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Dossier : 2005-3853(EI)

ENTRE :

TOM O'CONNOR,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

BRAVE NEW WINES LTD.,

intervenante.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 23 octobre 2006 à Calgary (Alberta)

 

Devant : L’honorable M. H. Porter, juge suppléant

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Douglas D. H. Holl

 

 

Avocate de l’intimé :

Me Lesley Akst

 

 

Avocate de l’intervenante :

Me Jennifer I. Smith

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel est rejeté, et la décision du ministre est confirmée selon les motifs du jugement ci‑joints.

 

       Signé à Calgary (Alberta), ce 22e jour de novembre 2006.

 

 

 

« M. H. Porter »

Juge suppléant Porter

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour de mai 2007.

 

 

 

Jean David Robert, traducteur


 

 

 

 

Référence : 2006CCI633

Date : 20061122

Dossier : 2005-3853(EI)

ENTRE :

TOM O'CONNOR,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

BRAVE NEW WINES LTD.,

intervenante.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Porter

 

[1]     En l’espèce, l’objet du litige est de savoir si l’appelant travaillait à titre d’employé ou d’entrepreneur indépendant pour le compte d’une entreprise consacrée à la vente de vin faisant affaire sous le nom de « Brave New Wines Ltd. » (ci‑après « BNW ») du 1er août 2003 au 28 août 2004.

 

[2]     Dans une lettre datée du 3 août 2005, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a fait connaître à l’appelant sa décision selon laquelle l’emploi qu’il occupait n’était pas assurable parce que l’appelant n’avait pas été engagé en vertu d’un contrat de louage de services et qu’il n’était donc pas un employé de BNW pendant la période en cause.

 

[3]     L’appelant a porté cette décision en appel devant la Cour, et BNW est intervenue dans l’appel pour appuyer la position du ministre.

 

Examen de la preuve

 

[4]     Les principaux éléments de preuve ont été produits par l’appelant, Tom O’Connor, ainsi que par Peter Whitney (ci‑après « M. Whitney »), l’ancien directeur général de BNW, et son épouse, Marnie Griffith. D’anciens registres et des documents se rapportant aux déclarations de revenus de l’appelant ont été déposés par un responsable de BNW et par un employé de l’Agence du revenu du Canada.

 

[5]     La preuve révèle que l’appelant et M. Whitney étaient d’anciens amis d’école qui se sont connus de nombreuses années avant les événements en cause. Ils avaient tous deux vécu en Ontario. L’appelant a déménagé à Banff et a commencé à travailler dans la restauration, et M. Whitney a déménagé en Australie, où il a étudié le commerce des vins. Vers l’année 2000, M. Whitney est retourné en Ontario avec sa femme et a constitué BNW en société dans cette province‑là. Il a enregistré son entreprise dans la plupart des autres provinces, y compris l’Alberta, de sorte qu’elle puisse y faire des affaires.

 

[6]     Les activités de BNW consistaient à effectuer et à organiser l’importation des vins d’Australie au Canada, puis à en faire la distribution auprès de divers points de vente, bars, restaurants, magasins d’alcools ou détaillants à grande surface, tels que Superstore. Le mode d’exploitation dépendait des règles propres à chaque province.

 

[7]     En Alberta, les règles ont été établies par la Alberta Gaming & Liquor Commission (la « AGLC »). Elles prévoient qu’il est possible d’importer des vins, mais ces derniers doivent passer par l’entrepôt de la AGLC. La AGLC reçoit les vins du fournisseur d’outre‑mer et les transfère au compte de BNW. BNW, par l’entremise de son représentant, voit à son tour à ce que les points de vente d’alcools achètent ces vins de la AGLC, et elle reçoit ses commissions pour avoir conclu les ventes.

 

[8]     En mai 2001, M. Whitney a retracé l’appelant à Banff et il a séjourné chez ce dernier. Il a expliqué à l’appelant la nature de son entreprise et a cherché à le faire participer, reconnaissant que ce dernier avait de nombreuses relations dans l’industrie, bien qu’il n’eût que peu ou pas de réelle expérience dans les ventes. L’appelant a présenté M. Whitney à un autre de ses amis, Marc Brooker (ci‑après « M. Brooker »), qui avait de l’expérience en ventes dans l’industrie de la bière.

