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Dossiers : 2004-2419(EI)

2004-2420(EI)

ENTRE :

HALA KAYAL,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

____________________________________________________________________

Appels entendus le 25 février 2005, à Montréal (Québec)

 

Devant : L'honorable S.J. Savoie, juge suppléant

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Omar Nagi

 

Avocate de l’intimé :

Me Marie-Claude Landry

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels sont rejetés et les décisions rendues par le Ministre sont confirmées selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Grand-Barachois (Nouveau-Brunswick), ce 5e jour de mai 2005.

 

 

 

 

S.J. Savoie

Juge suppléant Savoie

 


 

 

 

 

Référence : 2005CCI273

Date : 20050505

Dossiers : 2004-2419(EI)

2004-2420(EI)

ENTRE :

HALA KAYAL,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Savoie

 

[1]     Ces appels ont été entendus à Montréal (Québec), le 25 février 2005.

 

[2]     Il s’agit de déterminer si l’appelante exerçait un emploi assurable lorsqu’au service de 2796686 Canada Inc. du 15 juillet 1999 au 15 juillet 2000 et lorsqu’au service de 3103-5215 Québec Inc. du 1er juillet 2002 au 22 février 2003.

 

[3]     Le 22 décembre 2003, le ministre du Revenu national (le « Ministre ») a informé l’appelant de sa décision selon laquelle elle n’exerçait pas un emploi assurable lorsqu’au service de 2796686 Canada Inc. du 15 juillet 1999 au 15 juillet 2000 et le 9 décembre 2003 le Ministre a informé l’appelante qu’elle n’exerçait pas non plus un emploi assurable lorsqu’au service de 3103-5215 Québec Inc. du 1er juillet 2002 au 22 février 2003.

 

[4]     En rendant sa décision dans le dossier 2004-2420(EI), le Ministre s’est appuyé sur les faits présumés suivants :

 

5.a)      La compagnie 2796686 Canada Inc. (ci-après la « Payeuse ») a été créée en 1992. (admis)

 

b)         L’entreprise de la Payeuse consistait en la vente au détail de vêtements sport pour hommes et femmes dans une boutique située au mail commercial appelé Place Versailles à Montréal. (admis)

 

c)         Les actionnaires de la Payeuse, à parts égales, étaient Omar Nagi et Akram Antonio Saleh. (admis)

 

d)         En 1994, M. Nagi et M. Saleh sont devenus actionnaires à parts égales, d’une seconde compagnie, soit 3103-5215 Québec Inc. avec laquelle ils ont ouvert une deuxième boutique, sur la rue Ste-Catherine ouest à Montréal. (admis)

 

e)         La boutique ouverte par 3103-5215 Québec Inc. faisait aussi la vente au détail de vêtements sport pour hommes et femmes. (admis)

 

f)          L’entreprise de la Payeuse employait environ 6 travailleurs, dont l’appelante. (nié)

 

g)         L’appelante est la conjointe de Omar Nagi et ce, depuis juillet 1996. (admis)

 

h)         L’appelante a commencé à travailler pour la Payeuse en 1997. (admis)

 

i)          Elle était payée par chèque pour 20 heures de travail par semaine. (environ)

 

j)          Elle était payée 500 $, par chèque, à chaque deux semaines. (admis)

 

k)         Les tâches de l’appelante consistaient à compiler les factures à la main dans les livres pour le comptable, vérifier les commandes lorsqu’elles arrivaient au magasin et vérifier les heures des autres travailleurs. Elle ne faisait pas de chèques ni de bordereaux de dépôt. (admis avec explication)

 

l)          L’appelante a donné naissance à trois enfants, soit en octobre 1998, août 2000 et mai 2003. (admis)

 

m)        En juillet 2000, l’appelante a cessé de travailler en prévision de son accouchement du mois suivant. (admis)

 

n)         Suite à la naissance de son enfant en août 2000, l’appelante est demeurée à la maison où elle effectuait un peu de comptabilité telle que la facturation et la tenue de livres. (admis)

 

o)         La Payeuse continuait de verser un salaire de 500 $ à l’appelante. (admis)

 

p)         La Payeuse n’exerçait aucun contrôle sur l’appelante. (nié)

 

q)         L’appelante déterminait elle-même son horaire de travail. (nié)

 

r)          L’appelante choisissait elle-même son lieu de travail;. (nié)

 

s)         Les fonctions de l’appelante n’étaient pas intégrées aux activités de la Payeuse. (nié)

 

t)          L’appelante effectuait peu de tâches pour la Payeuse et celles-ci ne justifiaient pas son salaire. (nié)

 

u)         La Payeuse a cessé ses opérations en juillet 2002 (admis).

