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Dossier : 2005-4300(GST)I

ENTRE :

SAMUEL C. YOUNG PROFESSIONAL CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 17 août 2006 à Edmonton (Alberta)

 

Devant : L’honorable juge M.A. Mogan

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Samuel C. Young

Avocat de l’intimée :

Me George F. Body

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie en vertu de la Loi sur la taxe d’accise pour la période de déclaration se terminant le 31 décembre 2002, dont l’avis est daté du 28 janvier 2005, est rejeté.

 

Signé à Ottawa (Canada) ce 2e jour de février 2007.

 

 

« M.A. Mogan »

Juge suppléant Mogan

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de février 2008.

                                      

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

 

 

Référence : 2007CCI69

Date : 20070203

Dossier : 2005-4300(GST)I

ENTRE :

SAMUEL C. YOUNG PROFESSIONAL CORPORATION,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Mogan

 

[1]     Le 25 octobre 2002, l’appelante a acheté un bien-fonds situé dans la ville d’Edmonton portant la description officielle : plan 9823737, îlot 78, lot 20, et dont l’adresse municipale est le 738, allée Hetu, Edmonton. Par souci de commodité, le bien-fonds sera ci-après désigné par le terme « bien-fonds en cause ». La transaction a été faite sans lien de dépendance, et le prix d’achat était de 136 500 $. Le 2 janvier 2003, l’appelante a transféré le bien-fonds en cause à un acheteur avec lequel elle avait un lien de dépendance. Dans le présent appel, la question principale est de savoir si l’appelante est responsable du paiement d’un montant de 9 555 $ de  taxe sur les produits et services (la « TPS ») à l’égard de l’achat et du transfert du bien-fonds en cause.

 

[2]     Seul Samuel C. Young a témoigné au nom de l’appelante. M. Young est un comptable agréé. Il est autorisé à fournir des services d’expertise comptable dans la province d’Alberta. Il est l’unique actionnaire, administrateur et mandataire de la société appelante. Winnie Yiu-Yeung (ci-après « Winnie ») est son épouse. L’appelante est une société professionnelle qui offre des services d’expertise comptable. En octobre 2002, la société était un inscrit aux fins de la TPS. Le bien‑fonds en cause a été transféré à Winnie le 2 janvier 2003. Winnie n’était pas un inscrit aux fins de TPS pendant la période pertinente. Le bien-fonds en cause était nu, sans aucun immeuble ou structure, au moment de son achat par l’appelante et à celui de son transfert à Winnie.

 

[3]     Seize documents ont été déposés en preuve à titre de pièces. Je présente ci‑après une liste de ces documents ainsi qu’une brève description de ce qu’ils sont ou semblent être :

 

Pièce A-1       Un document daté du 1er octobre 2002 et adressé [TRADUCTION] « à qui de droit », dans lequel Winnie nomme l’appelante fiduciaire pour l’achat du bien-fonds en cause.

 

Pièce A-2       Un relevé de compte chez Capital City Savings visant la période débutant le 18 octobre et se terminant le 10 novembre 2002. Le relevé montre qu’un chèque de 136 900 $ a été tiré sur le compte de Winnie le 28 octobre, ce qui a fait augmenter le solde négatif du même montant.

 

Pièce A-3       Des pages choisies tirées d’un répertoire professionnel et des pages jaunes edmontoniens. Elles indiquent que Nadia Koziak et Alann Nazarevich exerçaient la profession d’avocat.

 

Pièce R-1       Un contrat d’achat S.I.A. signé par M. Young au nom de l’appelante le 17 octobre 2002, où on offre 136 500 $ pour l’achat du bien-fonds en cause. Nadia Koziak et Alan Nazarevich sont les vendeurs qui ont accepté l’offre d’achat le 18 octobre 2002.

 

Pièce R-2       Un formulaire de [traduction] « transfert de bien-fonds » signé par les deux vendeurs, par lequel ils transfèrent le bien‑fonds en cause à l’appelante et où ils reconnaissent avoir reçu le prix d’achat.

 

Pièce R-3       Une déclaration sous serment faite par M. Young, le 28 octobre 2003, où il affirme être le mandataire de l’appelante, destinataire du transfert.

 

Pièce R-4       Un [traduction] « certificat de remboursement de TPS » signé le 28 octobre 2002. L’appelante y atteste être inscrite aux fins de la TPS, y accepte de verser tout montant de TPS relatif à l’achat du bien-fonds en cause et s’y engage à rembourser aux vendeurs tout montant de TPS qui serait payable à l’égard de cet achat.

 

Pièce R-5       Un état de rajustement révélant que le prix d’achat était de 136 500 $.

