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Dossier : 2003‑122(EI)

ENTRE :

MARLENE WENTZELL,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 4 juin 2003 à Calgary (Alberta)

 

Devant : L’honorable juge suppléant Michael H. Porter

 

Comparutions

 

Représentant de l’appelante :

Robert L. Wentzell

 

Avocate de l’intimé :

MGalina M. Bining

____________________________________________________________________

 

 

JUGEMENT

 

Le présent appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée conformément aux motifs du jugement ci‑joints. 

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 17jour de septembre 2003.

 

 

 

« Michael H. Porter »

Juge suppléant Porter

 

Traduction certifiée conforme

ce 27jour de janvier 2004.

 

 

 

 

Nancy Bouchard, traductrice


 

 

 

Référence : 2003CCI521

Date : 20030917

Dossier : 2003‑122(EI)

ENTRE :

MARLENE WENTZELL,

 

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

 

intimé.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Porter

 

[1]     Le présent appel a été entendu à Calgary, en Alberta, le 4 juin 2003. L’appelante, qui était absente à l’audience, était représentée par son époux, Robert Wentzell, qui a également témoigné en son nom. Il était le seul témoin. 

 

[2]     L’appelante a interjeté appel à l’encontre de la décision du ministre du Revenu national (ci‑après appelé le « ministre ») datée du 7 novembre 2002 selon laquelle l’emploi qu’elle occupait auprès de l’entreprise Robert L. Wentzell & Associates Incorporated pendant la période du 22 avril 2001 au 31 janvier 2002 n’était pas un emploi assurable en vertu de la Loi sur l’assurance‑emploi (la « Loi sur l’a.‑e. ») pour le motif suivant :

 

[Traduction]

 

[...] Il existait entre vous et l’entreprise Robert L. Wentzell & Associates Incorporated un lien de dépendance, et le ministre n’est pas convaincu que vous et l’entreprise Robert L. Wentzell & Associates Incorporated auriez conclu un contrat de travail à peu près semblable si vous n’aviez eu entre vous de lien de dépendance. Par conséquent, l’emploi qu’occupait Marlene Wentzell est un emploi exclu.

 

On a indiqué que cette décision avait été rendue en vertu du paragraphe 93(3) de la Loi sur l’a.‑e. et qu’elle était fondée sur l’alinéa 5(2)i) de cette même Loi.

 

[3]     Les faits établis révèlent que pendant la période pertinente, Robert Wentzell (« Robert ») détenait la totalité des actions de l’entreprise Robert L. Wentzell & Associates Incorporated (la « payeuse ») dont les activités commerciales consistaient à fournir des conseils professionnels, des services d’analyse coût‑avantage, des services d’évaluation de contrat ainsi que des services de règlements de différends et de médiation dans le cadre de programmes et de projets d’immobilisations. De même, toujours pendant la période pertinente, Robert était légalement marié à l’appelante. Par conséquent, en vertu de la Loi sur l’a.‑e. et du paragraphe 251(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu, les parties, en tant que personnes liées, sont réputées en droit avoir entre elles un lien de dépendance. En conséquence, l’emploi en question, sous réserve de l’alinéa 5(3)b) de la Loi sur l’a.‑e., relève de la catégorie des emplois exclus, c’est‑à‑dire qu’il ne s’agissait pas d’un emploi qui donne lieu au paiement de prestations d’assurance‑emploi au moment de la cessation dudit emploi. Le ministre a déterminé que les emplois en cause ne sont pas visés par l’exception, et l’appelante a donc porté cette décision en appel.

