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Dossier : 2002-2718(EI)

ENTRE :

SIU KUEN KU,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

_______________________________________________________________

 

Appel entendu le 5 février 2003 à Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

Devant : L’honorable juge en chef adjoint D. G. H. Bowman

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelante :

Alan M. Bruyneel

 

Avocate de l’intimé :

Me Jasmine Sidhu

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JUGEMENT

 

          Il est ordonné que l’appel interjeté à l'encontre de la décision établie en vertu de la Loi sur l'assurance‑emploi datée du 9 avril 2002 soit rejeté.

 

 

Signé à Toronto (Canada), ce 11e jour de février 2003.

 

 

 

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

 

 

           


 

 

 

Référence : 2003CCI39

Date : 20030211

Dossier : 2002-2718(EI)

ENTRE :

SIU KUEN KU,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge en chef adjoint Bowman, C.C.I.

 

[1]     Il s’agit d’un appel interjeté à l’encontre d’une décision qu’a rendue le ministre du Revenu national selon laquelle l’appelante n’était pas engagée en vertu d’un contrat de louage de services pendant la période du 1er mai 2000 au 28 mai 2001. Selon l’intimé, pendant la période en cause, l’appelante, n’était pas l’employée mais l’associée de son époux.

 

[2]     Subsidiairement, on a fait valoir que, même si l’appelante a été engagée par son époux en vertu d’un contrat louage de services, les deux parties avaient entre elles un lien de dépendance et que l’emploi qu’occupait l’appelante ne représentait pas un emploi assurable en vertu de l’alinéa 5(2)i) de la Loi sur l’assurance‑emploi. Bien que les parties concernées aient été liées, il a été allégué qu’elles n’auraient pas conclu un contrat de travail semblable si elles n’avaient entre elles aucun lien de dépendance. Cependant, on n’a pas fait valoir cet argument au cours de l’audience. Selon la Cour d’appel fédérale, l’exception prévue à l’alinéa 5(2)i) et que contient l’alinéa 5(3)b) dépend du pouvoir discrétionnaire qu’exerce le ministre et, à cet égard, aucun fondement probatoire n’a été allégué ou prouvé quant à savoir si un tel pouvoir avait été ou non exercé. En conséquence, nous devrons remettre à un autre jour la détermination de la question qui consiste à savoir si la conclusion de la Cour d'appel fédérale selon laquelle le libellé « si le ministre du Revenu national est convaincu… » accorde au ministre une forme de pouvoir administratif discrétionnaire entraîne l’omission du ministre du revenu national d’examiner cette question en vertu de l’alinéa 5(3)b) constitue en soi une forme de pouvoir ministériel discrétionnaire pouvant faire l’objet d’une révision devant la présente Cour.

 

[3]     Par conséquent, la seule question que la Cour est appelée à trancher consiste à savoir si l’appelante, pendant la période en cause, a été engagée par son époux en vertu d’un contrat de louage de services aux termes de l’alinéa 5(1)a) de la Loi sur l’assurance-emploi.

 

[4]     En 1998, l’appelante et son époux, Kypros Kyprianou, sont devenus associés à part égale dans l’entreprise Mail Boxes Etc. (« MBE ») qui consiste en un centre de services et de ventes au détail où l’on fournit des services de photocopie, d’emballage et d’expédition, de même que de location de casiers postaux. Jusqu’au 1er août 2000, l’appelante et son époux travaillaient à temps complet pour le compte de leur entreprise, six jours par semaine.

 

[5]     Lorsque l’appelante est tombée enceinte de son deuxième enfant, ils ont décidé qu’il était nécessaire qu’elle devienne une employée afin d'être admissible à des prestations de maternité au titre du régime d’assurance-emploi. Conséquemment, à compter du 1er août 2000, l’appelante s’est inscrite sur la feuille de paye et a déclaré un revenu d’emploi mensuel de 1 992 $. Le feuillet T4 émis à la fin de l’année d’imposition indique d’ailleurs des revenus d’emplois correspondant à ce montant. De cette somme, elle a déduit et prélevé des impôts sur le revenu, de même que des cotisations au Régime de pensions du Canada et d’assurance‑emploi.

