considéré comme ayant été « mis à la poste » pour l'application de cette disposition. Par conséquent, les cotisations mentionnées dans lesdits avis n'ont pas été effectivement établies.

[42]     J'examinerai maintenant le paragraphe 244(15) précité. Je dispose de bon nombre d'éléments de preuve au sujet de la procédure suivie par Revenu Canada à l'égard des envois par la poste. Cette preuve donne à entendre que les avis de nouvelle cotisation, qui ont été envoyés une seconde fois par la poste à l'appelante, l'ont été le 29 ou le 30 avril 2002. Cette preuve est fondée sur des conjectures au sujet de la mise à la poste, aucune des quatre personnes qui ont témoigné n'ayant pu dire qu'elle avait de fait assisté au traitement de ces documents. Mme Ellis a déclaré qu'elle n'était pas au courant de l'existence d'un système traitant le courrier retourné périmable[2]. Elle a déclaré qu'il n'y avait aucun document ou aucune pièce écrite interne disant que, lorsqu'une adresse change, les documents retournés doivent immédiatement être mis dans une enveloppe et envoyés.

[43]     Selon la preuve, les déclarations d'intérêt et les nouvelles cotisations pour un certain nombre d'années, y compris les années d'imposition 1995 et 1996, portaient un timbre-dateur indiquant qu'elles avaient été reçues à la salle du courrier de Revenu Canada, par l'entremise de la Société canadienne des postes, le 22 avril 2002. Une semaine plus tard, le 29 avril 2002, l'adresse de l'appelante inscrite dans le système des numéros d'entreprises de Revenu Canada a été remplacée par l'adresse suivante :

                                     800 - 200, rue Burrard

                                     Vancouver (C.-B.)

                                     V6B 5A5.

[44]     L'avocate de l'intimée a cherché à invoquer l'omission de l'appelante de citer M. Houssian comme témoin. L'avocate a également mentionné le fait que M. Houssian n'avait pas produit l'enveloppe renfermant les documents lors du second envoi par la poste. Toutefois, l'intimée a eu la possibilité d'interroger M. Houssian pendant l'interrogatoire préalable et elle l'a fait. Les portions de cet interrogatoire qui ont été versées en preuve ne faisaient pas mention de pareille enveloppe. L'intimée aurait pu citer M. Houssian comme témoin si, en se préparant avant l'instruction, elle avait jugé bon de le faire. Le témoignage fourni par M. Houssian dans les portions de son interrogatoire préalable qui ont été versées au dossier permettait à mon avis de conclure, selon la prépondérance des probabilités, que les avis de nouvelle cotisation qui avaient de nouveau été envoyés par la poste ont été reçus par l'appelante le 17 mai 2002 seulement.

[45]     Dans la décision Schafer v. The Queen [1998] G.S.T.C. 60, la Cour examinait une demande que l'appelante avait présentée en vue d'obtenir une ordonnance prorogeant le délai dans lequel un avis d'opposition à une cotisation établie en application de la Loi sur la taxe d'accise ( « la LTA » ) pouvait être déposé. À la page 60-5, la Cour a dit ce qui suit :

Dans une grande organisation comme un ministère, un cabinet d'avocats ou d'experts-comptables ou une société, où le courrier envoyé chaque jour est volumineux, il est pratiquement impossible de trouver un témoin pouvant jurer qu'il a déposé au bureau de poste une enveloppe adressée à telle ou telle personne. Le mieux qu'on puisse faire est de décrire en détail les étapes suivies, par exemple le fait d'adresser les enveloppes, d'y insérer des documents, d'apporter les enveloppes à la salle du courrier et de livrer le courrier au bureau de poste.

Après avoir décrit les éléments de preuve se rapportant à la procédure suivie par Revenu Canada en ce qui concerne la préparation et l'envoi par la poste des avis de cotisation, la Cour a ajouté ce qui suit :

Je suis convaincu, selon la prépondérance des probabilités, que l'avis de cotisation a vraisemblablement été placé dans le sac de Postes Canada le 2 septembre 1993. Je dis cela sans disposer d'aucune preuve précise à cet égard. Toutefois, si la marche normale a été suivie, l'hypothèse selon laquelle l'avis a été envoyé semble plus probable que l'hypothèse contraire.

