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Dossier : 2006-2383(IT)I

ENTRE :

EZIO CAROSIELLI,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 30 janvier 2007 à Montréal (Québec)

 

Devant : L’honorable juge Réal Favreau

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

 

 

Avocat de l’intimé :

Me Marie-Claude Landry

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel de l’avis de nouvelle cotisation établie le 29 juin 2006 à l’égard de l’appelant relativement à l’année d’imposition 2000 est rejeté conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Signé à Montréal (Québec), ce 12e jour de juin 2007.

 

 

« R. Favreau »

Juge Favreau

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour d’octobre 2007

 

Suzanne Bolduc, LL.B.

 

 

 

Référence : 2007CCI246

Date : 20070612

Dossier : 2006-2383(IT)I

ENTRE :

EZIO CAROSIELLI,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Favreau

 

[1]     Il s’agit d’un appel interjeté sous le régime de la procédure informelle à l’encontre d’une nouvelle cotisation établie à l’égard de l’appelant pour l’année d’imposition 2000, par laquelle le ministre du Revenu national (le « ministre ») a inclus dans le calcul du revenu de l’appelant 9 334 $ à titre de revenu d’entreprise non déclaré. Des pénalités ont été imposées sur ce montant en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

[2]     L’appelant conteste tous ces points et fait également valoir que l’année visée par l’appel était frappée de prescription.

 

[3]     La nouvelle cotisation a été établie au terme d’une vérification de la société de personnes appelée Les Immeubles Carosielli SENC (« IMCA »), dont l’appelant et ses trois frères étaient des associés, chacun d’eux détenant une participation de 25 % dans la société de personnes. Le ministre a constaté l’existence d’un écart de 56 006 $ entre les montants déposés dans les comptes de IMCA et les montants déclarés ou comptabilisés par IMCA pour l’année 2000.

 

[4]     IMCA était propriétaire d’immeubles commerciaux et résidentiels, notamment de ceux qui étaient situés au 9030, 9040, 9050 et 9056, rue Maurice Duplessis, à Montréal.

 

[5]     Parmi les locataires du 9040, rue Maurice Duplessis, se trouvait une garderie, exploitée par Les Productions Merveilles Inc. et, parmi les locataires du 9056, rue Maurice Duplessis, se trouvait également une garderie, exploitée par 2439‑9503 Québec Inc., faisant affaire sous le nom de Garderie Merveilles du Royaume Inc. L’unique actionnaire des deux sociétés exploitant les garderies était Luisa Sassano, l’épouse de l’appelant. Cette dernière est toujours propriétaire des garderies en cause et continue de les exploiter, bien que leurs noms aient subi quelques modifications.

 

[6]     Au cours de l’année d’imposition 2000, mais avant le 1er septembre 2000, l’appelant et Luisa Sassano ont constitué une société en nom collectif appelée Les Immeubles Omnicentre RDP, SEC (« Omnicentre »), chacun d’eux détenant une participation de 50 %.

 

[7]     Le 1er septembre 2000, Omnicentre a acquis de IMCA les propriétés situées au 9030, 9040, 9050 et 9056, rue Maurice Duplessis. Les garderies sont demeurées des locataires au 9040 et au 9056, rue Maurice Duplessis. À la suite de l’acquisition des propriétés par Omnicentre, l’appelant a cessé d’être un associé dans IMCA.

 

[8]     Aux termes du bail commercial daté du 10 août 1998 et conclu entre IMCA et 2439-9503 Québec Inc., le locataire avait droit à un loyer gratuit pour une période de 10 mois, les mois en question devant être sélectionnés conjointement par les parties. Lorsque les propriétés ont été vendues par IMCA à Omnicentre le 1er septembre 2000, IMCA n’a accordé aucun loyer gratuit.

 

[9]     Dans un document daté du 1er septembre 2004 et intitulé Confirmation d’entente, IMCA a convenu, à titre de condition d’achat des propriétés par Omnicentre, de rembourser ou de créditer le loyer payé par les deux garderies du 1er avril au 30 septembre 2000, lequel s’élevait à 54 677,40 $ (9 112,90 $ par mois pendant six mois). La Confirmation d’entente stipule en termes clairs que ce loyer a en fait été crédité à Garderie Royaume des Merveilles Inc., que celle‑ci n’en a pas inclus le montant à titre de dépense pour l’année d’imposition qui s’est terminée le 31 mars 2001 et que IMCA n’en a pas inclus le montant non plus à titre de revenu en 2000.

