Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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Dossiers : 2005-1290(EI)

2005-1291(EI)

2005-1292(EI)

2005-1293(EI)

 

ENTRE :

2158-3331 QUÉBEC INC.

FAISANT AFFAIRE SOUS LA RAISON SOCIALE

LA MAISON DU PÊCHEUR,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

Appels entendus le 10 août 2006, à Percé (Québec).

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

Comparutions :

 

Représentant de l'appelante :

Georges Mamelonet

 

Avocate de l'intimé :

Me Anne Poirier

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

          Les appels interjetés en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance‑emploi sont accueillis et les décisions du ministre du Revenu national sont annulées, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de septembre 2006.

 

« Alain Tardif »

Juge Tardif

 


 

 

 

 

Dossier : 2005-1499(EI)

ENTRE :

NADINE BEAUDRY,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

____________________________________________________________________

Appel entendu le 10 août 2006, à Percé (Québec).

Devant : L'honorable juge Alain Tardif

 

Comparutions :

 

Représentant de l'appelante :

Georges Mamelonet

 

Avocate de l'intimé :

Me Anne Poirier

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

          L'appel interjeté en vertu du paragraphe 103(1) de la Loi sur l'assurance‑emploi est accueilli et la décision du ministre du Revenu national est annulée, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de septembre 2006.

 

 

« Alain Tardif »

Juge Tardif

 

 


 

 

 

 

Référence : 2006CCI489

Date : 20060912

Dossiers :    2005-1290(EI), 2005-1291(EI),

2005-1292(EI), 2005-1293(EI),

2005-1499(EI) 

 

ENTRE :

 

2158-3331 QUÉBEC INC.

FAISANT AFFAIRE SOUS LA RAISON SOCIALE

LA MAISON DU PÊCHEUR,

 

et

 

NADINE BEAUDRY,

appelantes,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Tardif

 

[1]     Il s'agit de cinq appels où les faits pertinents sont similaires au point où les parties ont consenti à ce que tous ces appels soient entendus sur preuve commune.

 

[2]     L'appelante Nadine Beaudry n'était pas présente. Cependant, monsieur Georges Mamelonet, actionnaire principal de la société, a déposé une procuration l'autorisant à comparaître en son nom.

 

[3]     D'entrée de jeu, monsieur Mamelonet a admis tous les faits allégués par l'intimé. Conséquemment, il ne contestait ni les faits indiqués dans les déclarations statutaires, ni le contenu des nombreux documents pris en compte lors de la vérification et de l'analyse à l'origine des déterminations qui font l'objet des appels.

 

[4]     Monsieur Mamelonet a donc indiqué que le fondement des contestations portait essentiellement sur l'interprétation des faits non contestés.

 

[5]     Même si tous les faits furent admis, les parties ont néanmoins fait entendre des témoins.

 

[6]     De son côté, la société appelante a fait témoigné monsieur Sylvio Asselin, chef‑cuisinier, depuis plusieurs années à son service. Ce dernier a expliqué qu'il aimait son emploi et était très fier de faire partie du personnel du restaurant faisant affaire sous la raison sociale « La Maison du Pêcheur ».

 

[7]     Il a déclaré avoir commencé à travailler au restaurant au bas de l'échelle et avoir gravi tous les échelons en participant à des stages de formation auprès d'écoles spécialisées.

 

[8]     Il a reconnu qu'en dehors des périodes de travail indiquées sur les relevés d'emploi, il lui arrivait de se rendre au restaurant pour vérifier les livraisons de produits commandés à partir de chez lui. Selon lui, il s'agissait là d'une tâche minimale représentant un nombre d'heures tout à fait marginal qu'il n'a pas été en mesure de chiffrer.

 

[9]     Il a affirmé qu'il visait ainsi à s'assurer de la bonne marche du restaurant. Il a aussi mentionné qu'il aimait se rendre sur les lieux de son travail, non pas pour y travailler, mais pour parler avec ses compagnons et compagnes de travail.

