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Dossier : 2004-3784(IT)I

ENTRE :

ANDRÉ LETARTE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

Appel entendu le 15 février 2005, à Sherbrooke (Québec)

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

Comparutions :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :

Me Stéphanie Côté

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JUGEMENT

          L'appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu pour l'année d'imposition 2002 est rejeté, sans frais, selon les motifs du jugement ci-joints.

Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de juillet 2005.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


Référence : 2005CCI420

Date : 20050728

Dossier : 2004-3784(IT)I

ENTRE :

ANDRÉ LETARTE,

appelant,

et

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Tardif

[1]      La question en litige est de déterminer si, pour l'année d'imposition 2002, le fonds de revenu viager ( « FRV » ) détenu par l'appelant est un fonds enregistré de revenu de retraite ( « FERR » ) ou un autre type de « rente viagère prévue par un régime de retraite ou d'autres pensions, ou en provenant » non compris dans la définition de « revenu de pension » au paragraphe 118(7) de la Loi de l'impôt sur le revenu (la « Loi » ) donnant droit au crédit d'impôt pour pension prévu au paragraphe 118(3) de la Loi.

[2]      L'appelant se représentait lui-même au procès. Il conteste, par son appel, le refus du ministre du Revenu national (le « ministre » ) de lui accorder le crédit d'impôt pour pension en vertu du paragraphe 118(3) de la Loi.

[3]      Les faits sur lesquels le ministre s'est fondé pour établir et ratifier la nouvelle cotisation du 30 janvier 2004 sont décrits au paragraphe 7 de la réponse à l'avis d'appel, comme suit :

a)          l'appelant, pendant l'année d'imposition en litige, était âgé de cinquante-huit (58) ans;

b)          en produisant sa déclaration de revenus, à l'égard de l'année d'imposition en litige, l'appelant a déclaré une somme de 2 974 $, à titre de revenus de pension;

c)          le ministre, en vérifiant les feuillets annexés à la déclaration de revenus de l'appelant pour l'année d'imposition 2002, constata que le feuillet à l'appui de la somme de 2 974 $ indiquait un revenu provenant d'un fonds enregistré de revenu de retraite (FERR);

d)          étant donné l'âge de l'appelant, le ministre est d'avis que les sommes reçues en vertu d'un FERR ne constituent pas un revenu de pension admissible qui donnent droit au crédit pour pension.

[4]      L'appelant a bien résumé dans son avis d'appel du 8 août 2004 la nature de ses prétentions :

On m'a refusé la déduction de 1 000 $ pour revenu de retraite alléguant que ce revenu de retraite venait d'un régime enregistré d'épargne retraite, ce qui est faux. Ce montant venait d'un F.R.V.

La loi québécoise des régimes de retraite nous permet avant l'âge de 55 ans de transférer les montants de retraite chez un nouvel employeur ou dans un C.R.I. (compte de retraite immobilisé), ce que j'ai fait.

Maintenant, pour retirer une rente, la loi québécoise nous oblige à transférer ce C.R.I. dans un F.R.V. (fonds de revenu viager) ce que j'ai fait également. Cet argent provenant directement et uniquement de mon ex-employeur, il s'agit donc d'un revenu de retraite.

Étant donné que les fonctionnaires à Ottawa ont confondu le F.R.V. avec un F.E.E.R. puisque le F.R.V. était nouveau et qu'il semblait avoir les mêmes caractéristiques que le F.E.E.R., nous recevons un T4RIF comme si cet argent provenait des REER tandis qu'il s'agit bel et bien d'argent provenant directement de mon employeur.

Les amis avec qui j'ai travaillé de nombreuses années et qui ont choisi de laisser leur pension chez l'employeur reçoivent un T4A ce qui leur permet une déduction de 1 000 $ pour revenu de pension.