 

Le droit

 

[4]     Dans le cadre du régime établi par la Loi sur l’a.‑e., le législateur a prévu que certains emplois sont assurables et donnent droit à des prestations lorsqu’ils prennent fin et que d’autres emplois, qui sont « exclus », ne donnent droit à aucune prestation lorsqu’ils prennent fin. Les conventions d’emploi contractées par des personnes qui ont un lien de dépendance sont des « emplois exclus ». Des frères et des sociétés contrôlées par des personnes liées à eux sont réputés avoir entre eux un lien de dépendance suivant le paragraphe 251(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu qui régit cette situation. Cette disposition légale avait manifestement pour but d’éviter au régime d’avoir à payer une multitude de prestations fondées sur des conventions d’emploi factices ou fictives; voir les observations de la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Paul c. Le ministre du Revenu national, [1986] A.C.F. no 682, nA‑223-86 inédite, où le juge Hugessen a déclaré ceci :

 

Nous sommes tous disposés à présumer, comme nous y invite l’avocat de l’appelante, que l’alinéa 3(2)c) de la Loi de 1971 sur l’assurance‑chômage [] et le paragraphe 14a) du Règlement sur l’assurance‑chômage visent entre autres à éviter les emplois abusifs de la Caisse d’assurance‑chômage par la création de soi‑disant rapports « employeur‑employé » entre des personnes dont les rapports sont, de fait, très différant (sic). […] Cet objectif se révèle tout à fait pertinent et rationnellement justifiable dans le cas des époux qui vivent ensemble maritalement. Mais même si, comme le soutient l’appelante, nous ne sommes en présence que d’époux légalement séparés et qui peuvent traiter entre eux sans lien de dépendance, la nature de leurs rapports en qualité de conjoints est telle qu’elle justifie, à notre avis, d’exclure de l’économie de la Loi l’emploi de l’un par l’autre.

 

[]

 

Nous n’écartons pas la possibilité que les dispositions susmentionnées aient d’autres objectifs, comme par exemple la décision conforme à une politique sociale visant à écarter du champ d’application de la Loi de 1971 sur l’assurance‑chômage tous les emplois exercés au sein de l’unité familiale, comme l’a suggéré l’avocat de l’intimé. (Non souligné dans l’original.)

 

 

[5]     La rigueur de cette disposition a toutefois été atténuée par l’alinéa 5(3)b) de la Loi sur l’a.‑e., lequel prévoit qu’un emploi dans le cas où l’employeur et l’employé sont des personnes liées est réputé être exercé sans lien de dépendance et peut donc être considéré comme un emploi assurable s’il remplit toutes les autres conditions, si le ministre est convaincu qu’il est raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli, qu’ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s’ils n’avaient pas eu (en fait) de lien de dépendance.

 

[6]     Il pourrait être utile que je reformule la façon dont je comprends cet alinéa. Pour les personnes qui sont liées, la Loi exclut tout droit à des prestations d’emploi, à moins qu’on ne puisse convaincre le ministre que la convention d’emploi est la même qu’auraient conclue des personnes non liées, c’est‑à‑dire des personnes qui n’ont manifestement aucun lien de dépendance. Le législateur a jugé que, s’il s’agit d’un contrat de travail à peu près semblable, il devrait en toute équité être inclus dans le régime. Toutefois, c’est le ministre qui décide. Sauf s’il est convaincu qu’il y a lieu de l’inclure, l’emploi reste exclu et l’employé n’a pas droit à des prestations.

 

[7]     Le paragraphe 93(3) de la Loi sur l’a.‑e. porte sur les appels au ministre et sur le règlement de questions par celui‑ci. Il exige que :

 

Le ministre règle la question soulevée par l’appel ou la demande de révision dans les meilleurs délais et notifie le résultat aux personnes concernées.