 

Pièce R-6       Un document délivré par le North Alberta Land Registration District montrant que le transfert du bien-fonds en cause à l’appelante a été enregistré le 1er novembre 2002.

 

Pièce R-7       Une déclaration de fiducie datée du 1er novembre 2002, dans laquelle M. Young, au nom de l’appelante, déclare que cette dernière a acquis le bien-fonds en cause en fiducie pour Winnie.

 

Pièce R-8       Un accord de vente, daté du 2 janvier 2003, par lequel l’appelante vend le bien-fonds en cause à Winnie, qui accepte de payer la somme de 136 500 $ au moyen d’un billet portant intérêt.

 

Pièce R-9       Un billet, signé par Winnie et daté du 2 janvier 2003, pour un montant de 136 500 $ payable à l’appelante et assorti d’un taux d’intérêt annuel de 3 %, commençant à courir le 3 janvier 2003.

 

Pièce R-10     Un acte de transfert établi en vertu de la Land Titles Act de l’Alberta  et faisant état du transfert du bien-fonds en cause de l’appelante à Winnie en contrepartie de la somme de 136 500 $. Dans la déclaration sous serment jointe au document, qui porte sur la valeur du bien-fonds, Winnie jure que la valeur du bien-fonds en cause est de 136 500 $ et qu’elle a donné une contrepartie véritable, le billet à demande d’une valeur de 136 500 $.

 

Pièce R-11     Une lettre écrite par l’avocat de l’appelante, datée du 7 janvier 2003, qui porte sur le transfert du bien-fonds en cause à Winnie.

 

Pièce R-12     Une lettre datée du 9 décembre 2004 envoyée à l’appelante par l’Agence du revenu du Canada.

 

Pièce R-13     Une lettre datée du 31 décembre 2004 envoyée à l’Agence du revenu du Canada par l’appelante.

 

[4]     Selon le témoignage de M. Young, Winnie a conclu un contrat de construction en mars 2003 afin de faire construire une maison sur le bien-fonds en cause. La maison a été achevée en décembre de la même année. Le 19 décembre 2003, M. Young, Winnie et leur famille ont emménagé dans la nouvelle maison. En 2004, Winnie a présenté une demande de remboursement de la TPS en vertu de la législation sur la TPS pour les coûts de construction de la nouvelle maison. Après avoir échangé quelques lettres avec l’Agence du revenu du Canada (voir les pièces R-12 et R-13), l’appelante a fait l’objet d’une cotisation selon laquelle elle devait payer la TPS nette d’un montant de 9 555 $ pour l’achat et le transfert du bien-fonds en cause. Le présent appel résulte de cette cotisation.

 

[5]     La position de l’Agence du revenu Canada est résumée à l’alinéa 23bb) de la réponse à l’avis d’appel :

 

[traduction]

 

L’appelante était tenue de déclarer un montant de taxe nette de 9 555 $ en ce qui concerne l’achat du bien-fonds et le transfert ultérieur de sa propriété bénéficiaire à Winnie. Ce montant est ainsi calculé :

 

Autocotisation de la taxe relative à l’achat du bien-fonds                          9 555,00 $

Taxe percevable quant au transfert du bien-fonds à la fiducie

au bénéfice et à l’usage de Winnie                                                           9 555,00 $

Droit aux crédits de taxe sur les intrants pour le transfert

à la fiducie                                                                                            -9 555,00 $

Taxe nette                                                                                              9 555,00 $

 

[6]   En vertu de l’alinéa 221(2)b) de la législation sur la TPS, les vendeurs du bien-fonds en cause n’étaient pas tenus de percevoir la TPS à l’égard de la vente de celui-ci à l’appelante le 25 octobre 2002 (Pièce R-2).

 

221(2)  Le fournisseur, sauf un fournisseur visé par règlement, qui effectue la fourniture taxable d’un immeuble par vente n’est pas tenu de percevoir la taxe payable par l’acquéreur en vertu de la section II si, selon le cas :

 

a)         […]

 

b)         l’acquéreur est inscrit aux termes de la sous-section d et, s’il est un particulier, l’immeuble n’est ni un immeuble d’habitation ni fourni à titre de concession dans un cimetière, de lieu d’inhumation, de sépulture ou de lieu de dépôt de dépouilles mortelles ou de cendres;

 

Le contrat d’achat (pièce R-1) contient une clause, au paragraphe 7.6, stipulant   [traduction] « [qu’]il est entendu que les acheteurs assument la responsabilité de la TPS quant au bien-fonds ». L’appelante n’a pas payé de TPS au moment de  l’achat du bien-fonds en cause parce qu’elle était un inscrit. L’article 268 de la législation sur la TPS traite de la disposition de biens visés par une fiducie non testamentaire :

 

268      Pour l’application de la présente partie, dans le cas où une personne dispose des biens visés par une fiducie non testamentaire :

