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Dossier : 2002-4492(EI)

ENTRE :

MARIO LYNCH,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu sur preuve commune avec l'appel de Gérald Lynch (2002-4493(EI)) le 28 juillet 2003 à Sherbrooke (Québec)

 

Devant : L'honorable J.F. Somers, juge suppléant

 

Comparutions :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

 

Avocate de l'intimé :

Me Emmanuelle Faulkner

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel est rejeté et la décision rendue par le Ministre est confirmée selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'octobre 2003.

 

 

 

«J.F. Somers»

Juge suppléant Somers


 

 

 

Référence : 2003CCI692

Date : 20031017

Dossier : 2002-4492(EI)

ENTRE :

MARIO LYNCH,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

ET

Dossier : 2002-4493(EI)

GÉRALD LYNCH,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge suppléant Somers

 

[1]     Ces appels ont été entendus à Sherbrooke (Québec), le 28 juillet 2003.

 

[2]     Par lettre en date du 8 octobre 2002, le ministre du Revenu national (le «Ministre») a informé les appelants de ses décisions selon lesquelles ils avaient exercé un emploi assurable durant les périodes en cause, soit du 1er janvier 2001 au 17 mai 2002 pour Gérald Lynch, et du 1er janvier 2001 au 11 juillet 2002 pour Mario Lynch, lorsqu'au service de Garage P.E. Lynch Inc., le payeur, parce qu'il existait une relation employeur-employé entre eux et le payeur. De plus, le Ministre a informé les appelants que malgré qu'il existait un lien de dépendance entre eux et le payeur, compte tenu de toutes les circonstances, un contrat de travail à peu près semblable aurait été conclu entre eux et le payeur.

 

 

 

[3]     Le paragraphe 5(1) de la Loi sur l'assurance-emploi (la «Loi») se lit en partie comme suit :

 

Sous réserve du paragraphe (2), est un emploi assurable :

 

a) l'emploi exercé au Canada pour un ou plusieurs employeurs, aux termes d'un contrat de louage de services ou d'apprentissage exprès ou tacite, écrit ou verbal, que l'employé reçoive sa rémunération de l'employeur ou d'une autre personne et que la rémunération soit calculée soit au temps ou aux pièces, soit en partie au temps et en partie aux pièces, soit de toute autre manière;

 

[...]

 

[4]     Les paragraphes 5(2) et (3) de la Loi sont libellés en partie comme suit :

 

(2) N'est pas un emploi assurable :

 

[...]

 

i) l'emploi dans le cadre duquel l'employeur et l'employé ont entre eux un lien de dépendance.

 

[...]

 

(3)        Pour l'application de l'alinéa (2)i) :

 

a)         la question de savoir si des personnes ont entre elles un lien de dépendance est déterminée conformément à la Loi de l'impôt sur le revenu;

 

b)         l’employeur et l’employé, lorsqu’ils sont des personnes liées au sens de cette loi, sont réputés ne pas avoir de lien de dépendance si le ministre du Revenu national est convaincu qu’il est raisonnable de conclure, compte tenu de toutes les circonstances, notamment la rétribution versée, les modalités d’emploi ainsi que la durée, la nature et l’importance du travail accompli, qu’ils auraient conclu entre eux un contrat de travail à peu près semblable s’ils n’avaient pas eu de lien de dépendance.

 

 

 

[5]     L'article 251 de la Loi de l'impôt sur le revenu se lit en partie comme suit :

 

Article 251 :  Lien de dépendance

 

(1)        Pour l'application de la Loi,

 

a) des personnes liées sont réputées avoir entre elles un lien de dépendance;

 

[...]

 

(2)        Définition de «personnes liées».  Pour l'application de la loi, sont des «personnes liées» ou des personnes liées entre elles:

 

a) des particuliers unis par les liens du sang, du mariage ou de l'adoption;

 

b)         une société et :

 

(i)         une personne qui contrôle la société si cette dernière est contrôlée par une personne,

 

(ii)        une personne qui est membre d'un groupe lié qui contrôle la société,

 

(iii)       toute personne liée à une personne visée au sous-alinéa (i) ou (ii);

 

[...]