 

[8]     Le ministre est donc tenu de régler la question. La loi l’exige. Si le ministre n’est pas convaincu, l’emploi reste exclu et l’employé n’a pas droit aux prestations. Si toutefois il est convaincu, sans plus de cérémonie et sans prise d’aucune mesure par le ministre (sauf la communication de la décision), l’employé a droit à des prestations, pourvu qu’il remplisse les autres exigences. Il ne s’agit pas d’un pouvoir discrétionnaire au sens que, si le ministre est convaincu, il lui est alors loisible de décider que l’emploi est assurable. Il doit « régler la question » et, selon ce qu’il décide, aux termes de la loi l’emploi est réputé soit comporter un lien de dépendance, soit ne pas en comporter. En ce sens, le ministre n’a pas à proprement parler de pouvoir discrétionnaire à exercer car, en prenant sa décision, il doit agir de façon quasi judiciaire et il n’a pas le droit de faire le choix qui lui plaît. Il ressort des décisions de la Cour d’appel fédérale sur cette question que le critère qui s’applique est le même que celui qui s’applique à une multitude d’autres fonctionnaires qui prennent des décisions quasi judiciaires dans de nombreux domaines différents. (Voir Tignish Auto Parts Inc. C. M.R.N., C.A.F., nA‑555‑93, 25 juillet 1994 (185 N.R. 73), Ferme Émile Richard et Fils Inc. c. M.R.N., C.A.F., nos A‑172‑94, A‑173‑94, 1er décembre 1994 (178 N.R. 361), Procureur général du Canada c. Jencan Ltd., [1998] 1 C.F. 187 ((1997) 215 N.R. 352) et Sa Majesté la Reine et Bayside Drive‑in Ltd., C.A.F., nos A‑626‑96, A‑627‑96, A‑628‑96, A‑629‑96, 25 juillet 1997 ((1997) 218 N.R. 150.)

 

[9]     Le rôle de ce tribunal est alors, en cas d’appel, de réviser la décision du ministre et de décider s’il l’a prise légalement, c’est‑à‑dire conformément à la Loi sur l’a.‑e. et aux principes de la justice naturelle. Dans l’affaire Sa Majesté la Reine c. Bayside, précitée, la Cour d’appel fédérale a relevé certains points à considérer par notre cour lorsqu’elle entend de tels appels. Ce sont les suivants :

 

(i)                le ministre a agi de mauvaise foi ou en s’appuyant sur un objectif ou un motif inapproprié;

(ii)              le ministre n’a pas tenu compte de toutes les circonstances pertinentes, comme il est expressément tenu de le faire aux termes de l’alinéa 3(2)c) de la Loi sur l’assurance‑chômage, maintenant le paragraphe 5(3) de la Loi sur l’a.‑e.;

(iii)            le ministre a tenu compte d’un facteur non pertinent.

 

[10]    La Cour d’appel fédérale a ensuite ajouté ceci :

 

Ce n’est que si le ministre a commis une ou plusieurs de ces trois erreurs susceptibles de contrôle que l’on peut dire qu’il a exercé son pouvoir discrétionnaire d’une façon contraire à la loi, et [] que le juge de la Cour de l’impôt serait justifié de faire sa propre évaluation de la prépondérance des probabilités quant à savoir si les intimés auraient conclu un contrat de travail à peu près semblable s’il n’y avait pas eu entre eux de lien de dépendance. 

 

[11]    Je ne dois pas oublier, à l’examen de cette affaire, qu’il n’appartient pas à la Cour de substituer son opinion concernant la preuve à celle du ministre. Toutefois, si la façon dont ce dernier est arrivé à la décision était illégale à la lumière des jugements mentionnés ci‑dessus, je pourrais ne pas tenir compte des parties concernées des faits énoncés et je devrais alors me demander s’il se dégage des faits qui restent des motifs justifiant la décision. Si ces motifs sont en soit suffisants pour que le ministre prenne une décision, même si la Cour pouvait ne pas l’agréer, la décision doit être maintenue. Si, par ailleurs, il ne reste plus rien sur lequel le ministre pourrait, d’un point de vue objectif et raisonnable, légalement fonder une telle décision, celle‑ci peut alors être infirmée, et la Cour peut examiner la preuve qui lui a été présentée en appel et rendre sa propre décision.    