 

[10]    La vérification effectuée par l’Agence des douanes et du revenu du Canada (l’« Agence ») a révélé que IMCA avait déposé les revenus locatifs reçus des garderies pour les mois d’avril à septembre 2000 dans son compte bancaire, le montant mensuel étant de 5 199,71 $ pour le 9040, rue Maurice Duplessis, et de 3 913,19 $ pour le 9056, rue Maurice Duplessis, ce qui représente au total 54 677 $ pour six mois. La part de l’appelant dans ces revenus non déclarés de IMCA a été établie à 9 334 $.

 

[11]    L’appelant a expliqué que IMCA ne disposait pas en 2000 des fonds nécessaires pour rembourser le loyer aux garderies, et que IMCA a traité le montant payable comme un emprunt de 50 000 $ ne portant pas intérêt auprès de Garderie Royaume des Merveilles Inc., ainsi qu’en fait foi la note 5 des états financiers non vérifiés de IMCA pour l’exercice financier se terminant le 31 décembre 2000.

 

[12]    Même si l’appelant a déclaré que l’emprunt obtenu auprès des garderies a été remboursé au complet, IMCA n’a fourni aucune preuve du remboursement du montant de 54 677 $ à l’égard du loyer payé par les garderies et n’a fourni aucune preuve permettant de conclure que ce montant a été crédité d’une autre manière.

 

[13]    Les deux garderies étaient la propriété de Luisa Sassano, qui les exploitait, elles étaient réglementées et subventionnées par le gouvernement du Québec et elles étaient tenues de produire des états financiers vérifiés pour chacun de leurs exercices financiers, qui se terminaient le 31 mars de chaque année. Ainsi qu’il est mentionné plus haut au paragraphe 9, les garderies n’ont pas déduit à titre de dépense le loyer s’élevant à 54 677,40 $ qui a été versé à IMCA. Les conséquences financières et fiscales de cette sous‑évaluation des dépenses par les garderies n’ont pas été divulguées ni abordées.

 

[14]    L’appelant fait valoir que le traitement fiscal du loyer versé par les garderies était neutre, puisque IMCA ne l’a pas inclus dans le calcul de son revenu et que les garderies ne l’ont pas déduit à titre de dépense. Pour cette raison, l’appelant estime qu’il n’a fait aucune présentation erronée des faits dans le calcul de son revenu et que des pénalités ne devraient pas lui être imposées pour faute lourde.

 

[15]    Malheureusement, je ne suis pas d’accord avec l’appelant. M. Carosielli est avocat et il s’est occupé de la gestion de IMCA de 1985 à 2000. Il savait donc combien il était important de tenir les livres et registres appropriés pour IMCA, ce qu’il n’a pas fait pour l’année d’imposition 2000. Le vérificateur de l’Agence a déclaré dans son témoignage que les revenus provenant des loyers de chacune des propriétés n’ont pas pu être déterminés clairement, comme ils ont pu l’être pour les années d’imposition 2001 et 2002.

 

[16]    L’appelant est un contribuable bien informé qui savait combien il était important de déclarer tous ses revenus et qui connaissait bien les incidences fiscales d’une telle déclaration.

 

[17]    Il incombe à l’appelant de démontrer, selon la prépondérance de la preuve, que le ministre a eu tort d’ajouter le montant de 9 334 $ à son revenu pour l’année d’imposition 2000, en vertu de l’article 9 de la Loi. L’appelant doit présenter une preuve suffisante pour démontrer que les montants déposés dans le compte bancaire de IMCA ne sont pas des revenus assujettis à l’impôt.

 

[18]    L’absence d’une telle preuve me convainc que la preuve produite est nettement insuffisante pour me permettre de conclure que l’appelant s’est acquitté du fardeau de preuve qui lui incombait. Sa décision de ne pas inclure le loyer versé par les garderies et de ne pas le déduire à titre de dépense d’entreprise dans le calcul du revenu de IMCA peut être logique du point de vue commercial ou financier, mais elle ne respecte pas rigoureusement les exigences de la Loi.

