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Dossier : 2007-1342(IT)I

ENTRE :

 

XIN WANG,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appels entendus le 22 janvier et le 29 avril 2008 à Toronto (Ontario).

 

Devant : L’honorable juge T. E. Margeson

 

Comparutions :

 

Représentant de l’appelant :

Sean Hu

Avocate de l’intimée :

Me Samantha Hurst

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

       Les appels interjetés à l’encontre des nouvelles cotisations établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu relativement aux années d’imposition 2002 et 2003 de l’appelant sont accueillis, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national afin qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant compte des modifications suivantes qui seront apportées aux annexes III, V et VI de la réponse :

 

annexe III

-         différence selon l’avoir net, 2002 : le montant de 39 595,72 $ est remplacé par le montant de 37 137,91 $

 

annexe V

-         revenu d’entreprise non déclaré, 2002 : le montant de 36 063,22 $ est remplacé par le montant de 33 605,41 $

-         revenu d’entreprise non déclaré selon l’avoir net en 2002 : le montant de 33 702,33 $ est remplacé par le montant de 31 244,46 $

 

annexe VI

-         revenu d’entreprise non déclaré selon l’avoir net, 31 décembre 2002 : le montant de 33 702 $ est remplacé par le montant de 31 244 $.

 

Rajustement total – 31 décembre 2002 : le montant de 37 234 $ est remplacé par le montant de 34 786 $.

 

       Les appels sont rejetés à tous les autres égards.

 

       Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 19e jour de juin 2008.

 

 

« T. E. Margeson »

Juge Margeson

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de septembre 2008.

 

Aleksandra Koziorowska, LL.B.


 

 

 

 

Référence : 2008CCI308

Date : 20080619

Dossier : 2007‑1342(IT)I

ENTRE :

 

XIN WANG,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Margeson

 

[1]   Le contribuable a initialement interjeté appel des cotisations établies pour les années d’imposition 2001, 2002 et 2003.

 

[2]   Au début du procès, l’intimée a demandé le rejet de l’appel concernant l’année d’imposition 2001 au motif qu’aucun avis d’opposition n’avait été déposé relativement à cette année‑là.

 

[3]   La preuve a démontré qu’aucun avis d’appel n’avait été déposé relativement à l’année d’imposition 2001. Par une ordonnance rendue le 7 mars 2008, j’ai accueilli la requête et rejeté l’appel concernant l’année d’imposition 2001.

 

[4]   Le ministre du Revenu national a établi de nouvelles cotisations à l’égard de l’appelant pour les années d’imposition 2002 et 2003, en vertu du paragraphe 152(7) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »), par des avis de nouvelle cotisation datés du 10 janvier 2006, et il a augmenté le revenu d’entreprise net de l’appelant pour ces années de 37 234 $ et de 34 055 $ respectivement, en utilisant la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net. En outre, il a imposé des pénalités de 3 730,93 $ et de 1 661,92 $ respectivement, en vertu du paragraphe 163(2) de la Loi, relativement à un montant de 33 702 $ pour l’année d’imposition 2002 et à un montant de 20 878 $ pour l’année d’imposition 2003; il s’agissait de montants qui représentaient le revenu d’entreprise non déclaré pour ces années d’imposition. Ce sont ces nouvelles cotisations qui font l’objet du présent appel.

 

La preuve

 

[5]   L’appelant a déclaré dans son témoignage qu’il a immigré de la Chine continentale en janvier 1997. Il n’avait aucune formation en affaires et ne connaissait rien à la fiscalité. C’est son comptable qui remplissait ses déclarations de revenus. Selon son comptable, il devait tenir des registres quotidiens. L’appelant avait ces documents avec lui lorsqu’il a comparu devant la Cour.

 

[6]   En ce qui concerne l’affirmation du vérificateur selon laquelle il a surévalué de 4 154 $ le coût des biens vendus, l’appelant a dit qu’il croyait qu’il s’agissait de dépenses de nettoyage et de publicité.

 

[7]   L’appelant ne croyait pas que 5 % seulement de ses frais d’automobile devaient être attribués à ses activités commerciales et 95 % à ses activités personnelles. Selon lui, l’utilisation à des fins personnelles devait être de 20 % et l’utilisation à des fins commerciales, de 80 %.

 

[8]   L’appelant a acheté l’entreprise, mais [TRADUCTION] « elle n’était pas rentable ». Lui et sa famille ont survécu en vivant simplement et en empruntant de l’argent à ses beaux‑parents. L’appelant a dit qu’il ne dépensait pas 6 000 $ par année pour l’épicerie. Il a dit que lui et sa famille détestaient les restes de nourriture du restaurant et qu’ils se rendaient à l’église ou au temple pour obtenir des repas gratuits.

 

[9]   Il contestait la thèse du ministre selon laquelle il dépensait 1 200 $ par année pour des vêtements, affirmant que les vêtements qu’ils portaient provenaient de la Chine. Ils ne dépensaient pas d’argent pour les soins de santé, les soins personnels, les loisirs et les articles divers. Il lisait le journal au supermarché. Ils n’achetaient pas d’alcool, de tabac, de cadeaux ou de billets de spectacle.

 

[10] Ils ont vendu l’entreprise en 2003 au prix de 44 000 $. Ils l’avaient payée 70 000 $.

 

[11] Les beaux‑parents de l’appelant, qui vivaient en Chine, leur ont apporté 85 000 $ comptant. Ils leur ont aussi prêté 40 000 $ au cours d’une période de trois ans.

 

[12] L’appelant a dit qu’il n’avait jamais transmis de documents au ministre, à part ses déclarations de revenus, avant de recevoir la lettre du vérificateur datée du 23 juillet 2004 et déposée sous la cote A‑1.

 

[13] L’appelant n’a pas été informé des raisons pour lesquelles la vérification s’est étendue à l’année 2003.

 

[14] Lors de son contre‑interrogatoire, il a dit qu’il parlait un peu anglais et qu’il avait vu des documents et des indications relatifs au restaurant.

