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Dossier : 2007-1048(CPP)

ENTRE :

BOULDER CREEK HOLDINGS INC.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de

Jaie Moore (2007-1049(CPP)) le 14 septembre 2007

à Kelowna (Colombie‑Britannique)

 

 

Devant : L’honorable juge Valerie A. Miller

 

Comparutions :

 

Représentante de l’appelante :

Caryn Cooke

Avocate de l’intimé :

Me Pavanjit Mahil

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT MODIFIÉ

 

       L’appel est rejeté et la décision du ministre du Revenu national est confirmée conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Le présent jugement remplace le jugement daté du 28 septembre 2007.

 

      


Signé à Halifax (Nouvelle‑Écosse), ce 17e jour d’octobre 2007.

 

 

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mars 2008.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


 

 

 

 

Dossier : 2007-1049(CPP)

ENTRE :

JAIE MOORE,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de

Boulder Creek Holdings (2007-1048(CPP)) le 14 septembre 2007

à Kelowna (Colombie‑Britannique)

 

Devant : L’honorable juge Valerie Miller

 

Comparutions :

 

Représentante de l’appelant :

Caryn Cooke

Avocate de l’intimé :

Me Pavanjit Mahil

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT MODIFIÉ

 

       L’appel est rejeté et la décision du ministre du Revenu national est confirmée conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 

Le présent jugement remplace le jugement daté du 28 septembre 2007.

 


       Signé à Halifax (Nouvelle‑Écosse), ce 17e jour d’octobre 2007.

 

 

 

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de mars 2008.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice

 


 

 

 

 

Référence : 2007CCI580

Date : 20070928

Dossier : 2007-1048(CPP)

ENTRE :

BOULDER CREEK HOLDINGS INC.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

 

ET ENTRE :

 

Dossier : 2007-1049(CPP)

 

JAIE MOORE,

appelant,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge V.A. Miller

 

[1]     Les présents appels ont été entendus ensemble. La question en litige est de savoir si Jaie Moore (le « travailleur ») exerçait un emploi ouvrant droit à pension au sens de l’alinéa 6(1)a) du Régime de pensions du Canada (le « RPC ») auprès de Boulder Creek Holdings Inc. (le « payeur ») pendant les années 2005 et 2006.

 

[2]     Le payeur et le travailleur étaient tous deux représentés par Caryn Cooke. Le travailleur a été la seule personne à témoigner.

 

FAITS

 

[3]     Le payeur a été constitué en société le 27 février 2001. Ses actionnaires étaient Patrick Moore, Caryn Cooke et le travailleur. Au moment où la société a été constituée, chaque actionnaire détenait un nombre égal d’actions. Lors de l’audience, il a été indiqué que Caryn Cooke détenait maintenant un pourcentage plus important d’actions, mais aucun élément de preuve indiquant le pourcentage exact n’a été présenté.

 

[4]     Les actionnaires sont parents. Patrick Moore est le père du travailleur et Caryn Cooke est la tante du travailleur. Ils habitent tous la maison de Caryn Cooke, et le bureau du payeur se trouve dans cette même maison.

 

[5]     Le payeur exploite une entreprise de transport par grand routier et transporte des biens entre le Canada et les États‑Unis. Le travailleur détient un permis de conduire de classe 1 et possède vingt ans d’expérience dans l’industrie du transport routier. Lorsqu’on lui a demandé la raison pour laquelle le payeur était constitué en société, le travailleur a répondu qu’il croyait que c’était mieux pour lui de travailler pour son propre compte et qu’il voulait protéger le camion et la remorque de toute responsabilité en cas d’accident.

 

[6]     Le travailleur exécutait les tâches suivantes : transporter des biens entre le  Canada et les États‑Unis; effectuer un peu d’entretien et des petites réparations pour le camion, la remorque et l’équipement; accomplir les formalités de dédouanement pour tous les biens; établir les lettres de voiture et faire les travaux d’écriture connexes. Le payeur n’a jamais embauché de camionneur autre que le travailleur. En outre, depuis que le payeur est constitué en société, le travailleur n’a effectué de tâches que pour celui‑ci.