 

[12]    Bref, si le ministre dispose de suffisamment de faits pour rendre sa décision, c’est à lui qu’il appartient de régler la question et, s’il n’est « pas convaincu », il n’appartient pas à la Cour de substituer à celle du ministre sa propre opinion au sujet de ces faits et de dire que le ministre aurait dû être convaincu. De même, si le ministre était convaincu, il n’appartient à la Cour de substituer à celle du ministre sa propre opinion selon laquelle il n’aurait pas dû être convaincu (scénario peu probable de toute façon). C’est seulement si la décision est prise d’une manière inappropriée et qu’elle est déraisonnable d’un point de vue objectif, compte tenu des faits qui ont été légitimement présentés au ministre, que le tribunal peut intervenir.

 

[13]    Je puis m’appuyer à ce sujet sur un certain nombre de décisions de diverses Cours d’appel du Canada et de la Cour suprême du Canada dans des affaires connexes concernant diverses procédures relevant du Code criminel, décisions qui ont été examinées par la suite par les tribunaux et qui sont à mon avis analogues à la présente espèce. La norme de contrôle en ce qui concerne la validité d’un mandat de perquisition a été établie par le juge d’appel Cory (tel était alors son titre) dans l’affaire Times Square Book Store, Re (1985) 21 C.C.C. (3d) 503 (C.A.), où il dit qu’il n’appartient pas au juge qui fait le contrôle d’examiner ou de considérer de novo l’autorisation relative à un mandat de perquisition et que ledit juge ne saurait substituer sa propre opinion à celle du juge qui a accordé le mandat. Il s’agit plutôt, au stade du contrôle, de déterminer d’abord s’il existait ou non des éléments de preuve sur la foi desquels un juge de paix pouvait conclure, de façon judiciaire, qu’un mandat de perquisition devait être délivré. 

 

[14]    La Cour d’appel de l’Ontario a repris et développé son point de vue dans l’affaire R. v. Church of Scientology of Toronto and Zaharia [1987] 31 C.C.C. (3d) 449 (C.A.), autorisation de pourvoi refusée. En indiquant que le tribunal faisant le contrôle devait examiner « l’ensemble des circonstances », la Cour a affirmé à la page 492 :

 

[Traduction]

 

Évidemment, s’il n’y a pas d’éléments de preuve sur lesquels appuyer une telle conviction (c’est‑à‑dire qu’une infraction criminelle n’a pas été commise), on ne peut dire que dans ces circonstances le juge de paix doit être convaincu. Il y aura cependant des cas où une telle preuve (établissant des motifs raisonnables) existera bel et bien et où le juge de paix pourrait être convaincu, mais où il ne le sera pas et n’exercera pas son pouvoir discrétionnaire pour délivrer un mandat de perquisition. Dans de telles circonstances, le juge qui fait le contrôle ne doit pas dire que le juge de paix aurait dû être convaincu et qu’il aurait dû délivrer le mandat.

 

De même, si le juge de paix dit dans de telles circonstances qu’il est convaincu et délivre le mandat, le juge qui fait le contrôle ne doit pas dire que le juge de paix n’aurait pas dû être convaincu. 

 

[15]    La Cour suprême du Canada a entériné ce point de vue dans l’affaire R. c. Garofoli, [1990] 2 R.C.S. 1421. Le regretté juge Sopinka, traitant de la question de la révision de la délivrance d’une autorisation d’écoute électronique, a affirmé ceci :

 

[...] Bien que le juge qui exerce ce pouvoir relativement nouveau ne soit pas tenu de se conformer au critère de l’arrêt Wilson, il ne devrait pas réviser l’autorisation de novo. La façon appropriée est établie dans les motifs du juge Martin en l’espèce. Il affirme [] :

 

[Traduction]

 

Si le juge du procès conclut, d’après les documents dont disposait le juge ayant accordé l’autorisation, qu’il n’existait aucun élément susceptible de le convaincre que les conditions préalables pour accorder l’autorisation existaient, il me semble alors que le juge du procès doit conclure que la perquisition, la fouille ou la saisie contrevient à l’art. 8 de la Charte.

