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Dossier : 2008-224(EI)

ENTRE :

FINANCIÈRE BANQUE NATIONALE INC.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

CARLO MASSICOLLI,

intervenant.

____________________________________________________________________

Appel entendu les 17 juillet et 1er août 2008, à Montréal (Québec).

 

Devant : L'honorable juge Pierre Archambault

 

Comparutions :

Avocats de l'appelante :

Me Wilfrid Lefebvre

Me Vincent Dionne

Avocat de l'intimé :

Me Mounes Ayadi

Avocats de l'intervenant:

Me Serge Racine

Me Stéphane Larochelle

____________________________________________________________________

JUGEMENT

 

          L'appel de la décision rendue par le ministre du Revenu national en vertu de la Loi sur l'assurance-emploi est accueilli et ladite décision est infirmée. Monsieur Carlo Massicolli occupait un emploi assurable auprès de la Financière Banque Nationale durant la période du 1er janvier 2003 au 1er octobre 2004.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de janvier 2009.

 

« Pierre Archambault »

Juge Archambault


 

 

 

 

 

Référence : 2008 CCI 624

Date : 20090116

Dossier : 2008-224(EI)

ENTRE :

FINANCIÈRE BANQUE NATIONALE INC.,

appelante,

et

 

LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL,

intimé,

et

 

CARLO MASSICOLLI,

intervenant.

 

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Archambault

 

[1]              L’agent d’admissibilité de l’Agence du revenu du Canada a rendu, le 1er décembre 2006, une décision selon laquelle monsieur Carlo Massicolli occupait un emploi assurable selon l’article 5 de la Loi sur l’assurance-emploi (Loi) chez la Financière Banque Nationale (FBN) durant la période du 1er janvier 2003 au 31 décembre 2004 (période pertinente)[1]. L’agente des appels a annulé cette décision et a conclu que monsieur Massicolli n’occupait pas un emploi assurable au cours de la même période. La FBN a interjeté appel de cette décision devant cette Cour et monsieur Massicolli a déposé un avis d’intervention le 10 mars 2008. Le 26 juin 2008, le procureur de l’intimé a informé les autres parties au litige qu’il souscrivait maintenant au point de vue de la FBN, qu’il ne déposerait aucune preuve et qu’il ne ferait aucune argumentation lors l’audience prévue pour le 17 juillet 2008. En raison de ce changement de position de l’intimé, j’ai décidé de ne pas tenir compte des faits tenus pour acquis par celui-ci; chacune des deux autres parties avait donc le fardeau d’établir les faits justifiant la conclusion qu’elle recherchait devant cette Cour.

 

Entente sur les faits

 

[2]              Les trois parties ont produit à la Cour une entente partielle sur les faits dans laquelle on précise la question en litige : il s’agit de déterminer si monsieur Massicolli était un travailleur indépendant ou bien un employé de la FBN durant la période pertinente. Contrairement à la position que prennent généralement les payeurs et les travailleurs devant cette Cour, la FBN soutient que monsieur Massicolli était un employé alors que ce dernier soutient qu’il était un entrepreneur indépendant. Je reproduis ici une partie de l’entente partielle, en particulier les paragraphes 1 à 29 :

 

1. L’Appelante est une compagnie constituée au Canada qui fournit, entre autres, des services de courtage en valeurs mobilières.

 

2. Les activités de courtage en valeurs mobilières de l’Appelante consistent notamment à offrir des services de conseil et de courtage aux particuliers par l’entremise de conseillers en placements ainsi que des services de courtage institutionnel et de financement à des sociétés.

 

3. Les services de conseil et de courtage aux particuliers qui sont offerts par l’Appelante sont rendus par des conseillers en placements qui sont affectés dans différentes succursales à travers le Canada dont, entre autres, la succursale située à Pointe‑Claire, Québec (« Succursale »).

 

4. Le 27 août 1993, l’Intervenant s’est joint à l’équipe de conseillers en placements de l’Appelante. Son travail consistait notamment à conseiller des clients en matière de placements d’après leurs profils et objectifs en tant qu’investisseur (« Clients »). Entre le 1er janvier 2003 et le 1er octobre 2004 (« Période »), l’Intervenant a agi à titre de conseiller en placements et de courtier à la Succursale de l’Appelante.

 

Réglementation

 

5. Lors de la Période, l’Appelante ainsi que l’Intervenant étaient assujettis à l’application de règles émanant d’autorités législatives, dont, entre autres, la Loi sur les valeurs mobilières (Québec) et d’organismes d’auto-réglementation régissant le commerce des valeurs mobilières dont, entre autres, l’Association canadienne des courtiers en valeurs mobilières (« ACCOVAM »).

 

6. L’ACCOVAM est l’organisme d’auto-réglementation qui, notamment, est responsable de la supervision et l’administration et l’inscription des courtiers, surveille la conduite des affaires des courtiers et de ses représentants et s’assure que les courtiers ont le capital nécessaire pour exercer leurs fonctions de façon appropriée afin de protéger les Clients. Lors de la Période, l’Appelante était membre de l’ACCOVAM à titre de courtier en valeurs mobilières.

 

7. Depuis 1982, la Commission des valeurs mobilières du Québec (maintenant l’Autorité des marchés financiers) a confié à l’ACCOVAM l’administration et la règlementation des activités des courtiers en valeurs mobilières, telle l’Appelante, et des représentants, tel l’Intervenant.

 

8. Depuis 2008, l’ACCOVAM et les Services de réglementation du marché inc. (« SRM ») se sont regroupés afin de former l’Organisme canadien de règlementation du commerce des valeurs mobilières (« OCRCVM »). L’OCRCVM remplit maintenant le rôle de l’ACCOVAM dans la province de Québec.

 

9. Afin de se conformer aux exigences de l’ACCOVAM lors de la Période, l’Appelante avait mis en place des mécanismes de surveillance et de contrôle des transactions et opérations concernant les affaires des Clients.

 

10. L’Intervenant était un représentant inscrit de l’Appelante auprès de la Commissions des valeurs mobilières du Québec conformément à l’article 149 de la Loi sur les valeurs mobilières (Québec)[2].

 

11. Pendant les années en cause, l’Intervenant détenait des licences pour exercer sa profession en Colombie‑Britannique, au Québec et en Ontario.

 

Rémunération et bénéfices marginaux

 

12. Lors de la Période, l’Intervenant était rémunéré entièrement à commissions et l’Appelante n’avait aucune obligation de verser un revenu minimum à l’Intervenant.

 

13. Lors de la Période, les commissions versées à l’Intervenant représentaient environ 50% des frais de commission chargé aux Clients.

 

14. L’Appelante s’occupait notamment de la facturation et de la perception des comptes auprès des Clients et remettait à l’Intervenant sa part des commissions auquel [sic] il avait droit.

 

15. Lors de la Période, l’Intervenant avait droit à des bénéfices marginaux dont, entre autres, différentes assurances collectives dont des assurances-vie collectives et une assurance-maladie.

 

Bureaux et équipements

 

16. L’Intervenant avait un bureau situé à la Succursale.

 

17. L’Intervenant était appelé à exercer son travail à l’extérieur des locaux de la Succursale lorsque celui-ci devait rencontrer les Clients.

 

18. Les dossiers des Clients devaient être entreposés à la Succursale et les opérations et transactions sur les comptes des Clients étaient nécessairement effectuées ou initiées à partir du bureau situé à la Succursale.

 

19. Lors de la Période, l’Intervenant devait encourir des dépenses liées à son travail dont ses frais de déplacement et ses frais de voyage et de véhicule à moteur. L’Appelante ne remboursait pas ces dépenses.

 

20. À la Succursale, l’Appelante mettait à la disposition de l’Intervenant :

 

            a. des salles de réunion;

           

b. un service d’analyse financière, de réception, de marketing, de comptabilité, de paie, et

 

            c. des outils intranets.

 

Administration et marketing

 

21. Lors de la Période, l’Intervenant a offert des services de conseiller en placement et de courtier aux Clients sous la bannière de l’Appelante. Durant la Période, lors de ses représentations auprès des Clients, l’Intervenant utilisait des cartes d’affaires et du papier lettre portant le logo et la raison sociale de l’Appelante.

 

23. À compter d’avril 2003, l’Intervenant s’est associé, dans le cadre d’une société de personnes en participation à monsieur Mark W. Auger, un conseiller en placements exerçant sa profession à la Succursale[3]. La raison sociale de la société de personne [sic] était « Auger‑Massicolli »[4]. À compter d’environ juin 2003, la raison sociale Auger‑Massicolli figurait aussi sur les cartes d’affaires et le papier lettre de l’Intervenant[5].