 

[10]    Les personnes concernées par les appels habitaient la petite communauté où était exploité le restaurant. Il s'agissait de personnes qui assumaient des responsabilités et participaient aux décisions relatives à la bonne marche de l'entreprise.

 

[11]    Le président de la société a expliqué qu'il s'agissait de personnes qui travaillaient depuis de nombreuses années pour l'entreprise; il a fait état d'employés ayant de 15 à 20 ans d'ancienneté. Il a aussi mentionné qu'il s'agissait de personnes qui avaient commencé au bas de l'échelle; ayant démontré des aptitudes et un vif intérêt pour le travail, la société avait investi dans le développement de leur savoir au point où elles sont devenues, au fil des ans, les responsables de leur département respectif.

 

[12]    À partir de ces faits, monsieur Mamelonet a affirmé que les personnes en question étaient fières de leur travail et se préoccupaient du bon fonctionnement de l'entreprise. Il a également insisté sur le fait que ces personnes prenaient des initiatives sans intervention directe ou indirecte de sa part. En d'autres termes, il ne demandait pas aux personnes visées par les appels de se présenter au travail ou d'effectuer certains travaux en dehors des périodes mentionnées dans les relevés d'emploi.

 

[13]    Le fait que des personnes partagent une même passion et vivent dans une petite communauté éloignée des grands centres fait en sorte qu'il peut s'avérer normal et tout à fait légitime que des liens d'amitié, de solidarité et d'entraide se créent et se développent au fil des ans. Dans un tel contexte, il est facile d'imaginer de nombreuses situations très particulières où les relations humaines sont fort différentes de la norme habituelle souvent établie à partir de ce qui se passe dans les grands centres urbains.

 

[14]    Cependant, une telle situation ne peut, pour autant, échapper aux dispositions de la Loi sur l'assurance‑emploi.

 

[15]    Il faut tenir compte du contexte en ce qui concerne les griefs ou constats particuliers soulevant des soupçons légitimes quant à l'exactitude des faits indiqués dans les relevés d'emploi, notamment la date du début et la fin des périodes de travail.

 

[16]    Les enquêteurs ont mis en doute l'exactitude des dates de début et de fin des périodes de travail après avoir constaté que, parfois, les dates figurant sur diverses factures destinées à l'entreprise et sur lesquelles apparaissait également le nom de certains employés précédait ou suivait la période indiquée sur les relevés d'emploi qui les concernait.

 

[17]    Le responsable du dossier a, dès lors, conclu que les personnes dont les noms apparaissaient sur ces factures avaient exécuté des heures de travail en dehors des périodes indiquées dans les relevés d'emploi. Il a tenu pour acquis que les personnes concernées avaient travaillé huit heures la journée où leur nom apparaissait sur une facture, et ce, même si l'action d'apposer une signature ne prend que quelques secondes.

 

[18]    La Cour doit trancher entre deux versions des faits, l'une voulant que les employés aient, au cours des périodes en question, été présents au travail de façon ponctuelle, selon le témoignage de l'exploitant de la société et du cuisinier, lui‑même directement concerné par l'un des appels et l'autre version de la personne responsable de l'analyse du dossier qui a déterminé que les employés avaient effectué des journées complètes de travail, soit 8 heures à partir du seul constat que le nom de la personne concernée apparaissait sur une facture.

 

[19]    J'ai cherché à savoir si l'enquête avait permis de constater si la pratique des heures non déclarées mais travaillées touchait tous les employés de la société, au nombre d'une quarantaine, si elle était généralisée ou bien si elle était fortement répandue. La réponse a été que non. Les constats, à cet effet, ne visaient que certains employés, soit exclusivement ceux et celles qui assumaient des fonctions importantes dans l'organisation et qui avaient accumulé de très nombreuses années d'ancienneté, soit 15 ans et plus.

 

[20]    À maintes reprises j'ai affirmé que le programme d'assurance‑emploi n'était pas un programme de soutien à l'entreprise ni une façon de réduire la masse salariale d'une entreprise. J'ai également indiqué que tout travail doit généralement être rémunéré.