 

Le juge qui siège en révision ne substitue pas son opinion à celle du juge qui a accordé l’autorisation. Si, compte tenu du dossier dont disposait le juge qui a accordé l’autorisation et complété lors de la révision, le juge siégeant en révision conclut que le juge qui a accordé l’autorisation pouvait le faire, il ne devrait pas intervenir. Dans ce processus, la fraude, la non‑divulgation, la déclaration trompeuse et les nouveaux éléments de preuve sont tous des aspects pertinents, mais au lieu d’être nécessaires à la révision leur seul effet est d’aider à décider s’il existe encore un fondement quelconque à la décision du juge qui a accordé l’autorisation.

 

[16]    Cette approche semble avoir été adoptée par à peu près toutes les cours d’appel au pays. (Voir R. v. Jackson (1983), 9 C.C.C. (3d) 125 (C.A. C.-B.); R. v. Conrad et al. (1989), 99 A.R. 197; 79 Alta. L.R. (2d) 307; 51 C.C.C. (3d) 311 (C.A.); Hudon v. R. (1989), 74 Sask. R. 204 (C.A.); et R. v. Turcotte (1988), 60 Sask. R. 289; 39 C.C.C. (3d) 193 (C.A.); R. v. Borowski (1990), 66 Man. R. (2d) 49; 57 C.C.C. (3d) 87 (C.A.); Bâtiments Fafard Inc. et autres c. Canada et autres (1991) 41 Q.A.C. 254 (C.A.); Société Radio‑Canada c. Nouveau‑Brunswick (Procureur général) et autres (1991), 104 N.B.R. (2d) 1; 261 A.P.R. 1; 55 C.C.C. (3d) 133 (C.A.); R. v. Carroll and Barker (1989), 88 N.S.R. (2d) 165; 225 A.P.R. 165; 47 C.C.C. (3d) 263 (C.A.); R. v. MacFarlane (K.R.) (1993), 100 Nfld. & P.E.I.R. 302; 318 A.P.R. 302; 76 C.C.C. (3d) 54 (C.A. Î.‑P.‑É.). Il me semble s’agir d’une approche très pertinente au contrôle de la décision du ministre, laquelle est une décision quasi judicaire.

 

Étape I – Examen de la décision du ministre

 

[17]    Dans la Réponse à l’avis d’appel signée en son nom, on a indiqué que le ministre s’était appuyé sur les hypothèses de fait suivantes (j’ai indiqué, entre parenthèses, celles qu’a admises ou niées l’appelante) :

 

[traduction]

 

a)         l’entreprise de la payeuse fournit des conseils professionnels, des services d’analyse coût‑avantage, des services d’évaluation de contrat ainsi que des services de règlements de différends et de médiation dans le cadre de programmes et de projets d’immobilisations; (admise)

 

b)         Robert Wentzell (ci‑après appelé l’« actionnaire ») est l’unique actionnaire de la payeuse; (admise)

 

c)         l’appelante est l’épouse de l’actionnaire; (admise)

 

d)         l’appelante a été engagée à titre d’adjointe administrative et ses tâches consistaient à répondre au téléphone, à traiter avec les clients, à tenir les dossiers à jour, à utiliser un ordinateur pour l’exécution du travail, à produire et à réviser des rapports, à faire des photocopies, à s’occuper de l’approvisionnement de fournitures de bureau, à s’occuper des travaux d’écriture et à entretenir le bureau; (admise)

 

e)         l’appelante travaillait à l’extérieur de son domicile et de celui de l’actionnaire; (niée, le travail s’accomplissait au bureau de la payeuse qui était situé à leur domicile) 

 

f)          l’appelante percevait un salaire annuel de 26 500 $; (admise)

 

g)         l’appelante a perçu de la payeuse les paiements suivants : (admise) 


 

 