 

[15] Il a expliqué que la différence entre la somme d’argent que, selon le ministre, il avait à sa disposition pour ses fins personnelles et le montant qu’il a déclaré dans ses déclarations de revenus correspondait au montant d’argent que lui avait envoyé sa famille.

 

[16] Il n’a pas gagné d’argent au jeu. Il a reçu de l’argent de ses beaux‑parents, mais il n’avait aucun reçu qui le confirmait. Il prétendait que lui et sa famille avaient reçu 20 000 $ de ses beaux‑parents en 2003. Il a reconnu que le vérificateur a accepté ce montant. Ils n’ont pas reçu beaucoup d’argent de ses beaux‑parents en 2002. Sa femme est allée en Chine continentale en 2002 et est revenue avec une somme de 10 000 $ comptant.

 

[17] Il a ensuite indiqué qu’il avait reçu 35 000 $ de cette source au cours des années 2002 et 2003.

 

[18] Il a reconnu la lettre envoyée par un certain Qingyu Zeng – la pièce R‑2, onglet 23 de la pièce R‑1 – qu’il a montrée au vérificateur, dans laquelle M. Zeng alléguait avoir donné 7 500 $ à l’appelant en août 2002. Cette lettre contredisait le témoignage de l’appelant selon lequel sa femme est revenue de Chine avec une somme de 10 000 $ en 2002.

 

[19] La seule explication de l’appelant était que, si les parents de son épouse n’avaient pas voulu qu’ils utilisent l’argent, ils ne l’auraient pas fait. Il n’avait aucun document faisant état de la somme de 7 500 $. M. Zeng n’était pas disponible pour témoigner parce qu’il était parti en Chine. L’appelant ne lui a pas dit avant son départ qu’il allait lui demander de témoigner.

 

[20] L’appelant a indiqué que la pièce R‑3, qui se trouve à l’onglet 24 de la pièce R‑1, est une lettre qui aurait été écrite par Fei Sun qu’il a remise au vérificateur. Selon cette lettre, M. Sun a remis à l’appelant 15 000 $US provenant des parents de ce dernier lorsqu’il est venu au Canada en 2002. L’appelant a dit qu’il a reçu cette somme, mais que si la famille de son épouse n’avait pas voulu que lui et sa famille s’en servent, ils ne l’auraient pas fait. L’appelant et sa famille ont dépensé environ 30 000 $ en 2002 et en 2003.

 

[21] À l’étape de la vérification, l’appelant a dit qu’ils avaient reçu 7 500 $ et 15 000 $US en 2002. Il a ajouté ensuite qu’ils avaient apporté 80 000 $ au Canada et qu’ils en avaient dépensé la moitié au cours d’une période de trois ans.

 

[22] Après son arrivée à Vancouver, M. Sun s’est rendu directement à Toronto. Il apportait la somme de 15 000 $ comptant. Il n’a pas déposé cette somme à la banque.

 

[23] Au cours de la période de vérification, l’appelant a demandé à M. Sun de rédiger cette lettre. Celle‑ci portait la mention suivante : [TRADUCTION] « a aidé M. Wang à apporter 15 000 $ provenant de sa famille en Chine ».

 

[24] La pièce R‑2, qui se trouve à l’onglet 23 de la pièce R‑1, a été présentée à l’appelant. Il s’agit d’une lettre qui aurait été écrite par Qingyu Zeng. L’appelant a dit qu’il ne pensait pas que cette lettre avait été écrite par M. Sun (même si les deux lettres se ressemblaient beaucoup). Il a communiqué avec lui, mais il n’a pas répondu au téléphone. L’appelant ne savait pas si la lettre avait été écrite par M. Zeng ou si celui‑ci avait chargé quelqu’un d’autre de l’écrire, mais c’est sa signature qui y figurait.

 

[25] On n’a pas demandé à l’appelant de remplir son relevé de dépenses personnelles, qui se trouve à l’onglet 8, même si celui‑ci a été envoyé à son comptable.

 

[26] L’appelant a reconnu le relevé de dépenses personnelles – la pièce R‑5, qui se trouve à l’onglet 10 de la pièce R‑1 – mais il ne l’a pas rempli. Il a discuté de son contenu avec son épouse. Le couple a inscrit les montants, mais l’appelant croyait qu’ils en avaient surestimé certains.

 

[27] Selon l’appelant, ils n’ont pas acheté de couches ni de vêtements pour bébé; leurs amis leur en ont donné. Ils ne se sont pas non plus acheté de vêtements. L’appelant n’a pas inscrit le coût de la location de la voiture, qui est d’au moins 600 $. Pour le reste, les montants indiqués étaient exacts. Il n’y avait aucune dépense pour les soins de santé.

 

[28] L’appelant et sa famille ont dépensé seulement 20 $ par mois pour leurs soins personnels. La belle‑mère de l’appelant leur a acheté en Chine tout ce qui était nécessaire pour le bébé. L’appelant a reconnu avoir bu de l’alcool, mais il a dit que ses amis le lui avaient offert. Il n’a fait de présents à personne, même pas à sa belle‑mère. Celle‑ci a refusé tous les cadeaux qu’ils voulaient lui donner.

 

[29] L’appelant a nié que son relevé de dépenses personnelles avait été fabriqué de toutes pièces, même si les montants qui y étaient indiqués n’étaient pas élevés. Il a reconnu que ce document indiquait un montant total de 19 412 $ pour 2002, alors que sa déclaration de revenus montrait un revenu net de seulement 8 133,48 $.

 

[30] L’appelant ne se rappelait pas à quel moment il avait payé les droits de permis d’alcool ou le prix d’un permis municipal pour le restaurant, ou même s’il l’avait fait. Lorsqu’il a payé ces frais, il ne les a pas inscrits sur son relevé de dépenses, mais il a essayé de le faire au moment de la vérification. Il a reconnu qu’il y avait eu une [TRADUCTION] « petite erreur ». Il n’a pas inscrit non plus les honoraires de l’expert‑comptable.

