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Dossier : 2006-2353(IT)G

ENTRE :

 

507582 B.C. LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de

John Frank Krmpotic (2006-2354(IT)G) et de

507582 B.C. Ltd. (2006-2355(GST)I)

le 6 mars 2008, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

 

Devant : L’honorable juge T. E. Margeson

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Alistair Campbell

Avocate de l’intimée:

Me Susan Wong

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel de la cotisation établie en application de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2001 de l’appelante est admis et la cotisation est annulée.

 

          L’appelante a droit à ses dépens, à taxer, dans la présente action.

 

       Signé à Ottawa, Ontario, ce 20e jour de mai 2008.

 

« T. E. Margeson »

Juge Margeson

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de septembre 2008.

 

Christian Laroche, juriste-traducteur


 

 

 

 

Dossier : 2006-2354(IT)G

ENTRE :

 

JOHN FRANK KRMPOTIC,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de

507582 B.C. Ltd. (2006-2353(IT)G et 2006-2355(GST)I)

le 6 mars 2008, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

 

Devant : L’honorable juge T. E. Margeson

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelant :

Me Alistair Campbell

Avocate de l’intimée :

Me Susan Wong

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

          L’appel de la cotisation établie en application de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2000 de l’appelant est admis et la cotisation est annulée.

 

          L’appelant a droit à ses dépens, à taxer, dans la présente action.

 

       Signé à Ottawa, Ontario, ce 20e jour de mai 2008.

 

« T. E. Margeson »

Juge Margeson

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de septembre 2008.

 

Christian Laroche, juriste-traducteur

 


 

 

 

Dossier : 2006-2355(GST)I

ENTRE :

 

507582 B.C. LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec les appels de

John Frank Krmpotic (2006-2354(IT)G) et de

507582 B.C. Ltd. (2006-2353(IT)G

le 6 mars 2008, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

 

Devant : L’honorable juge T. E. Margeson

 

Comparutions :

 

Avocat de l’appelante :

Me Alistair Campbell

Avocate de l’intimée :

Me Susan Wong

____________________________________________________________________

JUGEMENT

          L’appel de la cotisation établie en application de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise pour la période allant du 1er juin 1997 au 31 mai 2002, laquelle est datée du 21 mars 2006 et porte le numéro 11GU0001881, est accueilli et la cotisation est annulée.

 

          L’appelante a droit à ses dépens, à taxer, dans la présente action.

 

       Signé à Ottawa, Ontario, ce 20e jour de mai 2008.

 

« T. E. Margeson »

Juge Margeson

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de septembre 2008.

 

Christian Laroche, juriste-traducteur


 

 

Référence : 2008CCI220

Date : 20080520

Dossier : 2006-2353(IT)G

ENTRE :

507582 B.C. LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2006-2354(IT)G

ET ENTRE :

JOHN FRANK KRMPOTIC,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée,

 

Dossier : 2006-2355(GST)I

ET ENTRE :

507582 B.C. LTD.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

Le juge Margeson

 

[1]     Les parties se sont mises d’accord pour que toutes les affaires soient entendues sur preuve commune.

 

[2]     Les parties se sont entendues sur un exposé conjoint des faits partiel, comme suit :

 

[traduction]

 

EXPOSÉ CONJOINT DES FAITS PARTIEL

 

Pour les besoins des présents appels, les parties conviennent des faits énoncés dans le présent exposé des faits partiel. Les parties conviennent que d’autres éléments de preuve pourront être présentés par l’une ou l’autre partie, dans la mesure où ces éléments ne sont pas incompatibles avec les faits suivants :

 

1.      L’appelante 507582 B.C. Ltd. (« 507582 ») est une société constituée en vertu des lois de la Colombie‑Britannique; il s’agit d’une société privée sous contrôle canadien selon la définition figurant au paragraphe 125(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

 

2.      Pendant la période pertinente, l’exercice de 507582 prenait fin le 31 mai.

 

3.      En ce qui concerne la taxe sur les produits et services (la « TPS ») :

 

a)      507582 a été inscrite en vertu de la Loi sur la taxe d’accise, à compter du 1er juin 1996, et elle s’est vu attribuer le numéro d’inscription 89419 1451 aux fins de la TPS;

 

b)      507582 produit des déclarations relatives à la TPS et elle a déclaré un montant percevable total nul au titre de la TPS ainsi que des crédits de taxe sur les intrants totaux (les « CTI ») nuls pour la période allant du 1er juin 1997 au 31 mai 2002 (la « période »).

 

4.      Pendant la période pertinente, l’unique actionnaire de 507582 était Kuna Enterprises Ltd. (« Kuna Enterprises »), une société de la Colombie‑Britannique et une « société canadienne imposable » selon la définition figurant au paragraphe 89(1) de la Loi.

 

5.      Pendant la période pertinente, l’unique actionnaire de Kuna Enterprises était Kuna Holdings Ltd. (« Kuna Holdings »), une société de la Colombie‑Britannique et une « société canadienne imposable » selon la définition figurant au paragraphe 89(1) de la Loi.

 

6.      Pendant la période pertinente, l’unique actionnaire de Kuna Holdings était l’appelant John Frank Krmpotic, un particulier qui résidait au Canada pour l’application de la Loi.

 

7.      Pendant la période pertinente, M. Krmpotic était l’un des deux dirigeants et administrateurs de 507582. L’autre dirigeant et administrateur était son père, John Ivan Krmpotic.

 

8.      Pendant la période pertinente, M. Krmpotic était l’un des deux administrateurs de Kuna Holdings. L’autre administrateur était John Ivan Krmpotic.

 

9.      Pendant la période pertinente, M. Krmpotic était l’un des deux dirigeants et administrateurs de Kuna Enterprises. L’autre dirigeant et administrateur était John Ivan Krmpotic.

 

10.  Mme Betty Krmpotic était un particulier qui résidait au Canada pour l’application de la Loi. Mme Krmpotic est la mère de John Frank Krmpotic.

 

11.  Pendant la période pertinente, 507582 s’occupait d’aménagement, de construction et de vente de biens immeubles à usage d’habitation.

 

12.  En 1996, 597582 a acheté un bien immeuble, à Whistler en Colombie‑Britannique, dont l’adresse municipale est le 4405 Blackcomb Way, à Whistler, en Colombie‑Britannique. En 1996 et en 1997, 507582 a construit sur ce bien immeuble un ensemble en copropriété composé de maisons en rangée, appelé Granite Court (l’« ensemble »).

 

13.  Vers le mois de juillet 1997, 507582 a commencé à vendre les unités de l’ensemble.

 

14.  507582 a déclaré la vente de toutes les unités de l’ensemble, sauf l’unité ici en cause, dans ses déclarations de revenus pour les années d’imposition au cours desquelles les unités ont été vendues.

 

15.  507582 n’a pas inclus le coût de l’unité ici en cause dans son bilan, à la fin de son année d’imposition 2000, ni dans son bilan d’ouverture pour son année d’imposition 2001.

 

16.  En préparant les états financiers et les déclarations de revenus des sociétés de 507582 pour l’exercice qui a pris fin le 31 mai 2000, les comptables externes de 507582 ont déduit le coût de l’unité ici en cause du revenu de 507582 au titre du coût des marchandises vendues. Le montant déduit au titre du coût des marchandises vendues était de 224 361 $.

 

17.  En 2001, l’autorité évaluatrice de la Colombie‑Britannique a évalué l’unité ici en cause à 442 000 $.

 

18.  507582 a cessé de produire des déclarations annuelles auprès du registre des sociétés et du registre des biens immobiliers de la Colombie‑Britannique après le mois de novembre 2001 et elle a été dissoute pour non‑production.

 

19.  Le 21 avril 2005, le ministre du Revenu national (le « ministre ») a établi une nouvelle cotisation à l’égard de l’année d’imposition 2000 de M. Krmpotic en vue d’ajouter le montant de 442 000 $ à son revenu à titre d’avantage relatif au transfert de l’unité ici en cause, et en vue d’imposer une pénalité pour faute lourde en application du paragraphe 163(2) de la Loi.

 

20.  La « période normale de nouvelle cotisation » à l’égard de l’année d’imposition 2000 de M. Krmpotic a pris fin le 7 juin 2004. M. Krmpotic n’a pas déposé de renonciation selon le formulaire prescrit au cours de la période normale de nouvelle cotisation à l’égard de cette année‑là.

 

21.  Le 19 juillet 2005, le ministre a établi une nouvelle cotisation à l’égard de l’année d’imposition 2001 de 507582 en vue d’inclure le produit de la disposition au montant de 442 000 $ à l’égard du transfert de l’unité ici en cause et en vue d’imposer une pénalité pour faute lourde en application du paragraphe 163(2) de la Loi.

 

22.  Le 21 mars 2006, le ministre a établi une cotisation à l’égard de 507582 pour la TPS nette au montant de 30 940 $, des pénalités au montant de 18 121,76 $ et des intérêts au montant de 4 516,30 $ à l’égard du transfert de l’unité ici en cause au cours de la période. Le montant de la pénalité comprenait une pénalité pour faute lourde de 7 735 $ établie en vertu de l’article 285 de la partie IX de la Loi sur la taxe d’accise.

 

23.  Les appelants ont déposé des avis d’opposition aux cotisations susmentionnées, lesquelles ont par la suite été ratifiées par le ministre.

 

FAIT à Vancouver (Colombie‑Britannique), le 5 mars 2008.

 

Cet exposé conjoint des faits partiel énonce les cotisations dont il est fait appel.

 

[3]     En plus de l’exposé conjoint des faits partiel, une preuve a été soumise, pour le compte de l’appelante, par John Frank Krmpotic, qui a témoigné être l’unique actionnaire de Kuna Holdings Ltd. (« Kuna Holdings ») et être l’un de deux dirigeants et administrateurs de 507582 B.C. Ltd. (la « société »). M. Krmpotic a déclaré que, pendant la période pertinente, la société s’occupait d’aménagement, de construction et de vente de biens immeubles à usage d’habitation. Entre 1996 et l’année 2000, la société a construit 38 maisons en rangée à Whistler (Colombie‑Britannique), communément appelées Granite Court (l’« ensemble »). L’adresse municipale était le 4405 Blackcomb Way, à Whistler, en Colombie‑Britannique (la « propriété »). M. Krmpotic avait de l’expérience dans le domaine du bâtiment et de la construction.

 

[4]     En 1996, M. Krmpotic a constaté qu’il y avait des possibilités à Whistler; il a visité la propriété et il l’a achetée; la propriété a fait l’objet d’un zonage et elle a été mise en valeur. M. Krmpotic a identifié le document de travail du vérificateur produit sous la cote R‑1, onglet 1, lequel se rapporte à l’année d’imposition 2001. Il a dit qu’il s’agissait du registre des ventes concernant ce complexe.

 

[5]     En 1997, les conditions préalables aux ventes pour ce complexe étaient remplies. Ils ont retiré les unités du marché, étant donné que les gens les revendaient immédiatement. Vers la fin des travaux, ils ont remis les unités sur le marché. L’avant‑dernière unité a été vendue au prix de 299 000 $ comme le montre le document versé à l’onglet I. Il restait une unité et ils voulaient la conserver pour l’avenir, à des fins d’investissement. Elle aidait au financement. L’unité 102 était une unité située aux deuxième et troisième étages. Elle était utilisée comme maison modèle, de sorte qu’elle était meublée.

 

[6]     Le témoin a identifié le document produit sous la cote R‑1, onglet 27, soit le document de transfert en propriété franche pour l’unité 102. Le document indiquait qu’il avait été signé le 1er septembre 1999, mais le témoin a déclaré l’avoir signé à l’avance. Le document a été enregistré le 1er décembre 2000.

 

[7]     L’unité ici en cause a été transférée à la mère, Mme Betty Krmpotic, qui a été présentée comme étant une femme d’affaires, à Burnaby (Colombie‑Britannique).

 

[8]     M. Krmpotic voulait dissoudre la société parce qu’il ne voulait pas avoir à payer pour les rapports annuels ni engager d’autres dépenses, si la société poursuivait ses activités. Il a également ramené sa responsabilité à un montant inférieur. En transférant la propriété à sa mère, il aurait encore un actif. S’il dissolvait la société, tout bien appartenant à la société serait confisqué en faveur de la Couronne. Il disposait d’un délai de dix ans pour que la société soit reconstituée. La société a été dissoute au mois de novembre 2001.

