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Dossier : 2006-3033(IT)I

ENTRE :

CHRIS OSUALA,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appels entendus le 23 avril 2007, à Montréal (Québec).

 

Devant : L’honorable juge G. A. Sheridan

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelant :

M. Frank Dike

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Chantal Roberge

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          Les appels des cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour les années d’imposition 2001 et 2002 sont rejetés selon les motifs de jugement ci‑joints.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour d’août 2007.

 

 

« G. A. Sheridan »

Juge Sheridan

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d’octobre 2007

 

Johanne Brassard, trad. a.


 

 

Référence : 2007CCI504

Date : 20070823

Dossier : 2006-3033(IT)I

ENTRE :

CHRIS OSUALA,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Sheridan

 

[1]     L’appelant, Chris Osuala, interjette appel des cotisations établies par le ministre du Revenu national (le « ministre ») pour ses années d’imposition 2001 et 2002. À ce moment‑là, il était l’unique actionnaire de NNCO Global Inc., une société de Montréal qui vendait des cartes d’appel prépayées et qui exportait pour la vente du matériel informatique d’occasion. Le revenu déclaré par l’appelant au cours de chacune de ces années était d’environ 18 000 $[1]. À la suite d’une vérification des feuilles de paie de NNCO Global, le vérificateur a conclu que l’appelant avait effectué, par chèque ou à des guichets automatiques bancaires, de nombreux retraits du compte d’affaires de NNCO Global, s’élevant en tout à 37 621 $ et à 44 000 $[2] pour les années 2001 et 2002 respectivement. L’appelant était l’unique personne autorisée à effectuer de tels retraits. En l’absence d’une preuve documentaire indiquant que ces montants avaient été utilisés aux fins de l’entreprise, le ministre a supposé qu’ils avaient été utilisés au profit personnel de l’appelant et il a ajouté ces montants au revenu de celui‑ci. Le ministre a également imposé des pénalités pour faute lourde à l’égard de l’année 2002.

 

[2]     L’appelant était représenté par son représentant, M. Frank Dike, d’InHOUSE Trust’s Tax, qui avait également préparé l’avis d’appel. Dans ce document, l’appelant alléguait qu’en 2001, le montant de 37 621 $ qui avait été retiré de NNCO Global avait été utilisé pour l’achat de stocks à l’encan et qu’en 2002, le montant de 44 000 $ avait été utilisé pour le remboursement d’un prêt à l’entreprise consenti par un certain Edward Farhood.

 

[3]     Comme c’est le cas dans tous les appels de nature fiscale, le contribuable a la charge de prouver que les cotisations sont erronées. L’appelant a été l’unique personne à témoigner pour son compte. Malheureusement, je ne trouve pas du tout son témoignage convaincant[3]. Les réponses de l’appelant étaient vagues et parfois incompatibles avec son témoignage antérieur, avec ses actes de procédure ou avec les déclarations que l’appelant avait faites au vérificateur. L’incapacité de l’appelant de se rappeler le but commercial de divers retraits, s’élevant en tout à 37 621 $ entre les mois d’avril et de décembre 2001, et d’un retrait de 40 000 $ au mois de janvier 2002, n’aidait pas à le rendre crédible. Il s’agit de gros montants, le retrait de 40 000 $ représentant plus du double du revenu déclaré par l’appelant pour l’année 2002. Par contre, l’appelant se rappelait fort clairement un retrait beaucoup moins élevé, de 11 500 $, au mois d’octobre 2001. L’appelant a immédiatement et clairement relaté que ce montant avait servi de versement initial sur sa maison; de plus, il a fourni à la Cour des détails au sujet du programme provincial de remboursement pour habitation dans le cadre duquel il avait pu récupérer plus de la moitié de ce montant. Cela révèle jusqu’à quel point la mémoire de l’appelant était sélective ainsi qu’un certain degré de connaissances en matière financière.

