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Dossier : 2005-404(IT)G

ENTRE :

PARAMJIT THANDI,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Mandeep Thandi (2005‑405(IT)G) le 15 août 2007, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable juge L.M. Little

 

Comparutions :

 

 

Avocat de l’appelant :

Me Paul K. Lail

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Karen Truscott

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, relativement à l’avis de cotisation numéro 26352 daté du 14 juin 2002, est rejeté, sans dépens, conformément aux motifs de jugement ci‑joints.

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 12e jour d’octobre 2007.

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de novembre 2007.

 

Johanne Brassard, trad. a.


 

Dossier : 2005-405(IT)G

ENTRE :

MANDEEP THANDI,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu sur preuve commune avec l’appel de Paramjit Thandi (2005‑404(IT)G) le 15 août 2007, à Vancouver (Colombie-Britannique).

 

Devant : L’honorable juge L.M. Little

 

Comparutions :

 

 

Avocat de l’appelante :

Me Paul K. Lail

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Karen Truscott

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, relativement à l’avis de cotisation numéro 26351 daté du 14 juin 2002, est rejeté, sans dépens, conformément aux motifs de jugement ci‑joints.

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 12e jour d’octobre 2007.

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de novembre 2007.

 

Johanne Brassard, trad. a.


 

 

 

 

Référence : 2007CCI590

Date : 20071012

Dossiers : 2005-404(IT)G

2005-405(IT)G

ENTRE :

PARAMJIT THANDI,

MANDEEP THANDI,

appelants,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Little

 

A.      FAITS

 

[1]     L’appelant, Paramjit Thandi (« Paramjit »), est le fils de Jarnail Thandi.

 

[2]     L’appelante, Mandeep Thandi (« Mandeep »), est mariée avec Paramjit. Elle est donc la belle‑fille de Jarnail Thandi.

 

[3]     Jarnail Thandi a été employé à divers titres par National Aluminium Production (« NAP »), de 1976 jusqu’à ce que NAP ferme son usine en 1994.

 

[4]     Après la cessation des activités de NAP en 1994, Jarnail Thandi et six de ses amis ont décidé de fonder une entreprise et de travailler ensemble pour l’exploiter.

 

[5]     En juin 1995, Jarnail Thandi et ses six amis ont constitué AC Vinyl Windows Manufacturing Ltd. (la « société ») en société sous le régime de la British Columbia Company Act.

 

[6]     Jarnail Thandi et ses six amis étaient administrateurs, actionnaires et employés de la société.

 

[7]     Les activités de la société consistaient à fabriquer des fenêtres en vinyle.

 

[8]     La société a cessé ses activités en février 1998.

 

[9]     Le ministre du Revenu national (le « ministre ») soutient que la société, lorsqu’elle a payé les salaires de ses employés pendant l’année d’imposition 1997, a omis de verser la somme de 39 571,42 $ (cette somme comprend l’impôt, l’intérêt et les pénalités).

 

[10]   Le 30 juin 1999, un certificat faisant état de la dette de la société au titre de l’impôt fédéral, de l’intérêt et des pénalités a été produit à la Cour fédérale du Canada.

 

[11]   Un bref d’exécution se rapportant au certificat a été délivré à l’égard de la société, mais il y a eu défaut d’exécution totale en date du 16 août 1999.

 

[12]   Par un avis de cotisation daté du 14 octobre 1999, le ministre a établi à l’égard de Jarnail Thandi une cotisation relative à l’impôt fédéral sur le revenu (plus l’intérêt et les pénalités) déduit à la source par la société, mais non versé par cette dernière. Cette cotisation a été établie en application du paragraphe 227.1(3) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). La somme totale visée à ce moment‑là s’élevait à 30 934,48 $.

 

[13]   Jarnail Thandi n’a pas produit d’avis d’opposition relativement à la cotisation du 14 octobre 1999.

 

[14]   Vers le 15 mai 1998, Jarnail Thandi a transféré la moitié de son intérêt dans un bien situé au 13302 88A Avenue, à Surrey, en Colombie‑Britannique, à l’appelant, Paramjit Thandi. Le bien susmentionné est ci‑après désigné comme le « bien ».

 

[15]   Vers le 15 mai 1998, Jarnail Thandi a transféré la moitié de son intérêt dans le bien à l’appelante, Mandeep Thandi.