 

[9]     M. Krmpotic a identifié l’acte de fiducie produit sous la cote R‑1, onglet 14, comme étant une copie conforme de l’acte de fiducie initial signé par Mme Krmpotic en faveur de la société pour l’unité 102, 4405 Blackcomb Way, à Whistler, en Colombie‑Britannique. Dans l’acte de fiducie, il était déclaré que Mme Krmpotic détenait la propriété en fiducie pour la société. Il était en outre déclaré que Mme Krmpotic n’avait pas de droit quel qu’il soit sur ladite unité et qu’elle la transférerait sur demande à la société pour la somme d’un dollar.

 

[10]    Ce document a été créé par le témoin le 1er décembre 2000 et il a été signé par la mère du témoin. Le témoin n’avait obtenu aucun conseil juridique au sujet du document.

 

[11]    Le témoin a donné des explications au sujet du document à sa mère, qui agissait comme secrétaire de la société. La mère était au courant du projet Granite. Elle comprenait ce dont il s’agissait.

 

[12]    Le document comportait une erreur en ce sens qu’il était question du 4450 Blackcomb Way, au lieu du 4405 Blackcomb Way. Or, la société n’a jamais été propriétaire du 4450 Blackcomb Way. L’unité n’avait jamais été utilisée ni louée. Personne au sein de la société n’utilisait l’unité à des fins personnelles.

 

[13]    M. Krmpotic a identifié la déclaration T‑2 et les renseignements annexés produits sous la cote R‑1, onglet 15, pour la période ayant pris fin le 31 mai 2000. Il a également identifié la déclaration T‑2 et les renseignements annexés produits sous la cote R‑1, onglet 16, au 31 mai 2000. Ce document montrait qu’il n’y avait rien dans l’inventaire des terrains et des travaux en cours. En outre, cela était erroné, étant donné que la société détenait encore l’unité ici en cause en fiducie. M. Krmpotic n’était pas au pays au moment où ces documents ont été préparés par les comptables de la société.

 

[14]    Le témoin n’a pas signé la déclaration T‑2 et les états financiers produits sous la cote R‑1, onglet 15, parce qu’il n’était pas au pays. Il était en Croatie.

 

[15]    Le témoin a admis que le coût total de l’inventaire avait été déduit même si l’unité ici en cause faisait encore partie de l’inventaire. Il s’agissait d’une erreur de la part des comptables.

 

[16]    Lors du contre‑interrogatoire, on a renvoyé M. Krmpotic à la pièce R‑1, onglet 27, soit le transfert en propriété franche établi en vertu du Land Title Act; il a affirmé qu’on lui avait remis une liasse de documents à signer le 1er septembre 1999 et qu’il y avait peut‑être des titres de copropriété et d’autres documents.

 

[17]    Le témoin a été interrogé au sujet des réponses qu’il avait données lors de l’interrogatoire préalable; il a dit que la réponse qu’il avait donnée à la question 61 n’était pas complète et qu’il aurait également dû mentionner qu’il voulait liquider la société, notamment pour des raisons de responsabilité. Il a également dit qu’il n’avait pas affirmé que l’on craignait que la Couronne puisse prendre possession de la propriété, parce que la question n’avait jamais été soulevée. Par conséquent, les réponses qu’il avait données à la question 61 ainsi qu’aux questions 64 à 74 n’étaient pas complètes. Il disposait d’un délai de dix ans pour atteindre ses objectifs.

 

[18]    On a renvoyé le témoin à l’acte de fiducie; il a déclaré que le document avait été rédigé en l’an 2000, mais qu’il avait été soumis à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC ») en 2006 seulement, après que l’opposition eut été faite. Il ne savait pas pourquoi il en était ainsi. Il était parfois à l’étranger parce que, en 2001, il achevait des travaux en Croatie. M. Desai s’occupait de la comptabilité, mais il n’avait pas l’acte de fiducie à sa disposition. Ce témoin n’a remis le document à personne pour qu’il soit transmis à l’ARC. Il ne savait pas pourquoi la société n’avait pas signé l’acte de fiducie comme sa mère l’avait fait.

 

[19]    Le témoin a renvoyé au document produit sous la cote R‑1, onglet 16; il a déclaré ne pas avoir signé la déclaration T‑2 pour l’année 1999. Selon ce qu’il se rappelait, il était à l’étranger. Lorsqu’il était au pays, il signait les documents. S’il n’avait pas signé la documentation concernant les autres années, c’était parce qu’il était à l’étranger, probablement en Croatie. Il n’avait pas informé M. Desai, son comptable, que la société allait conserver l’unité 102. M. Desai s’occupe encore des déclarations de la société et de celles du témoin.

 

[20]    On a encore une fois demandé au témoin pourquoi il voulait conserver l’unité 102. Le témoin a déclaré qu’il s’agissait d’une des unités les plus grosses, qu’elle était bien située et qu’il y avait une aire d’hélicoptère à proximité. Le témoin a décidé de conserver l’unité 102 lorsqu’il a vendu l’avant‑dernière unité. L’hypothèque avait été remboursée et la situation de la société était bonne.

 

[21]    M. Desai préparait les déclarations de la société et les documents financiers depuis que la société avait été constituée. Auparavant, il préparait les déclarations personnelles du témoin. Il s’occupait également des déclarations et des états de Kuna Enterprises Ltd.

 

[22]    Le témoin avait terminé sa douzième année; il avait suivi des cours dans le domaine de la construction, de l’arpentage et de la planification. Il s’était occupé de huit ou neuf projets immobiliers ou projets de construction différents. Il n’avait pas d’expérience en matière de comptabilité.

[23]    Lorsqu’on lui a demandé pourquoi il n’avait pas obtenu de conseils juridiques au sujet de la rédaction de l’acte de fiducie, le témoin a répondu qu’il croyait être capable de le faire lui‑même avec sa mère.

 

[24]    Lors du réinterrogatoire, le témoin a déclaré avoir constitué la société parce que cela facilitait la réalisation du projet. Il voulait également éviter toute responsabilité.

 

[25]    Mme Krmpotic a témoigné être la mère de M. Krmpotic. Elle connaissait la société en question. Cette société appartenait à son fils et celui‑ci avait construit des unités condominiales à Whistler. Mme Krmpotic n’est pas une dirigeante de la société. Elle s’occupait de la production des documents, de la remise des documents au comptable et des virements bancaires et elle avait le pouvoir de signer pour la société. Elle ne participait pas au projet Granite Court. Elle était au courant du projet; pendant la durée des travaux, elle recevait les factures s’y rapportant et les acquittait.

 

[26]    En ce qui concerne l’unité 102, Mme Krmpotic y était entrée une ou deux fois. L’unité servait de maison modèle. Le titre était enregistré en son nom, en fiducie, pour qu’elle détienne l’unité pour le compte de la société tant qu’ils n’auraient pas décidé de ce qu’il fallait en faire. Mme Krmpotic a signé l’acte de fiducie après que John le lui eut présenté. Elle en avait parlé avec lui auparavant. Elle détenait l’unité pour la société. Elle n’avait jamais signé pareil document auparavant. Elle a signé le document chez elle. Elle n’a jamais utilisé personnellement l’unité. Cette unité ne lui appartient pas.

 

[27]    Lorsqu’elle a été contre‑interrogée, Mme Krmpotic a affirmé encore une fois qu’elle détenait l’unité en fiducie et qu’elle croyait que son fils la lui avait transférée en fiducie pour bien des raisons, tant qu’il n’en ferait pas quelque chose. Quant à elle, il s’agissait uniquement de signer l’acte de fiducie.

 

[28]    Mme Krmpotic remettait tous les chèques oblitérés, les talons, les documents de transfert et les documents bancaires à M. Desai pour le compte de la société. Elle ne donnait pas d’instructions au sujet de la préparation des documents de la société. Elle n’avait pas conservé de copie de l’acte de fiducie.

 

[29]    M. Manoharlal Desai a témoigné être comptable agréé. Il agissait comme comptable des deux appelants depuis 1990. Il fournit des services comptables à de petits clients, notamment à des particuliers et à des entreprises.

 

[30]    Entre 1996 et 2002, le cabinet de M. Desai avait préparé les états mensuels, les déclarations relatives à la TPS et toute déclaration qui devait être présentée à l’ARC pour le compte de la société. M. Desai avait accès à des renseignements concernant les ventes, aux relevés bancaires, aux talons de chèques, aux carnets de dépôt et aux états d’évaluation de diverses propriétés; il était au courant du montant net des rentrées d’argent et des débours de fonds effectués pour l’appelante. Ces renseignements lui étaient donnés par Mme Krmpotic. Les renseignements étaient inscrits dans les programmes d’ordinateur du cabinet et dans le grand livre. M. Desai était au courant du projet, à Whistler.

 

[31]    M. Desai a été interrogé au sujet des divers états financiers de la société se rapportant à la présente affaire que son cabinet avait préparés. Il était fort bien au courant de ces documents et il avait accès aux états de rajustement lorsque chaque unité était vendue.

 

[32]    M. Desai a identifié la pièce A‑1, qui était une copie de la balance de vérification du grand livre de la société, en date du 30 novembre 1999. Il a confirmé l’énoncé des faits figurant aux paragraphes 15 et 16 de l’exposé conjoint des faits partiel et il a expliqué qu’il avait cru que le dernier lot avait été vendu, alors que ce n’était pas le cas. Il restait encore une unité après la fin de l’année et il s’agissait de l’unité ici en cause.

 

[33]    On a renvoyé M. Desai à la pièce R‑1, onglet 15, soit une déclaration T‑2 et des renseignements annexés concernant la société pour l’exercice ayant pris fin le 31 mai 2000. Le bilan indiquait qu’il ne restait pas d’unités et que l’inventaire était tombé à zéro. M. Desai a également identifié la pièce A‑2, qui était un extrait du grand livre pour l’exercice ayant pris fin le 31 mai 2000. M. Desai a dit que le grand livre résume toutes les opérations de la société pour cette période. On a renvoyé M. Desai à la page 3 du document qui montrait le coût des achats, de 224 361,45 $. En ce qui concerne l’unité en question, il était d’accord pour dire que la société avait déclaré en moins le revenu parce que le coût total de la dernière unité avait été radié, alors qu’il n’aurait pas dû l’être.

 

[34]    M. Desai a confirmé ne pas avoir reçu l’état de rajustement concernant l’unité ici en cause et il croyait que toutes les unités avaient été vendues. On a renvoyé M. Desai à la pièce R‑1, onglets 12 et 13, soit les déclarations de la société pour les périodes ayant pris fin les 31 mai 2001 et 2002. M. Desai a déclaré que, s’il n’y a rien dans l’inventaire, ils ne préparent pas d’états financiers. Dans la déclaration datée du 31 mai 2001, le seul revenu se rapportait aux hypothèques que la société possédait. En ce qui concerne la période du 31 mai 2002, il n’y avait pas d’états financiers parce qu’il n’y avait pas de revenu ni de dépenses et que seul un montant en argent de 3 310 $ était inscrit au titre des actifs. Aucun de ces documents n’avait été signé par M. Krmpotic, mais M. Desai avait néanmoins produit les déclarations.

 

[35]    Lors du contre‑interrogatoire, M. Desai a dit que son cabinet employait trois comptables agréés et comptait dix employés. Le personnel préparait les états et ces états étaient examinés par les comptables. La plupart du temps, s’il était au bureau lorsque les documents étaient apportés, il rencontrait la personne qui les livrait. Normalement, la société ne signe pas ses déclarations.

 

[36]    On a renvoyé M. Desai à l’acte de fiducie; il a affirmé qu’il ne l’avait vu que récemment. Il ne l’avait pas vu lorsqu’il avait préparé les déclarations des années 2000 et 2001. Lorsque le vérificateur avait demandé des renseignements, M. Krmpotic lui avait montré les documents. Son cabinet n’avait pas donné de conseils ou de renseignements à la société ou à M. Krmpotic au sujet de la fiducie. Son cabinet n’avait pas communiqué avec la société avant de préparer les états financiers qui ont donné lieu aux présentes actions. M. Desai n’avait jamais eu en sa possession un état de rajustement pour l’unité 102 et il ne revenait jamais en arrière pour faire le suivi, mais il supposait que les unités étaient toutes vendues.

 

[37]    M. Desai a identifié la pièce A‑3, qui était un sommaire de société de la Colombie‑Britannique pour la société, indiquant que la société avait été reconstituée, la date d’expiration étant le 4 octobre 2009.

 

[38]    Jason Brown était vérificateur à l’ARC. Il comptait dix années d’expérience. C’était lui qui avait établi la nouvelle cotisation d’impôt dans ce cas‑ci. Les nouvelles cotisations relatives à la TPS avaient été établies par quelqu’un d’autre par suite de la nouvelle cotisation qu’il avait établie.