 

[4]     Quant au montant de 37 621 $ qui avait été retiré en argent ou par chèque en 2001, sans explications, l’appelant ne pouvait pas se rappeler le but de ces retraits; il a soutenu qu’ils avaient peut‑être été utilisés pour des achats à l’encan ou pour des rénovations d’entreprise. Comme c’était le cas au cours de la vérification, l’appelant ne possédait pas de reçus à l’appui. L’appelant a déclaré avoir perdu une bonne partie de ses documents lors d’un incendie qui avait détruit, au mois de décembre 2001, l’immeuble dans lequel NNCO Global exploitait son entreprise. Cela peut en partie expliquer l’absence de documents justificatifs, mais en fait l’appelant ne tenait absolument pas de livres et de registres adéquats[4], que ce soit pour lui‑même ou pour la société dont il était l’unique propriétaire. Je retiens le témoignage de l’appelant lorsqu’il a déclaré que, souvent, les personnes qui vendent du matériel d’occasion ne fournissent pas de reçus, mais cela ne dispensait pas l’appelant de l’obligation d’établir ses propres documents. Ces documents n’avaient pas non plus à être compliqués. Ainsi, l’appelant aurait pu noter l’achat sur le reçu du guichet automatique ou consigner simplement ses achats dans un carnet. L’entreprise qui décide d’exercer ses activités selon la comptabilisation de caisse doit également accepter la responsabilité d’établir de tels documents.

 

[5]     L’explication que l’appelant a donnée pour avoir retiré 40 000 $ en 2002 était également troublante. Selon le témoignage de l’appelant, la société avait obtenu, en 2001, un prêt initial de 56 000 $ d’Edward Farhood, un homme d’affaires et conseiller qui était l’ami de l’appelant depuis plus de dix ans. Bien que l’appelant ait affirmé qu’il s’agissait d’un [traduction] « bon » ami et qu’ils étaient amis depuis longtemps, lorsqu’on lui a montré, au cours du contre‑interrogatoire, une copie d’un jugement daté du 12 février 2002 lui accordant la garde exclusive de sa fille[5] et où figuraient la signature et le sceau d’un certain « Edward Farhood », en sa qualité de commissaire à la Cour supérieure du Québec, l’appelant a déclaré ne pas savoir que M. Farhood occupait cette charge. Toutefois, il n’a pas nié que la personne en question était bel et bien le même M. Farhood. Quoi qu’il en soit, l’appelant a témoigné qu’au mois de janvier 2002, il avait retiré les 40 000 $ de la société en vue de rembourser le prêt consenti par M. Farhood. Pourtant, six mois plus tard seulement, au mois de juin 2002, lorsque le vérificateur lui a demandé des renseignements au sujet des 40 000 $, l’appelant n’a pas mentionné le prêt consenti par M. Farhood et il a dit, à ce moment‑là, qu’il ne se rappelait pas le but du retrait. Pour les motifs énoncés ci‑dessous, je retiens la preuve du vérificateur selon laquelle, bien qu’il eût promis de le faire, l’appelant ne lui avait jamais donné d’explications. À l’audience, l’appelant n’a pas pu fournir de preuve corroborante au sujet de l’emprunt. L’appelant a mentionné en passant que M. Farhood était décédé. Malgré l’importance du prêt, aucun contrat de prêt formel (et aucun document de quelque genre que ce soit) n’avait été établi pour indiquer le montant emprunté ou les modalités de remboursement.

 

[6]     Le vérificateur en question était M. Christian Boutin. M. Boutin a commencé à s’occuper du dossier de l’appelant en 2002 en sa qualité (à ce moment‑là) de vérificateur des feuilles de paie chargé de vérifier l’authenticité de certains feuillets T4 pour les années 1998, 1999 et 2000, dans lesquels NNCO Global était désignée à titre d’employeur, et l’appelant, désigné à titre d’employé. Cela était étonnant puisque les demandes de renseignements de M. Boutin allaient par la suite révéler que NNCO Global n’avait été constituée en personne morale qu’au mois d’avril 2001. Lorsqu’on lui a demandé des renseignements au sujet des feuillets T4, l’appelant a expliqué qu’il avait essayé d’acheter une propriété en 2001 et que son agent immobilier (apparemment de son propre chef) avait remis de faux feuillets T4 à la banque à l’appui d’une demande de prêt visant l’obtention des fonds nécessaires à l’achat. En découvrant que la société n’existait pas à ce moment‑là et qu’en fait, elle n’avait pas de compte T4, M. Boutin a ouvert un compte et a annulé les faux feuillets T4 pour les années 1998, 1999 et 2000. En examinant les documents bancaires de la société, M. Boutin a découvert les retraits que l’appelant avait effectués du compte de NNCO Global, lesquels, en l’absence de quelque autre explication, ont ensuite été inclus dans les nouveaux feuillets T4 de l’appelant à titre de revenu personnel tiré de NNCO Global.