 

[16]   Au moment du transfert de chacune des moitiés de l’intérêt dans le bien à Paramjit et à Mandeep, la valeur nette réelle du bien était évaluée à plus de 250 000,00 $.

 

[17]   Par l’avis de cotisation numéro 26352 daté du 14 juin 2002, le ministre a établi à l’égard de l’appelant, Paramjit, une cotisation s’élevant à 39 571,42 $ relativement au transfert en sa faveur, par Jarnail Thandi, d’un intérêt dans le bien. La cotisation a été établie en application de l’article 160 de la Loi.

 

[18]   Par l’avis de cotisation numéro 26351 daté du 14 juin 2002, le ministre a établi à l’égard de l’appelante, Mandeep, une cotisation s’élevant à 39 571,42 $ relativement au transfert en sa faveur, par Jarnail Thandi, d’un intérêt dans le bien. La cotisation a été établie en application de l’article 160 de la Loi.

 

B.      QUESTIONS EN LITIGE

 

[19]   Les questions en litige sont les suivantes :

 

a)       L’appelant, Paramjit, est‑il responsable, selon l’article 160 de la Loi, du paiement de la somme de 39 571,42 $ relativement à l’intérêt dans le bien que Jarnail Thandi lui a transféré?

 

b)      L’appelante, Mandeep, est‑elle responsable, selon l’article 160 de la Loi, du paiement de la somme de 39 571,42 $ relativement à l’intérêt dans le bien que Jarnail Thandi lui a transféré.

 

C.      ANALYSE ET DÉCISION

 

[20]   L’avocat des appelants a fait valoir que les cotisations établies à l’égard des appelants devraient être annulées parce que les cotisations sous‑jacentes sont dénuées de fondement. Selon l’avocat des appelants, il existe des précédents permettant d’affirmer qu’un particulier peut contester une cotisation « en cascade » même si aucun avis d’opposition n’a été produit relativement à la cotisation sous‑jacente initiale.

 

[21]   L’avocat des appelants affirme que la question essentielle à trancher est celle de savoir si Jarnail Thandi a fait preuve du degré de soin, d’habileté et de diligence qu’une personne raisonnable aurait exercé dans les mêmes circonstances.

 

[22]   À l’appui de ce moyen, l’avocat des appelants a renvoyé à la décision Soper v. The Queen, 97 DTC 5407, rendue par M. le juge Robertson.

 

[23]   Il a déclaré que cette décision permettait d’énoncer les principes suivants :

 

         1.       L’administrateur ne doit pas être assimilé à un fiduciaire.

 

2.       L’administrateur n’a pas besoin de manifester, dans l’exercice de ses fonctions, un degré de compétence et de soin supérieur à ce qu’on peut attendre d’une personne ayant ses connaissances ou son expérience.

 

3.       L’administrateur n’est pas obligé de consacrer son attention en permanence aux affaires de la société.

 

4.       L’administrateur peut à juste titre compter sur les dirigeants de la société pour s’acquitter des fonctions qui leur ont été déléguées, sauf s’il a des motifs d’avoir des soupçons.

 

[24]   L’avocat des appelants a soutenu que Jarnail Thandi avait rempli l’obligation qui lui incombait aux termes de l’article 227.1 de la Loi et qu’il ne devait donc pas faire l’objet d’une cotisation à titre d’administrateur d’AC Vinyl. Il conclut que, comme la cotisation établie à l’égard de Jarnail Thandi en application de l’article 227.1 de la Loi est irrégulière, il convient d’annuler les cotisations « en cascade » établies à l’égard des appelants.

 

[25]   L’avocate de l’intimée a signalé qu’en l’espèce, il s’agit d’une cotisation [traduction] « en trois couches », la première cotisation visant AC Vinyl, la deuxième visant Jarnail Thandi et la troisième visant chacun des appelants conformément à l’article 160 de la Loi.

 

[26]   L’avocate de l’intimée a affirmé qu’il était loisible aux appelants de contester les cotisations établies à l’égard d’AC Vinyl. Cependant, les actes de procédure sont muets sur ce point.