 

[39]    On a renvoyé M. Brown à son document de travail, produit sous la cote R‑1, onglet 1. M. Brown a déclaré avoir effectué le travail par suite d’une autre vérification sur laquelle il travaillait. Il a décidé que la société appelante et M. Krmpotic étaient des actionnaires liés de la société faisant l’objet de la vérification. Il avait fait des recherches au sujet de la société et avait découvert qu’elle s’occupait de construction. Il avait fait des recherches dans leur base de données au sujet des transferts de propriété effectués par la société et il avait remarqué qu’il y avait eu un transfert de la société en faveur de Mme Krmpotic au montant d’un dollar. Il avait communiqué avec le comptable de la société au mois de novembre 2004. Le comptable lui avait dit que toutes les ventes avaient été enregistrées de la façon appropriée par la société. Il a demandé des documents connexes pour confirmer les déclarations. N’ayant pas obtenu de réponse, il a communiqué encore une fois avec eux et il n’y a pas eu de réponse.

 

[40]    Au mois de janvier 2005, M. Brown a communiqué avec le comptable et il a demandé la documentation de la société pour les années 1998, 1999, 2000 et 2001. Il leur avait accordé un délai d’une ou deux semaines. À la fin du mois de janvier, il n’avait toujours pas reçu les documents de la société. Il leur avait dit qu’il avait besoin des états de rajustement du vendeur en ce qui concerne l’unité 102. À la fin de janvier, il ne les avait pas reçus. Il a créé son document de travail à l’aide de ce qui avait été enregistré aux fins de l’impôt. Il essayait d’effectuer un rapprochement avec ce qui avait été déclaré pour les ventes.

 

[41]    M. Brown a conclu qu’en l’an 2000, il y avait eu un transfert, se rapportant à l’unité ici en cause, moyennant une contrepartie d’un dollar. Il a constaté que Mme Krmpotic était encore inscrite comme propriétaire de l’unité.

 

[42]    On a renvoyé M. Brown à la pièce R‑1, onglet 6, qui est l’imprimé de la recherche de titre se rapportant à l’unité en question. L’imprimé indiquait que le propriétaire inscrit était Mme Krmpotic. M. Brown a supposé que l’inventaire au complet avait fait l’objet de dispositions et que la chose avait été consignée même si l’unité 102 était encore détenue.

 

[43]    M. Brown a écrit aux évaluateurs de biens immobiliers, qui lui ont dit que la valeur imposable suffisait pour indiquer la valeur de l’unité 102. Il a comparé cette valeur à celles de trois autres unités que la société venait de vendre et la valeur de l’unité 102 était la plus élevée. Il a également obtenu les renseignements d’entreprise dont il avait besoin pour déterminer qui contrôlait la société.

 

[44]    M. Brown a conclu que l’unité avait été transférée à une personne liée moyennant une contrepartie inadéquate et que le montant aurait dû être inclus dans le revenu. Il a reçu l’acte de fiducie après avoir établi la nouvelle cotisation. Il n’avait pas reçu de documents de la société pour la vérification. La société a fait opposition et c’est alors que l’acte de fiducie a été déposé.

 

[45]    La nouvelle cotisation a été ratifiée, et ce, parce que l’acte de simple fiducie n’avait pas été accepté par l’ARC. Selon M. Brown, le document n’était pas signé, il n’était pas attesté par un témoin et la société ne l’avait pas signé. De plus, la personne qui était réputée avoir la propriété effective avait un inventaire nul en 2001, selon les dossiers de la société dont disposait l’ARC.

[46]    On a demandé à M. Brown pourquoi les pénalités avaient été imposées et il a répondu que c’était notamment à cause du montant en question. Il s’agissait de la seule unité qui avait été vendue en 2001, d’une valeur de 442 000 $. M. Brown a tenu compte des antécédents de M. Krmpotic en ce qui concerne l’entreprise et d’autres sociétés. Il savait également que la société avait fait l’objet d’une vérification aux fins de la TPS à la fin des années 1990, que Kuna Enterprises avait également fait l’objet d’une vérification et que M. Krmpotic faisait l’objet d’un examen à ce moment‑là. Il croyait que M. Krmpotic et la société auraient dû savoir ce qui se passait. En outre, il n’avait jamais reçu de renseignements du comptable de la société, de sorte qu’il avait conclu que les documents n’étayaient peut‑être pas les documents produits.

 

[47]    On a renvoyé M. Brown à la pièce R‑1, onglet 7, soit la lettre datée du 31 janvier 2005, qu’il avait envoyée à la société par l’entremise du comptable de cette dernière, Manu Desai. Ce document était désigné comme étant une lettre de proposition. M. Brown a indiqué avoir proposé de réviser le revenu imposable en ajoutant 441 911 $ au revenu. Il avait demandé si la société avait en sa possession d’autres renseignements pour justifier un autre montant.

 

[48]    M. Brown a parlé à Me Nick Smith, un avocat, et lui a demandé de répondre à la lettre de proposition. Au mois d’avril, il n’avait toujours pas reçu de réponse, de sorte qu’il a informé la société qu’il allait procéder au rajustement pour la société et pour M. Krmpotic et que ceux‑ci pouvaient toujours en appeler de la cotisation.

 

[49]    Encore une fois, en ce qui concerne les pénalités, M. Brown a dit qu’elles avaient été ratifiées au stade de l’opposition, et ce, pour les mêmes raisons. Il a ajouté que l’acte de simple fiducie avait été remis à la Division des appels plutôt qu’au vérificateur. Il a conclu que l’unité avait été transférée à la demande de M. Krmpotic. Les raisons pour lesquelles les pénalités avaient été imposées étaient les mêmes dans le cas de M. Krmpotic et de la société.

 

[50]    La Division des appels a ratifié les pénalités.

 

[51]    Lors du contre‑interrogatoire, M. Brown a affirmé ne pas savoir pourquoi M. Desai ne lui avait pas fourni les renseignements qu’il avait demandés. Les deux lettres avaient été envoyées à M. Desai parce que c’était cette adresse qui était inscrite comme adresse de la société dans leur base de données.

 

[52]    M. Brown a mentionné qu’il avait procédé à une recherche de titre et qu’il avait constaté que le propriétaire inscrit était Mme Krmpotic. On a renvoyé M. Brown à l’alinéa 10o) de la réponse et on lui a demandé pourquoi il avait conclu que la propriété effective et la propriété légale avaient été transférées à Mme Krmpotic. Il a répondu que le comptable avait dit que toutes les ventes étaient déclarées et qu’il supposait que le droit de propriété au complet avait été transmis à Mme Krmpotic. La Division des appels n’a pas accepté l’acte de simple fiducie.

 

[53]    Lorsqu’on a demandé à M. Brown pourquoi ils avaient imposé des pénalités pour faute lourde, il a énuméré les motifs suivants :

 

1.                 L’importance du montant (442 000 $).

2.                 Les antécédents de M. Krmpotic dans les affaires et dans le domaine connexe de la construction.

3.                 Le fait que la société avait par le passé fait l’objet d’une vérification (c’était là tout ce qu’il savait).

4.                 Le fait que Kunar Enterprises avait fait l’objet d’une vérification aux fins de l’impôt sur le revenu (c’était là tout ce qu’il savait).

5.                 Le fait que les renseignements demandés à la société n’avaient pas été fournis.

 

[54]    En ce qui concerne les pénalités pour faute lourde imposées à M. Krmpotic personnellement, M. Brown a déclaré qu’il aurait fallu que M. Krmpotic établisse lui‑même le montant et l’ajoute à son revenu.

 

[55]    Lors du réinterrogatoire, M. Brown a identifié la pièce R‑3 comme étant une note de dossier T2020, se rapportant à la conversation qu’il avait eue avec la société et ses représentants.

 

L’ARGUMENTATION PRÉSENTÉE POUR LE COMPTE DE L’APPELANTE

 

[56]    L’avocat de l’appelante a déclaré que les faits révélaient que la déclaration de fiducie avait été signée le 1er décembre 2000 par Mme Krmpotic en présence de M. Krmpotic. Cette déclaration de fiducie faisait état d’une relation de simple fiducie ayant un effet juridique, par laquelle Mme Krmpotic détenait en fiducie, pour la société, le titre légal afférent à l’unité. Toutefois, la société était encore la personne qui avait la propriété effective de l’unité. La chose a été confirmée par les témoignages de M. et de Mme Krmpotic.

 

[57]    Il n’existait pas le moindre élément de preuve indiquant que la déclaration de fiducie était une simulation ou une fraude ou qu’elle avait été créée ou signée à une autre date que le 1er décembre 2000. Ces faits ont été établis par les témoignages de M. et de Mme Krmpotic.

 

[58]    Le 1er décembre 2000, ils ont transféré à Mme Krmpotic le titre afférent à l’unité. Ce document a été enregistré au bureau des titres de biens‑fonds de la Colombie‑Britannique comme le confirme le témoignage de M. Krmpotic. Une copie du formulaire A prescrit par le Land Title Act a été versée sous la cote R‑1, onglet 27.

 

[59]    À compter du 1er décembre 2000, Mme Krmpotic détenait le titre légal afférent à l’unité, même si la société a toujours continué à en avoir la propriété effective. La chose a été confirmée par les témoignages de M. et de Mme Krmpotic, ainsi que par l’acte de fiducie lui‑même qui a été produit sous la cote R‑1, onglet 14.

 

[60]    La contrepartie pour le transfert de l’unité était d’un dollar. La société estimait avoir toujours eu la propriété effective de l’unité.

 

[61]    John Krmpotic et Manu Desai ont tous deux confirmé les renseignements figurant dans les documents financiers qui avaient été présentés à l’ARC, y compris les états financiers. En préparant les états financiers, M. Desai avait inscrit dans le bilan les coûts de l’ensemble, y compris les coûts afférents au bien‑fonds, les permis, les frais d’arpentage, les coûts de construction et ainsi de suite sous la rubrique [traduction] « inventaire des biens‑fonds et des travaux en cours ».

 

[62]    Lorsque la société vendait des unités, M. Desai défalquait le coût de [traduction] l’« inventaire des biens‑fonds et des travaux en cours » dans les états financiers de la société, en vue de faire état de la disposition de ces unités. Le témoignage de M. Desai et les états financiers confirmaient la chose.

 

[63]    En déterminant le revenu net ou la perte nette de la société pour chaque exercice, M. Desai indiquait le coût des unités vendues sous la rubrique [traduction] « coût des marchandises vendues » dans l’état des résultats de la société.

 

[64]    M. Desai a témoigné que, le ou vers le 20 octobre 1999, la société avait vendu une unité dont l’adresse était le 310 – 4405 Blackcomb Way, à Whistler, en Colombie‑Britannique. Il s’agissait de la dernière vente.

[65]    Le 19 septembre 2000, M. Desai a rédigé les états financiers pour l’exercice de la société ayant pris fin le 31 mai 2000. À ce moment‑là, M. Desai croyait à tort que l’unité vendue le 20 octobre 1999 était la dernière unité restante de l’ensemble qui était détenue par la société. M. Desai croyait que l’ensemble était achevé et que toutes les unités avaient été vendues aux acheteurs.

 

[66]    Les états financiers versés à l’onglet 15 et le témoignage oral de M. Desai confirment la chose.

 

[67]    En préparant le bilan pour l’exercice ayant pris fin le 31 mai 2000, M. Desai a ramené à zéro le chiffre inscrit à la ligne du coût de [traduction] l’« inventaire des biens‑fonds et des travaux en cours » pour montrer que la société ne détenait plus de droits à l’égard de l’ensemble. Les états financiers versés à l’onglet 15 et le témoignage de M. Desai confirment la chose.

 

[68]    En outre, M. Desai a tenu compte du coût restant de l’ensemble, à la ligne [traduction] « coût des marchandises vendues », dans l’état des résultats. Le coût de l’unité a donc été déduit dans le calcul du revenu de la société pour l’exercice qui a pris fin le 31 mai 2000. C’est ce qu’indiquent le témoignage de M. Desai et les états financiers, onglet 15.

 

[69]    M. Desai a réduit le coût de [traduction] l’« inventaire des biens‑fonds et des travaux en cours » de la société et il a déduit le coût de l’ensemble sous la rubrique [traduction] « coût des marchandises vendues » en croyant erronément que la société avait vendu la dernière unité restante de l’ensemble au cours de l’exercice qui avait pris fin le 31 mai 2000. S’il avait su que la société détenait encore l’unité après le 31 mai 2000, M. Desai n’aurait pas réduit le coût de l’inventaire et il n’aurait pas réduit le coût de l’unité dans le calcul du revenu de la société pour l’année.