La Cour a conclu que l'avis de cotisation n'avait pas été reçu par l'appelante. Elle a ensuite dit que, selon le paragraphe 334(1) de la LTA, concernant la taxe sur les produits et services, l'avis est réputé avoir été reçu le jour où il a été envoyé et elle a ajouté ce qui suit :

[...] La présomption de réception énoncée au paragraphe [334(1)] n'est pas concluante, et cette présomption a été réfutée.

Cette disposition, qui est assez semblable au paragraphe 248(7), est rédigée comme suit :

Pour l'application de la présente partie, tout envoi en première classe ou l'équivalent est réputé reçu par le destinataire à la date de sa mise à la poste.

La Cour a ensuite conclu, selon la prépondérance des probabilités, que l'appelante, ayant découvert qu'un avis de cotisation avait été délivré environ trois ans avant la date de l'interrogatoire préalable concernant cinq autres avis de cotisation, n'avait pas reçu cet avis. Elle a conclu que l'appelante n'avait pas besoin d'une ordonnance prorogeant le délai dans lequel un avis d'opposition pouvait être déposé, parce qu'elle avait déposé une opposition valide dans le délai prévu par la Loi.

[46]     Dans les motifs de jugement qu'elle a prononcés en appel, 2000 DTC 6542, la Cour d'appel fédérale a cité, à la page 6546, le paragraphe 301(1.1) de la LTA qui est rédigé comme suit :

La personne qui fait opposition à la cotisation établie à son égard peut, dans les 90 jours suivant le jour où l'avis de cotisation lui est envoyé, présenter au ministre un avis d'opposition, en la forme et selon les modalités déterminées par celui-ci, exposant les motifs de son opposition et tous les faits pertinents.

La Cour d'appel fédérale a dit ce qui suit :

En conséquence, la seule exigence applicable est que le ministre doit établir que l'avis a été envoyé. Il n'existe pas d'exigence selon laquelle l'avis doit avoir été reçu afin que le délai commence à courir. Le libellé du paragraphe 301(1.1) est clair et non ambigu et on doit l'appliquer indépendamment de son objet. [...] La Cour de l'impôt estime que ce paragraphe crée une présomption réfutable en ce qui concerne la date de réception de l'avis. [...] La question revient donc à savoir si la conclusion selon laquelle le paragraphe 334(1) contient une disposition déterminative réfutable qui irait à l'encontre de la LTA est fondée. [...] Avec égards, je suis d'avis que le paragraphe 334(1) ne crée pas une présomption réfutable [...] Je suis d'accord qu'il serait extrêmement difficile d'administrer un régime, dans lequel l'avis est envoyé au contribuable par courrier ordinaire de première classe, qui obligerait le ministre à communiquer avec chaque personne à qui un avis de cotisation a été envoyé afin de s'assurer que chacun a bel et bien reçu l'avis [...]

Aucun paragraphe correspondant ne décrit comment le ministre ou le contribuable peut établir que ce dernier a reçu l'avis de cotisation. Avec égards, je suis d'avis que le fait que la LTA ne contienne pas de disposition décrivant la méthode permettant d'établir la réception ou l'absence de réception d'un avis de cotisation constitue une preuve forte qui démontre la nature péremptoire de la disposition déterminative.

[Non souligné dans l'original.]

[47]     Dans l'arrêt Kovacevic v. R. [2003] G.S.T.C. 112-1, à la page 112-5, la Cour d'appel fédérale a fait les remarques suivantes :

Je conviens que lorsque la loi exige qu'un document soit envoyé par courrier ordinaire par une grande organisation comme un ministère, mais qu'elle n'exige pas que ce soit fait par courrier recommandé ou certifié ou qu'il y ait une preuve d'un moyen d'envoi plus formel, la remarque du juge Bowman [de la Cour canadienne de l'impôt] dans la décision Schafer est raisonnable. En général, il suffit donc d'énoncer dans un affidavit, souscrit par la dernière personne en autorité qui a traité le document avant qu'il soit soumis à la procédure normale d'envoi du bureau, la description de cette procédure.