 

[6]     Le fardeau de la preuve incombe aux appelants. Ces derniers se doivent d'établir, selon la prépondérance de la preuve, que les décisions du Ministre sont mal fondées en fait et en droit. Chaque cas est un cas d'espèce.

 

[7]     En rendant sa décision dans l'appel de Mario Lynch, le Ministre s'est fondé sur les présomptions de fait suivantes lesquelles ont été admises ou niées :

 

a)         le payeur a été constitué en société le 24 février 1983; (admis)

 

 

 

 

b)         durant la période en litige, les actionnaires du payeur étaient :

 

            Paul-Émile Lynch                      90 % des actions votantes

            l'appelant                                  10 % des actions votantes (admis)

 

c)         Paul-Émile Lynch est le père de l'appelant; (admis)

 

d)         le payeur se spécialisait dans la construction de granges et d'étables de ferme et dans la vente et la réparation d'instruments agricoles; (admis)

 

e)         le payeur avait un chiffre d'affaires d'environ 2 millions par année et embauchait de 16 à 20 employés à temps plein; (admis)

 

f)          l'appelant avec son père et son frère Gérald étaient membres du conseil d'administration du payeur; (admis)

 

g)         le payeur avait une vie corporative active; (admis)

 

h)         l'appelant était le responsable du service des pièces; (admis)

 

i)          les tâches de l'appelant consistaient à la gestion du système informatique, des inventaires des pièces, des achats, de la facturation et du service à la clientèle au comptoir; (admis)

 

j)          l'appelant avait un horaire de travail fixe pour le payeur soit du lundi au vendredi de 8 h à 17 h et au besoin le samedi; (admis)

 

k)         l'appelant avisait le payeur en cas d'absence; (admis)

 

l)          l'appelant travaillait à l'année longue pour le payeur; (admis)

 

m)        durant la période en litige, l'appelant recevait une rémunération hebdomadaire fixe de 560 $ brut par semaine, payée par chèque; (admis)

 

n)         l'appelant n'a rien investi dans le payeur; (admis)

 

o)         l'appelant n'avait donné aucune garantie ou sûreté personnelle en faveur du payeur; (nié)

 

p)         le payeur défrayait les primes d'assurance de la CSST pour l'appelant; (admis)

 

 

 

q)         l'appelant n'avait aucun risque de perte ou chance de profit autre que son salaire; (admis)

 

r)          tous les outils dont se servait l'appelant appartenaient au payeur; (nié)

 

s)         les services rendus par l'appelant faisaient partie intégrante des activités du payeur. (admis)

 

[8]     Les présomptions de fait sur lesquelles le Ministre s'est basé pour rendre sa décision dans l'appel de Gérald Lynch sont sensiblement les mêmes que celles énoncées ci-haut et cet appelant a admis les sous-paragraphes a) à g), i), k) à m) et o) à s) et a nié les sous-paragraphes h), j) et n).

 

[9]     Le payeur a été constitué en société le 24 février 1983. Durant les périodes en cause, les actionnaires du payeur étaient Paul-Émile Lynch, le père des appelants, et Mario Lynch détenant respectivement 90 et 10 pour cent des actions votantes.

 

[10]    Le payeur se spécialise dans la construction de granges et d'étables de ferme et dans la vente et la réparation d'instruments agricoles. Le payeur avait un chiffre d'affaires d'environ deux millions par année et embauchait de 16 à 20 employés à temps plein.

 

[11]    Les appelants et Paul-Émile Lynch étaient membres du conseil d'administration du payeur et ceux-ci se réunissaient fréquemment; de plus, ils se consultaient au sujet des affaires du payeur mais Paul-Émile Lynch avait le dernier mot lors de la prise de décisions majeures.