Je suis donc pénalisé parce que j'ai décidé d'exercer un droit tout à fait légal et que les fonctionnaires à Ottawa par paresse intellectuelle n'ont pas compris la différence qui existe entre un F.R.V. et un F.E.E.R. Les croyants similaires ils ont fait faire les T4 sur les mêmes formulaires (T4RIF).

Je vous demande donc de rectifier la situation en demandant que le T4 pour un revenu provenant d'un F.R.V. soit fait sur un T4A plutôt que sur un T4RIF ce qui me donnerait les mêmes avantages que si j'avais laissé le montant de ma pension chez mon employeur.

La preuve de ce que j'avance, dans la lettre du 17 juin 2004, on a confondu le montant reçu avec un régime enregistré épargne retraite.

Je vous envoie comme preuve la lettre reçue le 17 juin 2004 ainsi que le T4RIF qui parle d'un revenu provenant d'un fonds enregistré de revenu de retraite et le T4 reçu du gouvernement du Québec qui cite qu'il s'agit bien d'un revenu provenant d'un F.R.V.

[5]      À l'appui de ses prétentions, l'appelant a déposé différentes pièces, dont une photocopie de la confirmation du paiement (A-1), le relevé de portefeuille (A-2), le FRV au 31 janvier 2001 (A-3), une photocopie de l'état du revenu provenant d'un fonds enregistré de revenu de retraite T4 RIF (A-4), une lettre de l'Agence des douanes et du revenu du Canada ( « ADRC » ) en date du 17 juin 2004 (A-5), une photocopie des T4A de Gabriel Boisvert et Carol Demers (A-6) ainsi qu'un document concernant les options de retraite (A-7).

[6]     À la lecture de son avis d'appel et de la présentation soignée et articulée de l'appelant, il ressort qu'il a investi beaucoup d'énergie dans la préparation de son dossier.

[7]     Dans un premier temps, il m'apparaît utile de reproduire deux paragraphes de la décision dans l'affaire Saucier c. Canada, [2001] 3 C.T.C. 2115, [2000] A.C.I. no 346 (Q.L.) (C.C.I.) :

[12]       Pour avoir droit au crédit de pension prévu au paragraphe 118(3) de la Loi, un particulier doit avoir atteint l'âge de 65 ans avant la fin de l'année. S'il n'a pas 65 ans, il peut avoir droit au crédit de pension s'il touche un revenu de pension admissible. Le revenu de pension admissible est défini au paragraphe 118(7) de la Loi. Il s'agit soit du versement d'une rente viagère provenant d'un régime de retraite ou de pensions ou soit d'autres versements de rente reçus par le particulier par suite du décès de son conjoint.

[13]       Comme l'appelant n'avait pas atteint l'âge de 65 ans avant la fin de l'année 1998, comme le paiement de pension n'était pas à titre de versement d'une rente viagère, et comme les montants de pension n'avaient pas été reçus par suite du décès de son conjoint, c'est à bon droit que le Ministre a refusé le crédit d'impôt prévu au paragraphe 118(3) de la Loi.

[8]      La réception d'une pension d'un genre visé au sous-alinéa 118(7)a)(i) de la Loi (définition de « revenu de pension » ) permettrait à l'appelant de réclamer le crédit au paragraphe 118(3). Le sous-alinéa 118(7)a)(i) de la Loi se lit comme suit :

(7) Sous réserve du paragraphe (8), les définitions qui suivent s'appliquent au paragraphe (3).

« revenu de pension » S'agissant du revenu de pension qu'un particulier a reçu au cours d'une année d'imposition, le total des montants suivants :

a) les montants que le particulier inclut dans le calcul de son revenu pour l'année :

            (i) à titre de versement de rente viagère prévue par un régime de retraite ou d'autres pensions, ou en provenant,

[9]      Quant au paragraphe 118(3), il se lit comme suit :

(3)         Le montant déterminé selon la formule suivante est déductible dans le calcul de l'impôt payable par un particulier en vertu de la présente partie pour une année d'imposition :

A × B

où :

A représente le taux de base pour l'année;

B le moins élevé de 1 000 $ et du montant suivant :

a) si le particulier a atteint l'âge de 65 ans avant la fin de l'année, le revenu de pension qu'il a reçu au cours de l'année,

b) sinon, le revenu de pension admissible qu'il a reçu au cours de l'année.