 

[6]     Je ne tire aucune inférence défavorable quant au fait que le motif justifiant le prétendu changement dans la relation visait à permettre à l’appelante d’être admissible à des prestations d’assurance-emploi ou quant au fait que les comptables de l’appelante et de son époux ont indiqué, dans leur déclaration de revenus d’emplois pour l’année d’imposition 2000, qu’ils étaient associés, ce qui, à mon avis, était involontaire.

 

[7]     La question consiste à savoir si leur intention de dissoudre leur association et de transférer la participation de l’appelante dans la société à son époux et, conséquemment, d’inscrire l’appelante sur les feuilles de paye comme une employée de son époux était contraire à la loi. Il ne s’agit pas déterminer ce qu’ils avaient l’intention de faire ou pourquoi ils ont agi ainsi. Il s’agit plutôt de déterminer si c’est ce qu’ils ont fait en fait et en droit.

 

[8]     La modification d’une relation d’associés en une relation d’employeur‑employé est fondamentale. Elle comprend au moins trois étapes :

 

a)       la dissolution de la société;

 

b)      le transfert des parts de l’associé à l’autre associé;

 

c)       l’embauche de l’associé sortant par le nouveau propriétaire unique en vertu d’un contrat d’emploi.

 

[9]     Il est nécessaire de fournir certaines preuves qui démontrent qu’il y a eu modification de la relation et qu’au moins le strict minimum des formalités légales a été respecté. Il ne suffit pas seulement de l’envisager. Il faut joindre le geste à la parole.

 

[10]    L’appelante et son époux constituent un jeune couple et tous les deux m’ont semblé bien intentionnés et tout à fait crédible. De plus, je suis convaincu qu’ils espéraient pouvoir modifier leur rapport juridique et qu’ils en avaient probablement l’intention. Cependant, bien que je souhaite pouvoir les aider, la preuve ne démontre pas que cette relation a été modifiée d’une façon quelconque. L’appelante a continué d’agir à titre d’associée ou de propriétaire partiaire. Ses heures de travail sont demeurées les mêmes, tout comme ses activités relatives à l’exploitation de l’entreprise. Même le fait qu’elle se soit inscrite elle‑même sur la feuille de paye constitue davantage un changement superficiel qu’un changement de fond. Elle a continué à signer des chèques du compte bancaire de l’entreprise pour divers montants qu’elle déposait dans son propre compte bancaire en vue de rembourser les dépenses qu’elle avait engagées pour le compte de l’entreprise. Aucune preuve n’a démontré qu’elle percevait une rémunération de 1 992 $ par mois. En fait, la preuve est davantage cohérente avec la conclusion selon laquelle elle percevait une rémunération de ce qui restait des paiements versés à l’entreprise, peu importe le montant et si de tels paiements étaient versés, après que toutes les autres dépenses avaient été payées. C’est ce que ferait un propriétaire d’une entreprise et non un employé. Par contre, les deux employés qui n’étaient pas liées aux associés et que l’entreprise avait engagés, soit Angela et Vladimir, percevaient un salaire calculé en fonction d’un taux horaire en particulier et du nombre précis des heures travaillées.

 

[11]    Par conséquent, je conclus que l’appelante n’a jamais cessé d’être une associée et qu’elle n’était pas une employée de son époux pendant la période en cause. Je parviens à cette conclusion avec regret. J’aurais bien aimé pouvoir aider l’appelante et son époux. Ils m’ont semblé être un couple sympathique, honnête et diligent, mais malheureusement leur entreprise s’est soldée par un échec et, conséquemment, ils ont dû mettre fin à leurs activités commerciales et vendre l’entreprise à perte en 2002.

 

[12]    L’appel est rejeté.

 

 

Signé à Toronto, Canada, ce 11e jour de février 2003.

 

 

 

« D. G. H. Bowman »

J.C.A.

 

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