 

a)         la personne est réputée avoir effectué, et la fiducie avoir reçu, une fourniture par vente des biens;

 

b)         la fourniture est réputée avoir été effectuée pour une contrepartie égale au produit de disposition des biens, déterminé en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[7]     Mon étude des pièces n’a rien révélé dans les documents signés par  l’appelante, en tant qu’acheteur, et Nadia Koziak et Alann Nazarevich, en tant que vendeurs, qui puisse étayer la prétention selon laquelle l’appelante a acheté le bien‑fonds en cause en tant que fiduciaire ou mandataire de Winnie. Je renvoie plus particulièrement aux pièces R-1, R-2, R-3, R-4 (le [traduction]  « certificat de remboursement de TPS »), R-5 et R-6. Le libellé des pièces en question amènerait les vendeurs et toute autre tierce partie à conclure que l’appelante a acheté l’intérêt en common law et l’intérêt bénéficiaire dans le bien-fonds pour son propre compte. Rien ne permet de croire que la déclaration de fiducie (pièce R-7) et la note  portant la mention [TRADUCTION] « à qui de droit » (pièce A-1) ont été vues par d’autres personnes que Winnie et son époux (en tant qu’unique actionnaire de la société appelante).

 

[8]     Au paragraphe 2.1 de son avis d’appel, l’appelante affirme avoir acheté le bien-fonds en cause en qualité de nue-fiduciaire pour Winnie, la propriétaire bénéficiaire. L’appelante soutient aussi, au paragraphe 2.2, que les vendeurs savaient qu’elle  achetait le bien-fonds en cause pour la propriétaire bénéficiaire, Winnie. Cette allégation a été niée par l’intimée, et lorsque celle-ci a appelé Nadia Koziak à témoigner, M. Young ne lui a pas demandé si elle savait que le bien‑fonds était acheté « en fiducie ».

 

[9]     L’appelante a déposé la pièce A-2 afin de prouver qu’un chèque de 136 900 $ a été tiré sur le compte de Winnie chez Capital City Savings le 28 octobre 2002. Le compte en fiducie de Bosco Yiu (l’avocat de l’appelante) indique que le même montant a été reçu de l’appelante quelque temps avant le 1er novembre 2002 (voir pièce R‑5, page 2). Si Winnie a fourni les fonds ayant servi à l’achat auprès des vendeurs le 28 octobre 2002 (voir pièce A-2), pourquoi a-t-elle dû acheter le bien-fonds en cause à l’appelante, au prix de 136 500 $, le 2 janvier 2003? Voir les pièces R-8, R-9 et R-10.

 

[10]    Dans son avis d’appel, l’appelante soutient qu’elle était une nue-fiduciaire. En droit, il n’y a guère de différence ente un nu-fiduciaire et un mandataire. À la lumière de l’ensemble des pièces (et particulièrement de la pièce A-2), je conclus que Winnie était l’acheteur de fait du bien-fonds en cause, qu’elle a acquis aux environs du 28 octobre 2002, et que l’appelante n’était que la mandataire de Winnie dans le cadre de l’achat. Puisque Winnie n’était pas un inscrit aux fins de l’application de la législation sur la TPS en octobre 2002, l’achat, par elle, du bien‑fonds auprès des vendeurs était assujetti à la TPS.

 

[11]    Le paragraphe 7.6 du contrat d’achat (pièce R-1) prévoit que l’acheteur assume la responsabilité du paiement de la TPS quant au bien-fonds. Dans la pièce R-4, la société appelante s’engage à rembourser aux vendeurs toute TPS qu’ils devront verser à la suite de la vente du bien-fonds en cause. En tant que mandataire, l’appelante a accordé ce remboursement au nom de sa mandante, Winnie.

 

[12]    Winnie, à titre de mandante, n’avait pas à acheter le bien-fonds en cause à l’appelante, sa mandataire. À mon avis, les pièces R-8, R-9 et R-10 sont superflues,  trompeuses, voir même mensongères. Je rejetterai l’appel et confirmerai la cotisation à l’égard de l’appelante pour un montant de TPS nette de 9 555 $ (7 % de 136 500 $).

 

Signé à Ottawa (Canada) ce 2e jour de février 2007.

 

 

« M.A. Mogan »

Juge suppléant Mogan

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour de février 2008.

                                      

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2007CCI69

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2005-4300(GST)I

 

INTITULÉ :

Samuel C. Youg Professional Corporation et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Edmonton (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 17 août 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge M.A. Mogan

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 3 février 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelante :

Samuel C. Young

Avocat de l’intimée :

Me George F. Body

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour l’appelante :

 

Nom :

s/o

 

Cabinet :

s/o

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 

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