 

v)         Suite à la fermeture de la Payeuse, l’appelante continuait de recevoir un salaire mais ce, par l’entremise de 3103-5215 Québec Inc. (admis)

 

AUTRES FAITS PERTINENTS

 

6.         Le sous-procureur général du Canada souligne les faits pertinents suivants :

 

a)         Durant sa période de maternité chômage, les fonctions de l’appelante étaient exécutées par d’autres personnes qui travaillaient pour la Payeuse. (nié)

 

[5]     Quant au dossier 2004-2419(EI), le Ministre s’est appuyé sur les faits présumés suivants :

 

5.a)      La compagnie 3103-5215 Québec Inc. (ci-après la « Payeuse ») a été créée en 1994. (admis)

 

b)         L’entreprise de la Payeuse consistait en la vente au détail de vêtements sport pour hommes et femmes dans une boutique située sur la rue Ste‑Catherine ouest à Montréal. (admis)

 

c)         Les actionnaires de la Payeuse, à parts égales, étaient Omar Nagi et Akram Antonio Saleh. (admis)

 

d)         M. Nagi et M. Saleh sont devenus actionnaires à parts égales, d’une autre compagnie, soit 2796686 Canada Inc. (admis)

 

e)         La compagnie 2796686 Canada Inc. opérait une boutique qui faisait aussi la vente au détail de vêtements sport pour hommes et femmes dans une boutique située dans le mail commercial Place Versailles à Montréal. (admis)

 

f)          L’appelante travaillait dans la boutique située dans la Place Versailles avant de travailler pour la Payeuse. (admis)

 

g)         L’entreprise de la Payeuse employait environ 6 travailleurs, dont l’appelante. (nié)

 

h)         L’appelante est la conjointe de Omar Nagi et ce, depuis juillet 1996. (admis).

 

i)          Elle était payée par chèque pour 20 heures de travail par semaine. (environ)

 

j)          L’appelante recevait un salaire de 500 $ par deux semaines jusqu’en décembre 2002. (admis)

 

k)         En janvier 2003, l’appelante a eu une augmentation de salaire, soit 600  $ par deux semaines. (admis)

 

l)          Les tâches de l’appelante consistaient à compiler les factures à la main dans les livres pour le comptable, vérifier les commandes lorsqu’elles arrivaient au magasin et vérifier les heures des autres travailleurs. Elle ne faisait pas de chèques ni de bordereaux de dépôt. (nié)

 

m)        La Payeuse n’exerçait aucun contrôle sur l’appelante. (nié)

 

n)         L’appelante déterminait elle-même son horaire de travail. (nié)

 

o)         L’appelante choisissait elle-même son lieu de travail. (nié)

 

p)         Les fonctions de l’appelante n’étaient pas intégrées aux activités de la Payeuse. (nié)

 

q)         L’appelante effectuait peu de tâches pour la Payeuse et celles-ci ne justifiaient pas son salaire. (nié)

 

 

AUTRES FAITS PERTINENTS

 

6.         Le sous-procureur général du Canada souligne les faits pertinents suivants :

 

a)         Avant le 1er juillet 2002, les tâches de l’appelante étaient exécutées par M. Harati. (nié)

 

b)         M. Harati effectuait son travail pour la Payeuse un jour par semaine. (admis)

 

c)         Il recevait la somme de 150 $ par semaine. (admis)

 

d)         Suite à l’embauche de l’appelante par la Payeuse, M. Harati continuait le même travail qu’auparavant et recevait la même rémunération. (nié)

 

 

[6]     La preuve a établi que les deux payeuses avaient de 8 à 11 employés, selon la période ou la saison, dont l’appelante, la majorité de ceux-ci étant des étudiants qui travaillaient à temps partiel. L’appelante travaillait soit au lieu du commerce ou à son domicile, à son choix. Selon les payeuses, c’est l’appelante qui décidait elle-même où et quand elle travaillait. Elle n’avait aucun horaire de travail. Ses tâches, elle les accomplissait quand elle voulait. Quand elle travaillait à la place d’affaires de la payeuse 2796686 Canada Inc., l’appelante n’occupait aucun bureau exclusif, elle partageait plutôt avec les autres celui qui était disponible.

