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Dossier : 2007-625(GST)I

ENTRE :

ANDREW BYRNES,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 4 décembre 2007 à Winnipeg (Manitoba)

 

Devant : L’honorable juge L.M. Little

 

Comparutions :

 

 

Pour l’appelant:

L’appelant lui-même

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Melissa Danish

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel à l’égard de la cotisation établie en vertu de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise pour la période débutant le 1er octobre 2001 et se terminant le 31 décembre 2001, dont l’avis est daté du 27 septembre 2006, est accueilli sans dépens, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation, conformément aux motifs du jugement ci-joints.

 


Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 24e jour de janvier 2008.

 

 

Juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de février 2008.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.L, LL.B.


 

 

 

Référence : 2008CCI57

Date : 20080124

Dossier : 2007-625(GST)I   

ENTRE :

ANDREW BYRNES,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[traduction française officielle]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Little

 

A.      FAITS

 

[1]     L’appelant exploite une entreprise, en tant que propriétaire unique, sous le nom de Country Club Motors (l’« entreprise »).

 

[2]     L’entreprise exerce des activités de construction, d’aménagement paysager et de déneigement à Winnipeg. L’entreprise est un inscrit aux fins de la Loi sur la taxe d’accise (la « Loi »).

 

[3]     L’entreprise est propriétaire de deux véhicules « bobcat », d’une pelle rétrocaveuse, d’un camion-benne et de divers autres outils et équipements servant à ses activités.

 

[4]     L’appelant a affirmé avoir retenu les services d’un cabinet d’expertise comptable, O’Grady Accounting, afin qu’il remplisse et produise les déclarations de taxe sur les produits et services (les « déclarations de TPS ») de l’entreprise.

 

[5]     L’appelant a produit une déclaration de TPS pour la période débutant le 1er octobre 2001 et se terminant le 31 décembre 2001 (la « période »). L’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») a reçu la déclaration le 13 février 2002. Dans la déclaration de TPS en question, l’appelant a déclaré un montant de taxe perçue de 588 $, et il a demandé un crédit de taxe sur les intrants de 310,79 $, qui a ramené le  total de taxe nette à 277,21 $. La déclaration de TPS a été admise telle qu’elle a été produite.

 

[6]     En 2004 ou en 2005, des fonctionnaires de l’ARC ont communiqué avec  l’appelant au sujet d’un montant de TPS dû par l’entreprise.

 

[7]     L’appelant a dit avoir été surpris d’apprendre, suite à la vérification faite par l’ARC, qu’un problème relatif à la TPS existait quant à son entreprise, puisqu’il croyait qu’O’Grady Accounting s’occupait des déclarations de TPS de celle-ci.

 

[8]     L’appelant a déclaré avoir appris, durant l’année d’imposition 2005, que Mme O’Grady ne produisait pas les déclarations de TPS de l’entreprise parce qu’elle avait subi un accident cérébrovasculaire et une dépression nerveuse.

 

[9]     Les fonctionnaires de l’ARC ont établi une nouvelle cotisation à l’endroit de l’entreprise pour un montant de TPS supplémentaire que celle-ci devait payer. L’appelant a soutenu avoir réglé la dette de TPS de son entreprise grâce à des fonds obtenus en grevant sa résidence d’une deuxième hypothèque.

 

[10]    Lorsqu’il a récupéré tous les documents de l’entreprise détenus par le cabinet O’Grady Accounting, l’appelant a découvert que ce dernier n’avait pas demandé les crédits de taxe sur les intrants relatifs à l’achat d’un tracteur chez Brandt Tractor Ltd. par l’entreprise le 31 octobre 2001. La facture pour le tracteur s’élevait à 50 160 $, et un montant de TPS de 3 080 $ avait été payé.

 

[11]    L’appelant, dans une lettre datée du 28 avril 2006, a écrit à l’ARC pour demander que la déclaration de TPS se rapportant à la période en cause soit modifiée, et qu’un crédit de taxe sur les intrants supplémentaire de 3 080 $ soit accordé à l’entreprise. Dans sa lettre, l’appelant a demandé un remboursement pour la période et l’a calculé ainsi :

 

           Taxe nette déclarée                              277,21 $

           Modification

           Crédit de taxe sur les intrants

           supplémentaire                                            3 080,00 $

           Remboursement demandé                            2 802,79 $

 

(Note : Les fonctionnaires de l’ARC reconnaissent que la lettre constitue une déclaration de TPS modifiée.)