[48]     Lorsque les avis de cotisation ont une seconde fois été envoyés à l'appelante par la poste, ils ont été envoyés à la mauvaise adresse fournie à Revenu Canada par l'appelante. Il s'agissait de l'adresse pour les livres et registres, qui était identique à l'adresse du siège social, sauf que le code postal de l'adresse pour les livres et registres n'était pas la bonne. Selon les témoignages des représentants de Revenu Canada, les trois adresses étaient affichées à l'écran et, de toute évidence, la mauvaise adresse avait été choisie. Même si l'appelante avait fourni cette adresse à l'intimée, Revenu Canada, en décidant de choisir l'adresse pour les livres et registres avec le mauvais code postal, a encore une fois fait preuve d'insouciance. Une mauvaise adresse, inscrite dans le système par Revenu Canada, ayant été utilisée lors du premier envoi, il aurait fallu prendre plus de temps et faire preuve de plus de soins pour s'assurer que la bonne adresse était utilisée la seconde fois. Deux adresses municipales identiques avec des codes postaux différents auraient dû attirer l'attention de Revenu Canada et auraient dû entraîner le choix de la bonne adresse.

[49]     Avec égards, compte tenu des circonstances de l'espèce, je ne me fonde pas sur les remarques précitées que la Cour a faites dans la décision Schafer ou sur celles que la Cour d'appel fédérale a faites dans l'arrêt Kovacevic.

[50]     Dans l'arrêt Schafer, la Cour d'appel fédérale a dit que le libellé du paragraphe 301(1.1) de la LTA était « clair et non ambigu » . En l'espèce, puisque la première fois les avis de cotisation ont été envoyés par la poste à la mauvaise adresse et que, la deuxième fois, ils ont été envoyés par la poste à une adresse que Revenu Canada aurait pu vérifier, je ne puis décider, malgré la preuve procédurale fournie par les représentants de Revenu Canada au sujet du fait que les avis de cotisation avaient probablement été de nouveau mis à la poste le 29 ou le 30 avril 2002, que tel était le cas, et ce, même selon la prépondérance des probabilités. Comme on peut s'y attendre, il n'y avait pas de preuve au sujet du trajet suivi par ces avis de nouvelle cotisation, datés du 8 avril 2002, entre le moment où ils ont été retournés à Revenu Canada le 22 avril 2002 et le moment où ils sont arrivés au bureau de l'appelante le 17 mai 2002, comme je l'ai conclu. Selon le libellé du paragraphe 244(15), lorsqu'un avis de cotisation a été envoyé par le ministre, comme le prévoit la Loi :

[...] la cotisation est réputée avoir été établie [...] à la date de mise à la poste de l'avis de cotisation [...]

[Non souligné dans l'original.]

Comme la Cour d'appel fédérale l'a dit, le sens des mots « à la date de mise à la poste » est « clair et non ambigu » .

[51]     L'intimée a fourni une preuve au sujet des étapes suivies aux fins de la mise à la poste, mais elle n'a fourni aucune preuve de la date de mise à la poste des avis de nouvelle cotisation. L'intimée n'a pas établi que les avis de nouvelle cotisation avaient été envoyés à l'appelante par la poste avant le 3 mai 2002. Par conséquent, l'intimée ne s'est pas acquittée de l'obligation qui lui incombait de convaincre la Cour qu'elle devrait conclure que le ministre du Revenu national a validement établi de nouvelles cotisations pour les années d'imposition 1995 et 1996 de l'appelante avant le 3 mai 2002.

[52]     L'appelante aura droit aux dépens.

Signé à Ottawa, Canada, ce 8e jour de décembre 2005.

« R. D. Bell »

Juge Bell

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de novembre 2006.

Mario Lagacé, jurilinguiste


RÉFÉRENCE :                                   2005CCI770

No DU DOSSIER DE LA COUR :       2004-1548(IT)G

INTITULÉ :                                        236130 British Columbia Ltd.

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Vancouver (Colombie-Britannique)

DATE DE L'AUDIENCE :                  Le 27 juillet 2005

MOTIFS DU JUGEMENT :                L'honorable juge R. D. Bell

DATE DU JUGEMENT :                    Le 8 décembre 2005

COMPARUTIONS :

Avocat de l'appelante :

Me Warren J. A. Mitchell, c.r.

Avocates de l'intimée :

Me Deborah Horowitz et

Me Wendy Burnham

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

       Pour l'appelante :

                   Nom :                              Warren J. A. Mitchell, c.r.

                   Cabinet :                          Thorsteinssons s.r.l.

                                                          Vancouver (C.-B.)

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1]               Le T7WC est un formulaire expliquant les modifications effectuées dans la nouvelle cotisation.

[2]               Ce qui veut dire, dans ce cas-ci, avec une date de prescription.

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