 

[21]    Très souvent, j'ai entendu les explications suivantes : « Ce n'était pas du travail, c'était du travail bénévole », ou « Ce n'était pas du travail, je ne recevais aucune rémunération ». La plupart du temps où de telles affirmations sont faites, il existe un lien de dépendance entre les parties concernées.

 

[22]    En l'espèce, il n'existait aucun lien de dépendance entre les parties concernées par le contrat de travail et le facteur saisonnier n'entrant pas enligne de compte non plus.

 

[23]    Les faits ne font l'objet d'aucune contestation. Ils sont, par contre interprétés d'une façon fort différente. Au départ, il m'apparaît important de souligner qu'il n'existe aucun lien de parenté et de dépendance entre les parties au contrat de travail.

 

[24]    Après avoir examiné de tous les faits pertinents, je conclus que je n'ai aucune raison de ne pas retenir les explications de monsieur Mamelonet quant aux circonstances expliquant la présence de certains employés à la place d'affaires du restaurant, et ce, à des moments où ils ne travaillaient pas d'après les relevés d'emploi soumis en preuve. Je n'ai aucune raison de rejeter son témoignage, lequel m'est apparu, dans les circonstances, raisonnable et crédible.

 

[25]    Il s'agissait de périodes très courtes, de présences ponctuelles qui n'avaient souvent rien à voir avec le travail rémunéré. Il s'agissait d'employés ayant à leur actif plusieurs années de service et qui, au fil des ans, ont développé un sentiment d'appartenance à l'égard du restaurant, une entreprise dont ils étaient fiers.

 

[26]    Passionnés par leur travail, ils avaient à coeur le bon fonctionnement de l'entreprise. Le fait que la communauté à laquelle ils appartenaient était petite faisait en sorte qu'ils avaient, au fil des ans, développé des liens d'amitié et de solidarité qui débordaient du cadre de la relation de travail; ce contexte très particulier et ces faits également assez exceptionnels font que je conclus en faveur des appelantes.

 

[27]    Il s'agit d'un dossier que l'on peut comparer à celui du salarié modèle qui, le soir après sa journée de travail, en regardant la télévision, pense à sa journée du lendemain, planifie l'exécution de son travail et il définit précisément son emploi du temps pour chacune des différentes tâches qu'il devra accomplir.

 

[28]    Ce travail mental est un travail profitable à l'employeur non commandé par ce dernier et, très généralement, non rémunéré.

 

[29]    Par contre, ceux et celles qui manifestent un tel dynamisme et enthousiasme pour leur travail voient souvent leurs efforts reconnus et s'assurent d'un plan de carrière avec de fortes accises, compensant d'une certaine façon pour la non‑rémunération. Il s'agit là d'une situation évidemment particulière où il est difficile, sinon impossible, d'en arriver à des conclusions absolues, l'être humain étant impénétrable.

 

[30]    En l'espèce, les personnes concernées par les appels étaient manifestement des employés qui, par leur travail, constituaient les piliers de l'entreprise. Elles assumaient leurs responsabilités avec zèle et intérêt.

 

[31]    Conséquemment, les appels interjetés sont accueillis et les déterminations du ministre du Revenu national sont annulées.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 12e jour de septembre 2006.

 

 

« Alain Tardif »

Juge Tardif

 


RÉFÉRENCE :                                  2006CCI489

 

NOS DES DOSSIERS DE LA COUR :          2005-1290(EI), 2005-1291(EI), 2005‑1292(EI), 2005-1293(EI), 2005-1499(EI) 

 

INTITULÉS DES CAUSES :             2158-3331 Québec Inc. faisant affaire sous la raison sociale la Maison du Pêcheur et

                                                          Nadine Beaudry et MRN

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Percé (Québec)

DATE DE L'AUDIENCE:                   le 10 août 2006

MOTIFS DES JUGEMENT PAR :     l'honorable juge Alain Tardif

DATE DES JUGEMENTS :               le 12 septembre 2006

 

Comparutions :

 

Représentant des appelantes :

 

 

Georges Mamelonet

 

Avocate de l'intimé :

Me Anne Poirier

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour les appelantes:

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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