Date

Montant

Description

2001‑07‑18

 5 000,00 $

Salaire pour le deuxième trimestre de 2001

2001‑07‑18

 5 000,00 $

Salaire pour le premier trimestre de 2001

 

10 000,00 $

(salaire total pour l’année 2001)

 

 

 

Date

Montant

Description

2001‑03‑13

 2 433,06 $

Salaire pour les mois d’oct., de nov. et de déc. 2000

2001‑01‑22

  5 460,00 $

Salaire pour l’année 2000

2000‑08‑13

11 600,00 $

Salaire pour l’année 2000

2000‑04‑14

  1 400,00 $

Avance temporaire

2000‑03‑24

  2 433,06 $

Salaire pour les mois de janv., de févr. et de mars

 

23 326,12 $

(Salaire total pour l’année 2000)

 

 

 

2000‑01‑15

  2 433,06 $

Salaire pour le quatrième trimestre de 1999

1999‑12‑21

  4 000,00 $

1999

 

 6 433,06 $

(Salaire total pour l’année 1999)

 

h)         la payeuse a émis les feuillets T‑4 suivants; (admise)

 

Année

Employé

Gains

2001

Appelante

26 500 $

 

 

 

2000

Appelante

26 500 $

 

 

 

1999

Appelante

17 000 $

1999

Actionnaire

 3 000 $

 

i)          la payeuse a versé les cotisations suivantes à l’égard de l’appelante; (niée, l’appelante a payé des cotisations d’a.‑e. pour les années 1999 et 2000 en plus de cotisations additionnelles pour l’année 2001 abstraction faite de celles s’élevant à 596,25 $)

 

 

RPC

A.-E.                         Impôt

2001

989,00 $

596,25 $                 3 500,00 $

2000

897,00 $

                               1 873,76 $

1999

472,50 $

                               2 322,76 $

 

j)          l’appelante était l’unique employée de la payeuse pendant la période en question; (admise, elle était l’unique employée à Calgary. La payeuse avait engagé un entrepreneur indépendant pour effectuer le même travail à Halifax, en Nouvelle‑Écosse.)

 

k)         l’actionnaire n’a tiré aucun revenu de la payeuse pendant la période en question; (admise)

 

l)          l’appelante n’avait ni horaire ni journée de travail d’établi; (admise, si Robert était absent, l’appelante prenait les messages, répondait au téléphone et aux télécopies que lui envoyaient des clients)

 

m)        les heures de travail de l’appelante étaient établies en fonction des tâches nécessaires à accomplir; (admise)

 

n)         les heures de travail de l’appelante n’étaient pas consignées; (admise)

 

o)         l’actionnaire supervisait l’appelante; (admise)

 

p)         la payeuse fournissait les outils et l’équipement de travail nécessaires; (admise)

 

q)         l’appelante n’avait aucune chance de générer des profits ni ne risquait de subir une perte; (admise)

 

r)          l’appelante n’a assumé aucune responsabilité personnelle pour le compte de la payeuse; (admise)

 

s)         l’emploi de l’appelante a cessé lorsque la payeuse n’a plus eu de contrat; (admise) 

 

t)          en raison de la nature confidentielle des activités commerciales de l’entreprise, la payeuse n’aurait pas engagé une personne non liée pour fournir les services que l’appelante fournissait; (niée) 

 

u)         l’appelante a fourni des services à la payeuse avant 1999 mais n’était pas rémunérée pour ces services; (admise)

 

v)         la payeuse et l’appelante avaient entre elles un lien de dépendance;

 

w)        le ministre a tenu compte de tous les faits pertinents dont il disposait, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli;

 

x)         le ministre n’était pas convaincu qu’il était raisonnable de conclure que la payeuse et l’appelante aurait conclu un contrat de travail à peu près semblable si elles n’avaient eu entre elles de lien de dépendance.

 

L’appelante a nié les hypothèses de fait énoncées aux points v), w) et x). Ce sont les décisions à l’encontre desquelles l’appelante a interjeté appel.