 

[7]     J’ai trouvé M. Boutin tout à fait crédible; il a donné une description claire des procédures qu’il devait suivre ainsi que des mesures qu’il avait prises en traitant avec l’appelant, à titre personnel ou à titre de dirigeant de NNCO Global. M. Boutin a rencontré l’appelant pour examiner les quelques documents que celui-ci possédait, principalement les relevés bancaires de la société, certains chèques oblitérés et de [traduction] « petits » états financiers. Je retiens le témoignage de M. Boutin selon lequel l’appelant, bien qu’il eût [traduction] « coopéré » (en ce sens qu’il n’avait pas contesté la conclusion du vérificateur selon laquelle il faudrait présenter de nouveaux feuillets T4 indiquant le revenu additionnel que l’appelant avait reçu de NNCO Global), avait en fin de compte omis de lui donner des explications au sujet des retraits.

 

[8]     L’obligation qui lui incombait à l’égard de la preuve a été expliquée à l’appelant plus d’une fois, mais lorsqu’il a contre‑interrogé M. Boutin, M. Dike a surtout contesté les motifs du vérificateur et les procédures que celui‑ci avait suivies, plutôt que les conclusions de fond que M. Boutin avait tirées. Bien que cela ne soit pas à vrai dire strictement pertinent, je dirai à titre d’information qu’il n’y a rien dans le témoignage de M. Boutin qui permette de conclure qu’il ne s’est pas conduit de façon professionnelle (et j’ajouterai de façon utile) en traitant avec l’appelant. Comme on l’a expliqué à M. Dike à l’audience, même si le vérificateur s’était mal conduit, un tel méfait ne relèverait pas de la compétence de la Cour canadienne de l’impôt. Le passage suivant illustre bien les tentatives agressives que M. Dike a faites pour étayer la position de l’appelant en contestant les actions du vérificateur :

 

[traduction]

 

Q.        En d’autres termes, M. Osuala et NNCO n’avaient pas de compte de paie?

 

R.         En effet, ils n’en avaient pas.

 

Q.        Et vous en avez donc ouvert un?

 

R.         Oui, parce que je devais traiter trois feuillets T4.

 

Q.        D’accord. Les trois feuillets T4 que vous deviez traiter, comme vous l’avez dit...

 

R.         Oui.

 

Q.        ... se rapportaient aux années 1998, 1999 et 2000, n’est‑ce pas?

 

R.         C’est exact.

 

Q.        D’accord. À quel moment la société Global NNCO a‑t‑elle été créée?

 

R.         En 2001.

 

Q.        Avez‑vous vérifié ce renseignement?

 

R.         Selon le relevé bancaire, lorsque la société... lorsque le relevé bancaire a été établi et lorsque les opérations ont commencé dans le compte de la société... le compte de banque, c’était en 2001.

 

Q.        Vous avez donc vérifié les renseignements bancaires?

 

R.         Les relevés que M. Osuala m’a fournis.

 

Q.        D’accord. Savez‑vous que lorsqu’une société est constituée, cela n’est pas fait à la banque?

 

R.         Oui, je le sais.

 

Q.        D’accord. Par conséquent, pourquoi ne vous êtes‑vous pas renseigné là où la société a été constituée?

 

R.         Parce que, afin de payer les salaires, il faudrait passer par le compte de banque, de sorte que nous demandons d’abord un relevé bancaire.

 

Q.        Ce n’est pas ce que je vous demandais.

 

R.         Pardon.

 

Q.        La question est la suivante : savez‑vous que ce n’est pas la banque qui constitue une société, oui ou non?

 

R.         Oui, je le sais[6].

 

[...]

 

Q.        D’accord. Par conséquent, vous savez que la constitution de la société au Canada aurait pu être faite par le registraire des sociétés?

 

R.         Oui, ce n’est pas la banque qui le fait.

 

Q.        D’accord. Par conséquent, avez‑vous vérifié ce renseignement avant...

 

R.         Les statuts [documents de constitution en personne morale] de la société?

 

Q.        Oui.

 

R.         Oui, je l’ai fait...

 

Q.        Alors...

 

R.         ... j’ai demandé les statuts.

 

Q.        ... pourquoi vous était‑il difficile de vous rendre compte que cette société ne pouvait pas avoir d’employés en 1998, en 1999 et en 2000, et avez‑vous néanmoins procédé à la vérification d’une société qui n’existait pas?

 

R.         Je n’avais pas le choix de procéder à la vérification de la société, parce que, même si j’avais trois feuillets T4, je devais néanmoins communiquer avec l’administrateur de la société pour vérifier si ces feuillets étaient de fait authentiques...