 

[12]    L'appelant Mario Lynch était responsable du service des pièces; ses tâches consistaient en la gestion du système informatique, à faire l'inventaire des pièces, à s'occuper des achats, de la facturation et du service à la clientèle au comptoir.

 

[13]    Mario Lynch oeuvrait pour le payeur à l'année longue selon un horaire fixe, soit du lundi au vendredi de 8 h à 17 h et au besoin le samedi et, comme les autres employés du payeur, il se devait de poinçonner à son arrivée au travail et à son départ. Durant la période en litige, il a reçu une rémunération hebdomadaire fixe de 560 $ payée par chèque.

 

 

[14]    Mario Lynch a affirmé qu'il n'avait pas investi d'argent dans le payeur mais qu'il avait contracté un emprunt pour ce dernier. Il a déclaré qu'il ne se souvenait pas de la date de cet emprunt et a ajouté qu'il s'agissait peut-être d'un montant de 2 500 $. Cependant, il aurait déclaré à l'agent des appels qu'il ne cautionnait pas la dette à long terme de la compagnie.

 

[15]    Lors de son témoignage à l'audition de son appel, il a déclaré qu'il prenait environ deux semaines de vacances par année mais qu'il devait parfois revenir au bureau pour des affaires urgentes. Il décidait lui-même quand il prenait des vacances mais devait en aviser le payeur; ses vacances ne devaient pas causer d'embêtements aux opérations de l'entreprise. Il a admis que le payeur défrayait les primes d'assurance de la Commission de la santé et de la sécurité au travail. Il a ajouté qu'il n'avait aucune chance de profit ni risque de perte; il ne recevait que son salaire.

 

[16]    Mario Lynch a affirmé qu'il possédait personnellement des outils de mécanicien d'une valeur d'environ 20 000 $. Il a ajouté qu'il se servait rarement de ses outils puisqu'il agissait comme gérant des pièces.

 

[17]    L'appelant Gérald Lynch a témoigné qu'il était vice-président sur le conseil d'administration du payeur mais qu'il n'était pas actionnaire. Les tâches de celui‑ci consistaient à faire des soumissions avec son père, à diriger les chantiers de construction, à négocier les achats, à vérifier la facturation et à assurer le service à la clientèle.

 

[18]    Selon ce témoin, ses heures de travail étaient de 8 h à 18 h. Il a ajouté qu'il travaillait plus de 60 heures par semaine puisqu'il oeuvrait souvent le samedi et le dimanche. Durant la période en cause, Gérald Lynch a d'abord reçu une rémunération hebdomadaire fixe pour ensuite être payé à un taux horaire et revenir à un salaire fixe de 850 $ par semaine.

 

[19]    Cet appelant avait droit à quatre semaines de vacances par année; de fait, il ne prenait pas de vacances, sauf quelques journées à l'occasion. Il a affirmé qu'il avait endossé un prêt pour le payeur en mettant sa maison personnelle en garantie. Toutes les dépenses reliées à l'emploi de cet appelant étaient assumées par le payeur, y compris les primes d'assurance de la Commission de la santé et de la sécurité au travail.

 

 

[20]    Tous les outils et le camion dont se servait l'appelant appartenaient au payeur. L'appelant a admis qu'il n'avait aucune chance de profit ni risque de perte; il ne recevait que son salaire.

 

[21]    Paul-Émile Lynch, président du payeur, a corroboré essentiellement le témoignage des appelants. Il a déclaré que les appelants, contrairement aux autres employés non liés, n'étaient pas payés pour le temps supplémentaire (temps et demi). Selon ce témoin, Gérald Lynch recevait une rémunération plus élevée que l'appelant Mario Lynch car il avait plus de responsabilités.

 

[22]    Selon lui, Mario Lynch a contracté un prêt au bénéfice du payeur en 1983 au montant de 5 000 $ et que cet argent avait servi en partie à l'achat des actions; donc cette somme lui a été remise plus tard.