 

22. Depuis environ juin 2003, les cartes d’affaires et le papier lettre utilisés par l’Intervenant lors de ses représentations auprès des Clients portaient aussi l’une des marques de commerce suivantes :

 

            a. « Bâtir de la résistance aux conséquences du hasard » (#LMC622252);

 

            b. « Building resistance to randomness » (#LMC621930); et

 

            c. “Dolmen & Dessin” (#LMC642799).

 

24. Les marques de commerce mentionnées au paragraphe 22 étaient la propriété de la société Les Placements Sydwood Inc., une entité non liée à l’Appelante ou à l’une de ses filiales[6].

 

Personnels [sic] et adjointes

 

25. L’Intervenant était assisté d’adjoints(es) afin d’accomplir son travail.

 

26. La rémunération de ces adjoints(es) était assumée en partie par l’Intervenant, par l’entremise de prélèvements effectués à même sa rémunération, et en partie par l’Appelante. En tout temps, l’Appelante a effectué les retenues salariales des salaires versées [sic] à ces adjointes en conformité avec les lois fiscales québécoises et fédérales.

 

27. L’Appelante assumait les frais des fournitures de bureau et des frais liés au mobilier de bureau liés aux activités des adjoints(es).

 

Cotisations aux organismes gouvernementaux

 

28. L’Intervenant devait assumer les frais et cotisations pour ses permis d’exercice auprès des organismes gouvernementaux des provinces dans lesquelles il était inscrit.

 

Administration

 

29. L’Appelante pouvait imputer à l’Intervenant les pertes sur transaction.

 

Contexte factuel

 

[3]              Les témoignages et les nombreux documents présentés lors de l’audience ont fournit la preuve de nombreux faits additionnels. Certains suivent et les autres seront traités sous la rubrique « Analyse ».

 

[4]              Après avoir obtenu en 1986 un baccalauréat en administration des affaires, option finances, de l’Université du Québec à Montréal, monsieur Massicolli a travaillé pour la Financière Coopérants à titre de conseiller financier. Après l’acquisition de cette société par la Banque Laurentienne du Canada, il a occupé des postes de directeur chez celle-ci, et notamment le poste de directeur du contrôle et de la sécurité d’une succursale et le poste de directeur du crédit.

 

•   Entente avec la FBN

 

[5]              Avant son engagement par la maison de courtage Lévesque Beaubien Geoffrion inc. (LBG), maintenant la FBN, monsieur Massicolli a rempli un formulaire de demande d’emploi et « l’emploi postulé » était celui de conseiller (voir pièce A-2, onglet 1). Sur ce formulaire, signé le 26 août 1993, monsieur Massicolli atteste : « Je désire entrer au service de votre Compagnie et […] je conviens de me conformer aux règlements et pratiques qui y sont en vigueur. » (Je souligne.) Le 27 août 1993, monsieur Maurice Dupont, vice‑président et directeur de la succursale de Laval, a confirmé par lettre l’offre d’engagement faite à monsieur Massicolli. Cette lettre a été modifiée par celle du 1er septembre 1993 dans laquelle on dit : «  La présente est pour vous confirmer les grandes lignes de l’entente qui finalisent [sic] votre emploi avec notre maison […] ». (Je souligne.)

 

[6]              On y indique que son embauche prenait effet, et que son « entraînement » devait débuter, le 1er septembre 1993. Selon ces conditions d’engagement, il devait recevoir un boni d’engagement, à savoir un « salaire » qui serait versé pour les neuf premiers mois et qui totaliserait 15 000 $, auquel devaient s’ajouter des commissions « selon le système de commissions et bonis tel qu’établi par la compagnie LBG ». On ajoute : « Le boni ci-haut mentionné n’est pas remboursable, cependant votre progrès sera contrôlé et révisé régulièrement […] ». (Je souligne.) La lettre précise que  si monsieur Massicolli devait démontrer un comportement pouvant nuire à la réputation de LBG, il serait du choix de LBG « de résilier votre association avec notre maison. » Monsieur Dupont conclut sa lettre en disant que cela lui faisait plaisir de l’accueillir dans « notre équipe » (voir pièce A‑2, onglet 4).

 

[7]              Sur le formulaire de demande d’emploi, sous la rubrique « Conditions d’embauche », on indique que le travail de monsieur Massicolli devait débuter à la succursale de Laval et que son « numéro d’employé » serait le 11368. En plus de son salaire annuel sous forme de commissions, on y mentionne comme avantage social une assurance-vie de base.

 

[8]              Le Guide du conseiller en placement de la FBN fournit plus de détails quant au calcul de la rémunération des conseillers en placement[7]. Il énonce le principe de base suivant :

 

I.          Principe de base

 

§                La rémunération d’un conseiller en placement se calcule en trois étapes :

 

1re étape :         On détermine la commission brute perçue par la FBN sur l’ensemble des activités et des transactions effectuées par le conseiller en placement.

 

2e étape :          On détermine la commission du conseiller en placement. Cette commission est un pourcentage de la commission brute qui peut se situer entre 0 % et 55 % de la commission brute selon le type d’activité ou la valeur de la transaction.

 

3e étape :          On ajuste la commission du conseiller en placement en augmentant ou en diminuant le montant de la commission de base avec des ajustements liés à sa production et en y [sic] soustrayant certaines sommes qui représentent des coûts additionnels que la FBN a encourus à l’égard des services qui lui sont rendus et qui sont en sus de certains paramètres établis.

 

[9]              Pour illustrer toutes les composantes de la fixation de la rémunération des conseillers en placement, il est utile de reproduire le « Sommaire des revenus mensuels – Exemple » tiré du guide[8].

 

Sommaire des revenus mensuels – Exemple 

 

+

Commissions nettes sur transactions

+

Honoraires de gestion de portefeuille

+

Honoraires de démarcheur

+

Commissions nettes sur les frais de maintien (Trailer Fees) prélèvements préautorisés au fonds et RER collectif au fonds

+

Commissions nettes sur assurance-vie

+

Commissions nettes sur contrats à terme

+

Corrections de commissions sur transactions

A

Total des revenus assujettis à l’ajustement

 

B

Ajustement : 33 1/3 % de A

 

C

Revenus après ajustement (A – B)

 

+

Commissions nettes sur frais administratifs

(REA, RER Portefeuille, FRR Portefeuille, Service Plein Accès)

-

Pertes sur transactions

-

Dépassement du budget du compte Entrepreneur

D

Revenus après ajustements et commissions sur frais administratifs

 

-

Portion (%) du revenu net versée à l’assistant

-

Versement fixe mensuel versé à l’assistant

-

Contribution au revenu garanti d’un conseiller en placement

-

Participation aux frais pour services informatiques

-

Frais d’enregistrement auprès des organismes de réglementation et d’autoréglementation

-

Contribution au salaire de l’assistant

-

Frais de contentieux

-

Remboursement pour Programme Relais

-

Autres remboursements de frais assumés par le conseiller

E

Revenus nets après les frais assumés par le conseiller

(ligne D moins le total des frais)

 

+

Boni trimestriel de performance

-

Portion (%) du boni de performance versée à l’assistant

F

Revenus nets du mois (c.‑à‑d. revenus bruts pour fins fiscales)

(ligne E plus le boni trimestriel net de performance)

 

[10]         Même s’il n’y a pas de quotas précis à être réalisés par les conseillers en placement, la politique de rémunération de la FBN en vigueur le 1er avril 2003 révèle que la rémunération des conseillers ayant généré des commissions brutes inférieures à 55 000 $ par période de trois mois est réduite de 33 % pour le mois suivant[9]. Selon monsieur Massicolli, la FBN ne lui avait pas fixé d’objectif puisqu’il produisait au-delà des attentes de celle-ci.

 

[11]         Le Guide de l’employé  (pièce A-2, onglet 23) préparé par le service des ressources humaines de la FBN traite, en particulier à la partie IV, des différentes conditions de travail applicables aux employés. Deux dispositions méritent une attention particulière :

 

4.3 Bonification

 

L’employé permanent éligible à recevoir une bonification discrétionnaire, basée sur la rentabilité de la firme ou de la division ainsi que sur sa performance individuelle, doit avoir travaillé pendant la période de référence et être à l’emploi de la firme au moment du versement pour y être admissible. De plus, l’indemnité de vacances applicable sur ce gain, s’il y a lieu, en vertu des différentes lois provinciales sur les normes du travail est inclus dans le montant de bonification versée.