 

[27]   L’avocate de l’intimée a renvoyé à l’arrêt Gaucher v. The Queen, 2000 DTC 6678, et a avancé que, selon les tribunaux, les contribuables doivent pouvoir examiner les [traduction] « cotisations sous‑jacentes ou initiales » pour s’assurer que l’impôt fédéral, l’impôt provincial, les pénalités et l’intérêt ont fait l’objet d’une cotisation exacte de sorte que la personne subséquente puisse être certaine du bien‑fondé de la cotisation. L’avocate s’est toutefois demandée si la Cour pouvait examiner la cotisation établie à l’égard de Jarnail Thandi au moment de statuer sur la validité de la cotisation établie en application de l’article 160 à l’égard des appelants.

 

[28]   Je me suis penché sur les précédents invoqués par l’avocate. Dans l’arrêt Gaucher (précité), au paragraphe 1, M. le juge Rothstein tient les propos suivants au nom de la Cour :

 

[1]       Il s’agit en l’espèce de décider si un contribuable imposé suivant une cotisation établie à titre dérivé en application du paragraphe 160(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu peut s’opposer à cette dernière en contestant la cotisation primaire sur laquelle se fonde la cotisation dérivée.

 

Au paragraphe 7, le juge Rothstein déclare :

 

[7]       Lorsque le ministre établit une cotisation à titre dérivé en application du paragraphe 160(1), il invoque une disposition législative particulière qui l’autorise à demander paiement à une seconde personne pour la cotisation d’impôt visant un premier contribuable. Cette seconde personne doit jouir d’un plein droit de défense pour contester la cotisation établie à son endroit, y compris celui d’attaquer la cotisation primaire sur laquelle se fonde la cotisation touchant la seconde personne.

 

Au paragraphe 8, il ajoute ce qui suit :

 

[8]       Ce point de vue a été formulé par certains juges de la Cour canadienne de l’impôt. Voir, par exemple, les affaires Acton c. La Reine (1994), 95 D.T.C. 107, page 108, juge Bowman; Ramey c. La Reine (1993), 93 D.T.C. 791, page 792, juge Bowman; Thorsteinson c. M.R.N. (1980), 80 D.T.C. 1369, page 1372, juge Taylor. […]

 

[29]   J’arrive à la conclusion que ces précédents permettent aux appelants d’examiner ou de contester la cotisation sous‑jacente ou initiale établie à l’égard de Jarnail Thandi dans le cadre de l’examen de la validité des cotisations établies à leur endroit.

 

[30]   J’ai minutieusement examiné la cotisation établie à l’égard de Jarnail Thandi le 14 octobre 1999 en application de l’article 227.1 de la Loi.

 

[31]   L’article 227.1 de la Loi prévoit que, dans certaines situations, les administrateurs d’une société sont solidairement responsables avec la société si cette dernière omet de déduire, de retenir ou de verser de l’impôt comme l’exigent certaines dispositions de la Loi.

 

[32]   Selon le paragraphe 227.1(3) de la Loi, un administrateur n’est pas responsable de cette omission lorsqu’il a agi avec le degré de soin, de diligence et d’habileté pour prévenir le manquement de la société de déduire ou de retenir et de remettre un montant d’impôt qu’une personne raisonnablement prudente aurait exercé dans des circonstances comparables.

 

[33]   Après avoir examiné la preuve présentée en l’espèce, je conclus que Jarnail Thandi ne satisfait pas aux exigences relatives à la défense fondée sur la diligence raisonnable qui est prévue au paragraphe 227.1(3) de la Loi.

 

[34]   J’ai tiré cette conclusion pour les raisons suivantes :

 

1.         Jarnail Thandi a répondu de manière très vague aux questions qui lui étaient posées. Ses souvenirs étaient incertains et, à certains moments, incompatibles avec ses réponses antérieures.

 

2.         On a demandé à Jarnail Thandi s’il avait posé des questions aux [traduction] « administrateurs internes » (c.‑à‑d. M. Bagri et M. Dardi) au sujet de l’exploitation de la société. M. Thandi n’a pu fournir des exemples de questions qu’il avait posées à ces derniers.

 

3.         Très peu de documents ont été présentés pour expliquer ce qui arrivait à la société et comment les administrateurs avaient choisi de l’exploiter.