 

[31] L’appelant était incapable d’expliquer la divergence entre sa déclaration de revenus, selon laquelle la valeur de la tenure à bail était de 64 750 $, et les renseignements concernant la vente, qui indiquaient que cette valeur était de 30 000 $.

 

[32] L’appelant a admis avoir commis, dans sa déclaration, trois erreurs qu’il ne pouvait pas expliquer.

 

[33] Il a dit qu’ils possédaient deux véhicules et que ceux‑ci étaient utilisés à environ 80 % pour les livraisons du restaurant. Il a signé un contrat de location pour la fourgonnette Dodge et il devait payer 250 $ par mois pour la location. Il ignorait si son salaire était inscrit sur le contrat de location, et il n’a pas apporté ce document avec lui aujourd’hui. Le véhicule valait plus de 20 000 $.

 

[34] La belle‑mère de l’appelant n’a pas assisté à l’audience parce qu’elle a dû demeurer à la maison et s’occuper de son enfant. L’appelant n’a appelé aucun autre témoin pour corroborer son témoignage.

 

[35] Son épouse est allée en Chine en 2002 et en 2003 et lui‑même s’est rendu dans ce pays en 2003. Sa belle‑mère a assumé les frais du voyage de son épouse en 2002 et il a lui‑même payé celui de 2003. Il a payé son propre voyage après la vente du restaurant. Il soutenait qu’un voyage aller‑retour en Chine coûtait environ 1 000 $.

 

[36] Lors de son réinterrogatoire, il a dit qu’il voulait déposer les deux lettres en preuve afin de montrer que le montant d’argent qui provenait de la Chine totalisait 85 000 $ environ.

 

[37] Son représentant a reconnu qu’aucune opposition n’avait été déposée en 2002 et que l’appelant se désistait de l’appel concernant cette même année. La Cour a rejeté l’appel en ce qui concerne cette année‑là.

 

[38] L’intimée a appelé Coskun Cetinkaya à témoigner. En 2003 et en 2004, M. Cetinkaya était un vérificateur de l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). Il détient un baccalauréat en gestion et il a reçu une formation spéciale de l’ARC. Son gestionnaire lui a confié le dossier de l’appelant en juillet 2004.

 

[39] M. Cetinkaya a envoyé une lettre à l’appelant, et le comptable de ce dernier, M. Chu, a communiqué avec lui. Il a indiqué que cette lettre est bien la pièce R‑2, qui se trouve à l’onglet 4 de la pièce R‑1. Après l’entrevue initiale, il a reçu des relevés bancaires, des relevés de carte de crédit et les documents relatifs à l’achat et à la vente de l’entreprise de l’appelant. Il a rédigé le document qui se trouve à l’onglet 5 de la pièce R‑1 après son entrevue avec l’appelant.

 

[40] M. Cetinkaya a passé en revue les observations du sélectionneur selon lesquelles un faible revenu avait été déclaré et qu’il fallait, en conséquence, vérifier la source de ce revenu. Plusieurs années et plusieurs facteurs ont été examinés.

 

[41] M. Cetinkaya a effectué une analyse bancaire et a constaté que les dépôts bancaires ne correspondaient pas au revenu déclaré. Le contribuable a dit qu’il ne déposait pas la totalité de ce revenu dans son compte de banque. M. Cetinkaya a effectué une [TRADUCTION] « analyse sommaire de la source de revenu », ainsi que des recherches dans les registres des biens et des véhicules automobiles. L’[TRADUCTION] « analyse sommaire de la source de revenu » a révélé que les dépenses étaient plus élevées que le revenu déclaré. L’appelant avait sûrement d’autres sources de revenu. M. Cetinkaya a aussi conclu que l’entreprise faisait des affaires au comptant. Il a discuté de la question avec son gestionnaire et ils ont décidé d’établir une [TRADUCTION] « cotisation fondée sur l’avoir net ».

 

[42] M. Cetinkaya a examiné tous les documents qui lui ont été remis et a eu des discussions avec le contribuable.

 

[43] M. Cetinkaya s’est servi des chiffres établis par Statistique Canada pour une famille de trois personnes. Il pensait que ces chiffres étaient un peu bas pour Toronto. Il a tenu compte du fait que le bébé se trouvait à l’extérieur de la ville pendant un certain temps et que la belle‑mère de l’appelant vivait une partie du temps avec eux.

 

[44] Après avoir découvert les divergences, il a rédigé une lettre de proposition, la pièce R‑9, qui se trouve à l’onglet 12 de la pièce R‑1. Il a d’abord conclu que le revenu imposable devait être majoré de 4 936 $ pour 2001, de 41 601 $ pour 2002 et de 10 915 $ pour 2003. Il a alors rencontré le contribuable et son représentant. Après avoir entendu leurs observations, il a fait certains rajustements. Il a considéré que l’année 2001 n’était pas importante car le montant en cause relativement à cette année‑là n’était pas élevé.

 

[45] Il a confirmé que sa lettre constituait la pièce R‑10, onglet 13 de la pièce R‑1, et a indiqué qu’il s’agissait de ses conclusions finales. Il a conclu que les dépenses déduites n’étaient pas étayées par les reçus et les documents qu’il avait examinés. Il y avait un écart de 4 154 $.

 

[46] Lors des entrevues, il a estimé que 20 % des frais de véhicule à moteur devaient être déduits, même si le contribuable n’avait demandé aucune déduction à cet égard. Selon lui, 5 % était raisonnable, et c’est la déduction qu’il a acceptée. Il ignorait que le contribuable et sa famille possédaient deux voitures. Les dépenses personnelles auraient ainsi pu être plus élevées, mais cela ne changeait rien au revenu.

 

[47] Selon M. Cetinkaya, la divergence concernant la perte déduite par le contribuable relativement à la vente de l’entreprise se chiffrait à 30 000 $.