 

[…]

 

4.4 Commission

 

L’employé éligible à recevoir des commissions doit avoir travaillé pendant la période de référence pour y être admissible. De plus, l’indemnité de vacances[10] applicable à ce gain, s’il y a lieu, en vertu des différentes lois provinciales sur les normes du travail est inclus dans le montant de commissionnement [sic] versé.

 

[Je souligne.]

 

[12]         Le Guide de l'employé décrit aussi une panoplie de protections d’assurance collective offertes à tout employé (administratif ou « producer ») permanent à temps plein ou à temps partiel travaillant pour un minimum de 20 heures par semaine. Il y a notamment une assurance‑vie de base, une assurance‑accidents de base, une assurance médicale, une assurance dentaire et une assurance-invalidité de courte durée. Selon le guide, l’employé est admissible au programme d'assurance collective dès la date de son embauche (pièce A‑2, onglet 23, à la page 16). Au paragraphe 6.4, on précise que les primes d'assurance‑vie de base sont versées à 100 % par l'employeur. Il en est de même pour l'assurance‑vie de base des personnes à charge et pour l'assurance‑accidents de base (décès ou mutilation). En ce qui a trait à l'assurance médicale, les primes sont également payées par l'employeur pour la protection individuelle, mais l'employé paie une prime pour la protection familiale d'assurance dentaire et médicale.

 

[13]         Le régime d'assurance-invalidité de courte durée couvre les premiers 90 jours civils d'absence pour maladie. L’employé ayant deux années et plus de service reçoit 100 % de sa rémunération pour les premiers 20 jours ouvrables consécutifs d’absence. Les 70 jours restants sont rémunérés à 85%. Dans le cas d'un employé n'ayant pas de salaire de base, la rémunération est établie en fonction des bonis de rendement et des commissions gagnés dans les 12 mois précédant la date d'invalidité jusqu'à concurrence d'un montant brut de 240 000 $ par année (page 20 du Guide de l'employé). Par contre, les conseillers en placement, comme monsieur Massicolli, n'avaient pas le droit d’adhérer au régime des rentes à prestations déterminées, parce qu’ils étaient considérés comme des employés « producer » sans salaire de base (voir page 22 du Guide de l'employé).

 

[14]         Le Guide de l'employé décrit plusieurs autres avantages sociaux, notamment des frais réduits pour les programmes financiers offerts par la Banque Nationale du Canada (BNC) et la FBN (voir pièce A‑2, volume 5, onglet 23, page 26). Le Guide du conseiller en placement contient également une section sur le compte d’employé, à savoir un compte en argent canadien ou américain ouvert au nom d’un employé permanent ou retraité de la FBN (Guide, P140‑10). Ce compte permet d’obtenir des taux d’intérêt très avantageux sur tout solde créditeur d’un compte courant, une réduction des commissions de courtage et la renonciation aux frais administratifs pour les comptes de régimes enregistrés. Même si monsieur Massicolli affirme ne pas s’être prévalu de ce privilège, il avait le droit de le faire.

 

[15]         Dans la section du Guide du conseiller en placement traitant des frais de voyage et de déplacement, on mentionne que les « employés à commissions (secteur détail) doivent assumer eux-mêmes leurs frais de repas, de déplacement et d’hébergement », sauf à l’égard de certaines activités, à savoir : le « Club du Président », le « Congrès du Président », le « Conseil du Président », la « formation des recrues, adjoints en placement et adjoints administratifs ».

 

[16]         Le Guide de l'employé traite de la politique de formation et de développement de la FBN. Tout le personnel permanent à temps plein ayant terminé sa période d’essai peut recevoir un remboursement de ses frais pour des cours de formation ou de ses frais d’inscription à un séminaire de perfectionnement (pièce A‑2, volume 5, onglet 23, page 9). Monsieur Massicolli a obtenu le remboursement par la FBN du coût de certains cours de formation qu'il a suivis, notamment des cours donnés par ICVM Mondial, alors que les frais d'inscription à un colloque sur le gel successoral tenu par l'Association de planification fiscale et financière ont été supportés par monsieur Massicolli (voir pièce INT‑2, onglet 44).

 

[17]         Lors de son engagement, monsieur Massicolli habite à St‑Constant sur la Rive‑Sud de Montréal, alors qu'il doit travailler à la succursale de Laval. Comme monsieur Massicolli a constaté que LBG n'avait pas de succursale dans l’Ouest-de-l’Île de Montréal, il décide de développer sa clientèle dans ce secteur géographique de Montréal.

 

[18]         Monsieur Leclerc a reconnu que la FBN ne fournissait pas de liste de clients comme telle à ses conseillers en placement, mais ceux-ci pouvaient chercher une partie de leur clientèle dans celle de la BNC, qui détenait à cette époque de 20 % à 30 % de LBG. Il existe donc une synergie entre la clientèle de la BNC et celle de la FBN. Monsieur Massicolli a reconnu avoir communiqué avec les directeurs des différentes succursales de la BNC. Il présentait aux clients potentiels des conférences relatives aux placements. Monsieur Leclerc a estimé à de 20 % à 25 % le pourcentage des clients servis par monsieur Massicolli qui étaient des clients de la BNC.

 

[19]         Fatigué d'avoir à traverser deux ponts pour se rendre à son lieu de travail, monsieur Massicolli a déménagé à Baie d'Urfée dans l’Ouest-de-l’Île. En 1996, monsieur Massicolli y avait développé une clientèle suffisante pour que LBG y établisse un point de vente, une sous‑succursale de la succursale de Laval. L'ouverture de ce point de service s'est faite le 10 mai 1996. Comme d'autres conseillers en placement habitaient également dans l’Ouest-de-l’Île, deux nouveaux conseillers se joignent à l'équipe de l’Ouest-de-l’Île et cela justifie l'ouverture officielle d'une succursale au cours de l'automne 1996. Monsieur Massicolli en devient le codirecteur avec un collègue, monsieur Christian Lamarre. Cette situation ne plaît pas à monsieur Massicolli. Il se trouve en quelque sorte à être en concurrence avec les autres conseillers en placement de la succursale. Il lui paraît difficile de les motiver. Étant codirecteur, il doit agir aussi comme agent de conformité à l'égard des activités de la succursale de l’Ouest-de-l’Île. En tout état de cause, un nouveau directeur est nommé en 2000 ; il s'agit de monsieur Martin Leclerc. Cette nomination permet à messieurs Massicolli et Lamarre de se concentrer sur les activités qui semblent les intéresser davantage, soit celles de développer et de servir une clientèle de courtage.

 

[20]         Monsieur Massicolli privilégie davantage la prestation de services de conseils en placement plutôt que la vente de produits développés par la FBN. Selon cette approche, on vise à recevoir des honoraires pour services de conseils plutôt qu'une commission basée sur l'achat et la vente de valeurs mobilières. Cette approche amène monsieur Massicolli, en mai 2003, à former une équipe avec monsieur Mark W. Auger dans le but de concentrer leurs efforts sur les entrepreneurs et les familles fortunées. Un des motifs pour s'associer ainsi est le principe de complémentarité, dont l’effet est de permettre à deux conseillers en placement de développer une expertise dans différents aspects de l'activité de courtage. Mark Auger a comme responsabilité la gestion des portefeuilles des clients de l'équipe Auger‑Massicolli, alors que monsieur Massicolli s'occupe du développement des affaires.

 

[21]         À bien des égards, messieurs Auger et Massicolli se comportent comme des entrepreneurs. Par exemple, pour développer son nouveau créneau, l'équipe Auger‑Massicolli décide d'adopter une stratégie de marketing haut de gamme. Elle retient les services d'un graphiste pour créer la papeterie. La maquette préparée par le graphiste décrit Auger‑Massicolli comme une société en nom collectif (S.E.N.C.). Sur les projets de papier à en-tête et sur les cartes professionnelles apparaissent non seulement cette dénomination sociale, mais aussi celle de la FBN, ainsi que le logo respectif de chacune de ces sociétés. Par contre, comme le prévoit le Guide du conseiller en placement, toute publicité faite par un représentant de la FBN doit être approuvée par la FBN[11]. Sur des feuilles de travail intitulées « Goals Worksheet », on voit que la question du projet S.E.N.C. faisait l'objet de discussion en juillet 2003. L'équipe Auger‑Massicolli n'a jamais obtenu l'approbation de la FBN pour l’utilisation de la désignation « S.E.N.C. ». C'est probablement en raison de cette situation que messieurs Massicolli et Auger disent avoir formé une société en participation, qui n'a pas d'obligation de « se déclarer, de la manière prescrite par les lois relatives à la publicité légale des sociétés » (art. 2189, Code civil du Québec (Code civil)).