 

[9]     Par suite de ces discussions, l’appelant et M. Brooker ont décidé de participer à l’entreprise. Bien qu’il travaillât comme serveur dans un hôtel de la région et qu’il continuât de le faire pendant quelque temps, l’appelant a commencé presque immédiatement à faire la promotion des vins de BNW auprès de bars, d’hôtels et de restaurants principalement dans le Sud‑Ouest de l’Alberta. M. Brooker avait d’autres obligations au départ, mais il s’est joint à l’entreprise en août 2001. Son rôle était principalement d’effectuer des ventes à des détaillants à grande surface, domaine dans lequel il avait déjà de l’expérience et des relations.

 

[10]    M. Whitney a offert de leur payer, au total, 12 % du prix CIF (coût, assurance et fret) de toutes les ventes générées chaque mois en Alberta consignées par la AGLC, qui tenait les registres.

 

[11]    L’appelant et M. Brooker devaient tous deux être titulaires d’une licence à titre de représentants autorisés de BNW en application des règlements de l’Alberta. Ils ont rempli cette exigence tout de suite avant de commencer à effectuer des ventes.

 

[12]    L’entente conclue par M. Whitney pour le compte de BNW et par l’appelant et M. Brooker n’a pas été consignée par écrit. En fait, elle était assez vague et ressemblait davantage à une ébauche. J’ai l’impression que BNW était une entreprise très néophyte à ce moment‑là, qui a crû de façon exponentielle au fil des années et qui est devenue plus difficile à gérer compte tenu du nombre d’intervenants en cause.

 

[13]    L’appelant et M. Brooker ont créé leur propre compte bancaire à la Alberta Treasury Branch (la « ATB »), à Banff. Ils ont signé un formulaire de contrat de société fourni par la banque et ils se sont attribué la raison sociale BNW West. Le chèque mensuel représentant la commission de 12 % était envoyé par BNW à l’appelant et déposé dans ce compte.

 

[14]    Ils se partageaient ensuite la commission en parts égales peu importe le revenu réellement gagné par chacun d’eux chaque mois. Elle était divisée en parts égales quelle qu’elle fût. Si l’appelant n’effectuait aucune vente et que M. Brooker en faisait, ou vice versa, ils se la partageaient quand même en parts égales.

 

[15]    Les témoins ont passé un certain temps lors du procès à tenter d’établir qui avait eu l’idée de créer le compte bancaire de la manière décrite ci‑dessus. M. Whitney les a sans aucun doute encouragés à conclure une entente bancaire, puis leur a laissé le soin de choisir la manière de procéder et le mode de répartition du montant du chèque représentant la commission.

 

[16]    Après que M. Whitney est retourné en Ontario, son épouse, qui gérait le bureau de BNW là‑bas, a envoyé à l’appelant divers objets, tels que des cartes professionnelles et du matériel promotionnel.

 

[17]    Dans son témoignage, M. Whitney a décrit les différences qu’il percevait entre le « marketing » et la « vente » des produits. Le marketing était effectué en grande partie en collaboration avec les fournisseurs d’outre‑mer, et un thème cohérent était retenu et utilisé dans le matériel de marketing. Donc, tout matériel de marketing fourni à l’appelant devait correspondre à ce thème. Pour ce qui est des ventes, cependant, il en était autrement, et M. Whitney a dit que l’appelant et M. Brooker étaient libres de s’occuper des ventes à leur guise. Le matériel de marketing qu’ils pouvaient utiliser devait être le même, mais la façon dont ils effectuaient leurs ventes, soit le choix du moment, du lieu, des clients et de la fréquence des ventes leur revenait exclusivement.

 

[18]    Au cours des années, diverses suggestions transmises par courrier électronique encourageaient l’appelant et M. Brooker à se concentrer davantage sur certains vins ou certaines régions. M. Whitney leur donnait aussi l’occasion de participer à des salons professionnels en payant pour eux, et il consignait les dépenses en question sous la rubrique « marketing ». Il s’agissait souvent, selon le témoignage de M. Whitney, d’occasions qu’il encourageait l’appelant et M. Brooker à saisir, et ils étaient libres de le faire ou non, à leur guise. J’ai tendance à croire M. Whitney à cet égard parce que, au cours des premières années d’exploitation de l’entreprise, il n’avait manifestement pas le temps de faire de la microgestion des ventes.

 

[19]    Des réunions hebdomadaires étaient organisées pour coordonner les activités et faire le point sur l’état de l’entreprise et ce qui s’y passait. M. Whitney a dit qu’elles n’étaient pas obligatoires, mais qu’elles étaient organisées en raison de leur utilité. Encore une fois, je le crois compte tenu du fait que, lorsque l’appelant ne voulait plus continuer de participer à ces téléconférences hebdomadaires, elles ont été abandonnées.