 

[48] L’appelant a expliqué au vérificateur que la différence concernant son avoir net était attribuable aux sommes d’argent que leur avaient données des membres de leur famille habitant en Chine. L’appelant n’avait rien dit de tel lors de l’entrevue initiale. Il avait d’abord dit qu’il avait emprunté de l’argent à sa belle‑mère et, après que l’ARC a mis la touche finale à ses conclusions, que ses amis lui avaient aussi apporté de l’argent.

 

[49] L’appelant a renvoyé aux pièces R‑2 et R‑3, qui se trouvent aux onglets 23 et 24 de la pièce R‑1. Ces pièces sont des lettres faisant état de sommes d’argent remises à l’appelant par des membres de sa famille vivant en Chine en 2002. L’appelant a dit que ces personnes lui avaient remis de l’argent comptant. Or, le témoin ne le croyait pas. Il a accordé une exemption pour les sommes apportées par des membres de la famille de l’appelant, lorsqu’ils pouvaient produire des reçus bancaires correspondant à leur date d’arrivée, comme la pièce R‑1, onglet 22, qui concerne une somme de 23 000 $. Comme un livret de banque au nom de l’épouse de l’appelant indiquait un dépôt de 15 000 $US, il a accepté la déduction de ce montant (équivalant à au moins 23 000 $CAN) de l’avoir net. Il a refusé la déduction de tous les autres montants.

 

[50] M. Cetinkaya a rédigé un rapport de vérification résumant ses conclusions; ce rapport constitue la pièce R‑14, qui se trouve à l’onglet 25 de la pièce R‑1. Il a avisé le contribuable des rajustements.

 

[51] En ce qui concerne les pénalités, M. Cetinkaya a indiqué que, s’il y a un revenu non déclaré, les pénalités sont calculées en tenant compte du montant de l’augmentation du revenu d’entreprise (importance relative) (le revenu non déclaré par rapport au revenu total). La connaissance est un autre facteur. Il était au courant de l’information transmise au ministre. Ce fait a aussi été pris en compte au début, mais l’appelant n’a jamais mentionné que des amis avaient apporté de l’argent de la Chine et il n’y avait aucun document étayant cette allégation. De plus, le fait que le contribuable avait déclaré un très faible revenu était important. Le vérificateur a décidé que le montant déclaré par le contribuable ne lui permettait pas de subvenir à ses besoins. Il y a eu une forte majoration à la suite de l’augmentation.

 

[52] Lors de son contre‑interrogatoire, M. Cetinkaya a indiqué que la pièce A‑1 était la lettre envoyée au contribuable au sujet de la vérification à laquelle il avait l’intention de procéder. Il a confirmé qu’il n’avait aucun document à examiner avant d’écrire la lettre. Il a tenu compte du fait que le contribuable faisait des affaires au comptant et qu’il avait un faible revenu d’entreprise et un faible revenu imposable. Il a aussi tenu compte des remarques du sélectionneur. Un seul de ces trois éléments est suffisant pour que l’on établisse une cotisation fondée sur l’avoir net. M. Cetinkaya avait aussi l’approbation de son gestionnaire.

 

[53] M. Cetinkaya a reconnu la pièce A‑2, le relevé des dépenses personnelles de l’appelant (l’annexe IV de la réponse). Ses chiffres étaient fondés sur ceux de Statistique Canada. Le contribuable pouvait peut‑être expliquer pourquoi ces chiffres ne s’appliquent pas dans son cas. M. Cetinkaya croyait que la plupart des chiffres s’appliquaient au contribuable. Il a pris en considération l’information fournie par le contribuable qui avait une incidence sur l’utilisation qu’il faisait des chiffres de Statistique Canada. Il a aussi tenu compte du fait que le contribuable mangeait la nourriture du restaurant et que cela devait être pris en considération.

 

[54] Les chiffres du contribuable sont toujours utilisés s’ils se rapprochent de ceux de Statistique Canada. Par contre, s’il y a une grande différence entre eux, ce sont les chiffres de Statistique Canada qui prévalent.

 

[55] M. Cetinkaya a reconnu que le montant de la cotisation devait être réduit de 2 447 $, ce montant ayant été inclus deux fois dans les dépenses personnelles pour l’année d’imposition 2002.

 

[56] M. Cetinkaya n’était pas convaincu du coût des biens vendus. Les journaux ne devaient pas être inclus dans ce coût étant donné qu’il ne s’agissait pas d’un coût direct. Aucune déduction concernant le coût des journaux n’avait été initialement demandée. La perte finale relative à la survaleur déduite en 2007 a été refusée.

 

[57] M. Cetinkaya a reconnu que certains livres comptables avaient été présentés, mais ils étaient insuffisants, de sorte qu’il a dû utiliser la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net. Il a renvoyé aux motifs de sa décision, qui sont exposés dans la pièce R‑1, onglet 25, à la page 132.

 

[58] En ce qui concerne ses recommandations concernant les pénalités, on a attiré l’attention de M. Cetinkaya sur la page 152 de l’onglet 26 de la pièce R‑1, où il a écrit que malgré le fait que le contribuable ait tenu des livres comptables appropriés, il était arrivé à la conclusion, après avoir passé en revue le coût des biens vendus et les dépenses, que les documents n’étayaient pas les dépenses que le contribuable avait déduites dans les déclarations de revenus.

 

[59] M. Cetinkaya a conclu également que l’augmentation de l’avoir net était incompatible avec le revenu déclaré. Le contribuable a déclaré un revenu de 31 951 $, de 8 362 $ et de 47 673 $ respectivement pour les années 2001, 2002 et 2003. Une fois rajusté, le revenu d’entreprise net pour 2002 a augmenté de 37 234 $ et celui pour 2003, de 34 055 $. Pour ce qui est de 2001, l’augmentation de l’avoir net était minime.

 

[60] Le témoin a été invité à expliquer comment l’appelant pourrait démontrer que ses dépenses étaient inférieures à la moyenne nationale et il a répondu qu’il pourrait produire des reçus de nourriture.