 

[22]         Pour mieux se concentrer sur leur clientèle type, à savoir les entrepreneurs et les familles fortunées, messieurs Auger et Massicolli décident de diminuer le nombre de leurs clients de 760 à 460[12]. Cette « épuration » s'est faite en partie par le transfert de leur clientèle à un autre conseiller en placement de la FBN. Le transfert d’un minimum de 10 millions de valeurs de placement donne à l'équipe Auger‑Massicolli droit à une contrepartie de 25 000 $ à être appliquée au paiement du salaire d'un adjoint ou d'une adjointe pour deux ans. Il semble qu'une partie de ces 25 000 $ a été utilisée également pour acquitter les frais de marketing de l’équipe.

 

[23]         Messieurs Auger et Massicolli définissent sur une feuille de travail (« Goals Worksheet ») leurs objectifs, à savoir : le montant de commissions à atteindre, les revenus à être gagnés durant le mois et le montant des actifs à avoir sous gestion. Il tente de convaincre monsieur Luc Paiement, président et responsable des placements des particuliers chez la FBN, de former un groupe qu'ils appellent « Private Client Wealth Management ». Les négociations entre l’équipe Auger‑Massicolli et la direction vont durer plusieurs mois. Finalement, la FBN permettra à l'équipe Auger‑Massicolli de personnaliser le concept de « Panier Conseiller » de la FBN pour le désigner plutôt comme le « Panier MWA » (MWA étant les initiales de monsieur Auger). Une lettre signée par monsieur Paiement le 15 décembre 2003 informe les clients de la FBN sur ce « Panier MWA ».

 

[24]         Par contre, les propositions faites par l’équipe Auger‑Massicolli qui ont trait aux éléments suivants : « a) société en nom collectif/limited liability partnership ; b) separate incorporated division ; c) merger/integration into NBF Gestion Privée ; d) separate branding ; joint branding », ne semblent pas obtenir l'aval de monsieur Paiement. D'ailleurs, dans une lettre du 24 janvier 2004[13], adressée à monsieur Paiement, monsieur Auger exprime sa frustration lorsqu'il écrit :

 

Auger‑Massicolli is genuinely concerned that our experiences and know how are being undermined by NBF's inaction. We are behind schedule. Our most direct competitors, National Bank of Canada and Desjardins, are not wasting anytime [sic] in aggressively recruiting, training, and coordinating the required people and technological resources. Auger‑Massicolli will not stand still.

 

[25]         On passera de la parole aux actes. L'équipe Auger‑Massicolli quittera la FBN le 1er octobre 2004, soit huit mois plus tard, pour se joindre à Valeurs mobilières Desjardins. Lors de leur départ en octobre 2004, la FBN remplit un relevé d'emploi en conformité avec les dispositions de la Loi.

 

[26]         En plus de ce relevé d'emploi, la FBN établit des feuillets de renseignements T4 pour 2004, tout comme elle l’avait fait pour les années antérieures, et sur ces feuillets les commissions versées par cette société à monsieur Massicolli apparaissent à la case 14 comme du « revenu d’emploi ». La FBN a également préparé des formulaires T2200 « Déclaration des conditions de travail » pour monsieur Massicolli pour les années 2003 et 2004 (voir pièce A‑2, volume 5, onglets 27 et 29). Dans ces formulaires, on décrit monsieur Massicolli comme un « employé » occupant un poste de conseiller en placement. On indique, pour l’année 2003, qu’il est autorisé à travailler à domicile[14] et qu’à sa discrétion il verse un salaire à un adjoint. Monsieur Leclerc, le directeur de succursale de monsieur Massicolli, a indiqué que ce dernier n’avait pas contesté qu’on lui remettre des T4 et des formulaires T2200 pour les années 2003 et 2004. Monsieur Massicolli a d'ailleurs inscrit ses commissions de la FBN dans son revenu tiré d’un emploi à la ligne 101 de sa déclaration de revenus (voir pièce INT‑1, onglets 39 et 40). Il a aussi déduit des « dépenses d’emploi » à la ligne 229[15]. Il est à noter que monsieur Massicolli a déclaré des revenus d’entreprise de 400 $ dans sa déclaration de revenus de 2004. Cette somme a trait à des conseils en planification financière. Ce sont là les seuls revenus tirés d'une entreprise qui apparaissent dans sa déclaration de revenus.

 

Contexte réglementaire

 

[27]         Avant d'exposer la position respective des parties, il est important de décrire le cadre réglementaire dans lequel se fait l’exploitation d’une entreprise de courtage en valeurs mobilières au Québec. Tout comme cela est le cas pour certaines professions, il existe des règles qui régissent l’exploitation de telles entreprises[16]. Pour mieux protéger le public et l’industrie du courtage, des normes exigeantes s’appliquent. Elles visent à la fois les entreprises elles‑mêmes, leurs employés et leurs mandataires. Selon ma compréhension, les maisons de courtage regroupées au sein de l’ACCOVAM s’étaient elles‑mêmes donné des normes pour mieux protéger leur industrie et leurs clients. La Commission des valeurs mobilières du Québec, elle‑même une création de la législation québécoise, a chargé l’ACCOVAM de la réglementation des activités de courtage à compter de 1982.

 

[28]          On trouve les Statuts, les Règlements et les Principes directeurs de l’ACCOVAM  dans son Manuel de réglementation (juillet 1997). Parmi les objets décrits dans l’acte constitutif de l’ACCOVAM, il y a, à l’article 2(b), les suivants, soit ceux : « d’encourager l’observation de normes professionnelles élevées entre ses membres[17] et leurs associés, leurs administrateurs, leurs dirigeants et leurs employés, au moyen de l’autodiscipline et de l’autoréglementation, ainsi que d’adopter des pratiques et des exigences qui peuvent être nécessaires et souhaitables pour éviter des conduites contraires aux intérêts des membres, de leurs clients et du public et de voir à leur application. » (Je souligne.) (Pièce A‑2,volume 2, onglet 12, Acte constitutif.)

 

•   Obligations générales

 

[29]         Le Statut 29 traite de la conduite des affaires et prévoit notamment ce qui suit à l’article 1[18] :

Conduite des affaires

 

1.         Les membres ainsi que chaque associé, administrateur, dirigeant, directeur des ventes, directeur, directeur adjoint ou codirecteur de succursale, représentant inscrit, représentant en placement et employé d’un membre (i) sont tenus d’observer des normes élevées d’éthique et de conduite professionnelle dans l’exercice de leur activité, (ii) ne doivent pas avoir de conduite ou de pratique commerciale inconvenante ou préjudiciable aux intérêts du public et (iii) doivent avoir le caractère, la réputation, l’expérience et la formation qui correspondent aux normes mentionnées aux points (i) et (ii) qui précèdent ou que le conseil d’administration peut prescrire.

 

 

Aux fins des procédures disciplinaires prévues aux Statuts, chaque membre est responsable des actes et des omissions de chacun de ses associés, administrateurs, dirigeants, directeurs des ventes, directeurs, directeurs adjoints et codirecteurs de succursale, représentants inscrits, représentants en placement et employés, et chacune des personnes susmentionnées doit se conformer à tous les Statuts, Règlements et Principes directeurs auxquels le membre doit se conformer.

 [Je souligne.]