 

[7]     L’appelante n’a pas comparu à l’audition. C’est M. Omar Nagi, son mari, qui a témoigné pour elle tout en étant son représentant à l’audition.

 

[8]     À l’audition, M. Nagi a d’abord nié les présomptions du Ministre portant sur le contrôle des payeuses sur l’appelante, l’horaire de cette dernière ainsi que son lieu de travail, ses fonctions dans les entreprises et le salaire de celle-ci qui ne pouvait être justifié compte tenu du peu de tâches qu’elle accomplissait. Cependant, dans son témoignage, il a reconnu que lorsque celle-ci travaillait pour le compte de 2796686 Canada Inc. elle n’avait pas à poinçonner, n’avait pas d’heures précises ou d’horaire fixe même si elle devait être présente à chaque jour pour accomplir des tâches spécifiques mais, ceci, selon sa disponibilité puisqu’elle pouvait entrer à l’heure qu’elle voulait. M. Nagi a été incapable d’expliquer les tâches de l’appelante ou de justifier le salaire qu’on lui payait. À la fermeture de l’entreprise 2796686 Canada Inc., en juillet 2002, l’appelante a continué de recevoir son salaire, mais celui-ci lui était payé par 3103‑5215 Québec Inc. Ceci a été admis par M. Nagi dans son témoignage mais il a nié cette affirmation dans sa déclaration statutaire. Quant au dossier 2004‑2419(EI), M. Nagi, à l’audition, a nié les présomptions du Ministre énoncées aux alinéas 6a) et d). Cependant, dans sa déclaration statutaire du 17 avril 2003, il a affirmé que M. Harati faisait le travail de l’appelante avant l’arrivée de celle‑ci dans l’entreprise. Il a précisé que ces tâches lui prenaient une journée par semaine, soit à peu près 10 heures. Il a ajouté qu’il était payé 150 $ par semaine. Quant à la présomption énoncée à l’alinéa 6d), M. Nagi l’a d’abord niée, puis il l’a admise pour ensuite ajouter qu’après l’arrivée de l’appelante dans l’entreprise, M. Harati a continué de faire le même travail, au même salaire, mais que l’appelante accomplissait d’autres tâches, lesquelles il a été incapable de décrire de façon crédible. Il convient de mettre en lumière d’autres contradictions flagrantes dans les déclarations de M. Nagi. Ce dernier a admis les présomptions du Ministre énoncées aux alinéas 5n) et o) au dossier 2004-2420(EI); celles-ci sont reproduites ci-dessous.

 

n)         Suite à la naissance de son enfant en août 2000, l’appelante est demeurée à la maison où elle effectuait un peu de comptabilité telle que la facturation et la tenue de livres.

 

o)         La Payeuse continuait de verser un salaire de 500 $ à l’appelante.

 

 

[9]   Il convient de comparer ces affirmations avec la déclaration statutaire de M. Nagi, dont voici un extrait :

 

Q.  A-t-elle rendu des services durant sa période de maternité chômage?

 

R.  Aucun

 

Q.  Qui l’a remplacé durant son absence?

 

R.  Les autres employés qui étaient déjà en place.

 

Q.  Durant son absence a-t-elle reçu des sommes d’argent?

 

R.  Non.

 

[10] L’entreprise 2796686 Canada Inc. a cessé ses opérations en juillet 2002. Cependant, l’appelante a continué à recevoir son salaire mais celui-ci lui était payé par l’autre entreprise de son mari, c’est-à-dire 3103-5215 Québec Inc. et, de plus, alors que l’appelante était toujours à la maison son salaire a été augmenté en janvier 2003.

 

[11] À partir de juillet 2002, l’entreprise n’a plus eu besoin des services de l’appelante; l’entreprise est fermée et M. Harati est là. En outre, il a été établi que les tâches de l’appelante étaient exécutées par d’autres employés avant son arrivée. La preuve a révélé que M. Harati accomplissait ces tâches en une journée par semaine et qu’il était rémunéré 150 $ pour ce travail.

 

[12] Il convient de reproduire un extrait de l’entretien de l’agent des appels, M. Jacques Rousseau avec le représentant des payeuses, M. Omar Nagi, et avec l’appelante. Je reproduis ci-dessous les faits retenus par l’agent des appels dans son rapport CPT 110 produit sous la cote I-4 :

 

19.  La travailleuse a cessé de travailler en juillet 2000 pour la naissance du deuxième enfant en août 2000. Après la naissance, elle a décidé de rester à la maison pour s’occuper des deux enfants. Elle faisait un peu de comptabilité soit facturation, bookkeeping.