 

[70]    Le témoignage de M. Desai confirme cette position. M. Desai a en outre témoigné que, le 3 octobre 2007, la société avait été rétablie dans le registre des sociétés en tant que société en règle, comme le confirme la pièce A‑3 de l’appelante.

 

[71]    Selon la preuve, la société a donc transféré, le 1er décembre 2000, le titre légal afférent à l’unité à Mme Krmpotic seulement. Depuis lors, Mme Krmpotic détient ce titre uniquement à titre de simple fiduciaire. Pendant la période pertinente, la société a continué à avoir la propriété effective de l’unité.

 

[72]    Par conséquent, la juste valeur marchande de l’unité que la société a transférée à Mme Krmpotic le 1er décembre 2000 (c’est‑à‑dire le titre légal afférent à l’unité) s’élevait au plus à un dollar.

 

[73]    La société a donc réalisé un produit de disposition d’un dollar par suite du transfert, le 1er décembre 2000, plutôt que le produit de disposition de 442 000 $ établi par le ministre en application de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR »).

 

[74]    En outre, la taxe sur les produits et services (la « TPS ») est payable sur la juste valeur marchande d’un dollar de la contrepartie payable par Mme Krmpotic à l’égard de la fourniture du titre légal afférent à l’unité plutôt que sur la contrepartie réputée de 442 000 $ établie par le ministre en application de la Loi sur la taxe d’accise.

 

[75]    En outre, M. Krmpotic n’a pas conféré d’avantage à Mme Krmpotic, aux termes du paragraphe 56(2) de la Loi, par suite du transfert du titre légal afférent à l’unité que la société avait effectué en faveur de Mme Krmpotic en l’an 2000, de sorte qu’il n’était redevable d’aucun impôt sur le revenu à l’égard de ce transfert.

 

[76]    Aucune pénalité ne s’applique en vertu de la LIR ou de la Loi sur la taxe d’accise, étant donné qu’il n’y a pas eu d’impôt sur le revenu additionnel ni de TPS payable par la société ou par M. Krmpotic par suite du transfert du titre légal afférent à l’unité que la société a effectué en faveur de Mme Krmpotic en l’an 2000.

 

[77]    En ce qui concerne la simple fiducie qui a été créée en faveur de Mme Krmpotic, l’expression « simple fiducie », selon son sens habituel reconnu, se rapporte à une fiducie dans laquelle le fiduciaire détient un bien, la seule obligation du fiduciaire étant de remettre ce bien, sur demande, au bénéficiaire ou aux bénéficiaires. Voir D. Waters, The Law of Trusts in Canada (3eéd.), (Toronto : Carswell, 2005), à la page 32.

 

[78]    En Colombie‑Britannique, le titre légal afférent à un bien immobilier peut être enregistré au nom du fiduciaire ou du mandataire même si la propriété effective de ce bien appartient à une autre personne (le bénéficiaire). Voir Whistler Village and Assessor North Shore Squamish Valley, (1981) 121 D.L.R. (3d) 284 (C.S.C.‑B.), aux pages 285 à 287.

 

[79]    Selon le Land Title Act, le bénéficiaire qui n’est pas inscrit peut néanmoins invoquer son droit à l’encontre des parties à l’instrument, et ce, malgré le défaut d’enregistrement de l’instrument. Land Title Act, R.S.B.C. 1996, ch. 250, paragraphe 20(1).

 

[80]    Le Land Title Act n’exige pas que le bien‑fonds qui est dévolu à un fiduciaire ou à un représentant personnel soit enregistré. En effet, selon cette loi, si le bien‑fonds est dévolu à un représentant personnel ou à un fiduciaire, le titre de cette personne peut être enregistré, mais les détails d’une fiducie créée ou déclarée à l’égard de ce bien‑fonds n’ont pas à être inscrits dans le registre. Il s’agit d’une disposition législative facultative qui n’exige pas que tous les droits de fiducie soient enregistrés à l’égard du titre de propriété. Land Title Act, R.S.B.C. 1996, ch. 250, paragraphe 180(1).

 

[81]    Il était donc loisible à la société de faire enregistrer en faveur de Mme Krmpotic le transfert du titre légal afférent à l’unité en vertu du Land Title Act, et ce, même si la société détenait encore la propriété effective de l’unité. L’acte de fiducie que Mme Krmpotic avait signé n’avait pas à être enregistré dans le titre de propriété.

 

[82]    En ce qui concerne l’application de la Loi de l’impôt sur le revenu et de la Loi sur la taxe d’accise aux simples fiducies, l’avocat a soutenu que ces lois se fondent sur les concepts existant en droit privé et en droit commercial lorsqu’il s’agit de déterminer les conséquences fiscales appropriées. Il faut déterminer la nature de la relation juridique pertinente avant de pouvoir déterminer les modalités d’application de la Loi. The Queen v. Lagueux & Frères Inc., 74 DTC 6569 (C.F. 1re inst.); Dale v. The Queen, [1997] 2 C.T.C. 286 (C.A.F.); Sussex Square Apartments Ltd. v. The Queen, [2000] 4 C.T.C. 203 (C.A.F.) confirmant [1999] 2 C.T.C. 2143 (C.C.I.).

 

[83]    La Cour suprême du Canada a reconnu le rapport réciproque entre le droit général ou le droit commercial et l’application de la Loi. Voir Continental Bank of Canada c. R, [1998] 2 R.C.S. 298. Voir également P. W. Hogg, J. E. Magee et T. Cook, Principles of Canadian Tax Law (3e éd., 1999), page 2, où les auteurs font les remarques suivantes :

 

[traduction]

 

La Loi de l’impôt sur le revenu se fonde implicitement sur le droit commun et plus particulièrement sur le droit des contrats et sur le droit des biens [...] Le fait qu’une personne soit un employé, un entrepreneur indépendant, un associé, un mandataire, le bénéficiaire d’une fiducie ou l’actionnaire d’une société par actions a généralement une incidence sur l’obligation fiscale et dépend de notions du droit commun, soit généralement du droit provincial.

 

Voir Will-Kare Paving & Contracting Ltd. c. La Reine, [2000] 1 R.C.S. 915, au paragraphe 31.

 

[84]    L’avocat a soutenu qu’en l’espèce, l’obligation fiscale des appelants dépendait de l’effet juridique de l’opération par laquelle l’unité a été transférée, le 1er décembre 2000. La preuve montre clairement que le titre légal afférent à l’unité a été enregistré au nom de Mme Krmpotic ce jour‑là, mais que la société a continué à avoir la propriété effective de l’unité parce que Mme Krmpotic détenait le titre en sa qualité de simple fiduciaire seulement.

 

[85]    La société n’a donc pas transféré quoi que ce soit qui ait une valeur à Mme Krmpotic le 1er décembre 2000, de sorte que cette dernière n’est pas réputée avoir disposé de l’unité à sa juste valeur marchande afin de réaliser un produit de disposition de 442 000 $, De même, on ne saurait dire que M. Krmpotic a conféré un avantage à Mme Krmpotic en vertu du paragraphe 56(2) de la Loi, parce que l’enregistrement, au nom de Mme Krmpotic, du titre afférent à l’unité dans le cadre d’une simple fiducie n’a pas eu pour effet de conférer un avantage à Mme Krmpotic.

 

[86]    En outre, le paragraphe 104(1) de la Loi exclut une simple fiducie de la notion de « fiducie » aux fins de l’impôt sur le revenu. Le paragraphe 104(1) prévoit que « l’arrangement dans le cadre duquel il est raisonnable de considérer qu’une fiducie agit en qualité de mandataire de l’ensemble de ses bénéficiaires pour ce qui est des opérations portant sur ses biens est réputé ne pas être une fiducie ». L’avocat fait également valoir que, selon une politique administrative traditionnelle du ministre en ce qui concerne les simples fiducies, le ministre ne tient pas compte de la fiducie aux fins de l’impôt sur le revenu lorsque le bien est détenu par un simple fiduciaire et il considère plutôt le cédant ou constituant comme étant le propriétaire du bien pour l’application de la Loi dans son ensemble. Le ministre a déclaré qu’en général, il considère une fiducie en common law comme étant une simple fiducie dans les circonstances suivantes :

 

a.       le fiduciaire ne possède pas de pouvoirs importants ou n’assume pas de responsabilités importantes, et il ne peut prendre des mesures que s’il obtient des instructions du constituant;

 

b.       le fiduciaire est uniquement chargé de détenir le titre légal afférent au bien;

 

c.       le constituant est l’unique bénéficiaire et peut faire en sorte que le bien lui soit retourné n’importe quand.

 

Voir Impôt sur le revenu – Nouvelles techniques no 7 (21 février 1996). Or, tous ces critères sont présents dans le cas qui nous occupe. Mme Krmpotic ne possédait aucun pouvoir important, elle n’assumait aucune responsabilité importante et elle ne prenait pas de mesures à l’égard de l’unité. Elle détenait uniquement le titre afférent à l’unité. La société était l’unique bénéficiaire et pouvait faire en sorte que l’unité lui soit retournée n’importe quand.

 

[87]    L’avocat a soutenu que l’appelante avait présenté, au sujet de l’acte de fiducie, une preuve non contestée et non contredite qui [traduction] « démolit » les hypothèses du ministre conformément aux faits énoncés dans l’arrêt Hickman Motors Limited v. The Queen, [1998] 1 C.T.C. 213 (C.S.C.) de la Cour suprême du Canada, aux paragraphes 91 à 97. Dans les présents appels, les appelants ont satisfait à l’obligation qui leur incombait de démolir les hypothèses du ministre, alors que le ministre a omis de soumettre une preuve à l’appui de ses hypothèses.

 

[88]    Les hypothèses de fait cruciales émises par le ministre aux alinéas 10o), p) et v) de la réponse ont été démolies par les appelants au moyen de la preuve qui a été soumise lors de l’audition des présents appels.

 

[89]    L’interprétation que M. Krmpotic donnait du droit de la Colombie‑Britannique pour ce qui est de la dissolution d’une société et de la confiscation d’un bien immobilier en faveur de la province était exacte. Voir le Business Corporations Act, S.B.C. 2002, ch. 57, paragraphe 422(1), articles 355 à 358 et 364, ainsi que l’Escheat Act, R.S.B.C. 1996, ch. 120, article 4.

 

[90]    Les appelants ont soumis une preuve prima facie montrant que, le 1er décembre 2000, la société n’avait pas transféré autre chose que le titre légal simple en faveur de Mme Krmpotic. La preuve que l’appelante a soumise au sujet de la signature de l’acte de fiducie et de l’intention, à savoir que Mme Krmpotic devait détenir l’unité en qualité de simple fiduciaire, n’est pas contestée et n’est pas contredite, de sorte qu’elle [traduction] « démolit » les hypothèses du ministre.

 

[91]    L’obligation de réfuter la preuve prima facie du contribuable incombe donc au ministre, qui doit prouver les hypothèses. Or, le seul élément de preuve que le ministre a soumis sur ce point était composé du témoignage de son vérificateur, M. Jason Brown, et des documents comptables de la société.

 

[92]    M. Brown a témoigné avoir supposé que la société avait transféré à Mme Krmpotic l’ensemble du droit qu’elle possédait sur l’unité en se fondant sur les renseignements figurant dans les documents concernant les droits de cession immobilière et dans les documents de l’autorité évaluatrice de la Colombie‑Britannique qu’il avait examinés, ceux‑ci indiquant un transfert de titre afférent à l’unité en faveur de Mme Krmpotic.

 

[93]    Il est certain que les appelants ont de fait transféré le titre afférent à l’unité au nom de Mme Krmpotic le 1er décembre 2000. Toutefois, certains éléments de preuve non contestés et non contredits indiquaient que la société avait toujours conservé la propriété effective de l’unité et que seul le titre légal avait été transmis. M. Brown n’a pas pu présenter de preuve au sujet de la propriété effective de l’unité, si ce n’est pour dire qu’il avait supposé que l’unité avait été transférée à Mme Krmpotic au moment où le titre avait été enregistré au nom de celle‑ci.

 

[94]    Le ministre a produit les états financiers pour l’exercice qui a pris fin le 31 mai 2000, le bilan montrant que [traduction] l’« inventaire des biens‑fonds et des travaux en cours » avait été ramené à zéro au 31 mai 2000 et l’état des résultats montrant que le coût de toutes les unités restantes avait été déduit dans le calcul du revenu net pour l’exercice qui avait prix fin le 31 mai 2000.