 

Obligation de surveillance

 

[30]         Parmi les règles de conduite régissant les membres de l’ACCOVAM, il y a celles traitant du devoir de surveillance, en particulier l’article 27(a) du Statut 29 :

 

27.(a)   Chaque membre doit établir et maintenir un système lui permettant de surveiller les activités de chacun de ses associés, administrateurs, dirigeants, représentants inscrits, employés et mandataires, qui est conçu pour assurer de manière raisonnable que les Statuts, Règlements et Principes directeurs de l’Association ainsi que toutes les autres lois et instructions générales et tous les autres règlements qui s’appliquent aux activités reliées aux valeurs mobilières et aux contrats à terme de marchandises du membre soient respectés. Ce système de surveillance doit contenir au moins les éléments suivants :

 

(i)         l’établissement, le maintien et l’application de politiques et de procédures écrites, qui soient acceptables pour l’Association, permettant de régir les divers types d’activités qu’il exerce et de surveiller chaque associé, administrateur, dirigeant, représentant inscrit, employé et mandataire du membre, et qui sont conçues pour assurer de manière raisonnable que les lois, règles, règlements et instructions générales soient respectés;

 

(ii)        des procédures conçues pour assurer de manière raisonnable que chaque associé, administrateur, dirigeant, représentant inscrit, employé et mandataire du membre comprenne les responsabilités qui lui incombent aux termes des politiques et des procédures écrites mentionnées à l’alinéa (i);

 

(iii)       des procédures pour assurer que les politiques et procédures écrites du membre soient modifiées selon les besoins dans un délai raisonnable suivant les modifications apportées aux lois, aux règlements, aux règles et aux instructions générales et que le personnel concerné en soit avisé;

 

(iv)       un nombre suffisant d’employés et de ressources diverses pour veiller à l’application, de manière adéquate et sans réserve, des politiques et des procédures écrites mentionnées à l’alinéa (i);

 

(v)        la désignation de personnel de surveillance possédant les compétences et le pouvoir nécessaires pour s’acquitter des responsabilités de surveillance qui lui sont confiées. Chaque membre doit tenir un registre interne du nom de toutes les personnes qui se voient déléguer des responsabilités de surveillance et des dates de prise d’effet et de fin, le cas échéant, de leur mandat. Le membre doit conserver ce registre pendant sept ans, et dans ses locaux au cours de la première année;

 

(vi)       des procédures de suivi et d’examen pour assurer que le personnel de surveillance s’acquitte convenablement de ses fonctions de surveillance. Lorsque la surveillance est effectuée dans la succursale et que les registres de surveillance sont tenus à cet endroit, les procédures de suivi et d’examen doivent comprendre des examens périodiques internes de la surveillance et de la tenue des registres de la succursale dans la mesure nécessaire en tenant compte des types d’activités et de surveillance qui y sont exercés;

 

(vii)             la tenue de registres appropriés des activités de surveillance, y compris les examens internes des succursales tel qu’il est décrit à l’alinéa (vi), les questions de conformité soulevées et le traitement de ces questions.

[Je souligne.]

 

[31]         Le Statut 39 de l’ACCOVAM traite des mandataires. En voici les passages les plus pertinents[19] :

 

Mandant et Mandataire

 

39.1          Chaque fois que le mot employé est utilisé dans les Statuts, Règlements, Principes directeurs et Formulaires de l’Association, il est réputé englober également le mot mandataire et chaque fois que le mot emploi est utilisé, il est réputé englober également le mot mandat, lorsque cela s’applique.

 

39.2          Aux fins du présent Statut, « entreprise reliée aux valeurs mobilières » désigne toute entreprise ou activité (qu’elle soit à caractère pécuniaire ou non) qui, directement ou indirectement, correspond à la négociation de valeurs mobilières ou de contrats de change ou à la prestation de services de conseiller en valeurs mobilières ou en contrats de change (y compris les contrats à terme de marchandises et les options sur contrats à terme de marchandises) aux fins de la législation relative aux valeurs mobilières ou aux contrats de change applicable dans tout territoire canadien, y compris les ventes faites aux termes d’une dispense prévue dans la législation.

 

39.3          La relation entre le membre et toute personne exploitant une entreprise reliée aux valeurs mobilières au nom du membre est celle :

 

a)         d’un employé, ou

b)         d’un mandataire qui n’est pas un employé,

 

            mais elle ne saurait être celle d’un représentant constitué en société[20].

 

39.4          Lorsque la relation commerciale du membre avec une personne exploitant une entreprise reliée aux valeurs mobilières au nom du membre est structurée sur le modèle de la relation mandat-mandataire [sic] prévue au paragraphe (b) de l’article 3 du présent Statut, le membre doit veiller à ce que :

 

                        […]

 

c)         le membre soit responsable de la conduite du mandataire et qu’il surveille ses agissements relativement à l’entreprise, notamment le respect de la législation applicable et des Statuts, des Règlements, des Principes directeurs et des Formulaires de l’Association, y compris les statuts, décisions, principes directeurs, règles, règlements, ordonnances et orientations de tout organisme d’autoréglementation ou de tout organisme semblable auquel le membre est assujetti;

 

d)        le membre soit responsable envers les clients (et les tiers en général) des actes et des omissions du mandataire relativement à l’entreprise du membre, comme si le mandataire était l’employé du membre;

 

                        […]

 

n)         le membre et le mandataire aient conclu une convention écrite devant être remise à l’Association avant le début de leur relation mandant-mandataire, laquelle doit contenir des modalités comprenant les dispositions des paragraphes (a) à (m) du présent article, inclusivement, et ne comprendre aucune disposition incompatible avec ces paragraphes, et fournissent à l’Association une attestation signée par un dirigeant ou un administrateur du membre et, à la demande de l’Association, un avis des conseillers juridiques, confirmant que la  convention est conforme à ces dispositions[21].

[Je souligne.]

 

[32]         Au règlement 1300 de l’ACCOVAM, qui traite du « contrôle des comptes » (pièce A‑2, volume 3, onglet 12), on définit un « compte géré » comme désignant « tout compte sollicité par un membre ou par […] un représentant inscrit d’un membre, à l’égard duquel les décisions de placement sont prises de façon continue par le membre ou par un tiers engagé par le membre ». « Compte carte blanche » désigne « le compte d’un client autre qu’un compte géré relativement auquel un membre ou une personne agissant au nom du membre use de pouvoirs discrétionnaires lorsqu’il négocie pour ce compte » (article 3 du règlement 1300). L’article 7 du même règlement prescrit :

 

Aucun membre […] ni aucune personne agissant pour son compte ne doit exercer un pouvoir discrétionnaire à l’égard d’un compte géré, à moins que : (a) la personne qui est responsable de la gestion de ce compte ne soit : (i) un associé, un administrateur, un dirigeant, un employé ou un mandataire du membre qui a été approuvé par l’Association à titre de gestionnaire de portefeuille ou de gestionnaire adjoint de portefeuille, ou (ii) un sous‑conseiller avec lequel le membre a conclu une convention écrite de sous‑consultation […] »[22]. [Je souligne.]

 

[33]         En plus du Règlement 1300, il y a le Principe directeur no 2, qui traite des normes minimales de surveillance des comptes au détail[23], en particulier pour les comptes gérés. On y précise, à la partie VII traitant de la surveillance de ces comptes, que le membre doit être autorisé par l’ACCOVAM pour pouvoir ouvrir des comptes gérés et doit se conformer à toutes les prescriptions détaillées qui figurent dans les Statuts, Règlements et Principes directeurs de l’Association. Seuls les gestionnaires de portefeuille qualifiés peuvent s’occuper de comptes gérés. (Section E : Comptes gérés)

 

[34]         Comme monsieur Massicolli a reconnu lors de son témoignage que, puisque ni lui ni monsieur Auger n’était associé, administrateur, dirigeant ou mandataire de la FBN, ni l’un ni l’autre ne pouvait être gestionnaire de portefeuille, à moins d’être un employé de la FBN. Or, monsieur Auger était gestionnaire adjoint de portefeuille et la preuve ne révèle l’existence d’aucune « convention écrite de sous‑consultation ». Ni monsieur Auger ni monsieur Massicolli n’était membre de l’ACCOVAM. Ils n’étaient que des représentants inscrits. Il fallait qu’ils soient des employés de la FBN pour ouvrir des comptes de gestion de portefeuille et exercer un pouvoir discrétionnaire à l'égard de tels comptes. Ils n’ont pu en ouvrir qu’au nom de la FBN, qui, elle, devait exercer un contrôle serré sur les activités de ses employés agissant comme gestionnaire ou gestionnaire adjoint de portefeuille.

 

[35]         De façon plus générale, il est important de souligner que toutes les règles contenues dans les Statuts, les Règlements et les Principes directeurs ne visent que les membres et leur personnel. Le personnel d'un membre comprend ses administrateurs (s'il s'agit d'une société par actions), ses associés (s'il s'agit d'une société de personnes), ses dirigeants, ses directeurs des ventes, ses directeurs ou codirecteurs de succursale, ses représentants en placement ou tout autre employé du membre. Il comprend également un mandataire agissant pour le compte d'un membre dans la mesure où une entente écrite à cet égard a été approuvée par l'ACCOVAM. Ainsi le devoir de surveiller ne s'applique qu'à l’égard de ces personnes. Ces règles n'imposent aucune obligation, notamment en matière de surveillance, à l'égard de toute autre personne exploitant une entreprise ou exerçant une activité de courtage. Ainsi, la FBN n'a pas d'obligation de surveillance à l'égard d'un sous‑traitant qui ne serait pas une des personnes mentionnées dans cette longue énumération.