 

[61] Lors de son réinterrogatoire, le témoin a dit qu’il y avait une différence de 4 154 $ au regard du coût des biens vendus. Il a été réinterrogé au sujet de la pièce R‑9, qui se trouve à l’onglet 12 de la pièce R‑1 et qui faisait état des rajustements qu’il proposait d’apporter au revenu. Il a dit que la preuve présentée à la Cour ne justifiait pas qu’on apporte des modifications à ces recommandations.

 

[62] Le crédit réclamé pour les journaux n’a jamais été mentionné par le contribuable. Il n’a pas été question de dépenses relatives à des journaux devant la Cour. Il s’agirait de dépenses de publicité et non du coût des biens vendus.

 

[63] On a attiré l’attention de M. Cetinkaya sur la pièce R‑11, à l’onglet 9 de la pièce R‑1, concernant le calcul de la perte finale. M. Cetinkaya a dit que les documents dont ils disposaient leur permettaient de calculer la perte finale. Comme les renseignements contenus dans la déclaration de revenus de l’appelant n’étaient pas appropriés, la perte finale a dû être calculée à maintes reprises. Pour ce faire, ils ont utilisé le prix d’achat total indiqué dans les documents fiscaux de l’appelant émanant du ministre des Finances, soit 70 250 $, et non le montant que le contribuable avait indiqué. La déclaration de revenus était erronée.

 

[64] M. Cetinkaya a répété qu’il a rajusté les chiffres de Statistique Canada après avoir reçu les observations formulées au nom du contribuable.

 

L’argumentation présentée pour le compte de l’appelant

 

[65] Le représentant de l’appelant a dit que l’utilisation de la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net créait quatre problèmes importants. Cette méthode était erronée sur le plan de la procédure. Il ne s’agit pas de la méthode normale de cotisation. Les cotisations d’impôt sont généralement fondées sur la déclaration de revenus.

 

[66] La méthode de l’avoir net est utilisée lorsqu’aucune déclaration de revenus n’a été produite (ou lorsque la déclaration produite est insuffisante) ou lorsqu’il manque des documents.

 

[67] Le juge en chef Bowman a écrit que la méthode de l’avoir net doit être utilisée « en dernier ressort » dans la décision Ramey c. Canada, [1993] A.C.I. no 142.

 

[68] Dans la décision Poopathie Company Ltd. c. La Reine, 2006 CCI 195, la juge Woods a mentionné que la méthode de l’avoir net peut être utilisée lorsqu’un contribuable n’a pas de livres comptables suffisants pour permettre la vérification du revenu indiqué dans la déclaration de revenus.

 

[69] Dans la décision Duncanson c. La Reine, 2000‑2820(IT)I, la juge Campbell a écrit que cette méthode était très insatisfaisante et pouvait produire des résultats inexacts. Elle a ajouté qu’il s’agissait d’une méthode de « dernier recours ».

 

[70] En l’espèce, il ne fait aucun doute que le ministre ne s’est pas d’abord servi de la méthode fondée sur les « documents », mais a choisi d’utiliser dès le départ la méthode fondée sur l’avoir net. L’appelant a renvoyé à la pièce A‑1 à cet égard et a dit que le ministre ne disposait d’aucun document à ce moment‑là étant donné que la vérification n’avait pas encore été effectuée. En conséquence, toute la cotisation devrait être annulée.

 

[71] Des livres comptables existaient en l’espèce, et ces documents étaient fiables. Rien dans la preuve ne permet de croire qu’il manquait des documents relatifs aux ventes ou que ceux‑ci n’étaient pas véridiques. Le ministre s’est fondé sur le faible revenu déclaré et sur le fait que l’entreprise de l’appelant faisait des affaires au comptant pour prendre sa décision.

 

[72] La cotisation n’est pas raisonnable. Elle reposait sur des chiffres peu fiables de Statistique Canada. Il s’agissait véritablement d’une [TRADUCTION] « cotisation fondée sur le mode de vie » et non réellement d’une « cotisation fondée sur l’avoir net ». Les contribuables ayant un faible revenu subissent un très grave préjudice lorsqu’une cotisation fondée sur l’avoir net devient une [TRADUCTION] « cotisation fondée sur le mode de vie ». Cette méthode a pour effet de déplacer le fardeau de la preuve.

 

[73] Le représentant de l’appelant a renvoyé à la décision Loewen c. La Reine, 2003 CCI 101, où le juge en chef adjoint Bowman, en rendant une ordonnance, a rappelé qu’« une proposition négative [est] généralement impossible à prouver ».

 

[74] L’augmentation de l’avoir net n’était pas négative pour ce qui est des années 2002 et 2003 et elle n’était pas très importante (10 000 $) pour l’ensemble des trois années.

 

[75] Le représentant de l’appelant a fait valoir que, selon la preuve, l’appelant disposait d’une somme de 55 445 $ pour subvenir à ses besoins. Cette somme était‑elle suffisante? L’appelant avait besoin de plus de 100 000 $ selon les chiffres de Statistique Canada. Le ministre a supposé que la vie de l’appelant correspondait à celle d’une famille de la classe moyenne.

 

[76] Il incombe au ministre de démontrer que le relevé produit par l’appelant était erroné puisque ce dernier a établi qu’il n’appartenait pas à [TRADUCTION] « une famille de la classe moyenne ».

 

[77] L’avoir net de M. Wang pour les années 2002 et 2003 était de 100 000 $, un montant inférieur à la moyenne nationale. Il ne possédait aucune action, aucune assurance‑vie ni aucune pension. Les dépôts qu’il a effectués en 2002 et en 2003 équivalaient seulement à 7 % et à 37 % de la moyenne nationale. Il n’avait pas les moyens d’atteindre la moyenne nationale.

 

[78] Les nouveaux immigrants comme M. Wang ont normalement un faible revenu. Leur revenu correspond généralement à 70 % de la moyenne nationale. Leur situation s’améliore normalement dix ans après leur arrivée au Canada. Un sur trois nouveaux immigrants a un faible revenu.

 

[79] Le représentant de M. Wang a renvoyé à nouveau à la décision Loewen c. La Reine, précitée, et a soutenu que la validité de la cotisation dépend de l’application du droit aux faits et non de l’analyse du répartiteur de l’impôt.