 

[20]    L’appelant a demandé à M. Whitney s’il paierait pour un véhicule puisque le travail exigeait des déplacements fréquents. M. Whitney lui a fait très clairement savoir qu’il n’était pas prêt à le faire. Il s’agissait, selon son témoignage, de dépenses de vendeurs, et l’appelant était tenu de payer ses propres dépenses à l’égard des ventes. Toutes les dépenses se rapportant notamment au marketing, au papier et à l’encre étaient remboursées à l’appelant par M. Whitney. Ce dernier a aussi fourni à l’appelant un ordinateur portatif et une imprimante qui était conçue pour imprimer tout le matériel de marketing, et le coût de ces objets a été supporté par BNW.

 

[21]    L’appelant a donc payé toutes les dépenses afférentes à sa voiture, à son téléphone cellulaire, à son espace d’entreposage, à son hébergement et à ses déplacements.

 

[22]    Il est clair que, en application des règlements de l’Alberta, ni l’appelant ni M. Brooker ne pouvaient vendre d’autres alcools et qu’ils devaient se limiter aux marques commercialisées par BNW, à moins d’obtenir une licence de la part de la AGLC. Aucun des deux n’a cherché à obtenir une licence, mais, lorsque M. Brooker a commencé à se livrer à de telles activités et que M. Whitney a pris connaissance de ce fait en juillet 2004, M. Brooker a été licencié.

 

[23]    Je ne suis pas certain si M. Whitney était préoccupé par l’infraction aux règlements et la possibilité que celle‑ci ternisse la réputation de BNW ou s’il ne voulait tout simplement pas que l’un des deux hommes vende des produits différents. Il a invoqué la première raison, mais j’avais le sentiment très vif que la deuxième explication était le motif principal.

 

[24]    Quoi qu’il en soit, à ce moment‑là, les relations existant entre BNW, d’un côté, et l’appelant et M. Brooker, de l’autre, avaient de toute évidence commencé à s’effriter. BNW avait engagé, peu de temps auparavant, un directeur commercial national qui n’était pas au courant des discussions initiales qui avaient eu lieu entre M. Whitney, l’appelant et M. Brooker. Le nouveau directeur voulait manifestement resserrer la surveillance et le contrôle exercé sur les hommes. M. Whitney l’a reconnu dans son témoignage, disant qu’ils voulaient renforcer leur contrôle sur les activités de l’appelant, et que, en juillet 2004, ils lui ont offert un contrat de travail. Selon cette offre, l’appelant aurait été payé qu’il effectuât des ventes ou non, mais il a refusé l’offre, et la relation s’est rompue. Des modalités semblables ont été offertes à une autre personne, qui a accepté le poste à titre d’employé.

 

[25]    Je ne sais pas exactement pourquoi M. Whitney pensait qu’il pouvait modifier unilatéralement le contrat conclu avec l’appelant, faisant passer la commission de 12 % à 6 % lorsque M. Brooker a été licencié. Tout ce que M. Whitney pouvait faire, c’est congédier M. Brooker, ce qui ne veut pas dire qu’il pouvait unilatéralement modifier le contrat conclu avec l’appelant. D’autres ont été ou seront sans doute appelés à trancher cette question. Ce geste a cependant mis fin à la relation en cause. C’est regrettable puisque ces hommes étaient de bons amis, et, maintenant, à en juger par leur comportement, je vois qu’il n’y a guère de sympathie entre eux.

 

La loi

 

Le degré ou l’absence de contrôle exercé par BNW

 

[26]    Le contrat conclu par l’appelant et M. Brooker prévoyait qu’ils devaient organiser la vente de vins en Alberta. Alors que M. Brooker se concentrait sur les magasins à grande surface, l’appelant devait utiliser ses relations dans l’industrie de l’hôtellerie, des bars et de la restauration, particulièrement dans la région de Banff. Cependant, il me semble que l’appelant pouvait travailler où bon lui semblait en Alberta, et qu’occasionnellement il pouvait participer à des salons en Colombie‑Britannique lorsqu’il y était invité.

 

[27]    L’appelant établissait son propre horaire et il travaillait autant ou aussi peu qu’il le souhaitait. Il n’y avait pas d’heures ou de jours de travail précisés. Il pouvait aller là où il voulait quand il le souhaitait.

