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Dossier : 2005-3944(IT)G

ENTRE :

PAUL BEAUDOIN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 22 janvier 2008, à Ottawa (Ontario)

 

Devant : L'honorable juge François Angers

 

Comparutions :

 

Pour l'appelant :

L'appelant lui-même

Avocat de l'appelant :

Me Martin Gentile

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L'appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard des années d'imposition 1997 et 2000 est accueilli et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

L'appel des cotisations établies en vertu de la Loi de l'impôt sur le revenu à l'égard des années d'imposition 1998 et 1999 est rejeté, selon les motifs du jugement ci-joints.

 

Chaque partie assumera ses dépens.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de février 2008.

 

 

 

« François Angers »

Juge Angers


 

 

 

Référence : 2008CCI65

Date : 20080225

Dossier : 2005-3944(IT)G

ENTRE :

PAUL BEAUDOIN,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Angers

 

[1]              L'appelant interjette appel d'une nouvelle cotisation émise par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en date du 27 mai 2003. Par cet avis de nouvelle cotisation, le ministre a modifié les revenus de l'appelant pour les années d'imposition 1997, 1998, 1999 et 2000 de la façon suivante:

 

 

Revenus déclarés

Revenus non déclarés

Revenus

révisés

1997

28 030 $

11 961 $

39 991 $

1998

4 070 $

30 649 $

34 719 $

1999

13 295 $

24 108 $

37 403 $

2000

3 811 $

31 308 $

35 119 $

 

[2]              Le ministre a, de plus, imposé la pénalité prévue au paragraphe 163(2) de la Loi de l'impôt sur le revenu (ci-après appelé la « Loi »), pénalité qui a été calculée relativement à chacun des montants et imposée pour chacune des années en cause.

 

[3]              Les calculs de revenus non-déclarés ont été effectués selon la méthode de l'avoir net. Selon le ministre, les montants non-déclarés dans le tableau constituent des revenus que l'appelant a omis de déclarer et qui doivent être pris en considération aux fins du calcul de ses impôts pour les années en cause.

 

[4]              Le ministre soutient également que l'appelant, en produisant ses déclarations de revenu pour les années d'imposition 1997 à 1999 inclusivement, n’a pas présenté sa situation réelle car il a omis de déclarer des revenus importants. Le ministre soutient donc qu'il était justifié dans les circonstances, et ce, aux termes des paragraphes 152(4) et 152(7) de la Loi, d’établir une nouvelle cotisation après l’expiration de la période normale de cotisation. Finalement, le ministre soutient que l'appelant a fait sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, de faux énoncés ou une omission dans ses déclarations de revenus pour les années d'imposition 1997 à 2000 inclusivement justifiant ainsi l'imposition de la pénalité prévue au paragraphe 163(2) de la Loi.

 

[5]              Au cours des années en cause, l'appelant exploitait une entreprise dans le domaine de la construction; il faisait du déneigement, des excavations et l'installation de fosses septiques. La preuve a révélé que l'appelant ne tenait aucun registre comptable pour son entreprise durant les années en cause et qu'il remplissait lui-même ses déclarations de revenu.

 

[6]              L'appelant a fait l'objet d'une vérification en 2003. Selon le vérificateur, l'appelant s'est montré très peu coopératif et a maintenu qu'il n'avait fait aucun revenu en 1997 et 1998 de son entreprise de déneigement et d'excavation. Le vérificateur a cependant réussi à obtenir de certains fournisseurs des preuves d'achat démontrant clairement que l'appelant avait acheté certains matériaux montrant que ce dernier a effectivement réalisé des travaux d'excavation durant ces deux années.

 

[7]              Suite à des demandes péremptoires visant l'obtention des comptes de banque, l'appelant a fourni des réponses à un questionnaire visant leur coût de la vie, et les chiffres ont été calculés selon la méthode de l’avoir net. Les chiffres figurant sous la rubrique « dépenses personnelles non identifiées » sont les seuls visés par l’objection soulevée par l'appelant à l'audience.

 

[8]              Son objection est fondée sur le fait que le vérificateur n’a accepté que la moitié environ des reçus constituant des dépenses d'entreprise, ce qui augmente par conséquent le montant figurant dans la rubrique de dépenses personnelles non-identifiées et nécessairement l'écart de revenus. L'appelant n'a cependant produit en preuve aucun reçu ni apporté une quelconque explication pouvant me permettre de modifier quoique ce soit dans les chiffres obtenus selon la méthode de l'avoir net.