 

4.         Aucun élément de preuve corroborant n’a été produit pour établir les faits pertinents. Par exemple, M. Bagri, le directeur général, n’a pas témoigné et M. Alan Seabrook, l’avocat de la société, n’a pas témoigné non plus.

 

5.         La pièce A-1 a été produite en preuve. Il s’agit d’une lettre que M. Seabrook, l’avocat de la société, a adressée aux administrateurs. Cette lettre fait mention de la vente de l’entreprise. Or, Jarnail Thandi a affirmé qu’il n’était pas sûr d’avoir lu la lettre.

 

6.         Les documents de la société montrent que Jarnail Thandi est demeuré administrateur de la société jusqu’en mars 1998 (voir la pièce R‑3).

 

7.         La pièce A-2 consiste en une lettre de démission signée par Jarnail Thandi le 20 novembre 1997. Cependant, aucun timbre de réception n’a été apposé sur la lettre. De plus, celle‑ci paraît être le document original.

 

8.         Jarnail Thandi a mentionné qu’il n’avait pas tenté de s’assurer auprès du service de l’impôt que la dette fiscale de la société avait été acquittée.

 

9.         Jarnail Thandi a affirmé qu’il ne connaissait rien au système de comptabilité utilisé par la société.

 

10.       Jarnail Thandi a affirmé qu’il n’avait pris aucune mesure pour établir quelles étaient ses fonctions à titre d’administrateur de la société. L’avocate de l’intimée lui a posé les questions suivantes :

 

[traduction]

 

Q.       Selon vous, quelles étaient les fonctions que vous assumiez à titre d’administrateur?

 

R.        Je ne savais rien. J’avais juste confiance en lui (c.‑à‑d. M. Bagri), tout ce qu’il faisait était bien.

            (Transcription - page 43, lignes 23 à 25, et page 44, ligne 1.)

 

Q.       Quelles mesures avez-vous prises pour savoir ce que vous deviez faire?

 

            R.        Je n’ai pris aucune mesure.

            (Transcription – page 44, lignes 2 à 4.)

 

[35]   En résumé, la preuve révèle sans équivoque que Jarnail Thandi n’a rien fait pour s’acquitter de ses fonctions à titre d’administrateur de la société.

 

[36]   À la lumière des remarques susmentionnées et de la preuve supplémentaire présentée, je conclus que la cotisation établie à l’endroit de Jarnail Thandi en application de l’article 227.1 était valide.

 

[37]   Comme je l’ai déjà signalé, le seul argument soulevé par l’avocat des appelants touchait à la cotisation établie à l’égard de Jarnail Thandi en application de l’article 227.1 de la Loi. L’avocat des appelants ne s’est pas opposé aux cotisations établies en application de l’article 160 de la Loi, et ses arguments se sont limités à cette seule cotisation établie à l’égard de Jarnail Thandi en application de l’article 227.1.

 

[38]   Les appels sont rejetés, sans dépens.

 

[39]   Avant de terminer, je souhaite préciser que les appelants ont chacun fait l’objet d’une cotisation à titre solidaire, c.‑à‑d. que le montant d’impôt total visé par les cotisations correspond à 39 571,42 $ multiplié par deux. Cependant, la dette fiscale se limite à la somme totale de 39 571,42 $. Le ministre doit garder ce fait en mémoire au moment d’établir une nouvelle cotisation à l’égard de chacun des appelants.

 

 

Signé à Vancouver (Colombie-Britannique), ce 12e jour d’octobre 2007.

 

 

 

 

« L.M. Little »

Juge Little

 

Traduction certifiée conforme

ce 30e jour de novembre 2007.

 

Johanne Brassard, trad. a.


 

 

 

RÉFÉRENCE :                                  2007CCI590

 

Nos DES DOSSIERS DE LA COUR :2005-404(IT)G

                                                          2005-405(IT)G

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              Paramjit Thandi et Mandeep Thandi c.

                                                          Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie-Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 15 août 2007

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge L.M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 12 octobre 2007

 

COMPARUTIONS :

 

Avocat des appelants :

Me Paul K. Lail

Avocate de l’intimée :

Me Karen Truscott

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour les appelants :

 

                          Nom :                      Me Paul K. Lail

 

                          Cabinet :                  Fritz Lail Dougans & Shirreff

                                                          Surrey (Colombie-Britannique)

 

       Pour l’intimée :                            John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

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