 

[28]    L’appelant était tenu d’utiliser le matériel de marketing (publicité) qui lui était fourni par BNW. Cependant, ce matériel provenait à son tour des fournisseurs d’outre‑mer, et il ne s’agit pas, à mon avis, d’une mesure de contrôle imposée par BNW, pas plus que ne l’est le fait qu’un sous‑traitant sur un chantier de construction est obligé de suivre les modalités, les conditions et les restrictions imposées à l’entrepreneur général par un propriétaire ou un lotisseur.

 

[29]    Le vin et le matériel de marketing étaient imposés à l’appelant. La façon dont l’appelant effectuait ses ventes ne regardait manifestement que lui. De temps à autre, il lui était suggéré par téléphone de déplacer certains stocks ou de se concentrer sur certaines régions, mais il était libre de donner suite à ces suggestions ou non.

 

[30]    La participation aux téléconférences était facultative, et, en effet, l’appelant lui‑même les a fait cesser.

 

[31]     Dans l’ensemble, je conclus que l’appelant a disposé d’une grande latitude, et cet aspect du critère appuie la conclusion selon laquelle il était un entrepreneur indépendant.

 

La propriété des instruments de travail

 

[32]    Mis à part l’ordinateur et l’imprimante fournis pour permettre l’impression du matériel de marketing conçu en Ontario, l’appelant fournissait ses propres outils.

 

[33]    Le principal instrument consistait en une nouvelle voiture, et BNW a dit très clairement dès le départ qu’elle ne financerait pas cette acquisition parce qu’il s’agissait de dépenses de vendeurs. Par conséquent, l’appelant l’a fournie lui‑même et a assumé toutes les dépenses d’utilisation de la voiture.

 

[34]    De plus, l’appelant a payé son propre téléphone cellulaire et a fourni un bureau et une pièce d’entreposage dans sa maison, assumant les dépenses connexes.

 

[35]    Cet aspect du critère appuie lui aussi la conclusion selon laquelle l’appelant était entrepreneur indépendant.

 

Les chances de bénéfice et les risques de perte

 

[36]    Manifestement, plus l’appelant et M. Brooker vendaient de vin, plus ils recevaient de commissions, et l’inverse était aussi vrai.

 

[37]    L’appelant avait certaines dépenses de base, par exemple ses paiements pour la voiture, les coûts du téléphone cellulaire et les frais de déplacement et d’hébergement. Par conséquent, s’il ne recevait aucune commission pendant un mois, il subirait une perte.

 

[38]    Je ne suis pas sûr s’il pouvait vendre d’autres produits puisque la question n’a pas été abordée en l’espèce. Il aurait été obligé d’obtenir une licence de la AGLC. Je pense que M. Whitney n’aurait pas voulu qu’il le fasse et qu’il aurait peut‑être résilié son contrat.

 

[39]    Cependant, il était libre de faire autre chose et, au début, il a travaillé comme serveur jusqu’au moment où les ventes ont pris suffisamment d’importance pour qu’il puisse démissionner de son poste. Il lui était de toute évidence possible d’arrondir son revenu d’une autre façon, à condition de ne pas faire concurrence aux produits de BNW. Le fait qu’il a choisi de ne pas le faire ne permet pas de tirer une conclusion dans un sens ou dans l’autre.

 

[40]    Bien que l’appelant ne pût engager personne pour réaliser les ventes sans avoir veillé à ce que la personne retenue obtienne une licence de la AGLC, il était libre d’embaucher des personnes pour accomplir d’autres tâches. En fait, c’est ce qu’il a fait en engageant des assistants à divers salons auxquels il a participé.

 

[41]    Il n’y avait clairement aucune garantie que, dans une semaine ou un jour donné, des ventes seraient réalisées, et il n’avait pas droit à des avantages sociaux de la part de BNW.

 

[42]    Manifestement, l’appelant a produit ses déclarations de revenus à titre de travailleur autonome et il a déduit des dépenses considérables, déductions dont il n’aurait pas nécessairement pu se prévaloir à titre d’employé. Il a saisi l’occasion de bénéficier de cet avantage fiscal à titre d’entrepreneur indépendant, non en tant qu’employé.

 

[43]    À mon avis, ces critères indiquent que l’appelant était un entrepreneur indépendant.

 

Le critère de l’intégration

 

[44]    En me fondant sur l’arrêt 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983, la question semble être la suivante : est‑ce que l’appelant fournissait ses services à titre de personne travaillant à son compte?