 

Position des parties

 

•   Position de la FBN

 

[36]         L'avocat de la FBN a rappelé les règles pertinentes qui devraient permettre à la Cour de décider si monsieur Massicolli était un salarié ou un travailleur autonome. Tout d’abord, la question devrait être tranchée en fonction du Code civil étant donné que la Loi ne définit pas ce qu’est un emploi exercé aux termes d’un contrat de louage de services, aux fins de la définition d'emploi assurable que l'on trouve au paragraphe 5(1) de la Loi. À l’appui de cette position, il a cité l’arrêt Tambeau, publié sous le nom de 9041‑6868 Québec Inc. c. Le Ministre du Revenu national, 2005 CAF 334. En particulier il a cité ces propos du juge Décary[24] :

 

[3]        L'entrée en vigueur du Code civil du Québec en 1994, puis l'adoption par le Parlement du Canada de la Loi d'harmonisation no 1 du droit fédéral avec le droit civil (c. 2001, ch. 4) et l'adjonction par cette Loi de l'article 8.1 à la Loi d'interprétation (L.R.C., ch. I-21) ont redonné au droit civil du Québec, en matière fédérale, ses lettres de noblesse que les tribunaux avaient eu parfois tendance à ignorer. Il suffit, à cet égard, de consulter l'arrêt de cette Cour, dans St-Hilaire c. Canada, [2004] 4 C.F. 289 (C.A.F.) et l'article du juge Pierre Archambault, de la Cour canadienne de l'impôt, intitulé « Contrat de travail : pourquoi Wiebe Door Services Ltd. ne s'applique pas au Québec et par quoi on doit le remplacer » et publié récemment dans le Deuxième recueil d'études en fiscalité (2005) de la collection L'harmonisation de la législation fédérale avec le droit civil québécois et le bijuridisme canadien, pour se convaincre que le concept de « contrat de louage de services », à l'alinéa 5(1)a) de la Loi sur l'assurance-emploi, doit être analysé à la lumière du droit civil québécois lorsque le droit provincial applicable est celui du Québec.

 

[...]

 

[7]        Bref, c'est le Code Civil du Québec qui détermine les règles applicables à un contrat conclu au Québec. Ces règles se retrouvent notamment dans ces dispositions du Code qui traitent du contrat en général (art. 1377 C.c.Q. et suiv.), et dans celles qui traitent du « contrat de travail » (art. 2085 à 2097 C.c.Q.) et du « contrat d'entreprise ou de service » (art. 2098 à 2129 C.c.Q.). Les articles 1378, 1425, 1426, 2085, 2098 et 2099 C.c.Q. sont les plus pertinents pour les fins du présent dossier :

 

1378.  Le contrat est un accord de volonté par lequel une ou plusieurs personnes s'obligent envers une ou plusieurs autres à exécuter une prestation.

 

1378.  A contract is an agreement of wills by which one or several persons obligate themselves to one or several other persons to perform a prestation.

 

1425.  Dans l'interprétation du contrat, on doit rechercher quelle a été la commune intention des parties plutôt que de s'arrêter au sens littéral des termes utilisés.

 

1425.  The common intention of the parties rather than adherence to the literal meaning of the words shall be sought in interpreting a contract.

 

1426.  On tient compte, dans l'interprétation du contrat, de sa nature, des circonstances dans lesquelles il a été conclu, de l'interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu'il peut avoir reçue, ainsi que des usages.

 

1426.  In interpreting a contract, the nature of the contract, the circumstances in which it was formed, the interpretation which has already been given to it by the parties or which it may have received, and usage, are all taken into account.

1440.  Le contrat n'a d'effet qu'entre les parties contractantes; il n'en a point quant aux tiers, excepté dans les cas prévus par la loi.

 

1440.  A contract has effect only between the contracting parties; it does not affect third persons, except where provided by law.

2085.  Le contrat de travail est celui par lequel une personne, le salarié, s'oblige, pour un temps limité et moyennant rémunération, à effectuer un travail sous la direction ou le contrôle d'une autre personne, l'employeur.

 

2085.  A contract of employment is a contract by which a person, the employee, undertakes for a limited period to do work for remuneration, according to the instructions and under the direction or control of another person, the employer.

2098. Le contrat d'entreprise ou de service est celui par lequel une personne, selon le cas l'entrepreneur ou le prestataire de services, s'engage envers une autre personne, le client, à réaliser un ouvrage matériel ou intellectuel ou à fournir un service moyennant un prix que le client s'oblige à lui payer.

 

2098.  A contract of enterprise or for services is a contract by which a person, the contractor or the provider of services, as the case may be, undertakes to carry out physical or intellectual work for another person, the client or to provide a service, for a price which the client binds himself to pay.

2099.  L'entrepreneur ou le prestataire de services a le libre choix des moyens d'exécution du contrat et il n'existe entre lui et le client aucun lien de subordination quant à son exécution.

2099.  The contractor and the provider of services is free to choose the means of performing the contract and no relationship of subordination exists between the contractor or the provider of services and the client in respect of such performance.

 

 

[...]

 

[9]        Le contrat sur lequel le ministre se fonde ou qu'une partie cherche à lui opposer est certes un fait juridique que le ministre ne peut ignorer même s'il ne produit pas d'effet à son égard (art. 1440 C.c.Q.; Baudouin et Jobin, Les Obligations, Éditions Yvon Blais 1998, 5e édition, p. 377). Cela n'empêche en rien le ministre, cependant, d'alléguer que dans les faits le contrat n'est pas tel qu'il parait être, qu'il n'a pas été exécuté selon ses termes ou qu'il ne reflète pas la véritable relation qui s'est établie entre les parties. Il est permis au ministre, et à la Cour canadienne de l'impôt après lui, de rechercher cette relation véritable, ainsi que le prévoient les articles 1425 et 1426 du Code Civil du Québec, dans la nature du contrat, dans les circonstances dans lesquelles il a été conclu, dans l'interprétation que les parties lui ont déjà donnée ou qu'il peut avoir reçue, ainsi que dans les usages. Et parmi ces circonstances dans lesquelles le contrat a été conclu se trouve l'intention légitime déclarée des parties, un facteur important retenu par cette Cour dans un bon nombre d'arrêts (voir Wolf c. Canada (C.A.), [2002] 4 C.F. 396, para. 119 et 122; A.G. Canada c. Les Productions Bibi et Zoé Inc., 2004 CAF 54; Le Livreur Plus Inc. c. M.R.N., 2004 CAF 68; Poulin c. Canada (M.R.N.), 2003 CAF 50; Tremblay c. Canada (M.R.N.), 2004 CAF 175.

 

[...]

 

[11]      Trois éléments constitutifs caractérisent le « contrat de travail » en droit québécois : une prestation de travail, une rémunération et un lien de subordination. C'est ce dernier élément qui est à la source de la plupart des litiges. Pour le définir de façon globale, je m'en remets à ces propos de Robert P. Gagnon, dans Le droit du travail du Québec, Éditions Yvon Blais, 2003, 5e édition, aux pages 66 et 67 :

 

90 ‑ Facteur distinctif ‑ L'élément de qualification du contrat de travail le plus significatif est celui de la subordination du salarié à la personne pour laquelle il travaille. C'est cet élément qui permet de distinguer le contrat de travail d'autres contrats à titre onéreux qui impliquent également une prestation de travail au bénéfice d'une autre personne, moyennant un prix, comme le contrat d'entreprise ou de service régi par les articles 2098 et suivants C.c.Q. Ainsi, alors que l'entrepreneur ou le prestataire de services conserve, selon l'article 2099 C.c.Q., « le libre choix des moyens d'exécution du contrat » et qu'il n'existe entre lui et son client « aucun lien de subordination quant à son exécution », il est caractéristique du contrat de travail, sous réserve de ses termes, que le salarié exécute personnellement le travail convenu sous la direction de l'employeur et dans le cadre établi par ce dernier.

 

91 ‑ Appréciation factuelle ‑ La subordination se vérifie dans les faits. À cet égard, la jurisprudence s'est toujours refusée à retenir la qualification donnée au contrat par les parties....