 

[95]    Toutefois, M. Desai a témoigné avoir réduit les coûts de [traduction] l’« inventaire des biens‑fonds et des travaux en cours » de la société et avoir déduit le coût de l’ensemble, sous la rubrique [traduction] « coûts des marchandises vendues », parce qu’il croyait erronément que la société avait vendu la dernière unité restante de l’ensemble au cours de l’exercice qui avait pris fin le 31 mai 2000. S’il avait su que la société détenait encore l’unité après le 31 mai 2000, M. Desai n’aurait pas réduit le coût de l’inventaire et il n’aurait pas déduit le coût de l’unité dans le calcul du revenu de la société de cette année‑là.

 

[96]    De toute évidence, l’impôt n’est pas établi en vertu de la LIR sur la base des inscriptions comptables, mais il est plutôt établi compte tenu des opérations qui ont réellement eu lieu. La Cour d’appel fédérale a conclu que les erreurs comptables et les inscriptions inexactes n’ont pas pour effet d’accorder des avantages aux actionnaires. Voir Franklin v. The Queen, [2002] 2 C.T.C. 88 (C.A.F.), au paragraphe 7.

 

[97]    Le même raisonnement s’applique en l’espèce. Les livres de la société ne correspondent pas aux faits. Les états financiers pour l’exercice qui a pris fin le 31 mai 2000 indiquaient que la société ne détenait pas d’autres unités à cette date. Cela est clairement inexact parce que, à ce moment‑là, la société détenait encore le titre légal et la propriété effective de l’unité (étant donné que le titre a été enregistré au nom de Mme Krmpotic le 1er décembre 2000 seulement).

 

[98]    Puisque les livres de la société ne correspondent pas aux faits tels qu’ils existent, ils ne peuvent servir de fondement à une cotisation d’impôt. Voir Long v. The Queen, [1997] 1 C.T.C. 2995 (C.C.I.).

 

[99]    En conclusion, l’avocat a soutenu que les présents appels devraient être accueillis et que les nouvelles cotisations ici en cause devraient être annulées, compte tenu du fait que la société a transféré à Mme Krmpotic le titre légal afférent à l’unité le 1er décembre 2000 seulement, que ce titre légal était détenu par Mme Krmpotic en sa seule qualité de simple fiduciaire et que la juste valeur marchande de l’unité transférée n’était pas supérieure à un dollar.

 

L’ARGUMENTATION PRÉSENTÉE POUR LE COMPTE DE L’INTIMÉE

 

[100]  L’avocate de l’intimée a pris la position selon laquelle, suivant les paragraphes 180(2), (3) et (4) du Land Title Act, l’acte de fiducie doit être déposé auprès du registraire avec la demande d’enregistrement du titre. Le fiduciaire qui décide de faire enregistrer le titre doit se conformer à ces dispositions. Selon l’avocate, l’article 20 est simplement une disposition visant à fournir une protection lorsque des instruments non enregistrés sont en cause. Cette disposition ne vise pas à indiquer la façon dont les personnes en cause doivent mener leurs affaires ni la façon dont le bureau des titres de biens‑fonds s’attend à ce que les personnes en cause mènent leurs affaires. Celui qui procède à un enregistrement doit suivre toutes les dispositions.

 

[101]  L’avocat de l’appelante a renvoyé à l’article 20. Il s’agit simplement d’une disposition de protection qui s’applique lorsque des instruments non enregistrés sont en cause. Il se peut bien qu’il s’agisse d’une pratique commune qui permet d’éviter la taxe d’achat d’un bien lorsqu’un enregistrement est effectué à l’égard d’un titre. Toutefois, cela semble aller à l’encontre de la loi.

 

[102]  L’avocate a pris la position selon laquelle la société à numéro avait transféré l’unité à Mme Krmpotic « en fief simple ». En ce qui concerne les tiers en général, Mme Krmpotic détient un titre en fief simple. C’est ce qui ressort du document et de la recherche de titre. Selon l’avocate, l’examen des diverses définitions juridiques de l’expression « fief simple » permet en fin de compte de conclure que la société à numéro avait tout transféré à Mme Krmpotic.

 

[103]  Puisqu’elle agit ainsi, l’appelante ne peut plus invoquer la fiducie parce que ce qu’elle tentait d’accomplir, c’était de déclarer aux tiers dans leur ensemble que le droit au complet se rattachant à l’unité, un droit en fief simple, avait été transféré à Mme Krmpotic alors que la société avait conservé la propriété effective.

 

[104]  L’avocate se demande si les appelants ont accompli ce qu’ils voulaient accomplir compte tenu des dispositions de l’Escheat Act : en effet, l’article 4 de cette loi prévoit qu’en cas de dissolution, tout bien‑fonds appartenant à la société ou auquel la société a droit au moment de la dissolution échoit à la Couronne.

 

[105]  En outre, si l’acte de fiducie avait été enregistré, les tiers auraient facilement pu constater que la société conservait la propriété effective. Si la société avait ensuite cherché à obtenir la dissolution, en prenant elle‑même des mesures en vue de l’obtenir ou en omettant de produire des déclarations annuelles comme c’est ici le cas, la propriété effective aurait‑elle été dévolue au gouvernement provincial? La seule façon d’accomplir les deux objectifs consistait à faire ce que l’appelante a fait, c’est‑à‑dire ne pas faire enregistrer l’acte de fiducie et faire croire aux tiers que le fief simple avait été transféré à Mme Krmpotic, de façon qu’il n’y ait pas dévolution de la propriété.

 

[106]  L’avocate a renvoyé à l’arrêt Friedberg v. Canada (F.C.A.), 92 DTC 6031, à l’appui de la position selon laquelle si quelqu’un prend des mesures en vue de faire en sorte que quelque chose semble réel, cela devient réel. Une personne ne peut pas créer une fiction contractuelle qui vise à présenter un rapport juridique de manière erronée, à en tirer parti et à la désavouer ensuite afin d’éviter les désavantages fiscaux.

 

[107]  En l’espèce, il y a eu un transfert de titre en fief simple en faveur de Mme Krmpotic, le 1er décembre 2000. Rien n’indiquait l’existence d’une fiducie. Quant aux tiers dans leur ensemble, Mme Krmpotic détenait le titre « en fief simple ». On n’a présenté aucun élément de preuve montrant que l’unité avait été dévolue à la Couronne provinciale, de sorte que l’appelante semble avoir accompli ce qu’elle voulait accomplir. Toutefois, la conséquence est qu’elle ne peut pas maintenant invoquer l’existence d’une fiducie. En fin de compte, la personne qui fait savoir aux tiers qu’elle a créé une situation à son profit ne peut pas ensuite affirmer, lorsqu’elle est assujettie à une taxe ou à un impôt, que le contrat ne visait jamais à lui permettre d’arriver à ce résultat. Or, c’est le problème auquel les appelants font face si l’acte de fiducie est accepté.

 

[108]  L’acte de fiducie lui‑même est plein de problèmes. Il a été remis au ministre environ cinq ans plus tard, en 2006, soit après que la cotisation eut été établie. En outre, le document est daté du 1erdécembre 2000. Or, l’acte de transfert en propriété franche a été signé le 1er septembre 1999, soit 15 mois auparavant. La date de l’acte de fiducie est la même que celle à laquelle l’acte de transfert en propriété franche a en fin de compte été enregistré au bureau des titres de biends‑fonds. L’avocate se demandait pourquoi cela ne correspond pas à la date de signature de l’acte de transfert en propriété franche plutôt qu’à la date d’enregistrement au bureau des titres de biens‑fonds. À ses yeux, cela semblait étrange. Toutefois, elle a admis ne pas avoir demandé à M. Krmpotic, lors du contre‑interrogatoire, quelle en était la raison.

 

[109]  En outre, l’acte de fiducie n’est pas signé par les deux parties contractantes, ce qui, selon l’avocate, sort de l’ordinaire. En outre, le document n’est pas attesté par des témoins. Il manque certaines des formalités qui s’appliquent à un contrat ou à un accord ordinaire.

 

[110]  L’avocate a pris la position selon laquelle ce que la société a fait dans ses livres et registres indique ce qui s’est réellement passé. M. Desai avait peut‑être commis une erreur dans les documents, ou il n’en avait peut‑être pas commis. Toutefois, cela importe peu parce que, si l’acte de fiducie avait pour effet de transférer quelque chose de plus que le titre légal, il importerait peu que M. Desai ait commis une erreur. L’avocate a de fait soutenu que la preuve présentée par M. Desai au sujet de la raison pour laquelle celui‑ci croyait que le bien‑fonds au complet avait été transféré puisqu’il croyait avoir reçu le dernier état de rajustement semble aller à l’encontre de ce qu’il avait l’habitude de faire à l’égard des autres unités. M. Desai a supposé qu’il s’agissait du dernier lot, même s’il n’avait clairement pas reçu d’état de rajustement pour le lot en question.

 

[111]  L’avocate a abordé la question des avantages dont bénéficiait M. Krmpotic en vertu du paragraphe 56(2) de la Loi. Elle a renvoyé à l’arrêt Neuman c. Canada (M.R.N.), [1998] 1 R.C.S. 770, mais elle a convenu que même si les faits n’étaient pas particulièrement pertinents, les quatre conditions à remplir pour que le paragraphe 56(2) s’applique sont pertinentes :

(1)     le paiement doit être fait à une personne autre que le contribuable à l’égard duquel une nouvelle cotisation est établie;

 

(2)     la répartition doit avoir été faite suivant les instructions ou avec l’accord du contribuable à l’égard duquel une nouvelle cotisation est établie;

 

(3)     le paiement doit être fait au profit du contribuable à l’égard duquel une nouvelle cotisation est établie ou à une autre personne à titre d’avantage que ce contribuable souhaitait voir accorder;

 

(4)     le paiement aurait été inclus dans le revenu du contribuable à l’égard duquel une nouvelle cotisation est établie si ce dernier l’avait reçu lui‑même.

 

[112]  La première condition est remplie puisque le paiement a été effectué en faveur de Mme Krmpotic. La deuxième condition est remplie parce que la répartition a été faite suivant les instructions ou avec l’accord de M. Krmpotic, selon l’exposé conjoint des faits partiel, et que le transfert aurait été effectué suivant les instructions de M. Krmpotic, à cause du lien qu’il avait avec la société à numéro. La troisième condition est remplie parce que le paiement aurait été effectué au profit de Mme Krmpotic. La quatrième condition est remplie parce que, si l’unité avait été transférée directement à Mme Krmpotic, le paragraphe 246(1) s’appliquerait et M. Krmpotic aurait été obligé de l’inclure dans son revenu.

 

[113]  Quant à la dernière question, à savoir les pénalités pour faute lourde, l’avocate a renvoyé à la décision Venne v. The Queen, 84 DTC 6247 (C.F. 1re inst.). Dans cette décision, la cour a énoncé ce qui, selon elle, était le critère applicable pour que le ministre établisse une faute lourde ainsi que le critère applicable pour que le ministre soit en mesure de rouvrir une année frappée de prescription. C’est ce qui est arrivé en l’espèce.

 

[114]  La disposition pertinente est l’alinéa 152(4)j). Selon cette disposition, le contribuable doit avoir fait « [...] une présentation erronée des faits, par négligence, inattention ou omission volontaire, ou [avoir] commis quelque fraude en produisant la déclaration ou en fournissant quelque renseignement sous le régime de la [...] [L]oi ». Toutefois, c’est le paragraphe 163(2) qui s’applique, cette disposition prévoyant que « [t]oute personne qui, sciemment ou dans des circonstances équivalant à faute lourde, fait un faux énoncé ou une omission dans une déclaration, un formulaire, un certificat, un état [...] ou y participe, y consent ou y acquiesce est passible d’une pénalité [...] », la façon de calculer la pénalité étant ensuite indiquée dans le reste de la disposition. L’avocate a ensuite renvoyé à la page 6 de la décision Venne, précitée, dans laquelle il est dit ce qui suit : « Je suis convaincu qu’il suffit au Ministre, pour invoquer son pouvoir en vertu de l’alinéa 152(4)a)(i) de la Loi, de démontrer la négligence du contribuable, à l’égard d’un ou plusieurs éléments de sa déclaration de revenus au titre d’une année donnée. Cette négligence est établie s’il est démontré que le contribuable n’a pas fait preuve de diligence raisonnable. C’est sûrement là le sens des termes " présentation erronée des faits, par négligence ", en particulier avec d’autres motifs comme l’inattention ou l’omission volontaire qui font référence à un degré de négligence plus élevé ou à une mauvaise conduite délibérée. Sauf si ces termes étaient superflus dans cet article, hypothèse que je ne puis accepter, le terme " négligence " impose un critère moins strict de faute, semblable à celui qui est utilisé dans les autres domaines du droit, comme la responsabilité délictuelle. »

 

[115]  En l’espèce, l’avocate a soutenu qu’il a sans aucun doute été satisfait au critère moins strict de la négligence et qu’on peut même soutenir qu’il a été satisfait à certains des degrés plus élevés d’application du critère. Si un tribunal reconnaît que la version des événements donnée par l’intimée est exacte, à savoir que l’acte de transfert du titre afférent au bien‑fonds a été signé comme il devait l’être et que l’acte de fiducie a été gardé secret comme on voulait qu’il le soit, et si la Cour conclut à l’existence de toutes ces circonstances, il a été satisfait au critère énoncé au paragraphe 153(4) et le ministre a le droit de rouvrir l’année frappée de prescription.