 

[18]    Robert a témoigné au nom de son épouse, c’est‑à‑dire au nom de l’appelante et, je présume, également au nom de son entreprise, la payeuse.

 

[19]    Il a produit des documents en preuve pour montrer que des cotisations d’a.‑e. au montant de 596,25 $ ont été versées en sus en 1999, en 2000 et en 2001, conformément à ce que le ministre avait inscrit dans ses dossiers. Je suis tout à fait convaincu que Robert est un homme intègre et foncièrement honnête. Je n’ai aucune hésitation à déclarer que j’admets sans équivoque son témoignage et que je suis convaincu que lesdites cotisations ont en fait été versées, comme il le prétend. Dans la mesure où le ministre a cru le contraire, il était dans l’erreur. Cependant, je ne suis pas certain que l’on puisse affirmer qu’il s’agit d’un fait pertinent simplement, parce que le simple fait que le ministre a admis ces cotisations d’a.‑e. ne l’empêche pas de rendre une décision comme il l’a fait. Il s’agit tout simplement d’un fait non pertinent à la question en litige dans l’affaire en l’espèce et dans la mesure où le ministre en a tenu compte, je suis d’avis qu’il n’aurait pas dû.

 

[20]    En ce qui concerne l’hypothèse énoncée au point j), j’admets également que la payeuse n’avait engagé aucun autre employé à Calgary. Toutefois, elle a fait appel à une agence commerciale pour qu’on lui fournisse des services semblables à Halifax en vertu d’un contrat d’entreprise. Cependant, le témoin a clairement indiqué qu’il s’agissait d’entrepreneurs indépendants et, par conséquent, le ministre, à cet égard, était justifié en affirmant que l’appelante était la seule « employée ».

 

[21]    En ce qui concerne les hypothèses énoncées aux points l) et m), Robert a expliqué qu’en fait, son épouse intervenait, lorsqu’il devait s’absenter, pour répondre aux appels téléphoniques et aux télécopies de clients ou de clients éventuels parce que plutôt que de laisser un message, ils préféraient s’adresser à quelqu’un. Elle s’occupait également de réviser ses rapports. Aucune preuve concernant le nombre d’heures qu’elle avait consacrées à accomplir ces tâches pendant la période en question ne m’a été présentée. Elle ne consignait pas ses heures ou ses journées de travail. Elle ne travaillait que lorsqu’il y avait quelque chose à faire, par exemple, lorsque Robert s’absentait. Le ministre était justifié d’affirmer qu’elle n’avait aucun horaire de travail établi. En fait, elle pouvait accomplir la majeure partie de son travail en utilisant n’importe quel téléphone à la maison. Elle utilisait d’ailleurs son téléphone cellulaire lorsqu’elle y transférait les appels reçus au bureau.

 

[22]    La dernière hypothèse qu’a contestée l’appelante est celle énoncée au point t). Ici encore, j’admets le témoignage de Robert selon lequel il aurait pu engager une personne non liée pour accomplir le travail en question et c’est ce qu’il aurait fait si son épouse n’avait pas été disponible. Une fois de plus, le ministre a commis une erreur en s’appuyant sur cette hypothèse de fait. 

 

[23]    Robert a particulièrement admis l’hypothèse énoncée au point g), confirmant que le salaire annuel que percevait son épouse lui était versé le premier et le deuxième trimestre de l’année 2001, soit le 18 juillet de cette même année. Il a expliqué que son salaire annuel lui était versé à cette date parce que c’est à cette période qu’il percevait les paiements de son ou de ses clients. De la même manière, il a versé à son épouse son salaire pour les mois d’octobre, de novembre et de décembre 2000 le 13 mars 2001. Bien qu’il ait également payé le bureau de gestion des affaires à Halifax de la même manière, il a reconnu qu’il s’agissait d’une entente contractuelle conclue avec un entrepreneur indépendant et qu’il n’avait versé à aucun autre employé des arriérés en salaire accumulés sur une période de plus de six mois. À mon avis, il s’agissait d’un fait très pertinent dont le ministre aurait dû tenir compte.  