 

[80] Les faits n’ont pas démontré qu’il existait un lien entre l’appelant et la classe moyenne. Les renseignements de Statistique Canada ne sont pas fiables et doivent être utilisés avec circonspection.

 

[81] Selon le représentant de l’appelant, la Cour canadienne de l’impôt avait des doutes au sujet des cotisations fondées sur l’avoir net. Il a renvoyé à la décision Cox c. La Reine, dossier : 1999‑4002(IT)G, où la Cour a procédé à un petit rajustement à la baisse en raison du mode de vie de l’appelant.

 

[82] En ce qui concerne les pénalités, le représentant a soutenu que rien ne les justifiait. Les montants n’étaient pas importants. Il incombe au ministre de démontrer que le montant du revenu dont l’appelant disait avoir eu besoin n’était pas raisonnable. Le modèle de Statistique Canada est déficient. La méthode fondée sur le mode de vie comporte de nombreuses lacunes. Cette méthode ne consiste pas à appliquer le droit aux faits.

 

[83] Le ministre n’a tenu aucun compte des documents. Tout ce qu’il reprochait à l’appelant était son faible revenu.

 

[84] L’appel devrait être accueilli en entier ou les frais de subsistance devraient être réduits à 53 % du montant utilisé, et les pénalités devraient être annulées. Les chiffres de Statistique Canada montrent que les dépenses des personnes qui ont un faible revenu équivalent à seulement 53 % de la moyenne nationale.

 

L’argumentation présentée pour le compte de l’intimée

 

[85] L’avocate de l’intimée a dit qu’il y avait trois questions en litige en l’espèce :

 

(1) La méthode de cotisation fondée sur l’avoir net était‑elle appropriée aux fins de l’article 152?

 

(2) Les pénalités étaient‑elles justifiées?

 

(3) Le fardeau de la preuve.

 

[86] C’est à M. Wang qu’il incombe de démontrer que la cotisation fondée sur l’avoir net n’est pas valable. Il n’a produit aucun élément de preuve de son revenu réel.

 

[87] En 2002, il a déduit 4 154 $ pour le coût des objets vendus. Il a dit initialement que ce montant avait été dépensé pour la publicité, non pour des journaux comme il l’a soutenu devant la Cour. Il n’avait pas demandé la déduction de ces dépenses à l’origine.

 

[88] En ce qui concerne les frais de véhicule à moteur, il a dit au vérificateur qu’il voulait même déduire un montant plus élevé, même s’il a affirmé que 95 % des livraisons se faisaient à son entreprise. Une déduction de 5 % de ces frais a été autorisée. Les frais n’avaient jamais été déduits avant que la vérification soit effectuée.

 

[89] M. Wang a dit au vérificateur qu’il faisait la plupart de ses affaires au comptant et qu’il ne déposait pas toujours l’argent à la banque.

 

[90] Il a produit la pièce R‑5, qui se trouve à l’onglet 10 de la pièce R‑1, qui montre ses dépenses personnelles. Selon le document, il a dépensé 22 850 $ en 2001 et 19 412 $ en 2002, alors que, selon le même document, son revenu était de 8 362 $ en 2001 et il a subi une perte de 47 673,37 $ en 2002.

 

[91] M. Wang a déclaré des dépenses de nourriture et de vêtements minimes, pour lesquelles il n’avait cependant pas de reçus.

 

[92] La preuve ne démontrait pas pourquoi ses beaux‑parents auraient donné à M. Wang et à sa famille tous les vêtements dont ils avaient besoin après leur avoir déjà prétendument donné (prêté) 85 000 $. M. Wang a dit qu’il n’avait rien dépensé pour des soins de santé ou des soins personnels, malgré le fait qu’il avait un jeune bébé.

 

[93] Son témoignage au sujet de ses dépenses ou des soins personnels, des soins de santé et des loisirs était différent de ce qu’il a déclaré.

 

[94] L’appelant a dit qu’il n’avait pas acheté de tabac ou d’alcool, malgré le fait qu’il a admis être sorti avec des amis. Il a dit qu’il n’avait pas acheté de cadeaux et qu’il n’avait presque rien dépensé pour des voyages. Ses chiffres étaient déraisonnables et contradictoires.

 

[95] L’avocate a convenu que l’annexe III du relevé de l’avoir net devait être modifiée pour tenir compte du fait que le montant de 2 447,81 $ avait été inscrit deux fois. L’appel devrait être accueilli sur ce point.

 

[96] L’appelant a surévalué la perte finale de son entreprise d’un montant de 13 824 $, selon l’information qu’il a fournie au vérificateur.

 

[97] L’appelant a présenté différentes versions concernant l’argent que des amis de la Chine lui ont apporté. Une grande partie de ces renseignements n’ont pas été donnés au vérificateur.

 

[98] Le ministre a permis à l’appelant de déduire un montant qui pouvait être relié à des membres de sa famille grâce aux relevés et aux documents bancaires. Les lettres écrites par ses amis concernant les autres montants dont la déduction a été refusée n’étaient pas crédibles. L’appelant a fait valoir que lui et son épouse n’avaient pas le droit d’utiliser une partie de l’argent. Il n’y avait aucun document émanant des personnes qui auraient donné l’argent. Les montants ont été inventés de toutes pièces et modifiés.

 

[99] En ce qui concerne les pénalités, un revenu inférieur au revenu réel a été déclaré délibérément. Les montants qui n’ont pas été déclarés étaient importants. En 2002, la différence concernant l’avoir net était de 37 137,91 $, et l’appelant a déclaré un revenu de 8 362 $ seulement. En 2003, il a déclaré une perte nette de 47 673 $, alors qu’il aurait dû déclarer un gain de 35 509,20 $.

 

[100]  L’appelant a été en mesure de faire ses paiements hypothécaires et de payer toutes ses dépenses, alors qu’il a déclaré un faible revenu. Il était au courant des divergences et savait que les montants inscrits sur sa déclaration de revenus n’étaient pas exacts.