 

Pénalités

 

[19]    Le ministre a imposé des pénalités en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi et soutient qu’en omettant de déclarer le revenu supplémentaire dans le calcul du revenu de 9 334 $ pour l’année d’imposition 2000, l’appelant a sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde fait un énoncé faux ou une omission, ou y a participé, consenti ou acquiescé.

 

[20]    Dans l’affaire Venne v. The Queen, 84 DTC 6247, page 6256, le juge Strayer analyse la faute lourde dans les termes suivants :

 

... La « faute lourde » doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la Loi [...]

 

Et dans l’affaire Morin v. M.N.R., 88 DTC 1596, page 1597, le juge en chef Couture de la Cour canadienne de l’impôt a dit :

 

Pour échapper aux pénalités prévues aux dispositions du paragraphe 163(2) de la Loi, il est nécessaire, à mon avis, que l’attitude et le comportement général du contribuable soient tels qu’aucun doute quant à sa bonne foi et sa crédibilité ne puissent [sic] être sérieusement entretenus [sic] et cela pendant toute la période couverte par la cotisation [...]

 

[21] J’en suis arrivé à la conclusion que les explications fournies par l’appelant pour justifier sa décision de ne pas déclarer sa part du loyer versé par les garderies sont invraisemblables. Toute cette affaire révèle une attitude qui traduit une certaine indifférence relativement aux obligations fiscales de la part des parties en cause.

 

[22] La Confirmation de l’entente a été signée par les parties quatre ans après la vente des propriétés par IMCA à Omnicentre et après le début de la vérification fiscale par l’Agence.

 

[23] Dans la présente affaire, je suis convaincu que, selon la prépondérance de la preuve, le ministre a eu raison d’imposer des pénalités pour l’année en question.

 

Année prescrite

 

[24] Tout comme dans le cas des pénalités, il incombe au ministre d’établir que la cotisation pour l’année prescrite était justifiée. Le ministre doit convaincre la Cour, selon la prépondérance de la preuve, que l’appelant a fait une présentation erronée des faits par négligence, inattention ou omission volontaire, ou qu’il a commis une fraude en produisant sa déclaration ou en fournissant des renseignements, ainsi que le prévoit le sous‑alinéa 152(4)a)(i) de la Loi.

 

[25] Dans un autre extrait tiré de l’affaire Venne, précitée, le juge Strayer décrit ce fardeau de preuve de la façon suivante à la page 6251 :

 

Je suis convaincu qu’il suffit au Ministre, pour invoquer son pouvoir en vertu de l’alinéa 152(4)a)(i) de la Loi, de démontrer la négligence du contribuable, à l’égard d’un ou plusieurs éléments de sa déclaration de revenus au titre d’une année donnée. Cette négligence est établie s’il est démontré que le contribuable n’a pas fait preuve de diligence raisonnable. C’est sûrement là le sens des termes « présentation erronée des faits, par négligence », en particulier avec d’autres motifs comme l’inattention ou l’omission volontaire qui font référence à un degré de négligence plus élevé ou à une mauvaise conduite délibérée. Sauf si ces termes étaient superflus dans cet article, hypothèse que je ne puis accepter, le terme « négligence » impose un critère moins strict de faute, semblable à celui qui est utilisé dans les autres domaines du droit, comme la responsabilité délictuelle.

 

[26] J’ai déjà traité de la preuve et de la conduite de l’appelant. Comme j’ai conclu que ses explications étaient invraisemblables, j’en conclus qu’il y a donc eu présentation erronée des faits quant au revenu de l’appelant pendant l’année prescrite, ce qui justifie la cotisation établie pour l’année d’imposition 2000.

 

 

 

[27] Pour ces motifs, l’appel est rejeté.

 

 

Signé à Montréal (Québec), ce 12e jour de juin 2007.

 

 

 

« R. Favreau »

Juge Favreau

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 4e jour d’octobre 2007.

 

Suzanne Bolduc, LL.B.

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI246

 

No DU DOSSIER :                             2006-2383(IT)I

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Ezio Carosielli c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 30 janvier 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L’honorable juge Réal Favreau

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 12 juin 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Marie-Claude Landry

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                     

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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