 

[24]    Robert, au nom de son épouse, a soulevé la question d’équité et s’est demandé s’il était juste qu’il devait se défendre seul contre les 62 000 employés du ministère de la Justice. Sauf le respect que je lui dois, là n’est pas la question. Un avocat agit au nom du ministre, et l’appelante aurait pu, de la même manière, se faire représenter par un avocat.  

 

[25]    Robert a soulevé la question quant à savoir si l’avis des employés de Développement des ressources humaines Canada ou de l’Agence des douanes et du revenu du Canada a plus de valeur que le sien en dépit du nombre d’années d’expérience qu’il a acquis en affaires. Ici encore, là n’est pas la question puisque le ministre, qui agit par l’entremise d’agents autorisés, est tenu, par le législateur, de déterminer si une exception à la règle générale selon laquelle des personnes liées ne sont pas admissibles à des prestations d’a.‑e. à l’égard de l’emploi qu’elles occupent devrait s’appliquer avant que des fonds publics ne soient déboursés en vertu de la Loi.

 

[26]    Si je tiens compte de tous les éléments de preuve et des faits dont le ministre a tenu compte, et même en faisant abstraction des points qui étaient incorrects ou si je tiens compte de faits tels que le versement de cotisations d’a.‑e., je suis plus que convaincu que le ministre était en droit légalement et en toute objectivité de rendre cette décision. En particulier, je constate qu’aucune tâche ni aucun horaire de travail précis n’a été présenté au cours du témoignage. Essentiellement, l’appelante était en disponibilité, elle a été rémunérée jusqu’à six mois après les événements, elle demeurait au domicile où était installé le bureau de l’entreprise, mais aucune preuve n’indique qu’elle a travaillé dans ce bureau, et il n’existe tout simplement aucun élément de preuve détaillé concernant les tâches qu’elle a accomplies en échange d’un salaire annuel de 26 500 $. 

 

[27]    En vertu de la Loi, le ministre est tenu de tenir compte de toutes les circonstances relatives à l’emploi, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli pour être en mesure de déterminer s’il est raisonnable de conclure que les parties auraient conclu entre elles un contrat de travail à peu près semblable si elles n’avaient eu entre elles de lien de dépendance et, à cet égard, le ministre a décidé qu’une telle conclusion n’était pas raisonnable. Aucune preuve dans la présente affaire ne montre qu’il a agi de mauvaise foi. Même en faisant abstraction des hypothèses de fait erronées, il pouvait, à mon avis, parvenir légalement et en toute objectivité à cette conclusion en s’appuyant sur les autres éléments de preuve. Il est également important, à mon avis, de prendre note que l’exploitant du bureau d’affaires situé à Halifax, même s’il était un entrepreneur indépendant, était rémunéré pour les tâches qu’il accomplissait et pour le nombre d’heures qu’il y consacrait. L’appelante, quant à elle, n’était pas rémunérée de cette façon. Ainsi, le ministre était certainement en droit de parvenir à la conclusion selon laquelle les modalités en matière de rétribution auraient été différentes si les parties n’avaient eu entre elles de lien de dépendance.

 

[28]    Il ne m’est donc pas nécessaire de réexaminer la preuve. La décision du ministre est tout à fait justifiée. Cela étant dit, je pourrais ajouter que, selon la preuve qui m’a été présentée, je n’aurais aucune hésitation à parvenir à cette même conclusion.

 

[29]    Par conséquent, l’appel est rejeté et la décision du ministre est confirmée.

 

Signé à Calgary (Alberta), ce 17jour de septembre 2003.

 

 

 

 

 

« Michael H. Porter »

Juge suppléant Porter

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 27jour de janvier 2004.

 

 

 

 

Nancy Bouchard, traductrice

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