 

[116]  Il reste la question de la faute lourde. L’avocate a encore une fois renvoyé à la décision Venne, précitée, page 11, où la cour a dit ce qui suit :

 

[...] La "faute lourde" doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui correspond à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi. [...]

 

Sur ce point, si la Cour conclut que la version des événements donnée par l’intimée est exacte, il a été satisfait au critère de la faute lourde. En pareil cas, il y avait plus qu’un simple défaut de prudence raisonnable et il y a eu, selon toute probabilité, un degré important de négligence, correspondant à une action délibérée ainsi qu’une indifférence au respect de la loi. L’intimée soutient que si la Cour retient la version des événements qu’elle a donnée, il n’y a pas simplement eu indifférence au respect de la loi, mais qu’il y a plutôt eu intention de ne pas respecter la loi.

 

[117]  L’avocate a affirmé que la cotisation devrait être confirmée et que l’appel devrait être rejeté avec dépens.

 

[118]  L’avocate a convenu que l’appel concernant la TPS interjeté sous le régime de la procédure informelle devrait suivre l’issue des appels en matière d’impôt sur le revenu parce que la TPS établie à l’égard de l’appelante était celle qui s’appliquait au transfert de l’unité 102.

 

LA RÉPLIQUE

 

[119]  En réplique, l’avocat de l’appelante a affirmé être surpris que l’avocate de l’intimée ne croie pas qu’il soit important que M. Desai ait réduit la valeur comptable de l’inventaire au moment où il l’a fait. M. Desai a été cité comme témoin et il a donné une explication. Il avait devant lui des états financiers indiquant un coût de 208 000 $ et il n’avait reçu aucun autre état de rajustement depuis un an. C’est pourquoi il avait supposé que la dernière unité avait fait l’objet d’une disposition. Il s’agit d’une explication raisonnable l’autorisant à croire que toutes les unités avaient été transférées. Cela était raisonnable même si, en réponse à une question de la Cour, M. Desai a admis ne pas être revenu en arrière, ne pas avoir comparé l’inventaire et ne pas avoir effectué de rapprochement entre les états de rajustement et les différentes unités.

 

[120]  L’appelante se demande, si ces états sont inexacts comme l’indique le ministre et comme l’a affirmé M. Desai, pourquoi le ministre n’a pas établi de nouvelle cotisation à l’égard de la société pour ces années d’imposition et pourquoi le ministre n’a pas établi l’impôt additionnel payable. Il était loisible au ministre de le faire et il lui est encore loisible de le faire. Il s’agit d’une autre année. Il s’agit de l’année d’imposition 2000.

 

[121]  L’avocat a déclaré que le ministre semblait croire que le fait que ces unités avaient été radiées avait d’une façon ou d’une autre quelque chose à voir avec la disposition de l’unité, alors que les dates étaient complètement différentes. M. Desai a réduit le coût au 31 mai 2000. Or, l’enregistrement du titre en faveur de Mme Krmpotic n’a eu lieu qu’au mois de décembre 2000, de sorte qu’il n’existait aucun lien entre les deux. On ne saurait alléguer que M. Desai était au courant de la vente et qu’il l’avait radiée parce qu’il croyait qu’une vente avait réellement été conclue en faveur de Mme Krmpotic. Cela n’aurait jamais pu se produire. Cela n’aurait pas été conforme aux états financiers. Les états financiers ne sont pas vraiment utiles, lorsqu’il s’agit de savoir ce qui s’est réellement passé.

 

[122]  On a demandé à M. Brown, lorsqu’il témoignait, quelle était la position du ministre. L’avocat se demande maintenant quelle est la position ici prise par le ministre. Dit‑il que l’entente qui a été conclue a été signée à des dates autres que celles indiquées dans le document? Dit‑il que les parties ont établi ce document, mais que celui‑ci n’avait aucun effet juridique? Dit‑il qu’il s’agissait d’une simulation? Dit‑il qu’ils ont fabriqué ce document après coup pour cacher leur jeu? M. Brown n’a pas pu expliquer à la Cour quelle était la position du ministre.

 

[123]  L’avocate de l’intimée semble essayer de l’emporter à tout prix parce qu’elle a soulevé certaines questions au sujet de l’entente. Elle a mis en question la validité de l’acte de fiducie.

 

[124]  L’un des points soulevés par l’avocate de l’intimée était que le document n’était pas signé par les deux parties contractantes. Toutefois, il ne s’agissait pas d’un contrat. Il s’agissait d’une déclaration de fiducie. Personne n’a dit qu’il s’agissait d’un contrat. Il s’agissait d’une simple fiducie. Il s’agit ici de savoir s’il existe une simple fiducie. Telle est fondamentalement la question.

 

[125]  L’avocate de l’intimée a fait valoir qu’il n’y avait pas de témoin et que, normalement, il y a des témoins dans les accords ou dans les arrangements contractuels ordinaires. Encore une fois, il ne s’agit pas d’un contrat. Les caractéristiques d’un contrat ne sont pas présentes dans le document ici en cause. Ce document n’a rien à voir avec un contrat. La seule personne qui fait la déclaration est Mme Krmpotic. C’est elle qui a signé le document.

 

[126]  L’avocate de l’intimée a également soulevé la question de la date à laquelle le document d’inscription a été signé. Toutefois, lors des contre‑interrogatoires, elle n’a posé aucune question aux témoins à ce sujet. Le document a été signé le 1er septembre 1999 même s’il a été enregistré le 1er décembre 2000 seulement. Il ne convient pas pour l’avocate de l’intimée de critiquer maintenant les dépositions des témoins lorsqu’il s’agit d’établir un lien avec le document, alors qu’elle ne leur a pas posé de questions à ce sujet lorsqu’ils étaient à la barre.

 

[127]  En outre, personne n’a laissé entendre qu’il y avait une fiducie orale, si ce n’est l’avocate de l’intimée.

 

[128]  L’avocat a renvoyé à l’ouvrage de doctrine intitulé The Law of Evidence in Canada, 2e édition, de John Sopinka, au paragraphe 16.147, à l’appui de sa position, à savoir que si l’avocate voulait contester la crédibilité d’un témoin au sujet d’une preuve extrinsèque ou d’un document, le document aurait dû être présenté au témoin lorsqu’il était à la barre.

 

[129]  La règle s’applique non seulement à une preuve contradictoire, mais aussi aux conclusions finales. Cependant, dans la mesure où l’avocate de l’intimée soutient que la déclaration de fiducie est d’une façon ou d’une autre une simulation ou une fraude, il n’existe aucun élément de preuve en ce sens. De fait, selon la preuve, qui n’a pas été contredite, le document a été signé à la date à laquelle les parties ont affirmé l’avoir signé et les parties croyaient que le document avait force obligatoire entre elles.

 

[130]  L’avocat a soutenu que la décision 1524994 Ontario Limited v. Canada, citée par l’avocate de l’intimée, n’a absolument rien à voir avec la situation factuelle qui existe en l’espèce. Dans cette affaire‑là, les parties avaient conclu une entente à laquelle elles avaient donné suite, mais elles avaient ensuite tenté de désavouer l’entente. En l’espèce, les appelants ont établi une déclaration de fiducie qui a été signée et conservée, et les parties se conduisaient conformément à cette déclaration et ne tentaient pas de la désavouer. Cette affaire et d’autres affaires citées par l’intimée sont en fait utiles à la position de l’appelante.

 

[131]  La relation juridique qui existe en l’espèce est une relation fiduciaire. On n’a soumis aucun élément de preuve contraire indiquant l’absence de relation fiduciaire entre M. Krmpotic et sa mère à l’égard de l’unité. L’acte de fiducie a été présenté, il a été signé, la Cour a reçu des témoignages à ce sujet. L’acte de fiducie satisfait à toutes les exigences applicables aux actes de fiducie.

 

[132]  L’avocate de l’intimée a adopté la position selon laquelle les actions de l’appelante étaient illégales. Cela est tout à fait faux. L’article 20 montre clairement que des instruments non enregistrés peuvent avoir, pour les personnes qui y sont parties, des incidences sur le titre. Le fait que la fiducie n’a pas été enregistrée n’invalide aucunement la fiducie. Le paragraphe 20(1) fait fondamentalement autorité sur ce point. Ce qui est inscrit dans le registre l’emporte sur la fiducie uniquement à l’égard des tiers indépendants.

 

[133]  En ce qui concerne l’article 180 du Land Title Act, l’avocat a pris la position selon laquelle rien n’oblige une personne à déclarer qu’elle est fiduciaire. Il n’est pas nécessaire de faire enregistrer la fiducie. Même si la position de l’intimée est exacte, les parties, dans ce cas‑ci, ont simplement omis de se conformer au Land Title Act. Cela ne veut pas pour autant dire qu’elles ont annulé leur relation juridique. Cela veut simplement dire qu’elles ont omis de se conformer à une formalité du système d’enregistrement de titres de biens‑fonds de la Colombie‑Britannique. L’acte de fiducie fait état de la relation et l’article 20 du Land Title Act ne l’emporte pas sur cet acte.

 

[134]  Un grand nombre de documents ne sont pas enregistrés, mais lient néanmoins les personnes qui y sont parties. En d’autres termes, l’avocat a pris la position selon laquelle le paragraphe 180(3) du Land Title Act est une disposition obligatoire pour le registraire. L’autre conséquence est qu’il se peut que l’enregistrement n’ait aucun effet pour ce qui est de l’enregistrement en vertu du Land Title Act, sans toutefois que l’accord de fiducie soit vicié.

 

[135]  Le paragraphe 20(1) du Land Title Act renferme les mots [traduction] « sauf à l’encontre de la personne qui l’établit »; s’il ne renfermait pas ces mots, ce qui a été enregistré en vertu du Land Title Act l’emporterait sur toute entente privée. Ces mots disent fondamentalement que lorsque deux parties ont conclu un contrat ou une entente ou qu’elles ont établi entre elles un instrument, ce contrat, cette entente ou cet instrument ont force obligatoire entre les parties, et ce, peu importe ce qui est inscrit dans le titre.

 

[136]  Quant à l’Escheat Act, M. Krmpotic connaissait son effet, mais il n’a pas demandé de conseils juridiques à ce sujet. Toutefois, cela montrait réellement ce qu’il avait à l’esprit en rédigeant l’acte de fiducie et ce qu’il essayait d’accomplir l’acte. C’était le motif qui l’avait amené à agir comme il l’a fait. Toutefois, l’acte de fiducie a sans aucun doute été établi. Les témoins n’ont pas été contredits et le document n’a pas été contesté. Il faut consulter le document lui‑même pour savoir quelle était la relation juridique qui a été créée. C’est là ce qu’est une simple fiducie. L’appelante a satisfait aux critères applicables aux simples fiducies qu’elle a mentionnés dans son argumentation.

 

[137]  L’intimée affirme fondamentalement que l’appelante a fait enregistrer le titre au nom de Mme Krmpotic et qu’elle ne peut pas maintenant affirmer que Mme Krmpotic ne détenait pas le titre. Toutefois, c’est ce que disait la déclaration de fiducie. Mme Krmpotic détenait uniquement le titre légal afférent à l’unité; elle n’avait pas la propriété effective de l’unité. Il est vrai qu’ils n’ont pas informé M. Desai de la chose, mais les personnes qui établissent un acte de fiducie ne sont pas tenues d’aviser qui que ce soit de la chose. De toute façon, l’avocate de l’intimée n’a pas posé de questions à ce sujet lors des contre‑interrogatoires.

[138]  Étant donné que l’avocate de l’intimée n’a pas demandé aux témoins pourquoi le document n’avait pas été présenté à l’ARC auparavant ou pourquoi il n’avait pas été remis au comptable, elle ne peut pas, dans le cadre de l’instruction ou par la suite, affirmer qu’il y a quelque chose de suspect à cet égard.