 

[45]    D’abord, j’ai remarqué que, quand Marnie Griffith a demandé à l’appelant de lui fournir son numéro d’assurance sociale lorsque son époux est revenu de sa visite initiale à Banff, l’appelant lui a demandé pourquoi elle en avait besoin. Lorsqu’elle lui a répondu qu’elle en aurait peut‑être besoin aux fins d’impôt, il l’a aussitôt informée qu’il payait tous ses impôts lui‑même et qu’il ne devrait y avoir aucune déduction.

 

[46]    En fait, c’est ce qui s’est produit. Il semble qu’il ait produit ses déclarations de revenus à titre de personne travaillant à son compte et qu’il ait déduit des montants importants de dépenses (26 000 $ à 27 000 $ par année). Il s’agissait sans doute de dépenses parfaitement légitimes pour une personne travaillant à son compte, mais elles ne l’auraient pas nécessairement été pour un employé. C’est donc ainsi qu’il payait ses impôts. Il n’a jamais dit à BNW qu’il était un employé et qu’il avait besoin d’un feuillet T4. Manifestement, il a choisi l’autre voie.

 

[47]    J’ai aussi constaté que la demande introductive d’instance présentée par M. Brooker dans le cadre de l’action qu’il a intentée contre BNW après son licenciement énonçait ce qui suit :

 

Lors de la troisième semaine de mars 2001

[traduction] « M. Brooker et son associé, Tom O’Connor, ont été embauchés par Brave New Wines pour développer les activités commerciales de celle‑ci en Alberta. »

 

          et :

[traduction] « Pendant toute la période pertinente, M. Brooker et M. O’Connor faisaient affaire sous la raison sociale de Brave New Wines West. »

 

[48]    Bien que la demande présentée par l’appelant dans le cadre de l’action contre BNW énonçât qu’il était un employé, il y avait manifestement une divergence d’opinion qui avait surgi après le fait, c’est‑à‑dire après le licenciement, au sujet de la nature de leur relation.

 

[49]    J’ai constaté qu’à la banque les deux hommes ont constitué leur entreprise en société de personnes faisant affaire sous le nom de Brave New Wines West.

 

[50]    J’ai aussi remarqué qu’ils s’étaient entendus sur la façon de se partager leur chèque de commission mensuel. En fait, ils ont convenu de se le partager en parts égales indépendamment des efforts de chacun d’eux. Ils étaient bien sûr libres de modifier cette entente en tout temps et de procéder de toute autre façon qui leur convenait. Évidemment, en règle générale, les employés ne se partagent pas leurs chèques de paie, mais sont rémunérés en fonction de leurs propres travail et effort.

 

[51]    Tous ces aspects de l’affaire m’ont conduit à la conclusion claire et indubitable selon laquelle ces deux hommes travaillaient à leur compte.

 

[52]    BNW exploitait une entreprise consistant à importer en Alberta des vins de viticulteurs d’outre‑mer, et à faire le marketing général (publicité) des produits importés, qu’elle ne pouvait pas vendre elle‑même dans la province d’Alberta.

 

[53]    L’appelant et M. Brooker exploitaient une entreprise consistant à vendre les produits ou à les distribuer par l’entremise de la AGLC, et ils assumaient leurs propres dépenses, gagnaient leurs commissions et réalisaient leur propre profit.

 

[54]    Toutes les activités de l’appelant et de M. Brooker donnaient à penser qu’il s’agissait d’une entreprise commerciale.

 

Conclusion

 

[55]    Je suis totalement convaincu, compte tenu de la preuve portée à ma connaissance, que, pour les motifs présentés ci‑dessus, l’appelant exerçait son emploi à titre d’entrepreneur indépendant et qu’il travaillait à son compte.

 

[56]    L’appel est donc rejeté, et la décision du ministre est confirmée.

 

       Signé à Calgary (Alberta), ce 22e jour de novembre 2006.

 

 

 

« M. H. Porter »

Juge suppléant Porter

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 9e jour de mai 2007.

 

 

 

Jean David Robert, traducteur


RÉFÉRENCE :                                  2006CCI633

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2005-3853(EI)

 

INTITULÉ :                                       Tom O'connor et le M.R.N. et Brave New Wines Ltd.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Calgary (Alberta)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 23 octobre 2006

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable M. H. Porter, juge suppléant

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 22 novembre 2006

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat de l’appelant :

Me Douglas D. H. Holl

 

 

Avocate de l’intimé :

Me Lesley Akst

 

 

Avocate de l’intervenante :

Me Jennifer I. Smith

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                             Nom :                   

 

                            Cabinet :

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

       Pour l’intervenante :

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