 

20.  Elle a continué quand même à recevoir son salaire qui a augmenté à 300 $ par semaine soit 600 $ par deux semaines. [à partir de janvier 2003]

 

21.  Après la fermeture de la boutique de Place Versailles en juillet 2002, la travailleuse a continué à être payée par la boutique de la rue Ste-Catherine : 3103-5215 Québec Inc.

 

22.  M. Nagi me dit qu’elle travaillait 25 à 30 heures par semaine. Il se ravise en disant qu’elle travaillait moins d’heures que lorsqu’elle travaillait à la boutique. Il avoue qu’elle ne faisait plus que 10 % de ce qu’elle faisait auparavant.

 

23.  Je lui demande s’il aurait donné le même salaire à quelqu’un non lié avec lui, il me dit que non et qu’il sait qu’il faisait du favoritisme étant donné que c’était son épouse.

 

24.  Déclaration pour la travailleuse : Haval Hala

 

25.  Mme Hala me confirme les mêmes faits que son mari.

 

26.  De plus elle ajoute qu’après la naissance du deuxième enfant, elle allait à la boutique soit une fois par semaine ou par deux semaines.

 

[13] L’agent des appels, dans son rapport, produit à l’audition sous la cote I‑4, a affirmé dans son sommaire que :

 

Kayal Hala est l’épouse de Omar Nagi qui contrôle 50 % de la compagnie 2796686 Canada Inc. L’autre actionnaire Akram Antonio Saleh contrôle l’autre 50 % et n’a aucun lien de parenté avec M. Nagi et Mme Hala.

 

La travailleuse et le payeur ne sont pas liés au sens de l’article 251 de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[14] Cependant, cette Cour ne peut souscrire à une telle affirmation et doit conclure au contraire que l’appelante, dans les deux dossiers sous étude, est bel et bien liée aux deux payeuses.

 

[15] Pour les besoins de cette analyse, il est opportun de reproduire les textes législatifs pertinents à ce litige, soit des extraits de la Loi sur l’assurance‑emploi et de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[16] Le paragraphe 5(1) de la Loi sur l’assurance-emploi se lit en partie comme suit :

 

5.(1) Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

 

a)      l'emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d'un contrat de louage de services ou d'apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l'employé reçoive sa rémunération de l'employeur ou d'une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

 

[…]

 

[17]    Les paragraphes 5(2) et (3) de la Loi sont libellés en partie comme suit :

 

                        5.(2)     N'est pas un emploi assurable :

 

                         [...]

 

i)         l'emploi dans le cadre duquel l'employeur et l'employé ont entre eux un lien de dépendance.

 

(3)        Pour l'application de l'alinéa (2)i) :

 

a)        la question de savoir si des personnes ont entre elles un lien de dépendance est déterminée conformément à la Loi de l'impôt sur le revenu;

 

b)                  l'employeur et l'employé, lorsqu'ils sont des personnes liées au sens de cette loi, sont réputés ne pas avoir de lien de dépendance si le ministre du Revenu national est convaincu qu'il est raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d'emploi ainsi que la durée, la nature et l'importance du travail accompli, qu'ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s'ils n'avaient pas eu de lien de dépendance.

 

[18]    C’est à l’article 251 de la Loi de l'impôt sur le revenu que l’on retrouve la définition de « personnes liées » qui se lit en partie comme suit :

 

251.     Lien de dépendance.

 

                        (1)        Pour l'application de la présente loi :

 

                        a)         des personnes liées sont réputées avoir entre elles un lien de dépendance;

 

                        [...]

 

(2)        Définition de « personnes liées ». Pour l'application de la présente loi, sont des « personnes liées » ou des personnes liées entre elles :

 

a)                  des particuliers unis par les liens du sang, du mariage ou de l'adoption;

 

b)                  une société et :

 

(i)         une personne qui contrôle la société si cette dernière est contrôlée par une personne,

 

(ii)        une personne qui est membre d'un groupe lié qui contrôle la société,

 

(iii)       toute personne liée à une personne visée au sous-alinéa (i) ou (ii);

 

[17] L’appelante demande à cette Cour de renverser les décisions rendues par le Ministre.