 

[101]  Son témoignage n’était pas crédible et les lettres de ses amis concernant l’argent provenant de la Chine avaient été fabriquées. Les relevés de ses dépenses personnelles étaient erronés. L’appelant n’a produit aucun élément de preuve démontrant qu’il avait fait tout ce qu’il pouvait pour produire des déclarations de revenus exactes.

 

[102]  L’avocate a renvoyé à la décision Ramey c. Canada, précitée, quant à la question de savoir dans quels cas la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net peut être utilisée. Cette méthode peut être utilisée non seulement lorsque des documents ne sont pas disponibles, mais également lorsque des montants ne sont pas déclarés. Dans la présente affaire, des montants en espèces n’avaient pas été déclarés.

 

[103]  Les décisions invoquées étayent la cotisation en l’espèce. Dans les affaires où la Cour a permis que des montants soient déduits, des documents prouvaient la réception de ces montants. Or, il n’y a aucun document semblable qui puisse être accepté en l’espèce.

 

[104]  L’argumentation de l’appelant comportait des contradictions. L’appelant soutient que ses dépenses sont inférieures à la moyenne nationale, mais affirme aussi qu’il a reçu 84 800 $ de parents et d’amis.

 

[105]  Dans son argumentation, son représentant demande à la Cour de ne pas accepter les chiffres de Statistique Canada, mais demande également que les montants soient rajustés en fonction de ces chiffres.

 

[106]  L’appelant a dit au vérificateur qu’il possédait seulement une voiture alors qu’il en avait deux. Le vérificateur a procédé à la cotisation fondée sur l’avoir net avec la permission de son chef d’équipe, non de sa propre initiative comme le représentant l’a laissé entendre.

 

[107]  Il y avait des documents, mais ceux‑ci n’étaient ni exacts ni corrects.

 

[108]  L’avocate a demandé à la Cour de tirer une conclusion défavorable du fait que des témoins clés n’ont pas été appelés, et que l’appelant n’a pas expliqué leur absence de manière satisfaisante.

 

[109]  L’argumentation fondée sur la Charte qui était exposée dans l’avis d’appel a été abandonnée.

 

Analyse et décision

 

[110]  L’avocate de l’intimée et le représentant de l’appelant ont convenu que le présent appel soulevait essentiellement trois questions :

 

1.     L’utilisation de la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net était‑elle justifiée?

 

2.     Les pénalités étaient‑elles justifiées?

 

3.     Les parties se sont‑elles acquittées du fardeau de la preuve?

 

[111]  Le représentant de l’appelant a soutenu qu’il incombait au ministre de démontrer que la méthode de l’avoir net était celle qu’il convenait d’utiliser pour établir la cotisation de l’appelant, étant donné que le ministre s’était fondé sur des statistiques non fiables et avait établi la cotisation comme si l’appelant avait le mode de vie d’une personne de la classe moyenne, alors que l’appelant a démontré qu’il appartenait en fait à une catégorie de personnes ayant un revenu moins élevé. Les statistiques moyennes nationales utilisées par le ministre ne s’appliquaient pas à l’appelant en raison de son mode de vie.

 

[112]  L’avocate de l’intimée a, quant à elle, soutenu qu’il incombait à l’appelant de démontrer que la cotisation était erronée.

 

[113]  Comme dans l’affaire Bigayan v. The Queen, 2000 DTC 1619, qui est mentionnée dans la décision Cox, précitée, ni l’intimée ni l’appelant n’ont fait témoigner un représentant de Statistique Canada relativement aux chiffres utilisés, mais le répartiteur a été cité comme témoin en l’espèce. Contrairement à ce qui s’est passé dans l’affaire Bigayan, précitée, le représentant de l’appelant dans la présente affaire a été en mesure de contre‑interroger le répartiteur. Dans l’affaire Bigayan, précitée, le juge en chef adjoint Bowman avait refusé de rajuster les montants en fonction des chiffres de Statistique Canada parce qu’il ne disposait pas de chiffres plus fiables.

 

[114]  En l’espèce, le représentant de l’appelant demande à la Cour de réduire la cotisation et d’utiliser seulement 53 % des chiffres de Statistique Canada, même si la Cour ne dispose d’aucun élément de preuve confirmant que ce pourcentage traduit plus fidèlement la situation économique de la famille de l’appelant. En fait, il n’y a rien dans le témoignage de l’appelant qui permettrait à la Cour de le faire.

 

[115]  Dans la décision Cox, précitée, la Cour a été en mesure de procéder à un petit rajustement à la baisse parce qu’elle avait une idée du mode de vie de l’appelant. De toute évidence, le juge du procès a cru le témoignage présenté par l’appelant dans cette affaire concernant son mode de vie et a réduit ses dépenses personnelles en conséquence.

 

[116]  En l’espèce, la Cour a beaucoup de difficulté à accepter le témoignage de l’appelant à cet égard. Son témoignage était contradictoire, et une grande partie des dépenses qu’il a mentionnées étaient tellement minimes ou inexistantes qu’elles étaient irréalistes.

 

[117]  En ce qui concerne les soins de santé, l’appelant n’a déduit aucune dépense, en dépit du fait que sa belle‑mère vivait avec sa famille et qu’il avait un bébé. Les déductions de 240 $ pour les soins personnels, de 600 $ pour les loisirs, de 600 $ pour la nourriture et de 600 $ pour les vêtements, et le fait qu’il n’a déduit aucun montant pour le tabac, l’alcool et les cadeaux et contributions, n’étaient pas raisonnables. Il a admis avoir bu de l’alcool, mais a dit que c’était toujours les autres qui payaient. Il a fait valoir que sa belle‑mère avait apporté tous les vêtements de la Chine, de sorte qu’il n’avait rien dépensé pour des vêtements pendant toute l’année. Ce témoignage n’est pas crédible.