[10]     En premier lieu, un FRV est-il un FERR visé au sous-alinéa 118(7)a)(ii)? En second lieu, faut-il conclure qu'un FERR visé au sous-alinéa a)(ii) ne peut également être visé au sous-alinéa a)(i)?

[11]     Le FRV n'a jamais été défini par la jurisprudence. Étant donné l'absence de définition, il devient utile de prendre en considération le droit de la province de Québec[1] et le sens ordinaire et grammatical de FRV,[2] et finalement toute autre source d'interprétation.

[12]     Au Québec, le Règlement sur les régimes complémentaires de retraite, R.Q. c. R-15.1, r. 1, prévoit ce qui suit à l'article 18 :

Le fonds de revenu viager est celui qui est établi en vertu d'un contrat intervenu entre un établissement financier dûment habilité à cette fin et un constituant qui est un ancien participant, un participant ou son conjoint, et aux termes duquel, en contrepartie du capital qu'il reçoit, l'établissement doit verser au constituant un revenu dont le montant peut varier annuellement. Ce contrat doit satisfaire aux exigences que requiert la Loi sur les impôts (L.R.Q., c. I-3) pour être un fonds enregistré de revenu de retraite.

[Je souligne.]

[13]     Parmi les dictionnaires consultés, seul le Grand dictionnaire terminologique de l'Office de la langue française du Québec offre une définition de FRV :

Fonds issu de la conversion d'un capital-retraite qui, dès sa constitution, doit servir au paiement de prestations de retraite payables, la vie durant, selon les modalités prévues par une convention écrite entre un établissement financier et le titulaire. Note : Le montant des prestations servies peut varier périodiquement en fonction du choix du titulaire.

[14]     Étant donné la difficulté de définir ce qu'est un FRV, il est, à toutes fins pratiques, impossible de conclure à l'existence d'un sens courant à donner à ce terme.

[15]     Le Québec a été la première province à prévoir ce type de fonds de revenu au Canada, d'où le fait qu'il ne faut pas s'étonner de la difficulté de trouver le sens courant à donner à ce terme.

[16]     La meilleure source d'informations au sujet des FRV, voire la seule, est sans doute les auteurs québécois.

[17]     Monsieur Gary Nachshen a apporté une intéressante contribution à cet égard au Congrès 92, Association de planification fiscale et financière, aux pages 365 et 366 :

Le fonds de retraite viager ( « FRV » ) représente une nouvelle variété de FERR qui répond non seulement aux exigences de la L.I.R. mais aussi aux exigences de la législation de certaines juridictions en matière de régimes complémentaires de retraite. Le Québec a été la première juridiction canadienne à introduire le FRV, avec l'adoption en août 1990 de l'article 19 du Règlement sous la Loi sur les régimes complémentaires de retraite.

En bref, le FRV constitue pour un participant à un régime complémentaire de retraite une alternative à l'achat immédiat avec ses crédits de rente d'une annuité au moment de la cessation d'emploi ou de la retraite. Le FRV offre à un tel participant l'opportunité de continuer à accumuler avec ses crédits de rente des fonds pour la retraite, au lieu de fixer tout de suite le niveau de son revenu de retraite, et ce pour la durée qu'il choisit jusqu'à ce qu'il atteigne l'âge de 80 ans. Autrement dit, le FRV offre plus de flexibilité aux anciens participants à un régime de retraite.

L'administrateur d'un régime complémentaire de retraite ne doit transférer l'actif de son régime à un FRV que si un contrat-type du FRV en question a été préalablement enregistré auprès de Revenu Canada, Impôt et la Régie des rentes du Québec [...]