 

[12]    Le ministre du Revenu national (le « ministre »), au moyen d’un avis de cotisation envoyé le 27 septembre 2006, a refusé d’accorder le remboursement de TPS demandé par l’appelant au motif que le délai de 4 ans prévu au paragraphe 225(4) de la Loi à l’intérieur duquel l’appelant devait demander le crédit de taxe sur les intrants était écoulé.

 

B.      QUESTION EN LITIGE

 

[13]    La question en litige est de savoir si l’appelant a droit à un crédit de taxe sur les intrants supplémentaire de 3 080 $ pour l’équipement qu’il a acquis le 31 octobre 2001.

 

[14]    Le ministre soutient que l’appelant a omis de demander le crédit de taxe sur les intrants dans une déclaration d’impôt produite pour la période se terminant le 31 décembre 2001 dans le délai de quatre ans prévu par le paragraphe 225(4) de la Loi.

 

C.      ANALYSE ET DÉCISION

 

[15]    Dans l’avis de décision transmis à l’appelant, le ministre a fait le commentaire suivant :

 

[traduction]

 

Le paragraphe 225(4) de la Loi sur la taxe d’accise prévoit que le crédit de taxe sur les intrants ne peut être demandé que dans les 4 années suivant le jour où devait être produite la première déclaration de TPS permettant à l’inscrit de réclamer ce crédit de taxe. Dans votre cas, le crédit de taxe sur les intrants en cause se rapporte à la période de déclaration visant les mois d’octobre à décembre 2001. Vous deviez demander ce crédit de taxe sur les intrants au plus tard le 31 janvier 2006. Vous avez produit une déclaration de TPS modifiée le 28 avril 2006 et y avez demandé le crédit de taxe sur les intrants. Le crédit de taxe sur les intrants a donc été demandé après l’expiration du délai imparti.

 

[16]    L’alinéa 225(4)b) de la Loi est rédigé en ces termes :

 

225(4)  La personne qui demande un crédit de taxe sur les intrants pour sa période de déclaration donnée doit produire une déclaration aux termes de la présente section au plus tard le jour suivant :

 

[…]

 

b)  dans le cas où la personne n’est pas une personne déterminée au cours de la période donnée, le jour où la déclaration aux termes de la présente section est à produire pour la dernière période de déclaration de la personne se terminant dans les quatre ans suivant la fin de la période donnée;

 

[…]

 

[17]    Le paragraphe 296(2) de la Loi est ainsi rédigé :

 

296(2) Le ministre, s’il constate les faits suivants relativement à un montant (appelé « crédit déductible » au présent paragraphe) lors de l’établissement d’une cotisation concernant la taxe nette d’une personne pour une période de déclaration donnée de celle-ci, prend en compte, sauf demande contraire de la personne, le crédit déductible dans l’établissement de la taxe nette pour cette période comme si la personne avait demandé le crédit déductible dans une déclaration produite pour cette période :

 

a) le crédit déductible aurait été accordé à titre de crédit de taxe sur les intrants pour la période donnée ou à titre de déduction dans le calcul de la taxe nette pour cette période s’il avait été demandé dans une déclaration produite aux termes de la section V pour cette période à la date limite où la déclaration pour cette période était à produire et si les exigences en matière de documentation, énoncées aux paragraphes 169(4) ou 234(1), qui s’appliquent au crédit avaient été remplies;

 

b) le crédit déductible n’a pas été demandé par la personne dans une déclaration produite avant le jour où l’avis de cotisation lui est envoyé ou, s’il l’a été, a été refusé par le ministre;

 

c) le crédit déductible serait accordé à titre de crédit de taxe sur les intrants ou de déduction dans le calcul de la taxe nette de la personne pour une de ses périodes de déclaration s’il était demandé dans une déclaration produite aux termes de la section V le jour où l’avis de cotisation est envoyé à la personne, ou serait refusé s’il était demandé dans cette déclaration du seul fait que le délai dans lequel il peut être demandé a expiré avant ce jour.