 

[9]              Le vérificateur a motivé son refus d'accorder près de la moitié des dépenses par le fait qu'il lui a été impossible de rattacher la dépense visée par le reçu à un retrait bancaire correspondant. Si l'appelant paye des factures comptant, c'est donc dire qu'il dispose d'argent liquide qu'il n'a pas par conséquent déposé. La vérification a aussi établi que l'appelant avait négocié plusieurs chèques sans que les montants soient déposés. Puisque l'appelant ne tenait aucun registre comptable pour son entreprise, les vérificateurs ont été obligés de reconstituer les transactions commerciales de l'appelant durant les années en cause.

 

[10]         L'appelant n'a pas déclaré de revenu de son entreprise d'excavation et de déneigement du moins dans ses déclarations de revenu pour les années d'imposition 1997 et 1998. Les vérificateurs, je le rappelle, ont cependant obtenu de celui-ci des reçus de dépenses reliées à ces deux activités pour les deux années en question. Ils ont aussi obtenu les copies d'achat de fosses septiques faites par l'appelant durant ces années. À l'audience, lorsqu’il lui a été demandé s’il avait exploité son entreprise au cours des années en question, l'appelant a été évasif, en dépit des reçus démontrant qu’il s’était livré à certaines activités; il a finalement reconnu qu'il avait exploité son entreprise dans ce domaine au cours de ces deux années.

 

[11]         Les questions en litige sont les suivantes :

 

Premièrement, l'appelant a-t-il fait des déclarations de revenu erronées pour les années d'imposition 1997 à 1999 inclusivement?

 

Deuxièmement, est-ce à bon droit que ministre a ajouté aux revenus déclarés par l'appelant des montants de 11 961 $ pour l'année d'imposition 1997, de 30 649 $ pour l'année d'imposition 1998, de 24 108 $ pour l'année d'imposition 1999 et de 31 308 $ pour l'année d'imposition 2000?

 

Troisièmement, le ministre a-t-il dûment imposé des pénalités à l'appelant pour les années d'imposition 1997 à 2000 inclusivement, conformément au paragraphe 163(2) de la Loi?

 

 

[12]         Le paragraphe 152(4) de la Loi permet au ministre d’établir une cotisation après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation :

 

Cotisation et nouvelle cotisation

 

Le ministre peut établir une cotisation, une nouvelle cotisation ou une cotisation supplémentaire concernant l'impôt pour une année d'imposition, ainsi que les intérêts ou les pénalités, qui sont payables par un contribuable en vertu de la présente partie ou donner avis par écrit qu'aucun impôt n'est payable pour l'année à toute personne qui a produit une déclaration de revenu pour une année d'imposition. Pareille cotisation ne peut être établie après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année que dans les cas suivants :

 

(a)     le contribuable ou la personne produisant la déclaration :

 

(i)                soit a fait une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou a commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la présente loi,

(ii)              soit a présenté au ministre une renonciation, selon le formulaire prescrit, au cours de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année;

 

(b)     la cotisation est établie avant le jour qui suit de trois ans la fin de la période normale de nouvelle cotisation applicable au contribuable pour l'année et, selon le cas :

 

(i)         est à établir en conformité au paragraphe (6) ou le serait si le contribuable avait déduit un montant en présentant le formulaire prescrit visé à ce paragraphe au plus tard le jour qui y est mentionné,

(ii)        est établie par suite de l'établissement, en application du présent paragraphe ou du paragraphe (6), d'une cotisation ou d'une nouvelle cotisation concernant l'impôt payable par un autre contribuable,

(iii)       est établie par suite de la conclusion d'une opération entre le contribuable et une personne non-résidente avec laquelle il avait un lien de dépendance,

(iv)       est établie par suite d'un paiement supplémentaire ou d'un remboursement d'impôt sur le revenu ou sur les bénéfices effectué au gouvernement d'un pays étranger, ou d'un état, d'une province ou autre subdivision politique d'un tel pays, ou par ce gouvernement,

(v)        est établie par suite d'une réduction, opérée en application du paragraphe 66(12.73), d'un montant auquel il a été censément renoncé en vertu de l'article 66,

(vi)       est établie en vue de l'application des paragraphes 118.1(15) ou (16).