 

[23]    Paul-Émile Lynch a corroboré l'affirmation voulant que l'appelant Gérald Lynch avait endossé un prêt de 170 000 $ en 1997 en mettant sa maison personnelle en garantie.

 

[24]    Lors de son témoignage à l'audition de ces appels, Guylaine Dépot, agente de décision auprès de Développement des ressources humaines Canada, a déclaré qu'elle a fait son enquête basée sur des conversations téléphoniques qu'elle a eues avec les deux appelants, Paul-Émile Lynch et une employée du payeur.

 

[25]    Elle a déclaré que l'appelant Gérald Lynch travaillait de 50 à 57 heures par semaine et qu'il était payé 15 $ l'heure alors que les autres employés du payeur recevaient de 9 $ à 14 $ l'heure. Gérald Lynch lui a déclaré qu'il avait des heures flexibles compte tenu de ses responsabilités de gérant et qu'il notait celles-ci. Selon elle, Gérald Lynch prenait des décisions dans son champ de compétence mais Paul-Émile Lynch avait le dernier mot; cet appelant se devait de faire ses preuves vis-à-vis son père.

 

[26]    Selon ce témoin Mario Lynch aussi avait des heures flexibles à cause de ses responsabilités. Il était payé 560 $ par semaine, un salaire moindre que celui de Gérald Lynch puisqu'il avait moins de responsabilités.

 

[27]    Denis Hamel, agent des appels auprès de l'Agence des douanes et du revenu du Canada, a témoigné qu'il avait eu des conversations avec Mario Lynch et Marie-Claire Belleville, comptable du payeur.

 

[28]    Ce témoin a obtenu certains faits de ces personnes, dont ceux énoncés dans les Réponses aux avis d'appel, lesquels ont, pour la plupart, été admis par les appelants.

 

[29]    Mario Lynch lui aurait déclaré, entre autres, qu'il n'a pas cautionné de prêts ou fait des prêts au payeur. Il aurait également affirmé que ses heures de travail étaient de 8 h à 17 h et qu'il faisait occasionnellement du temps supplémentaire. Il aurait déclaré que son père était encore actif dans l'entreprise et que même s'il s'en détachait graduellement il était celui qui prenait les décisions finales.

 

[30]    L'agent des appels a obtenu des informations du comptable du payeur, Marie‑Claire Belleville. Cette dernière lui aurait déclaré que le payeur avait une dette à long terme de 500 000 $ mais qu'aucune caution personnelle n'était exigée; la compagnie devait 162 000 $ à l'actionnaire majoritaire du payeur, Paul‑Émile Lynch. Marie-Claire Belleville aurait déclaré, entre autres, à l'agent des appels que Gérald Lynch avait des heures flexibles et qu'il travaillait parfois 60 heures par semaine en plus de rendre, à l'occasion, des services au payeur le samedi et même le dimanche.

 

[31]    La Cour d'appel fédérale dans la cause Ferme Émile Richard et Fils Inc. et le ministre du Revenu national, [1994] A.C.F. no 1859, indique que lorsqu'il s'agit d'appliquer le sous-alinéa 3(2)c)(ii) de la Loi sur l'assurance‑chômage, maintenant l'alinéa 5(3)b) de la Loi sur l'assurance‑emploi, la Cour doit se demander si la décision du Ministre « résulte d'un exercice approprié de son pouvoir discrétionnaire ». La Cour doit exiger dans un premier temps que l'appelant « fasse la preuve d'un comportement capricieux ou arbitraire du Ministre ».

 

[32]    Les appelants occupaient des emplois cadres dans l'entreprise du payeur; leurs positions et tâches étaient différentes des autres employés.

 

[33]    Dans la cause Industries J.S.P. Inc. c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [1999] A.C.I. no 423, le juge Tardif de cette Cour en a résumé les faits, similaires aux causes sous étude, et s'exprimé ainsi :

 

            Madame Marie-Claude Perreault a témoigné, expliqué et décrit au moyen de plusieurs exemples son intérêt, son enthousiasme et son dynamisme et celui de ses frères pour les intérêts de la compagnie oeuvrant dans le domaine difficile et très compétitif de la construction de meubles.