 

[18]    Il est important de noter qu’une modification qui est entrée en vigueur le  7 juillet 1996 a été apportée au paragraphe 296(2). Le passage « L’un des montants suivants peut entrer dans l’établissement de la cotisation […] » a été remplacé par « Le ministre […] lors de l’établissement d’une cotisation […] prend en compte […] ».

 

[19]    En raison de la formulation actuelle du paragraphe 296(2), je suis d’avis que l’appelant a le droit de demander un crédit de taxe sur les intrants lorsqu’il existe un crédit non demandé permettant de réduire le montant de taxe qu’il doit payer. Dans un tel cas, le délai prévu au paragraphe 225(4) ne s’applique pas.

 

[20]    Cette conclusion est aussi appuyée par le bulletin Nouvelles de la TPS/TVH produit par l’ARC au printemps 2004.

 

[21]    Les commentaires suivants se trouvent à la troisième page des Nouvelles de la TPS/TVH :

 

Vérification de la TPS nette – C'est une question d'équité

 

Le principe de « vérification de la taxe nette » permet à un inscrit qui fait l'objet d'une vérification d'être mis au courant autant des montants auxquels il a droit que de ses obligations. Il s'agit, après tout, d'une question d'équité.

 

En règle générale, un inscrit dispose d'un délai de quatre ans (deux ans pour les personnes déterminées) pour demander les crédits de taxe (CTI) sur les intrants. Lorsqu'il déclare la taxe nette pour une période de déclaration, l'inscrit peut inclure les CTI qui sont devenus disponibles au cours de cette période, de même que tout CTI non demandé au cours des quatre années précédentes (ou des deux années précédentes dans le cas des personnes déterminées).

 

[…]

 

Au moment d'établir la cotisation à l'égard de la taxe nette de l'inscrit pour une période de déclaration faisant l'objet d'une vérification, l'ARC est tenue de prendre en compte les CTI que l'inscrit n'a pas demandés pour cette période de déclaration même si le délai normal est expiré. Ces CTI non demandés doivent s'appliquer à des montants de taxe qui sont devenus exigibles au cours de la période de déclaration faisant l'objet de la vérification.

 

[22]    Il est clair que le bulletin soutient mon interprétation du paragraphe 296(2).

 

[23]    L’exemple présenté dans le bulletin étaie lui aussi ma conclusion.

 

[24]    Je reproduis ci-dessous l’exemple en question :

 

Le 30 avril 2001, l'entreprise B, une personne déterminée dont l'exercice se termine le 30 juin, a inscrit les montants suivants dans sa déclaration de TPS/TVH pour la période du 1er mars 2001 au 31 mars 2001 :

 

TPS/TVH percevable et perçue

40 000 $

CTI demandés

25 000 $

Taxe nette

15 000 $

 

En novembre 2003, la période du 1er au 31 mars 2001 fait l'objet d'une vérification. Lors de la vérification, le vérificateur relève qu'un montant de 10 000 $ de CTI n'a pas été demandé pour la TPS/TVH payée au cours de cette période de déclaration visée. Bien que l'échéance pour demander ces CTI ait pris fin le 31 juillet 2003, le vérificateur doit les prendre en compte au moment d'établir la cotisation à l'égard de la taxe nette pour cette période de déclaration. Cependant, les CTI non demandés qui s'appliquent à des montants de taxe qui sont devenus exigibles au cours de périodes de déclaration antérieures à la période vérifiée ne seront pas pris en compte.

 

[25]    Dans Charles Beaupré c. Canada, 2005 CAF 168, le juge Létourneau de la Cour d’appel fédérale s’est exprimé en ces termes :

 

Les bulletins d'interprétation ne lient pas la Cour quant à l'interprétation à donner à une disposition législative. Mais lorsque l'interprétation suggérée au bulletin est la bonne, il n'y a alors aucune raison de l'ignorer.

 

[26]    L’appel est accueilli, sans dépens.

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique) ce 24e jour de janvier 2008.

 

 

 

 

Juge Little

 

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de février 2008.

                                      

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.L, LL.B.


 

 


RÉFÉRENCE :

2008CCI57

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :

2007-625(GST)I

 

INTITULÉ :

Andrew Byrnes et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Winnipeg (Manitoba)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 4 décembre 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 24 janvier 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

Avocate de l’intimée :

Me Melissa Danish

 

AVOCAT(E) INSCRIT(E) AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa (Canada)

 

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