 

92 ‑ Notion ‑ Historiquement, le droit civil a d'abord élaboré une notion de subordination juridique dite stricte ou classique qui a servi de critère d'application du principe de la responsabilité civile du commettant pour le dommage causé par son préposé dans l'exécution de ses fonctions (art. 1054 C.c.B.-C.; art 1463 C.c.Q.). Cette subordination juridique classique était caractérisée par le contrôle immédiat exercé par l'employeur sur l'exécution du travail de l'employé quant à sa nature et à ses modalités. Elle s'est progressivement assouplie pour donner naissance à la notion de subordination juridique au sens large. La diversification et la spécialisation des occupations et des techniques de travail ont, en effet, rendu souvent irréaliste que l'employeur soit en mesure de dicter ou même de surveiller de façon immédiate l'exécution du travail. On en est ainsi venu à assimiler la subordination à la faculté, laissée à celui qu'on reconnaîtra alors comme l'employeur, de déterminer le travail à exécuter, d'encadrer cette exécution et de la contrôler. En renversant la perspective, le salarié sera celui qui accepte de s'intégrer dans le cadre de fonctionnement d'une entreprise pour la faire bénéficier de son travail. En pratique, on recherchera la présence d'un certain nombre d'indices d'encadrement, d'ailleurs susceptibles de varier selon les contextes : présence obligatoire à un lieu de travail, assignation plus ou moins régulière du travail, imposition de règles de conduite ou de comportement, exigence de rapports d'activité, contrôle de la quantité ou de la qualité de la prestation, etc. Le travail à domicile n'exclut pas une telle intégration à l'entreprise. (mon soulignement).

 

[37]         Il a cité également ma décision dans Rhéaume c. Le Ministre du Revenu national et Julie Faucher, 2007 CCI 591, en particulier les paragraphes suivants :

 

[24]      Lorsqu'on analyse ces dispositions du Code civil, il en ressort clairement qu'il y a trois conditions essentielles quant à l'existence d'un contrat de travail : i) une prestation de travail fournie par le salarié; ii) une rémunération pour ce travail payée par l'employeur; et iii) un lien de subordination. Ce qui distingue nettement le contrat de service du contrat de travail, c'est l'existence du lien de subordination, c'est‑à‑dire le fait pour l'employeur d'avoir un pouvoir de direction ou de contrôle sur le travailleur.

 

[…]

 

[29]      À mon avis, les règles du Code civil régissant le contrat de travail ne sont pas identiques à celles de la common law et, par conséquent, il n'est pas approprié d'appliquer des décisions de common law comme les arrêts Wiebe Door Services Ltd. c. Ministre du Revenu national, [1986] 3 C.F. 553 (C.A.F.) et 671122 Ontario Ltd. c. Sagaz Industries Canada Inc., [2001] 2 R.C.S. 983, 2001 CSC 59.7 En common law, « aucun critère universel ne permet de déterminer, de façon concluante, si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant [...] La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir des services les fournit en tant que personne travaillant à son compte8». Voici ce qu’écrit le juge Major dans Sagaz :

 

47 Bien qu’aucun critère universel ne permette de déterminer si une personne est un employé ou un entrepreneur indépendant, je conviens avec le juge MacGuigan que la démarche suivie par le juge Cooke dans la décision Market Investigations, précitée, est convaincante. La question centrale est de savoir si la personne qui a été engagée pour fournir les services les fournit en tant que personne travaillant à son compte. Pour répondre à cette question, il faut toujours prendre en considération le degré de contrôle que l’employeur exerce sur les activités du travailleur. Cependant, il faut aussi se demander, notamment, si le travailleur fournit son propre outillage, s’il engage lui-même ses assistants, quelle est l’étendue de ses risques financiers, jusqu’à quel point il est responsable des mises de fonds et de la gestion et jusqu’à quel point il peut tirer profit de l’exécution de ses tâches.

 

48  Ces facteurs, il est bon de le répéter, ne sont pas exhaustifs et il n’y a pas de manière préétablie de les appliquer. Leur importance relative respective dépend des circonstances et des faits particuliers de l’affaire.

   [Je souligne.]

[…]

 

[31]      Au Québec, contrairement à la situation en common law, la question centrale est de savoir s'il existe un lien de subordination, à savoir un pouvoir de contrôle ou de direction. Un tribunal n'a pas d'autre choix que de conclure à l'existence ou à l'absence du lien de subordination pour pouvoir conclure qu'un contrat constitue un contrat de travail ou bien un contrat de service. C'est l’approche que le juge Létourneau de la Cour d'appel fédérale a adoptée dans l'affaire D & J Driveway9, où il a conclu à l'absence d'un contrat de travail en se fondant sur les dispositions du Code civil et, en particulier, en constatant l'absence d'un lien de subordination, lequel il a décrit comme « la caractéristique essentielle du contrat de travail »10.

 

[…]

 

[33]      Finalement, avant de terminer cet énoncé des règles pertinentes pour déterminer si madame Rhéaume occupait un emploi assurable, rappelons ces propos de la juge Picard de la Cour supérieure du Québec dans 9002‑8515 Québec inc.12, que j’ai rapportés au paragraphe 121, page 2:82 de mon article :

 

15 Pour qu’il y ait un contrat d’entreprise, il ne doit y avoir aucun lien de subordination et l’Entente contient plusieurs éléments démontrant un lien de subordination. Il existe dans ce cas un nombre suffisant d’indices d’un rapport d’autorité.

_______________________________

7              Voir l’analyse plus approfondie que j’ai faite dans mon article (précité).

8           Le juge Major dans Sagaz, par. 46 et 47.

9              D & J Driveway Inc. c. Canada (M.R.N.), [2003] A.C.F. no 1784 (QL), 2003 CAF 453. Voir également Charbonneau c. Canada, [1996] A.C.F. no 1337 (QL) (C.A.F.); Sauvé c. Canada, [1995] A.C.F. no 1378 (QL) (C.A.F.); Lagacé c. Canada (M.R.N.), [1994] A.C.F. no 885 (QL) (C.A.F.), confirmant [1991] T.C.J. no 945 (QL). Il faut toutefois mentionner que, dans les arrêts D & J Driveway et Charbonneau, la Cour d'appel n'a pas écarté explicitement l'application de Wiebe Door, mais a conclu à l'existence d'un contrat de service en se fondant sur l'absence du lien de subordination, suivant ainsi les règles du Code civil.

10                    Par. 16 de la décision.

12             Commission des normes du travail c. 9002‑8515 Québec Inc., REJB 2000‑18725. Voir également les commentaires du ministre de la Justice reproduits au par. 42 de mon article, selon lesquels le prestataire doit avoir une « indépendance quasi absolue dans la manière dont s’exécute le contrat ».

 

[38]         L’avocat de la FBN a cité également les propos suivants du juge Bédard dans l’affaire Caron, publié sous le nom de 9020‑8653 Québec Inc. c. Le Ministre du Revenu national[25] :

 

[17]      […] Je suis d'avis toutefois que contrairement à l'approche en common law, une fois qu'un juge est en mesure de conclure à l'absence d'un lien de subordination, son analyse s'arrête là pour déterminer s'il s'agit d'un contrat de service. Il n'est pas nécessaire de considérer la pertinence de la propriété des outils ainsi que le risque de perte ou la possibilité de profit, puisqu'en vertu du Code civil, l'absence du lien de subordination constitue le seul élément constitutif du contrat de service qui le distingue du contrat de travail. Les éléments tel que [sic] la propriété des outils et les risques de perte ou la possibilité de profit ne sont pas des éléments essentiels à un contrat de service. Par contre, l'absence d'un lien de subordination est déterminante. À l'égard des deux formes de contrat, il faut décider s'il existe ou non un lien de subordination. Évidemment, le fait que le travailleur se comportait comme entrepreneur pourrait être un indice de l'absence de lien de subordination.

 

[…]

 

[19]      Je tiens à souligner que l'appelante devait prouver l'absence de lien de subordination selon la prépondérance des probabilités, pour établir qu'il n'y avait pas de contrat de travail. Je tiens aussi à souligner que si la preuve révèle à la fois des éléments d'autonomie et de subordination, il faut conclure à l'existence d'un contrat de travail, puisque le contrat de service doit être exécuté sans lien de 30

subordination. C'est ce que le juge Picard a décidé dans l'arrêt Commission des normes du travail c. 9002-8515 Québec inc, no 505‑05‑020995‑963, 6 avril 2000 (C. Sup. Québec) :

 

15. Pour qu'il y ait un contrat d'entreprise, il ne doit y avoir aucun lien de subordination. [...] Il existe dans ce cas un nombre suffisant d'indices d'un rapport d'autorité.

[Je souligne.]