 

            Se partageant des responsabilités importantes et stratégiques de l'entreprise, elle et ses frères ne négligeaient strictement rien pour le mieux-être et le développement de l'entreprise contrôlée par monsieur Jacques Perreault, détenant 1,000 actions votantes mais non participantes.

 

            Chacun touchait un salaire plus que raisonnable et profitait, à la fin de chaque année, d'un boni qui variait suivant les performances économiques de l'entreprise et la qualité du travail offert par les membres de la famille.

 

            Les décisions importantes se prenaient dans la collégialité et consensus. Chacun consacrait un minimum de 60 heures dans le cadre de ses fonctions respectives pour la compagnie.

 

            La prépondérance de la preuve a donc été à l'effet que les membres de la famille Perreault se dévouaient entièrement et totalement aux affaires de la compagnie. Ils y investissaient la plus grande partie de leur disponibilité (minimum 60 heures) de manière à ce que la compagnie puisse réussir dans un marché difficile où la compétition est féroce.

 

[...]

 

            Lorsqu'une personne occupe un poste stratégique de cadre pour une entreprise, il est usuel et normal que la description de tâches soit très difficile à définir. En qualité d'associé ou de partie à la direction d'une entreprise, une personne peut difficilement espérer une description de tâches définie, précise et limitée.

 

            Le fait de contribuer et d'être associé à la gérance, à l'administration ou au développement d'une entreprise, et tout particulièrement lorsqu'il s'agit d'une petite entreprise, fait en sorte que la description tâches est fortement empreinte d'éléments propres et caractéristiques de celles souvent assumées par les propriétaires d'entreprise eux-mêmes ou de personnes détenant plus de 40 p. 100 des actions votantes de la compagnie dans laquelle ils ont un emploi. En d'autres termes, à ce niveau de responsabilités, la composante rétribution doit s'apprécier avec prudence au niveau d'une comparaison avec des tiers; il existe souvent des avantages qui compensent pour le salaire moindre.

 

[34]    Dans la cause Massé et Plante Auto (1997) c. Canada (ministre du Revenu national - M.R.N.), [2001] A.C.I. no 796, le juge Savoie de cette Cour s'est exprimé en ces termes :

 

Dans l'esprit de l'actionnaire majoritaire Denis Pomerleau, il a laissé la gestion de l'entreprise à ses deux fils. Il n'est jamais intervenu pour imposer sa volonté contre le gré de ses fils. Toutefois, il admet que certaines circonstances pourraient et devraient l'amener à intervenir.

 

La détermination de ce litige repose sur l'interprétation, en l'espèce, de la personne ou des personnes qui détiennent le contrôle ou le pouvoir de l'entreprise. La décision du Ministre a été prise en fonction de ce critère. Ainsi, le Ministre a statué que Denis Pomerleau a conservé le contrôle de facto de l'entreprise. En cette qualité, selon le Ministre, il peut intervenir en tout temps. Le fait qu'il n'ait jamais exercé ce pouvoir n'a aucune importance. L'important, c'est qu'il détient toujours ce pouvoir.

 

[35]    Quant à l'appelant Mario Lynch, il occupait une position de cadre dans l'entreprise familiale : il était en charge de la gestion du système informatique, faisait l'inventaire des pièces, s'occupait des achats, de la facturation et du service à la clientèle au comptoir.

 

[36]    Mario Lynch travaillait à des heures relativement régulières; cependant il pouvait, à l'occasion, faire du temps supplémentaire pour lequel il n'était pas rémunéré contrairement aux autres employés du payeur. Il pouvait prendre deux semaines de vacances par année et ce quand bon lui semblait à condition d'en aviser le payeur et que les opérations de l'entreprise n'en souffraient pas.