 

[139]  En ce qui concerne l’année frappée de prescription et les pénalités pour faute lourde, l’avocat a pris la position selon laquelle ces questions ne sont pas pertinentes puisqu’il n’y a pas d’impôt exigible sur l’opération. Toutefois, si la Cour retient la thèse de la Couronne, à savoir que même si M. Krmpotic et sa mère ont établi un acte de fiducie, cet acte n’est plus valide puisqu’ils ont fait enregistrer le titre au nom de Mme Krmpotic, comment M. Krmpotic est‑il censé le savoir en sa qualité de profane? Comment peut‑il s’agir d’une présentation erronée de sa part? Quant à lui, et pour ce qui est du témoignage qu’il a présenté devant la Cour, il a toujours cru que l’acte de fiducie était valide. Comment l’ARC peut‑elle donc dire qu’il a fait une présentation erronée, par négligence ou inattention? Il a toujours cru que l’acte de fiducie était l’instrument qui régissait la situation. Il ne croyait pas avoir conféré un avantage à sa mère. Il n’avait aucune raison de le faire.

 

[140]  Selon l’avocat, la déclaration de revenus personnelle de M. Krmpotic était frappée de prescription. Ici encore, il incombe à la Couronne de rouvrir l’année frappée de prescription. Il s’agit de savoir quelle preuve a été présentée pour donner à penser que M. Krmpotic, sciemment ou même par inattention, savait que l’acte de fiducie qu’il avait signé n’était pas valide et qu’il fallait plutôt se fonder sur le titre foncier, sur l’enregistrement du titre foncier. Aucune preuve n’a été soumise sur ce point. Le même argument s’applique aux pénalités pour faute lourde.

 

[141]  Il n’y aurait pas de faute lourde ou de négligence à moins que les personnes en cause ne créent une simulation. Même si la Cour retenait la position de l’intimée, lorsque celle‑ci affirme que ce qui figurait dans le titre l’emportait sur le document, en quoi M. Krmpotic a‑t‑il fait preuve de négligence? M. Krmpotic a toujours cru que l’acte de fiducie avait force obligatoire. Rien ne montrait qu’il croyait que ce qui avait été enregistré devait régir la situation; il avait l’acte de fiducie. Il pouvait à bon droit se fonder sur cet acte. Or, le vérificateur, M. Brown, a dit que M. Krmpotic aurait dû inclure les 442 000 $ dans son revenu en vertu du paragraphe 66(2). Il s’attendait à ce qu’un contribuable ordinaire sache que l’acte de fiducie qu’il avait établi, que sa société avait établi, avec sa mère n’était pas valide, et ce, à cause d’un problème juridique de formalité quelconque, et qu’en l’an 2000, M. Krmpotic aurait dû inclure les 442 000 $ dans son revenu. Ce n’est pas ce à quoi on s’attend d’un contribuable ordinaire.

[142]  En ce qui concerne les pénalités pour faute lourde, l’avocat a reconnu ce qui suit : « La "faute lourde" doit être interprétée comme un cas de négligence plus grave qu’un simple défaut de prudence raisonnable. Il doit y avoir un degré important de négligence qui correspond à une action délibérée, une indifférence au respect de la loi. » Telle est la norme, de sorte qu’il doit y avoir intention ou faute lourde. L’avocat était prêt à admettre que si le document était frauduleux, s’il avait été établi après coup ou s’il avait été antidaté, cela constituait une action délibérée et qu’il y aurait faute lourde. Toutefois, si, comme l’avocat l’a soutenu, il existait une véritable relation juridique et que, pour une raison ou une autre, il y avait un problème de formalité qui empêchait de donner suite au document, comment peut‑il y avoir faute lourde? L’obligation de prouver la faute lourde incombe à la Couronne; or, aucun élément de preuve n’a été soumis au sujet de l’état d’esprit des appelants, de M. Krmpotic ou de sa société.

 

[143]  De toute évidence, il n’y avait pas lieu pour M. Krmpotic ou pour la société de croire que l’acte de fiducie n’était pas valide et qu’il ne pouvait pas avoir pour effet de transférer la propriété effective à la société. Il n’existe aucun autre élément de preuve indiquant le contraire.

 

[144]  En fin de compte, la position de l’avocat était que l’accord de fiducie était valide et qu’il n’y a donc pas eu transfert de fonds, qu’il n’y avait pas de montant imposable. Aucune pénalité ne peut être imposée; les appelants ne doivent rien.

 

[145]  Si la Cour devait conclure que le document n’avait aucun effet sur le plan juridique, l’appel interjeté par la société appelante devrait être rejeté, sauf en ce qui concerne les pénalités pour faute lourde. En fait, la société a transféré en faveur de Mme Krmpotic un bien dont la juste valeur marchande s’élevait à 442 000 $.

 

[146]  En outre, aucune pénalité pour faute lourde ne devrait s’appliquer à la société. Quant à M. Krmpotic lui‑même, il y a prescription parce que M. Krmpotic n’a pas été négligent en omettant de déclarer ce revenu ou l’avantage qu’il a conféré à sa mère et aucune pénalité pour faute lourde ne devrait être imposée à M. Krmpotic.

 

ANALYSE ET DÉCISION

 

[147]  Les faits de la présente affaire ne sont pas réellement contestés. Ils sont fondamentalement énoncés dans l’exposé conjoint des faits partiel, auquel vient s’ajouter la preuve soumise par les trois témoins qui ont été cités pour le compte des appelants et, dans une moindre mesure, la preuve soumise par le témoin qui a été cité pour le compte de l’intimée.

 

[148]  La preuve présentée par John Krmpotic, par Manu Desai et par Betty Krmpotic n’a fondamentalement pas été contestée. Mme Krmpotic et M. Krmpotic semblaient être des témoins sincères qui ont présenté leurs témoignages avec franchise en se fondant sur leur propre connaissance des faits; la preuve qu’ils ont soumise n’a pas vraiment été mise en question, en particulier au cours du contre‑interrogatoire, et la Cour est convaincue qu’elle peut retenir cette preuve.

 

[149]  M. Desai a également témoigné avec franchise; la preuve qu’il a soumise n’a pas été contestée au cours du contre‑interrogatoire ou au moyen de quelque autre élément de preuve. Par conséquent, la Cour retient ce témoignage.

 

[150]  La Cour a de la difficulté à comprendre pourquoi M. Desai a conclu que tous les éléments d’actif de l’inventaire de la société avaient fait l’objet de dispositions, même s’il n’avait pas à sa disposition un état de rajustement pour l’unité ici en cause. Il se peut fort bien qu’à cause du temps qui s’était écoulé depuis la réception du dernier état de rajustement et qu’étant donné que la société n’avait pas exercé d’activités au cours de cette période, il ait conclu, d’une façon raisonnable, que la société avait disposé de tout son inventaire. Quoi qu’il en soit, son témoignage n’a pas été contesté et la Cour conclut qu’en préparant les états comme il l’a fait, M. Desai a simplement commis une erreur en tirant la conclusion à laquelle il est arrivé. Il n’y a pas eu de tentative délibérée de sa part ou de la part de quelqu’un d’autre pour induire l’ARC en erreur lorsque les déclarations ont été produites pour le compte de la société.

 

[151]  La Cour reconnaît que M. Desai a commis une erreur de bonne foi en tirant la conclusion à laquelle il est arrivé et que, dans les circonstances, ni la société ni M. Krmpotic ne savaient ou n’auraient dû savoir que cette erreur avait été commise, tant que l’ARC n’a pas soulevé la question dans le cadre de la procédure d’établissement de la cotisation.

 

[152]  La Cour est convaincue que, si M. Desai avait su que la société détenait encore l’unité après le 31 mai 2000, il n’aurait pas réduit le coût de l’inventaire ni déduit les coûts associés à l’unité dans le calcul du revenu de la société pour l’année. Les actions de M. Desai étaient fondées sur la conviction erronée selon laquelle la société avait vendu la dernière unité restante de l’ensemble au cours de l’exercice ayant pris fin le 31 mai 2000, et ce, même si la Cour, comme elle l’a mentionné, a de la difficulté à croire que M. Desai aurait dû arriver à cette conclusion en se fondant uniquement sur le fait que, depuis un certain temps, il n’avait pas reçu d’état de rajustement à l’égard des unités. Toutefois, M. Desai a bien dit qu’il n’avait pas été avisé de la vente de la dernière unité. Il a volontiers admis que c’était une erreur de sa part.

 

[153]  En fin de compte, la Cour peut uniquement conclure, à partir des raisons que M. Desai a données, que cette conclusion était justifiée, compte tenu de l’expérience que M. Desai avait eue avec les personnes en cause et de l’expérience qu’il avait acquise en travaillant comme comptable pendant un grand nombre d’années.

 

[154]  L’acte de fiducie était une simple déclaration selon laquelle Mme Krmpotic détenait l’unité 102‑4405 Blackcomb Way, en fiducie pour la société. Mme Krmpotic a en outre déclaré qu’elle ne possédait absolument aucun droit sur l’unité et qu’elle avait transféré l’unité à la société, sur demande, pour un montant d’un dollar. Mme Krmpotic a affirmé que le document avait été signé à la date qui y était inscrite, soit le 1er décembre 2000. Cette preuve n’a aucunement été contredite. La preuve ne permet aucunement d’insinuer le contraire.

 

[155]  Lors de la présentation de la preuve, M. et Mme Krmpotic ont tous deux témoigné que l’acte de fiducie visait à transférer à Mme Krmpotic le titre légal afférent à l’unité seulement, moyennant une contrepartie d’un dollar, et que la société avait encore la propriété effective de l’unité. Ce témoignage n’a pas non plus été contredit. Telle était l’intention et le document a été signé par Mme Krmpotic.

 

[156]  On n’a soumis aucun élément de preuve tendant à montrer qu’il fallait faire quelque chose d’autre pour que le document ait un effet juridique entre Mme Krmpotic et la société après qu’il eut été signé. À première vue, le document semble uniquement transférer le titre légal au simple fiduciaire, la société conservant de son côté la propriété effective de l’unité.

 

[157]  Selon la preuve soumise par Mme Krmpotic et par M. Krmpotic, c’est ce que le document visait à accomplir. M. Krmpotic a témoigné au sujet de la raison pour laquelle il voulait transférer l’unité de cette façon et Mme Krmpotic a témoigné que M. Krmpotic avait signé ce document pour des raisons qui lui étaient propres. Mme Krmpotic n’a pas mis en question ces raisons. Même si M. Krmpotic n’a pas obtenu de conseils juridiques au sujet de la rédaction de ce document et de son effet juridique, le document semble à première vue avoir accompli les fins visées.

 

[158]  La Cour ne retient aucun des arguments invoqués par l’intimée; il en va de même pour la suggestion de M. Brown, à savoir que, pour être un document valide accomplissant ce qu’il était censé accomplir, le document devait être rédigé sous une autre forme, renfermer les noms d’autres personnes ou être attesté par quelqu’un.

 

[159]  Il faut se rappeler, comme l’avocat de l’appelante l’a fait valoir, qu’il s’agissait d’un acte de simple fiducie, et non d’un contrat. On tentait de faire quelque chose de plutôt simple, soit de transférer au fiduciaire le titre légal afférent à l’unité, moyennant une contrepartie d’un dollar; or, la Cour conclut que le document renfermait les dispositions nécessaires à cette fin.

 

[160]  Indépendamment de la question de savoir si les raisons qu’avait M. Krmpotic pour agir comme il l’a fait étaient suffisantes afin de lui permettre d’accomplir ce qu’il voulait, les résultats que M. Krmpotic cherchait à atteindre n’ont pas d’importance en l’espèce. M. Krmpotic croyait que le document aurait pour effet de permettre à la société de conserver la propriété effective de l’unité tout en transférant le titre légal à sa mère, et ce, tant que la société ne déciderait pas de vendre l’unité, la propriété effective devant alors être de nouveau transférée à la société.

 

[161]  Selon le document lui‑même, Mme Krmpotic ne possédait aucun autre droit sur l’unité et elle était tenue de transférer de nouveau la propriété effective à la société lorsque cette dernière le lui demanderait. La Cour est convaincue que M. Krmpotic a lui‑même préparé l’acte de fiducie, qu’il a parlé à Mme Krmpotic de l’enregistrement du titre afférent à l’unité au nom de celle‑ci et qu’il a examiné avec elle les conditions de l’acte de fiducie. La Cour est convaincue que Mme Krmpotic a signé l’acte de fiducie le 1er décembre 2000, chez elle et en présence de M. Krmpotic. La Cour est convaincue que Mme Krmpotic et la société ont toutes deux toujours considéré que la société était en tout temps le véritable propriétaire de l’unité. La Cour est convaincue que Mme Krmpotic comprenait les conditions de l’acte de fiducie et qu’elle considérait que cet acte la liait en tout temps.