 

[18] Les décisions du Ministre sont fondées sur l’assurabilité de l’emploi de l’appelante selon l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi tandis que cette Cour a déjà déterminé ci-haut que l’emploi de l’appelante était exclu des emplois assurables en vertu du paragraphe 5(2) de cette même Loi. Il incombe à cette Cour de déterminer si l’appelante et les payeuses doivent être réputées ne pas avoir de lien de dépendance selon les critères énoncés à l’alinéa 5(3)b) de la Loi sur l’assurance-emploi qui précise que pour en arriver à cette détermination, il faut être convaincu qu’il était raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli, que les parties auraient conclu entre elles un contrat de travail à peu près semblable s’il n’y avait pas eu de lien de dépendance. Il est difficile de concevoir que l’appelante aurait bénéficié de telles conditions de travail si aucun lien de dépendance ne l’avait liée aux payeuses. D’ailleurs, M. Nagi l’a affirmé à l’agent des appels lorsqu’il a déclaré qu’il n’aurait pas payé le même salaire à quelqu’un qui n’était pas lié avec lui en précisant qu’il savait qu’il faisait du favoritisme étant donné que l’appelante était son épouse.

 

[19] Il a été établi que l’appelante avait un horaire de travail flexible, qu’elle rentrait quand elle le voulait et qu’elle a continué à recevoir son plein salaire lorsqu’elle a cessé de travailler et est retournée à la maison pour un congé de maternité. La preuve a été faite, par ailleurs, que l’entreprise qui a embauché l’appelante a fermé ses portes et que cette dernière a continué à recevoir son salaire qui lui était versé par une autre compagnie dont son mari détenait 50 pout cent des actions. En outre, la preuve a été faite qu’avant son embauche chez les payeuses, le travail de l’appelante était exécuté par d’autres employés, dont M. Harati à qui il fallait 10 heures par semaine pour le faire. Pour exécuter ce travail, M. Harati était payé 150 $ par semaine et celui-ci a continué à accomplir ces tâches après l’arrivée de l’appelante, et ce, pour le même salaire. En outre, le salaire de l’appelante a été augmenté en janvier 2003 à 300 $ par semaine pour des tâches imprécises, selon un horaire qu’elle fixait elle-même, alors qu’elle allait et venait à sa guise et qu’elle était plus souvent à la maison qu’à l’entreprise.

 

[20] L’appelante avait le fardeau de prouver la fausseté des présomptions du Ministre. Elle ne l’a pas fait. Il faut souligner que la plupart des présomptions du Ministre ont été admises. Par ailleurs, les présomptions niées par l’appelante n’ont pas été réfutées. Le seul témoignage à l’audition, celui de M. Nagi, a contredit sa propre déclaration statutaire et l’information donnée par celui-ci à l’agent des appels.

 

[21] Dans ces circonstances, il faut rappeler que la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Elia c. Canada, [1998] A.C.F. No. 316 a statué que les présomptions du Ministre doivent être considérées comme avérées, pour autant que celles-ci n’ont pas été expressément réfutées par l’appelante.

 

[22] En conséquence, l’emploi de l’appelante auprès des payeuses est exclu des emplois assurables selon l’alinéa 5(2)i) de la Loi de l’assurance-emploi puisque, selon l’alinéa 5(3)b) de cette même Loi, l’appelante et les payeuses étaient liées entre elles et qu’il n’est pas raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, que les parties auraient conclu entre elles un contrat de travail semblable si elles n’avaient pas eu de lien de dépendance.

 

[23] Pour tous ces motifs, les appels sont rejetés et les décisions du Ministre sont confirmées quant à l’assurabilité de l’emploi de l’appelante. Il faut préciser que cette Cour en est arrivée à cette conclusion selon l’application du paragraphe 5(3) de la Loi sur l’assurance-emploi contrairement au Ministre qui a déterminé l’assurabilité de l’emploi de l’appelante en application de l’alinéa 5(1)a) de cette même Loi.

 

Signé à Grand-Barachois (Nouveau-Brunswick) ce 5e jour de mai 2005.

 

 

 

 

S.J. Savoie

Juge suppléant Savoie

 


RÉFÉRENCE :                                  2005CCI273

 

Nº DES DOSSIERs DE LA COUR :  2004-2419(EI) et 2004-2420(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Hala Kayal et M.R.N.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 le 25 février 2005

 

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :       L'honorable S.J. Savoie, juge suppléant

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 5 mai 2005

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante :

Omar Nagi (représentant)

 

Avocate de l’intimé :

Me Marie-Claude Landry

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                            

 

                   Étude :

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Ontario

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