 

Q.        Et l’avez‑vous vérifié?

 

R.         Pardon?

 

Q.        L’avez‑vous vérifié?

 

R.         Oui, auprès de M. Osuala et à l’aide...

 

Q.        Non, non...

 

R.         ... du relevé bancaire.

 

Q.        ... avez‑vous validé les feuillets T4 de 1998, de 1999 et de 2000?

 

R.         J’ai conclu qu’aucun salaire n’avait été versé au cours de cette période parce qu’aucun compte de banque n’existait à ce moment‑là.

 

Q.        En d’autres termes, la société n’existait pas?

 

R.         C’est exact.

 

Q.        Et la société n’avait pas été constituée?

 

R.         Elle ne l’avait pas été.

 

Q.        D’accord. Par conséquent, cela n’a rien à voir avec Global NNCO?

 

R.         Que voulez‑vous dire?

 

Q.        Les feuillets T4 dont vous parlez, pour les années 1998, 1999 et 2000, avaient‑ils quelque chose à voir avec Global Inc.?

 

R.         Eh bien, en fait les feuillets T4 étaient... le nom de NNCO Global Inc. y figurait.

 

Q.        Les feuillets T4...

 

R.         Ainsi que le nom de M. Osuala...

 

Q.        ... avez-vous vérifié si cela ne provenait pas de cette société?

 

R.         Il ne s’agit pas de savoir si ces feuillets provenaient ou non de cette société; les feuillets T4 étaient libellés au nom de cette société particulière et j’étais fondamentalement chargé de vérifier l’authenticité de ces feuillets, en ce qui concerne le nom de l’employeur. J’ai conclu qu’ils ne l’étaient pas...

 

Q.        Ils n’étaient pas authentiques?

 

R.         Non, ils ne l’étaient pas.

 

Q.        D’accord. Par conséquent, vous avez fondamentalement commencé une vérification fondée sur de faux renseignements, vous vous êtes rendu chez M. Osuala à un moment donné... saviez‑vous qu’un incendie avait eu lieu dans les locaux de la société?

 

R.         La première fois que j’ai rencontré M. Osuala?

 

Q.        Qui, saviez‑vous qu’un incendie avait eu lieu dans les locaux de la société?

 

R.         Eh bien, oui, parce qu’avant de me rendre chez lui pour lui laisser ma carte professionnelle, je me suis rendu aux locaux de la société et c’est alors que j’ai constaté qu’il y avait eu un incendie[7].

 

[9]     L’appelant n’a pas contesté l’hypothèse du ministre selon laquelle, en un peu plus d’un an, entre le mois de mai 2001 et le mois de juin 2002, il avait retiré environ 81 000 $ de la société dont il était l’unique propriétaire. Même si le témoignage de l’appelant, tel qu’il a été présenté, avait été tout à fait crédible, un trop grand nombre de questions importantes sont restées sans réponse. Selon le témoignage de l’appelant, l’incendie du mois de décembre 2001 avait grandement réduit la rentabilité de NNCO Global. Pourtant, le compte bancaire de la société était suffisamment solvable pour permettre des retraits de 44 000 $ au cours des six mois qui ont suivi l’incendie. L’appelant a affirmé avoir traversé ces moments difficiles en contractant des emprunts auprès [traduction] « de membres de la famille et d’amis », qu’il n’a pas identifiés plus précisément. Lorsqu’il a contre‑interrogé le vérificateur, M. Dike a fait grand cas du fait que le vérificateur avait refusé d’accepter l’offre de l’appelant de lui remettre une [traduction] « lettre » d’amis confirmant que ceux‑ci lui avaient donné de l’argent. Je partage l’opinion du vérificateur, à savoir qu’un tel document ne serait pas en soi suffisant pour établir la nature non personnelle ou l’utilisation aux fins de l’entreprise des sommes retirées par l’appelant du compte de la société. On n’a pas non plus expliqué pourquoi ces fonds seraient passés par le compte bancaire de la société. Par conséquent, la preuve soumise par l’appelant ne démontrait pas comment les retraits en argent avaient été utilisés aux fins du paiement des dépenses et des dettes de NNCO Global Inc., et elle ne démontrait pas non plus que les fonds n’avaient pas été utilisés au profit personnel de l’appelant. Dans ces conditions, je puis uniquement conclure, selon la prépondérance des probabilités, que les montants de 37 621 $ et de 44 000 $ ont été à juste titre inclus dans le revenu de l’appelant pour les années 2001 et 2002.