 

[162]  En outre, Mme Krmpotic n’utilisait pas l’unité à des fins personnelles. Elle était entrée dans l’unité une ou deux fois seulement pour s’occuper de l’entretien et elle n’avait retiré aucun avantage personnel en faisant ce qu’elle a fait.

 

[163]  Peu importe que M. Krmpotic ait eu raison d’interpréter comme il l’a fait la législation de la Colombie‑Britannique concernant la dissolution d’une société et la confiscation d’un bien immobilier en faveur de la province, cela n’a rien à voir avec l’examen par la Cour des questions qui sont ici en litige. La Cour est convaincue que M. Krmpotic semblait comprendre passablement bien le Business Corporations Act et, dans une certaine mesure, l’Escheat Act, en agissant comme il l’a fait.

 

[164]  La Cour est convaincue que le fait que le document n’a pas été signé par les deux parties n’est pas pertinent. Il ne s’agissait pas d’un contrat. Il s’agissait d’une déclaration de fiducie.

 

[165]  Aux dires de l’avocat de l’appelante, la question qui se pose ici est de savoir s’il existe une simple fiducie. On a mis en question le fait que le titre foncier, l’acte de transfert, était daté du 1er septembre 1999, mais qu’il n’avait été enregistré que le 1er décembre 2000. Or, cette date, le 1er décembre 2000, était celle qui figurait dans l’acte de fiducie comme étant la date de sa signature. Toutefois, ce point n’a pas été soulevé au cours de l’interrogatoire des témoins, de sorte que la Cour est convaincue que ces dates ne sont pas pertinentes et qu’on ne saurait donc soulever la question du moment où les documents ont été signés ou enregistrés.

 

[166]  La Cour ne dispose d’aucun élément de preuve donnant à penser que la déclaration de fiducie était une simulation ou une fraude. De fait, la preuve indiquait le contraire. Le document semble avoir été signé à la date à laquelle les parties ont affirmé qu’il l’avait été et les parties croyaient que le document avait pour elles force obligatoire.

 

[167]  Dans sa réponse à l’avis d’appel, le ministre a supposé, aux alinéas 10o) et p), que l’appelante avait transféré à Mme Krmpotic la propriété légale et la propriété effective de la dernière unité de l’ensemble, soit l’unité 102‑4405 Blackcomb Way, pour la somme d’un dollar et que, pendant la période pertinente, c’était Mme Krmpotic qui avait la propriété effective de l’unité.

 

[168]  M. Brown a témoigné pour confirmer cette hypothèse, fondée sur son examen des renseignements figurant dans les documents concernant les droits de cession immobilière de la Colombie‑Britanique et dans les documents de l’autorité évaluatrice de la Colombie‑Britannique. Cela était uniquement fondé sur le fait qu’un transfert du titre afférent à l’unité en faveur de Mme Krmpotic y était indiqué. Toutefois, ces hypothèses ont été examinées dans la preuve présentée par M. et par Mme Krmpotic, qui ont tous deux témoigné que la société avait toujours continué à avoir la propriété effective de l’unité. M. Brown n’a pu fournir aucune preuve au sujet de la propriété effective de l’unité si ce n’est son hypothèse, à savoir que l’unité avait été transférée à Mme Krmpotic en même temps que le titre avait été enregistré au nom de celle‑ci, comme le montre le dossier.

 

[169]  Dans son témoignage, M. Brown a en outre déclaré avoir conclu que l’unité avait été transférée entre des parties qui avaient entre elles un lien de dépendance moyennant une contrepartie inadéquate et que la valeur réelle de l’unité était de 442 000 $. Il a conclu que ce montant devrait être inclus dans le revenu.

 

[170]  M. Brown n’a vu l’acte de fiducie qu’après que les nouvelles cotisations eurent été établies et il a confirmé que l’acte de simple fiducie n’avait pas été accepté. Il a déclaré que l’acte n’était pas signé, qu’il n’était pas attesté par un témoin et qu’il semblait y avoir contradiction entre la propriété effective du bien‑fonds et les documents déposés par la société. M. Brown n’a jamais reçu les renseignements qu’il avait demandés au comptable et à la société de lui fournir, de sorte qu’il a conclu que les dossiers ne correspondaient peut‑être pas aux documents qui avaient été déposés.

 

[171]  La Cour est convaincue qu’en l’absence de quelque disposition législative empêchant l’acte de simple fiducie d’avoir effet, la preuve a établi que le document en question satisfait aux conditions applicables à une « fiducie » parce que, dans ce cas‑ci, la fiduciaire, Mme Krmpotic, détenait l’unité sans être tenue de faire quoi que ce soit si ce n’est de la transférer au bénéficiaire ou aux bénéficiaires sur demande. Mme Krmpotic a uniquement obtenu le titre légal afférent à l’unité. Elle détenait ce titre en sa qualité de simple fiduciaire seulement et la société a toujours conservé la propriété effective de l’unité.

 

[172]  Il va sans dire que le paragraphe 104(1) de la Loi exclut la simple fiducie de la notion de « fiducie » aux fins de l’impôt sur le revenu. La politique administrative du ministre en ce qui concerne les simples fiducies veut que le ministre omette de tenir compte de la fiducie aux fins de l’impôt sur le revenu et qu’il considère le cédant ou le constituant comme étant propriétaire du bien en cause pour l’application de la Loi. En l’espèce, la fiducie en question semble satisfaire à toutes les exigences du ministre en ce sens :

 

a.       que le fiduciaire ne possède pas de pouvoirs importants ou n’assume pas de responsabilités importantes, et qu’il ne peut prendre des mesures que s’il obtient des instructions du constituant;

 

b.       que le fiduciaire est uniquement chargé de détenir le titre légal afférent à l’unité;

 

c.       que le constituant est l’unique bénéficiaire et qu’il peut faire en sorte que l’unité lui soit retournée n’importe quand.

 

[173]  L’avocate de l’intimée a pris la position selon laquelle l’acte de fiducie en question n’avait aucun effet parce qu’il n’était pas conforme au Land Title Act et, en particulier, à l’article 180 de cette loi. Elle a fait valoir que les actions de l’appelante dans ce cas‑ci n’étaient pas conformes à la loi. Selon l’avocate, en ce qui concerne les tiers, Mme Krmpotic détenait le titre foncier en fief simple, c’est‑à‑dire qu’elle possédait tous les droits se rattachant au bien‑fonds, selon la définition donnée par l’avocate. Par conséquent, Mme Krmpotic ne peut pas maintenant affirmer, après avoir déclaré aux tiers que la société avait transféré tous ses droits, que cette dernière avait encore la propriété effective de l’unité.

 

[174]  Il s’agit de savoir si la propriété effective est dévolue au gouvernement provincial, et ce, malgré l’intention contraire de l’appelante. La seule façon d’accomplir les deux choses consistait à faire ce que l’appelante a fait, à ne pas faire enregistrer l’acte de fiducie et à faire croire aux tiers que le fief simple avait été transféré à Mme Krmpotic, de façon que l’unité ne donne pas lieu à une dévolution. Cependant, pareilles questions n’ont pas été soulevées devant les témoins lorsqu’ils ont témoigné et la Cour ne peut pas tirer pareilles conclusions à l’aide de la preuve.

 

[175]  La Cour est convaincue que les actions des appelants en l’espèce n’étaient pas illégales ni contraires à l’article 20 du Land Title Act. Le fait que la fiducie n’était pas enregistrée à l’égard du titre n’invalide pas la fiducie. La Cour retient l’argument de l’avocat de l’appelante, lorsqu’il dit que l’article 20 fait clairement autorité à l’appui de la thèse selon laquelle les instruments non enregistrés peuvent avoir des incidences sur le titre entre les parties à ces instruments. De toute évidence, le fait que la fiducie n’a pas été enregistrée à l’égard du titre n’invalide pas la fiducie. L’enregistrement peut avoir une importance primordiale pour les tiers indépendants.

 

[176]  La Cour ne retient pas l’interprétation que l’avocate de l’intimée donne de l’article 180 du Land Title Act. La Cour est convaincue que cette disposition est facultative, lorsqu’il s’agit de faire enregistrer la fiducie. Même si tel n’était pas le cas, les parties ont simplement omis de se conformer au Land Title Act. Cela ne veut pas dire que la relation créée par l’acte de fiducie n’est pas valide. L’omission d’observer les formalités de la Loi n’invalide pas l’acte de fiducie.

 

[177]  L’avocat de l’appelante n’était pas prêt à dire quel serait l’effet de l’omission d’observer la Loi et l’avocate de l’intimée n’a pas abordé la question. De fait, si c’était le cas, Mme Krmpotic n’aurait peut‑être détenu aucun titre et l’enregistrement lui‑même aurait peut‑être été jugé invalide.

 

[178]  En fin de compte, même si les mots « en fiducie » ne figurent pas dans le titre et même si les appelants ne respectaient pas l’article 180 du Land Title Act, l’enregistrement pourrait être invalide. Cependant, cela ne change rien à la relation juridique existant entre la société et Mme Krmpotic.

 

[179]  De l’avis de la Cour, les dispositions de l’article 180 sont impératives en ce qui concerne les obligations du registraire, celui‑ci étant obligé de procéder à l’enregistrement au nom du représentant personnel, de faire une inscription contenant tout renseignement supplémentaire qu’il estime nécessaire pour identifier la succession testamentaire et de faire référence au moyen d’un numéro à l’acte de fiducie. Or, cela n’a aucun effet juridique sur la validité de l’acte de simple fiducie.

 

[180]  En l’espèce, il n’y avait rien dans le document qui indique quelles étaient les dispositions relatives à la fiducie et il se peut fort bien en fin de compte que l’enregistrement soit à un moment donné déclaré invalide pour l’application du Land Title Act. Toutefois, l’acte de fiducie n’est pas pour autant vicié.

 

[181]  La Cour est convaincue que l’effet de l’article 20 du Land Title Act, qui renferme les mots [traduction] « sauf à l’encontre de la personne qui l’établit », est de confirmer que le document a encore force obligatoire en ce qui concerne les parties qui l’ont signé, et ce, peu importe ce qui est indiqué dans le titre. De toute façon, la Cour est en outre convaincue que l’acte de simple fiducie n’est pas vicié par suite de quelque disposition législative. Il lie les personnes qui y sont parties. Il avait pour effet de transférer au fiduciaire le titre légal seulement, la société conservant la propriété effective de l’unité en tout temps.

 

[182]  En fin de compte, la Cour est convaincue que les appelants se sont acquittés de l’obligation qui leur incombait de la convaincre que les cotisations établies par le ministre n’étaient pas fondées. Par conséquent, la charge de la preuve est passée au ministre, qui devait réfuter la preuve prima facie présentée par le contribuable et prouver les hypothèses. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, la Cour est convaincue que le ministre ne l’a pas fait, que ce soit au moyen du contre‑interrogatoire ou au moyen d’un témoignage présenté à la Cour.

 

[183]  La Cour est convaincue que l’acte de fiducie est valide et qu’il indique la relation véritable qui existe entre les parties. Il n’y a pas eu transfert de propriété et il n’y avait pas de montant imposable. Aucune pénalité ni aucuns intérêts ne peuvent être imposés.

 

[184]  Les appels seront accueillis et les nouvelles cotisations seront annulées. Les appelants feront taxer leurs frais et dépens.

 

       Signé à Ottawa, Ontario, ce 20e jour de mai 2008.

 

« T. E. Margeson »

Juge Margeson

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 10e jour de septembre 2008.

 

Christian Laroche, juriste-traducteur

 


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI220

 

DOSSIERS DE LA COUR :               2006-2353(IT)G; 2006-2354(IT)G et 2006‑2355(GST)I

 

INTITULÉ :                                       507582 B.C. Ltd. c. La Reine

                                                          John Frank Krmpotic c. La Reine

                                                          507582 B.C. Ltd. c. La Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 6 mars 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable T.E. Margeson

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 20 mai 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me Alistair Campbell

Avocate de l’intimée :

Me Susan Wong

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                   Nom :                             Alistair Campbell

 

                   Cabinet :                         Legacy Tax + Trust Lawyers

                                                          Vancouver (Colombie-Britannique)

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 

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