Afin de permettre le roulement d'un actif d'un régime de retraite directement à un FRV sans imposition, il a été nécessaire de modifier l'article 147.3 L.I.R., qui ne mentionnait auparavant aucun roulement en franchise d'impôt d'un RPA à un FERR. Une telle modification à l'article 147.3 a été introduite en décembre 1991 [...]

[...] Cependant, il est désormais possible pour des anciens participants à un régime de retraite qui n'ont pas encore atteint l'âge de la retraite anticipée de transférer leurs crédits de rente du régime de retraite à un FRV. Puisqu'il n'existe aucun âge minimum pour le début du versement de prestations d'un FRV, lesdits participants pourront commencer à toucher immédiatement au moins une partie de l'actif représenté par leurs crédits de rente, même avant qu'ils n'aient atteint l'âge de la retraite anticipée.

[Je souligne.]

[18]     De son côté, madame Lucie Gaudreau, dans « Le passage d'employé à travailleur autonome : Incidences fiscales d'un congédiement » , Congrès 2000, tome 1, Association de planification fiscale et financière, écrit aux pages 10:41 et 10:42 :

Le CRI et le FRV ont été créés en août 1990 par le Règlement sur les régimes complémentaires de retraite [R.R.Q., c. R-15.1, r. 1] afin de recevoir les sommes accumulées dans un régime de retraite. Auparavant, le seul véhicule offert était le REÉR immobilisé. Ainsi, au moment de prendre sa retraite, le rentier n'avait d'autre choix que de convertir en rente viagère les sommes accumulées dans le REÉR immobilisé. Par contre, le titulaire d'un REÉR régulier avait deux possibilités au moment de la retraite, soit de transférer les fonds dans un fonds enregistré de revenu de retraite (ci-après « FERR » ), soit d'acheter une rente. L'introduction du CRI et du FRV a corrigé cette situation, permettant ainsi aux sommes d'argent provenant du régime de retraite (qui doit conserver la caractéristique d'immobilisation) d'être transférées dans un CRI et ensuite dans un FRV (dont le fonctionnement se rapproche de beaucoup à celui du FERR) ou directement dans un FRV.

Lorsqu'il a créé le CRI, l'objectif premier du gouvernement était de remplacer le REÉR immobilisé qui existait alors, et le FRV a été créé afin de conserver le caractère viager de la prestation. Auparavant, les employés qui désiraient toucher les sommes accumulées dans leur régime de retraite transféraient leurs droits acquis d'un régime de retraite à un REÉR immobilisé et, par la suite, transféraient ce REÉR immobilisé dans une autre institution financière. La notion d'immobilisation risquait de disparaître, puisqu'il manquait de rigueur à l'époque pour faire le suivi. Ce mécanisme n'est plus possible avec les règles actuelles.

Les règles régissant les CRI et les FRV s'apparentent à celles des REÉR et des FERR définies par la Loi de l'impôt sur le revenu. Les CRI et les FRV doivent d'ailleurs satisfaire aux exigences de cette Loi en plus de répondre aux normes fixées par les législations applicables aux régimes de retraite [...]

[19]     Il est donc raisonnable de conclure qu'un FRV est une forme de FERR régie par des règles similaires à celles régissant les FERR. Deux autres auteurs arrivent également à cette équation. Monsieur Marcel R. Théroux écrit dans « Rémunération lors de la retraite » ,[3] à la page 20 :

Le fonds de revenu viager ( « FRV » ) est un hybride. Il contient des éléments de la rente viagère et du fonds enregistré d'épargne-retraite ( « FERR » ). Un membre d'un régime de retraite peu[t] remplacer sa rente au titre du régime par une autre rente viagère, le FRV.

Le FRV doit être un FERR. Il est établi en vertu d'un contrat conforme à un contrat type préalablement enregistré auprès de la Régie des rentes.