 

[7]     Lorsque le payeur a commencé à exploiter son entreprise, le travailleur n’était pas payé pour accomplir ses tâches. Le payeur avait peu de revenus et chacun des actionnaires, à un moment ou à un autre, a utilisé son propre argent pour faire des paiements de camion et assumer des dépenses du payeur. À un certain moment donné, le travailleur a dit qu’il avait besoin de gagner un revenu. Les actionnaires se sont donc entendus sur son taux de salaire. Ce taux a été établi en fonction des revenus mensuels du payeur et était moindre que le taux courant dans l’industrie du transport routier. Pendant la période en cause, le travailleur gagnait 500 $ par voyage, ce qui représente environ la moitié du salaire gagné par d’autres camionneurs dans le domaine. En règle générale, le travailleur faisait quatre ou cinq voyages par mois.

 

[8]     Tous les voyages et les clients font l’objet d’une discussion entre les actionnaires. Si le travailleur se fait approcher par un client potentiel ou s’il trouve un nouveau client, il le renvoie à la répartitrice du payeur, Caryn Cooke. Les actionnaires prennent toutes les décisions importantes.

 

[9]     Le payeur était propriétaire du camion et de la remorque et payait l’essence pour chaque voyage. Le travailleur possédait deux ordinateurs portatifs. Sa fiancée et lui les utilisaient pour l’aider à établir son trajet, pour faire le suivi de ses dépenses et pour trouver des clients. Le travailleur était également le propriétaire des bâches, des chaînes et des courroies qu’il utilisait dans l’exécution de ses tâches. Il assumait aussi les dépenses relatives aux droits de péage, à l’envoi de télécopies et à ses repas pendant ses voyages.

 

[10]    Le travailleur n’était pas payé pour les jours fériés et il ne recevait pas de paie de vacances ou d’avantages sociaux de la part du payeur. Toutefois, le payeur assumait les frais d’une police d’assurance‑vie au nom du travailleur et payait ses cotisations pour l’indemnité d’accident du travail.

 

[11]    Le travailleur a affirmé que lorsqu’il était sur la route, il n’était pas tenu de rendre des comptes au payeur. Cependant, il téléphonait au bureau pour informer les actionnaires du déroulement du voyage et pour prendre les mesures nécessaires pour le chargement du retour.

 

JURISPRUDENCE

 

[12]    Les critères qui sont utilisés pour trancher la question de savoir si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant ont déjà été examinées par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt Wiebe Door Services Ltd. c. M.R.N., [1986] 2 C.T.C. 200. Il s’agit du degré de contrôle, de la propriété des instruments de travail, des chances de bénéfice et des risques de perte, ainsi que de l’intégration des travaux. Ces critères ont été confirmés par la Cour suprême du Canada dans l’arrêt  671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983 où le juge Major a affirmé ce qui suit, aux paragraphes 46, 47 et 48 :

 

 

46      À mon avis, aucun critère universel ne permet de déterminer, de façon concluante, si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant. Lord Denning a affirmé, dans l'arrêt Stevenson Jordan, précité, qu'il peut être impossible d'établir une définition précise de la distinction (p. 111) et, de la même façon, Fleming signale que [TRADUCTION] « devant les nombreuses variables des relations de travail en constante mutation, aucun critère ne semble permettre d'apporter une réponse toujours claire et acceptable » (p. 416). Je partage en outre l'opinion du juge MacGuigan lorsqu'il affirme -- en citant Atiyah, op. cit., p. 38, dans l'arrêt Wiebe Door, p. 563 -- qu'il faut toujours déterminer quelle relation globale les parties entretiennent entre elles :

 

[TRADUCTION]  [N]ous doutons fortement qu'il soit encore utile de chercher à établir un critère unique permettant d'identifier les contrats de louage de services [...]  La meilleure chose à faire est d'étudier tous les facteurs qui ont été considérés dans ces causes comme des facteurs influant sur la nature du lien unissant les parties.  De toute évidence, ces facteurs ne s'appliquent pas dans tous les cas et n'ont pas toujours la même importance.  De la même façon, il n'est pas possible de trouver une formule magique permettant de déterminer quels facteurs devraient être tenus pour déterminants dans une situation donnée.

 

 

47      Bien qu'aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l'employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s'il engage lui-même ses assistants, quelle est l'étendue de ses risques financiers, jusqu'à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu'à quel point il peut tirer profit de l'exécution de ses tâches.

