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Référence : 2007CCI350

Date : 20070625

Dossier : 2006-2479(IT)I    

ENTRE :

DEBBRA LOUBIER,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

(Révisés à l’aide de la transcription des motifs de jugement rendus oralement à l’audience le 30 mai 2007, à Toronto (Ontario))

 

Le juge Little

 

A.      LES FAITS

 

 

[1]     L’appelante travaillait à Revenu Canada, maintenant connu sous le nom d’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »).

 

[2]     L’appelante a commencé à travailler à Revenu Canada en 1981.

 

[3]     En 1984 et en 1990, l’Alliance de la fonction publique du Canada (l’« AFPC ») a déposé, devant la Commission canadienne des droits de la personne (la « Commission »), des plaintes relatives aux droits de la personne pour le compte de certains employés représentés par ses groupes professionnels à prédominance féminine. Environ 200 000 employés fédéraux étaient en cause dans cette demande.

 

[4]     Les plaignants maintiennent que le Conseil du Trésor (l’employeur de l’appelante et des autres employés) avait agi en violation de l’article 11 de la Loi canadienne sur les droits de la personne (la « LCDP »), en omettant d’assurer la parité salariale pour fonctions équivalentes (appelée ci‑après la « parité salariale »).

 

[5]     Le 29 juillet 1998, le Tribunal canadien des droits de la personne (le « tribunal ») a accueilli les plaintes et a conclu que le Conseil du Trésor avait agi en violation de l’article 11 de la LCDP. Le tribunal a ordonné au Conseil du Trésor d’accorder à l’appelante et aux autres fonctionnaires concernés la parité salariale, le salaire devant être rajusté rétroactivement au 8 mars 1985.

 

[6]     Dans son ordonnance, le tribunal ordonnait également que des intérêts soient versés sur le montant net des salaires directs pour chacune des années de la période de rétroactivité, et pour la période postérieure à la décision.

 

[7]     Le procureur général du Canada a interjeté appel de la décision devant la Section de première instance de la Cour fédérale.

 

[8]     Le 19 octobre 1999, la Section de première instance de la Cour fédérale a rejeté l’appel que le procureur général avait interjeté de l’ordonnance.

 

[9]     Le 29 octobre 1999, l’AFPC et le Conseil du Trésor ont conclu un protocole d’entente. Conformément au protocole d’entente, l’appelante a reçu un montant de 22 506,30 $ décrit comme représentant les intérêts, au cours de l’année d’imposition 2000.

 

[10]    Travaux publics et Services gouvernementaux Canada a délivré à l’appelante un feuillet T5 pour l’année d’imposition 2000, en indiquant le paiement de 22 506,30 $ au titre des intérêts.

 

[11]    En produisant sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 2000, l’appelante a inclus le montant de 22 506,30 $ dans son revenu. L’ARC a établi une cotisation à l’égard de l’appelante en acceptant telle quelle la déclaration que celle‑ci avait produite le 3 mai 2001.

 

[12]    Le 22 août 2001, l’appelante a déposé un avis d’opposition. Le 2 juin 2006, l’ARC a ratifié la cotisation.

 

B.      POINT LITIGIEUX

 

[13]    Dans son avis d’appel daté du 2 août 2006, l’appelante demandait si l’inclusion des intérêts d’un montant de 22 506,30 $ dans le calcul de son revenu avait été effectuée conformément à la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») au cours de l’année d’imposition 2000.

 

C.      ANALYSE ET DÉCISION

 

[14]    J’ai analysé tous les documents pertinents, et notamment l’exposé conjoint partiel des faits que les deux parties ont signé, et j’ai conclu que le paiement en question est décrit, est défini et est calculé comme représentant des intérêts dans la décision du tribunal du 29 juillet 1998. En outre, des intérêts étaient expressément prévus dans l’entente du 29 octobre 1999 entre l’AFPC et le Conseil du Trésor. Le montant payé ne représentait pas des dommages‑intérêts ou quelque autre type de paiement; il s’agissait purement d’intérêts.