[20]     Quant à l'auteur monsieur Marc Jolin, dans « Traitement fiscal des dons - Partie 2 : Formes de dons et leur traitement fiscal » ,[4] il écrit, aux pages 15 (note de bas de page 18) et 17 :

[...] Rappelons que sur le plan fiscal, le compte de retraite immobilisé (CRI) et le fonds de revenu viager (FRV) sont considérés comme des REÉR et des FERR respectivement même s'ils demeurent sujets aux législations visant les régimes de pensions, comme la L.R.C.R.

[...]

[...] les RÉER (comprenant les comptes de retraite immobilisés, le compte de retraite immobilisé (CRI)), les FERR (comprenant le fonds de revenu viager (FRV)) [...]

[21]     Finalement, monsieur Gary Nachschen écrivait ce qui suit :

Comme je l'ai signalé tantôt, le Québec a été la première juridiction à introduire le concept de FRV. Le Nouveau-Brunswick a suivi un peu plus tôt cette année, de même que le Manitoba. Il est à prévoir que toutes les provinces canadiennes, en plus du gouvernement fédéral, suivront l'exemple québécois au cours des prochaines années.[5]

[22]     Même s'il ressort assez clairement qu'un FRV est une forme de FERR, l'appelant n'a pas droit au crédit pour pension. Ajouter le FERR au sous-alinéa a)(i) irait à l'encontre des principes d'interprétation des lois étant donné qu'il a été, dans un premier temps, expressément exclu. Cette exclusion ne peut être occultée.

[23]     L'un de ces principes est bien résumé par un auteur souvent cité en la matière, P.-A. Côté, dans son ouvrage Interprétation des lois, 3e éd., 1999, Les Éditions Thémis, à la page 424 :

Les exemples de raisonnement a contrario sont très abondants en jurisprudence. Parfois, c'est l'adage expressio unius est exclusio alterius qui est invoqué. Par exemple, si une loi mentionne un élément d'un ensemble et pose à son sujet une règle donnée, on supposera que cette règle ne s'applique pas à l'égard des éléments non mentionnés : la loi qui permet qu'un groupe soit assigné en justice s'interprète comme n'autorisant pas le groupe à se porter demandeur; une disposition déclare certains articles d'une loi applicables : les autres ne le sont pas; [...]

[Je souligne.]

[24]     Qu'en est-il de l'argument de l'appelant qui affirme que puisque les fonds utilisés pour acquérir les FRV provenaient d'un « revenu de pension » , ce type de revenu ne devrait pas perdre son origine lorsqu'il prend la forme d'un FRV?

[25]     Cet argument ne saurait tenir étant donné les motifs du juge O'Connor dans l'affaire Whalen c. Canada, no 93-2748(IT)I, 2 juin 1994, [1994] A.C.I. no 397 (Q.L.) (C.C.I.), au paragraphe 5, qui se lit comme suit :

La loi précise bien que les paiements prévus par un FERR ne donnent pas aux bénéficiaires âgés de moins de 65 ans le droit de recevoir le crédit d'impôt pour pension de 1 000 $. Il est vrai que si les paiements avaient été transmis directement du régime de pension de la Camco, le crédit serait accordé. Bien qu'on puisse retracer l'origine des sommes en question grâce aux documents qui existent à cet effet, cela ne suffit pas à modifier l'application de la Loi. Les paiements prévus par un FERR sont différents des paiements faits directement en vertu d'une pension. L'appelant contrôle ses placements dans un FERR et le montant des paiements qui lui sont faits. L'appelant a probablement agi prudemment du point de vue fiscal en effectuant un transfert libre d'impôt de sa pension de compagnie dans son REER et en le transférant ensuite libre d'impôt dans un FERR. Ayant agi de la sorte, il ne peut toutefois prétendre maintenant que les paiements provenant du FERR doivent être considérés de la même manière que des paiements faits directement en vertu du régime de pension de sa compagnie.