 

[118]  La méthode de cotisation fondée sur l’avoir net a été considérée comme une méthode de dernier recours pouvant être utilisée lorsqu’aucune autre n’est efficace. Or, cette méthode est aussi utilisée lorsque le contribuable n’a conservé aucun document ou a conservé des documents insuffisants, ou lorsqu’une entreprise fait surtout des affaires au comptant, ou même lorsque des documents produits par le contribuable ne sont pas crédibles ou que les chiffres et les renseignements fournis par le contribuable sont contradictoires.

 

[119]  Tous ces facteurs étaient présents en l’espèce. Les chiffres donnés par l’appelant dans les déclarations produites auprès du ministre étaient contredits par des documents qu’il a déposés auprès du ministre. Par exemple, en 2002, son relevé de dépenses personnelles indiquait un total de 19 412 $, alors que le revenu net inscrit dans sa déclaration de revenus était seulement de 8 133,48 $.

 

[120]  L’appelant a produit certains éléments de preuve démontrant qu’il avait reçu une somme relativement élevée de la part de membres de sa famille vivant en Chine, mais il n’y avait aucun document approprié qui le confirme et aucune des personnes qui lui auraient apporté l’argent au Canada n’a été appelée à témoigner. La Cour tirera une conclusion défavorable à l’appelant à cet égard parce qu’aucun élément de preuve n’a été produit pour expliquer pourquoi ces personnes n’ont pas témoigné.

 

[121]  En l’espèce, l’appelant a eu la possibilité, avant que la cotisation soit établie définitivement, d’expliquer les divergences relevées par le vérificateur, de justifier sa position et de produire d’autres documents au soutien de celle‑ci. Selon le vérificateur, aucun document semblable n’a été produit.

 

[122]  Le vérificateur a donné toutes les occasions possibles au contribuable d’expliquer les divergences et de démontrer que les conclusions préliminaires qu’il avait tirées étaient erronées. Il a même tenu compte du fait que la belle‑mère du contribuable vivait avec l’appelant pendant une partie du temps et que l’enfant se trouvait à l’étranger. Il croyait également que les chiffres fournis par Statistique Canada étaient [TRADUCTION] « un peu bas » pour la ville de Toronto.

 

[123]  Après avoir fait parvenir une première lettre au contribuable, le vérificateur les a rencontrés, lui et son représentant, et a examiné leurs explications. Il a ensuite apporté certains rajustements.

 

[124]  L’appelant n’a expliqué qu’il avait reçu de l’argent de ses amis en Chine et de sa belle‑mère qu’après que l’ARC est parvenue à ses conclusions. Le vérificateur n’a pas cru les explications qui ont été données relativement à l’argent et n’a pas ajouté foi aux lettres.

 

[125]  Le vérificateur a toutefois accepté le fait que l’épouse de l’appelant avait reçu des sommes d’argent de parents car il y avait des documents qui le prouvaient.

 

[126]  Le vérificateur a confirmé qu’il avait tenu compte de l’information fournie par le contribuable qui avait une incidence sur son utilisation des chiffres de Statistique Canada. Il a admis qu’il avait reçu certains livres comptables, mais, comme ceux‑ci ne lui avaient pas permis de terminer sa vérification, il s’était servi de la méthode de l’avoir net.

 

[127]  La Cour est convaincue que le vérificateur avait bien le droit de se servir de la méthode de cotisation fondée sur l’avoir net pour tous les motifs donnés. En fait, il ne pouvait pas procéder autrement en l’espèce.

 

[128]  La Cour est convaincue que l’appelant n’a pas démontré, alors qu’il lui incombait de le faire, que la cotisation était erronée, sauf en ce qui concerne un aspect dont il sera question à la fin des présents motifs.

 

[129]  Pour ce qui est des pénalités, la Cour rejette les prétentions du représentant de l’appelant. La Cour est convaincue que les montants étaient importants et qu’un revenu inférieur au revenu réel doit avoir été déclaré délibérément. Les relevés de dépenses personnelles de l’appelant étaient erronés, et les erreurs doivent avoir été commises délibérément.

 

[130]  Le ministre a démontré, comme il devait le faire, pourquoi les pénalités devaient être imposées.

 

[131]  La Cour est convaincue en l’espèce qu’elle ne dispose d’aucun document ou élément de preuve fiable justifiant que des rajustements soient faits à la cotisation fondée sur l’avoir net, sauf en ce qui concerne le montant de 2 447,81 $ dont il est question dans l’annexe III de la réponse à l’avis d’appel, qui a essentiellement été pris en compte deux fois.

 

[132]  Les appels sont accueillis, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national afin qu’il procède à un nouvel examen et établisse de nouvelles cotisations en tenant compte des modifications suivantes qui seront apportées aux annexes III, V et VI de la réponse :

 

annexe III

-         différence selon l’avoir net, 2002 : le montant de 39 595,72 $ est remplacé par le montant de 37 137,91 $

 

annexe V

-         revenu d’entreprise non déclaré, 2002 : le montant de 36 063,22 $ est remplacé par le montant de 33 605,41 $

-         revenu d’entreprise non déclaré selon l’avoir net en 2002 : le montant de 33 702,33 $ est remplacé par le montant de 31 244,46 $

 

annexe VI

-         revenu d’entreprise non déclaré selon l’avoir net, 31 décembre 2002 : le montant de 33 702 $ est remplacé par le montant de 31 244 $.

 

Rajustement total – 31 décembre 2002 : le montant de 37 234 $ est remplacé par le montant de 34 786 $.

 

[133]  Les appels sont rejetés à tous les autres égards.

 

       Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 19e jour de juin 2008.

 

 

« T. E. Margeson »

Juge Margeson

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 11e jour de septembre 2008.

 

Aleksandra Koziorowska, LL.B.


RÉFÉRENCE :                                  2008CCI308

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2007-1342(IT)I

 

INTITULÉ :                                       Xin Wang et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 29 avril 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge T.E. Margeson

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 19 juin 2008

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelant :

Sean Hu

Avocate de l’intimée :

Me Samantha Hurst

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelant :

 

                          Nom :                     

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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