 

[37]    Mario Lynch, en tant qu'actionnaire de l'entreprise familiale, recevait un salaire qui n'était pas déraisonnable compte tenu qu'il occupait une position de cadre. Le fait qu'il n'était pas rémunéré, comme les autres employés du payeur, pour le temps supplémentaire ne pourrait affecter l'assurabilité de son emploi car il y avait des avantages et désavantages à oeuvrer pour l'entreprise familiale.

 

[38]    Mario Lynch et le payeur étaient des personnes liées en vertu de la Loi. L'emploi de cet appelant est un emploi assurable puisque lui et le payeur auraient conclu un contrat de travail à peu près semblable s'ils n'avaient pas eu de lien de dépendance et, de plus, son emploi rencontrait les exigences d'un véritable contrat de louage de services.

 

[39]    Les conditions d'emploi de l'appelant Gérald Lynch n'étaient pas semblables à celles de l'appelant Mario Lynch. Gérald Lynch n'était pas actionnaire dans la compagnie et il avait de plus grosses responsabilités que son frère Mario. Les tâches de cet appelant consistaient à soumissionner avec son père, à diriger les chantiers de construction, à négocier les achats, à vérifier la facturation et à assurer le service à la clientèle.

 

[40]    Gérald Lynch travaillait à des heures variables, cinq jours par semaine et souvent le samedi et le dimanche et son salaire de 850 $ par semaine n'était pas déraisonnable. Bien qu'il avait doit à quatre semaines de vacances par année, il a choisi de ne pas les prendre. Contrairement aux autres employés il n'était pas payé pour le temps supplémentaire.

 

[41]    Quant à ses conditions de travail, un facteur important le distingue de son frère Mario : Gérald Lynch a déclaré avoir endossé un prêt au bénéfice du payeur et son père, Paul-Émile Lynch, qui exerçait un contrôle impressionnant sur les destinées de l'entreprise, a corroboré cette affirmation en ajoutant que c'était en 1997 pour un montant de 170 000 $.

 

[42]    Ce prêt est un engagement personnel impressionnant pour un employé qui n'est pas actionnaire. Un employé occupant une position de cadre et n'ayant aucun lien de dépendance avec son employeur n'aurait pas signé un tel engagement.

 

[43]    Les appelants auraient pu présenter une preuve documentaire plus complète mais les témoignages des appelants Mario et Gérald Lynch et celui de leur père, Paul-Émile Lynch, sont dignes de foi; donc la Cour accepte la suffisance de la preuve sur ce fait important.

 

Conclusions

 

[44]    L'emploi exercé par l'appelant Gérald Lynch, pendant la période en cause, est exclu des emplois assurables en vertu de l'alinéa 5(2)i) et le paragraphe 5(3) de la Loi. En conséquence, son appel est admis et la décision du Ministre est annulée.

 

[45]    L'emploi exercé par l'appelant Mario Lynch est un emploi assurable puisque lui et le payeur auraient conclu un contrat de travail à peu près semblable s'ils n'avaient pas eu de lien de dépendance et, de plus, son emploi rencontrait les exigences d'un véritable contrat de louage de services. En conséquence son appel est rejeté et la décision du Ministre est confirmée.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 17e jour d'octobre 2003.

 

 

 

 

« J.F. Somers »

Juge suppléant Somers


 

 

RÉFÉRENCE :

2003CCI692

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2002-4492(EI) et 2002-4493(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :

Mario Lynch et M.R.N.

Gérald Lynch et M.R.N.

 

LIEU DE L'AUDIENCE :

Sherbrooke (Québec)

 

DATE DE L'AUDIENCE :

le 28 juillet 2003

 

MOTIFS DE JUGEMENT PAR :

L'honorable J.F. Somers,

juge suppléant

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 17 octobre 2003

 

COMPARUTIONS :

 

Pour les appelants :

Les appelants eux-mêmes

 

Pour l'intimé :

Me Emmanuelle Faulkner

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER:

 

Pour les appelants :

 

Nom :

 

 

Étude :

 

 

Pour l'intimé :

Morris Rosenberg

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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