 

[13]         En l'espèce, il est évident que, vu la preuve, l'appelant a omis de déclarer ses revenus provenant de ses activités de déneigement et d'excavation pour les années 1997 et 1998 alors qu'il avait en sa possession des reçus de dépenses montrant qu'il a fait des achats et donc effectué des travaux de ce genre. Il a d'ailleurs fini par admettre qu'il a effectivement exploité son entreprise durant ces deux années. Selon la prépondérance des preuves, je peux conclure qu'il n'a pas déclaré tous ses revenus reliés aux activités de déneigement et d'excavation en 1999. À mon avis, le ministre était donc justifié, dans les circonstances, d’établir une cotisation à l’égard de l'appelant après l'expiration de la période normale de nouvelle cotisation. Le ministre a donc établi, selon la prépondérance des probabilités, que l'appelant a fait des déclarations de revenu inexactes pour les années d'imposition 1997 à 1999.

 

[14]         Quant à la question de savoir si le ministre a ajouté à bon droit aux revenus déclarés par l'appelant des montants de 11 961 $ pour l'année 1997, 30 649 $ pour l'année 1998, 24 108 $ pour l'année 1999 et 31 308 $ pour l'année 2000, je dois accueillir l'appel pour les années 1997 et 2000. En effet, à l’ouverture de l'audience, le ministre a consenti à un jugement réduisant le montant des revenus pour 1997 de 11 961 $ à 1 960 $, et ceux relatifs à 2000 de 31 308 $ à 30 307 $. Les pénalités devront évidemment être imposées en fonction de ces nouveaux montants.

 

[15]         On ne saurait nier que le calcul du revenu d'un contribuable selon la méthode de l'avoir net ne reflète pas nécessairement la réalité; et une des façons pour éviter ce résultat, il revient au contribuable de tenir les registres comptables adéquats pour son entreprise et de conserver les pièces justificatives. En l'espèce, l'appelant a choisi de ne pas tenir des registres adéquats, de conserver des factures et même de ne pas déclarer tous ses revenus. Au vu de la preuve, il m'est impossible d’apporter quelque modification que ce soit aux chiffres résultant de la méthode de l’avoir net pour les années en cause, notamment ceux des revenus non-déclarés.

 

[16]         L'appelant ne m'a donc pas convaincu, selon la prépondérance des probabilités, qu’était injustifié l’ajout par le ministre, de ces montants aux revenus déjà déclarés par l'appelant, sous réserve, évidemment, des modifications présentées par le ministre pour les années 1997 et 2000.

 

[17]         Le ministre a également imposé des pénalités pour les années en cause. Le paragraphe 163(2) de la Loi dispose :

 

Faux énoncés ou omissions. Toute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde dans l'exercice d'une obligation prévue à la présente loi ou à son règlement, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état ou une réponse — appelé « déclaration » au présent article — rempli, produit ou présenté, selon le cas, pour une année d'imposition conformément à la présente loi ou à son règlement, ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d'une pénalité égale, sans être inférieure à 100 $, à 50% du total des montants suivants 

 

 

[18]         Ayant déjà conclu que l'appelant a fait des déclarations de revenu erronées et vu le fait que l'appelant a admis avoir fait des déclarations erronées aux vérificateurs quant à ses activités d’entrepreneur, c’est à bon droit que le ministre a imposé les pénalités prévues au paragraphe 163(2).

 

[19]         L'appel est accueilli et les cotisations sont déférées au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelles cotisations : les montants de revenu non-déclarés pour 1997 et 2000 seront modifiés conformément à ce qu’a consenti le représentant du ministre : une réduction à 1 960 $ pour l'année d'imposition 1997 et à 30 307 $ pour l'année d'imposition 2000 sans oublier l’ajustement des pénalités. L'appel des cotisations à l'égard des années d'imposition 1998 et 1999 est rejeté et les cotisations sont maintenues. Chaque partie assumera ses dépens.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 25e jour de février 2008.

 

 

 

« François Angers »

Juge Angers

 

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI65

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2005-3944(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Paul Beaudoin et Sa Majesté La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 25 janvier 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge François Angers

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 22 février 2008

 

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l'appelant :

 

L'appelant lui-même

Avocat de l'intimée :

Me Martin Gentile

 

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

       Pour l'appelant:

 

                     Nom :                           

 

                 Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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