 

[15]    L’alinéa 12(1)c) de la Loi est rédigé comme suit :

 

Sont à inclure dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d’une entreprise ou d’un bien, au cours d’une année d’imposition, celles des sommes suivantes qui sont applicables :

 

[...]

 

c)        sous réserve des paragraphes (3) et (5), les sommes reçues ou à recevoir par le contribuable au cours de l’année (selon la méthode qu’il suit normalement pour le calcul de son revenu) à titre ou en paiement intégral ou partiel d’intérêts dans la mesure où ces intérêts n’ont pas été inclus dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition antérieure;

 

[16]    Il importe de noter que l’exposé conjoint partiel des faits indique que les intérêts n’ont pas été inclus dans le revenu de l’appelante pour une année antérieure.

 

[17]    Je dois me demander ce que sont des intérêts pour l’application de l’alinéa 12(1)c) de la Loi. En l’espèce, la preuve indique que les intérêts ont été payés à l’appelante et aux autres plaignants à l’égard de la conservation par le gouvernement fédéral de sommes qui auraient dû être versées aux employés de sexe féminin entre le 8 mars 1985 et la date de la décision.

 

[18]    Je crois que la décision judiciaire qui est utile, lorsqu’il s’agit d’expliquer l’application de l’alinéa 12(1)c) de la Loi, est celle que la juge Reed a rendue dans l’affaire Miller v. The Queen, 85 DTC 5354. En ce qui concerne cette décision, je tiens à signaler un ou deux points. La juge Reed a dit ce qui suit :

 

[...] Les parties sont libres de régir leurs rapports au moyen d’accords rétroactifs :

 

[19]    C’est ce que les parties ont fait dans ce cas‑ci. Elles se sont entendues sur une entente rétroactive et elles ont convenu de prévoir des intérêts et non des intérêts composés, comme le demandait le représentant de l’AFPC; il s’agissait d’intérêts simples. En outre, la juge Reed a dit ce qui suit (page 5359) :

 

Selon moi, la somme de 62,51 $ constitue véritablement un paiement d’intérêt. Les parties ont convenu que leurs rapports seraient régis par un accord rétroactif, ce qui impliquait la détention de sommes d’argent dues à la demanderesse pour laquelle celle‑ci a finalement été dédommagée. Les parties et le conseil d’arbitrage ont considéré que le dédommagement versé constituait un intérêt. Il a été calculé sur une base cumulative et on a tenu compte soit du taux normal d’intérêt qui prévalait alors, soit des frais d’emprunt de l’employeur. Je ne vois pas pourquoi cette somme ne serait pas visée par le mot « intérêt » tel qu’il est utilisé au paragraphe 110.1 de la Loi de l’impôt sur le revenu.

 

[20]    Compte tenu de mon analyse des faits et de la décision rendue par la Cour fédérale dans l’affaire Miller précitée, j’ai conclu que le paiement d’intérêts au montant de 22 506,30 $ que l’appelante a reçu en l’an 2000 a été à juste titre inclus dans le revenu de l’appelante pour l’année d’imposition 2000 conformément à l’alinéa 12(1)c) de la Loi.

 


[21]    L’appel est rejeté sans qu’aucuns dépens soient adjugés.

 

 

 

Signé à Toronto (Ontario), ce 25e jour de juin 2007.

 

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 8e jour de février 2008.

 

Aleksandra Koziorowska, LL.B.

 

 


 

RÉFÉRENCE :                                             2007CCI350

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :                 2006-2479(IT)I

 

INTITULÉ :                                                  Debbra Loubier

                                                                    c.

                                                                    Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                             Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                            Le 30 mai 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :                          L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT ORAL :                   Le 30 mai 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle-même

 

Avocate de l’intimée :

Me Jade Boucher

 

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                                       

 

                   Cabinet :                                   

 

       Pour l’intimée :                                      John H. Sims, c.r.

                                                                    Sous-procureur général du Canada

                                                                    Ottawa, Canada

 

 

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