 

48      Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n'y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l'affaire.

 

[13]    En l’espèce, le travailleur a affirmé qu’il avait été embauché par le payeur en tant qu’entrepreneur indépendant et qu’il a toujours travaillé comme propriétaire exploitant. La question centrale est donc de savoir si le travailleur travaillait pour son propre compte en 2005 et en 2006. À mon avis, ce n’est pas le cas.

 

[14]    Il y a un certain nombre de facteurs qui m’amènent à tirer cette conclusion. D’abord, depuis qu’il a été embauché par le payeur, le travailleur n’a travaillé pour personne d’autre. En contre‑interrogatoire, lorsqu’on lui a demandé pourquoi il en était ainsi, le travailleur a affirmé que s’il allait travailler ailleurs, ceci diminuerait les revenus du payeur et ce dernier en subirait les conséquences. Aussitôt que le travailleur se faisait approcher par un client potentiel ou qu’il approchait un client potentiel, il le renvoyait à Caryn Cooke, la répartitrice du payeur. Le payeur n’a jamais embauché personne d’autre que le travailleur pour effectuer les mêmes tâches étant donné que, selon le travailleur, le payeur [traduction] « n’avait pas les moyens de payer un autre employé ». Le payeur assumait les frais d’une police d’assurance‑vie au nom du travailleur. Il est ressorti de la preuve que l’objectif du travailleur était de développer l’entreprise du payeur afin qu’elle puisse réaliser des profits. 

 

[15]    En l’espèce, le travailleur avait vingt ans d’expérience dans l’industrie du transport routier. Pour cette raison, et en raison de la nature des tâches à effectuer, le payeur n’avait pas à contrôler le travailleur de très près. Toutefois, lors du contre‑interrogatoire, le travailleur a affirmé qu’il essayait de communiquer avec le payeur à chaque jour quand il était sur la route pour lui laisser savoir où il était et s’il éprouvait des problèmes.

 

[16]    Le travailleur possédait quelques petits instruments, mais les instruments importants nécessaires à l’exécution de ses tâches (le camion et la remorque) appartenaient au payeur. Le travailleur n’avait pas de chance de bénéfice ou de risque de perte indépendamment du payeur. Il était payé selon un taux fixe pour chaque voyage qu’il faisait.  

 

[17]    Pendant l’audience, il était évident que les appelants ne pouvaient pas faire la distinction entre les rôles du travailleur en tant qu’actionnaire et en tant que travailleur. En tant qu’actionnaire, le travailleur a engagé des dépenses au nom du payeur. Pendant la période en cause, il a assumé les frais associés à l’achat de nouveaux coussinets et à des travaux de mécanique pour les freins du camion. Il est intéressant de souligner le fait que lorsqu’on a demandé au travailleur s’il pouvait être congédié, il a répondu que non, que ses actions devaient être rachetées. Après que la représentante ait insisté, il a conclu qu’il pourrait être congédié pour motif valable.  

 

[18]    Après avoir examiné toute la preuve dont j’ai été saisie et après avoir appliqué les critères énoncés dans l’arrêt Wiebe Door à la preuve, je conclus que le travailleur était clairement un employé du payeur et qu’il exerçait un emploi ouvrant droit à pension pendant les années 2005 et 2006.

 

[19]    Les appels sont rejetés.

         

         

 

       Signé à Ottawa, Canada, ce 28e jour de septembre 2007.

 

 

« V.A. Miller »

Juge V.A. Miller

 

 

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 7e jour de novembre 2007.

 

 

Hélène Tremblay, traductrice


RÉFÉRENCE :                                  2007CCI580

 

N° DE DOSSIER :                             2007-1048(CPP) et 2007-1049(CPP)

 

INTITULÉ :                                       Boulder Creek Holdings Inc. c. M.R.N.

                                                          et Jaie Moore c. M.R.N.

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Kelowna (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 14 septembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR         L’honorable juge Valerie Miller

 

DATE DU JUGEMENT MODIFIÉ : Le 17 octobre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Représentante des appelants :

Caryn Cooke

Avocate de l’intimé :

Me Pavanjit Mahil

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                          Nom :                     

 

                        Cabinet :

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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