 

[10]    Le ministre a également imposé des pénalités pour faute lourde à l’égard de l’année 2002, conformément au paragraphe 163(2) de la Loi de l’impôt sur le revenu, compte tenu du fait que l’appelant [traduction] « [...] sciemment [...] avait fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat [...] ou y avait participé, consenti ou acquiescé [...] ». L’avocate de l’intimée a mentionné l’arrêt Villeneuve v. Canada, de la Cour d’appel fédérale, et a fait valoir que, dans certaines circonstances, un « aveuglement volontaire » peut constituer une faute lourde :

 

Avec égards, je crois que la juge a omis de considérer la notion de faute lourde qui peut découler d=un aveuglement volontaire de son auteur. Même l=intention coupable qui, souvent, prend la forme de la connaissance de l=un ou de plusieurs des éléments constitutifs du geste reproché peut s=établir par une preuve d=aveuglement volontaire. En pareil cas, l=auteur du geste, bien qu=il n=ait pas de connaissance actuelle de l=élément reproché, se voit imputer la connaissance de cet élément.[8]

 

[11]    L’expression « faute lourde » a été définie par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Venne v. Canada :

 

La « faute lourde » doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui corresponde à une action délibérée, une indifférence au respect de la Loi[9].

 

[12]    À mon avis, le mot « indifférence » décrit d’une façon exacte la conduite de l’appelant à l’égard des obligations que lui impose la Loi. L’appelant s’y connaissait passablement bien en matière fiscale; les montants non comptabilisés étaient beaucoup plus élevés que le revenu déclaré par l’appelant; l’entreprise de NNCO Global était relativement simple; de plus, la tenue de livres nécessaire pour donner à l’appelant une idée exacte de sa situation financière personnelle et de celle de la société n’était pas accablante. Pendant toute la période en cause et en ce qui concerne toutes les questions qui sont ici pertinentes, l’appelant avait un double rôle, en sa qualité personnelle et en sa qualité de dirigeant de NNCO Global. Cela étant, il avait pleinement et exclusivement accès aux renseignements concernant les ventes conclues par la société, aux documents bancaires et financiers de la société, aux fonds se trouvant dans le compte bancaire de la société ainsi qu’à tous les renseignements qu’il fallait pour déclarer d’une façon appropriée son revenu et le revenu de la société. Je n’irai pas jusqu’à dire que l’appelant s’est montré délibérément vague au sujet de ses affaires, mais je suis convaincue qu’il a démontré une « indifférence » équivalant à la « faute lourde » envisagée dans les arrêts Villeneuve et Venne. Dans ces conditions, l’intimée a réussi à justifier l’imposition des pénalités pour faute lourde à l’égard de l’année 2002.

 

[13]    Les appels sont rejetés.

 

          Signé à Ottawa, Canada, ce 23e jour d’août 2007.

 

 

 

« G. A. Sheridan »

Juge Sheridan

 

Traduction certifiée conforme

ce 5e jour d’octobre 2007

 

Johanne Brassard, trad. a.


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI504

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2006-3033(IT)I

 

INTITULÉ :                                       CHRIS OSUALA

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 23 avril 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge G. A. Sheridan

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 23 août 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelant :

M. Frank Dike

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Chantal Roberge

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                   Nom :                            

 

                   Cabinet :                        

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 



[1] Dans sa déclaration de revenus de 2001, l’appelant a déclaré un revenu de travailleur autonome de 40 000 $, montant dont il a déduit 22 000 $ au titre des dépenses. En 2002, l’appelant a déclaré un revenu d’emploi de 15 000 $ et un revenu de location de 3 000 $.

[2] Ce qui comprend un retrait de 40 000 $ et plusieurs retraits moins élevés, s’élevant en tout à 4 000 $.

[3] En tirant cette conclusion, je n’ai accordé aucune importance aux présumées irrégularités de la traite bancaire de M. Farhood (pièce R‑3(12)) ou aux conclusions tirées par la Cour du Québec dans une action que NNCO Global avait intentée sans succès en vue d’obtenir le paiement du produit d’assurance, après l’incendie du mois de décembre 2001 (pièce R‑5).

 

[4] Comme l’exige la Loi de l’impôt sur le revenu.

[5] Pièce R‑4.

[6] Transcription : page 174, lignes 2 à 25, et page 175, lignes 1 à 12.

[7] Transcription : page 176, ligne 25, à la page 179, lignes 1 à 18.

[8] 2004 DTC 6077, paragraphe 6.

 

[9] 84 DTC 6247, paragraphe 37 (C.F. 1re inst.).

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