[26]     Dans l'affaire Kennedy c. Canada, no 2000-2785(IT)I, [2001] A.C.I. no 486 (Q.L.) (C.C.I.), en date du 21 juin 2001, l'honorable juge Bowie de cette Cour écrivait ce qui suit :

4           L'appelante a choisi la seconde option, et ses fonds ont par la suite été transférés dans deux Fonds enregistrés de revenu de retraite (FERR) desquels elle a reçu des versements de rente totalisant 3 329 $ en 1998.

5           Cela me ramène aux définitions de « revenu de pension » et de « revenu de pension admissible » . Pour les besoins de l'espèce, il suffira de comprendre que le versement d'une rente viagère « prévue par un régime de retraite ou d'autres pensions » entre dans le cadre de la définition de « revenu de pension » ainsi que de celle de « revenu de pension admissible » . D'autres types de revenus de pension, dont « un paiement prévu par un fonds enregistré de revenu de retraite » , entrent dans le cadre de la définition de « revenu de pension admissible » uniquement s'ils ont été reçus par la suite du décès du conjoint du bénéficiaire.

6           À la fin de 1998, l'appelante n'avait pas atteint l'âge de 65 ans. Elle n'avait pas non plus reçu ses versements de rente à la suite du décès de son conjoint. En fait, elle n'était pas veuve. Le ministre a refusé de lui accorder les déductions relatives à la pension et l'appelante interjette appel à l'encontre de cette décision.

7           L'appelante a d'abord soutenu que les paiements provenant de son FERR étaient admissibles à titre de paiements « prévu[s] par un régime de retraite ou d'autres pensions » et qu'ils constituent donc un « revenu de pension admissible » parce que la source originale des sommes qui, en 1998, comprenaient les FERR découlait de son droit en vertu de la Caisse de retraite de la fonction publique. Cet argument ne peut tenir. Le libellé du sous-alinéa a)(i) de la définition de revenu de pension ne permet tout simplement pas l'interprétation selon laquelle les versements provenant d'un FERR financés à même les prestations d'un régime de retraite qui sont transférés d'abord dans un REER puis dans un FERR constituent des versements découlant du régime de retraite. Ce motif d'appel est rejeté.

[27]     Ce raisonnement a également été suivi dans l'affaire Debruin c. Canada, no 94-3232(IT)I, 15 janvier 1996, [1995] A.C.I. no 1729 (Q.L.) (C.C.I.), au paragraphe 10.

[28]     Pour toutes ces raisons, l'appel doit être rejeté.

Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de juillet 2005.

« Alain Tardif »

Juge Tardif


RÉFÉRENCE :                                   2005CCI420

N º DU DOSSIER DE LA COUR :       2004-3784(IT)I

INTITULÉ DE LA CAUSE :               ANDRÉ LETARTE ET LA REINE

LIEU DE L'AUDIENCE :                    Sherbrooke (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE :                  le 15 février 2005

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :        L'honorable juge Alain Tardif

DATE DU JUGEMENT :                    le 28 juillet 2005

COMPARUTIONS :

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocate de l'intimée :

Me Stéphanie Côté

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

      

       Pour l'intimée :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] La Cour d'appel fédérale affirme ce qui suit dans l'affaire Canada (Procureure générale) c. Banque nationale du Canada, 2004 CAF 92, au paragraphe 33, après avoir fait référence aux articles 8.1 et 8.2 de la Loi d'interprétation, L.R. 1985, ch. I-21, telle que modifié par L.C. 2001, ch. 4, art. 8. :

[...] pour que l'on puisse recourir au droit d'une province en matière de propriété et droit civil en vue d'assurer l'application d'un texte de loi fédéral dans cette province, à titre supplétif, il faut d'une part qu'il soit nécessaire de recourir à ce droit et d'autre part qu'aucune règle de droit fédéral ne s'y oppose.

[3] Colloque : Rémunération des cadres, Montréal, 19 février 1992, Association de planification fiscale et financière, septième onglet.

[4] Colloque : Les dons planifiés, Montréal et Québec, 20 et 21 septembre 2000, Association de planification fiscale et financière, troisième onglet.

[5] G. Nachshen, op.cit., p. 366.

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