 

[39]         Selon l'avocat de la FBN, la preuve a révélé amplement que la FBN avait manifestement exercé une direction et un contrôle sur le travail de monsieur Massicolli. Le fait que cette obligation de contrôle et de direction à l’égard d’un travailleur découle en partie de normes réglementaires fait en sorte que ce travailleur est un employé. Il a rappelé que la nécessité de ce contrôle n’a pas comme source unique les normes réglementaires de l’ACCOVAM, mais elle découle aussi des exigences d’affaires de la FBN. Il y va notamment de la réputation de celle-ci et de sa capacité de réaliser des bénéfices. C’est pour cette raison également que la FBN a exercé un contrôle, et son droit de direction, sur le travail de monsieur Massicolli. L’avocat a rappelé les paragraphes 2 et 3 de l’entente partielle des faits, qui sont ainsi conçus :

 

2. Les activités de courtage en valeurs mobilières de l’Appelante consistent notamment à offrir des services de conseil et de courtage aux particuliers par l’entremise de conseillers en placements ainsi que des services de courtage institutionnel et de financement à des sociétés.

 

3. Les services de conseil et de courtage aux particuliers qui sont offerts par l’Appelante sont rendus par des conseillers en placements qui sont affectés dans différentes succursales à travers le Canada dont, entre autres, la succursale située à Pointe‑Claire, Québec (« Succursale »).

 

[Je souligne]

 

[40]         L’avocat a mentionné aussi les paragraphes suivants :

 

9.         Afin de se conformer aux exigences de l’ACCOVAM lors de la Période, l’Appelante avait mis en place des mécanismes de surveillance et de contrôle des transactions et opérations concernant les affaires des Clients.

 

14.       L’Appelante s’occupait notamment de la facturation et de la perception des comptes auprès des Clients et remettait à l’Intervenant sa part des commissions auquel [sic] il avait droit.

 

18.       Les dossiers des Clients devaient être entreposés à la Succursale et les opérations et transactions sur les comptes des Clients étaient nécessairement effectuées ou initiées à partir du bureau situé à la Succursale.

 

[41]         Comme autre preuve de l’exercice de la direction et du contrôle par la FBN, le procureur a rappelé les dispositions du Code d’éthique et du Guide de l’employé.

 

[42]         Il a reconnu que monsieur Massicolli était un employé modèle pour la FBN puisque sa production était très élevée et que son comportement était conforme aux règles de conduite de la FBN. Par conséquent, le fait que la FBN n’a pas exercé quotidiennement autant de contrôle sur monsieur Massicolli en ce qui a trait à son horaire ne signifie pas qu’elle n’avait pas un droit de contrôle sur ses activités.

 

•   Position de monsieur Massicolli

 

[43]         L'avocat de monsieur Massicolli n’a pas exprimé de désaccord quant à la description qu’a faite l'avocat de la FBN des règles de droit applicables pour déterminer si monsieur Massicolli était un travailleur indépendant ou un employé salarié, à savoir les règles du Code civil. En outre, quand il a évoqué comme motif important de sa conclusion que monsieur Massicolli était un travailleur autonome le fait que celui-ci devait supporter entièrement la perte résultant d’un placement mal exécuté par lui ou par une de ses adjointes, je lui ai fait part que les risques de perte ne constituaient pas un élément pertinent selon le Code civil. À cette intervention, l’avocat a répondu que cet élément était invoqué pour établir l’absence du lien de subordination. Il reconnaissait ainsi – et à bon droit, à mon avis ‑ l’approche civiliste quant à la détermination du statut de monsieur Massicolli.

 

[44]         Dans un premier temps, l’avocat de monsieur Massicolli a souligné que les règles de l’ACCOVAM peuvent s’appliquer à un mandataire qui n’est pas un employé, tel qu'il ressort du Statut 39. Il a également cité certains passages de l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Combined Insurance Co. of America c. Canada (Ministre du revenu National), 2007 A.C.F. nº 124 (QL), 2007 CAF 60, en particulier ceux‑ci :

70        Le juge s'est aussi référé au contrôle de la qualité du travail de l'intimée pour appuyer sa conclusion que l'appelante exerçait un contrôle sur l'intimée. Au paragraphe 19 de sa décision, il écrit "c'est le degré de contrôle exercé sur la qualité du travail qui compte". Il s'agit là d'une erreur de droit, car la jurisprudence de notre Cour est constante sur ce point : le contrôle de la qualité du travail, tout comme celui du résultat, ne créent pas nécessairement de lien de subordination. Ils ne doivent d'ailleurs pas être confondus avec le contrôle de l'exécution des travaux : voir Desbiens c. Procureur général du Canada, [2005] A.C.F. no 2103, 2005 CAF 439, au paragraphe 6.

 

[…]

 

72        […] Finalement, la preuve démontre que l'appelante n'exerçait qu'un contrôle minimal sur le résultat du travail de l'intimée et ce, principalement afin de respecter les exigences statutaires et réglementaires.

[Je souligne]

 

[45]         Aux fins de la détermination du statut de monsieur Massicolli, il fallait ainsi faire abstraction de l’application de la réglementation adoptée par l’ACCOVAM. Prié de qualifier les relations juridiques qui existaient entre l’équipe Auger‑Massicolli et la FBN, le procureur de monsieur Massicolli a indiqué qu’il voyait un contrat de service et de location de locaux et de personnel en vertu duquel la FBN fournissait ces services ou biens d'abord à monsieur Massicolli, puis, à partir de mai 2003, à l'équipe Auger‑Massicolli. Les adjointes de monsieur Massicolli et celles de l’équipe Auger‑Massicolli étaient les siennes ou celles de l'équipe et non celles de la FBN. Si la FBN versait des bonis à ses adjointes, c’était en raison de l’entente de service liant monsieur Massicolli et l'équipe Auger‑Massicolli à la FBN. Ainsi, c'est l'équipe Auger‑Massicolli, une société en participation, qui exploitait une entreprise de courtage en valeurs mobilières. C'est elle qui fournissait au client un service de conseils en placement et de planification financière, en vertu d'un contrat de service conclu entre elle et le client.

 

[46]         L’exécution de l’achat et de la vente des valeurs mobilières pour le compte des clients d’Auger‑Massicolli était faite par la FBN en vertu d’un mandat consenti par le client à la FBN. Quant à la conservation du portefeuille des clients servis par l'équipe Auger‑Massicolli, l’avocat y voyait une sorte de contrat de dépôt, sans doute entre le client et la FBN.

 

[47]         Pour justifier l’existence des règles de l’ACCOVAM, le procureur de monsieur Massicolli a beaucoup insisté sur l’article 2100 du Code civil, qui édicte ce qui suit :

 

2100.   L'entrepreneur et le prestataire de services sont tenus d'agir au mieux des intérêts de leur client, avec prudence et diligence. Ils sont aussi tenus, suivant la nature de l'ouvrage à réaliser ou du service à fournir, d'agir conformément aux usages et règles de leur art, et de s'assurer, le cas échéant, que l'ouvrage réalisé ou le service fourni est conforme au contrat.

 

 

Lorsqu'ils sont tenus du résultat, ils ne peuvent se dégager de leur responsabilité qu'en prouvant la force majeure.

[Je souligne.]

2100.             The contractor and the provider of services are bound to act in the best interests of their client, with prudence and diligence. Depending on the nature of the work to be carried out or the service to be provided, they are also bound to act in accordance with usual practice and the rules of art, and, where applicable, to ensure that the work done or service provided is in conformity with the contract.

 

Where they are bound to produce results, they may not be relieved from liability except by proving superior force.

 

[48]         Pour démontrer que monsieur Massicolli était un travailleur autonome, son avocat a évoqué l’absence d’horaire, le fait qu’il devait constituer sa propre clientèle, le fait que la clientèle avait en grande partie suivi messieurs Massicolli et Auger chez Valeurs mobilières Desjardins, le fait qu’ils devaient supporter 100 % des pertes résultant d’un placement et le fait qu’ils se comportaient comme des entrepreneurs lorsqu’ils engageaient des dépenses ‑ comme le salaire des adjointes ‑ pour gagner leurs revenus. Il a aussi évoqué l’article 1308 du Code civil en ce qui a trait à l’administration des biens d’autrui[26].

 

[49]         L’avocat de monsieur Massicolli a assimilé le rôle du la FBN à celui de courtier remisier. Il a cité également le paragraphe 105 de mon article (cité dans l'affaire Tambeau, précitée), notamment la page 2:67 :

 

[105]    Une autre preuve directe de l’exercice du pouvoir de direction d’un employeur pourrait être celle établissant que le payeur forme le travailleur, à moins que la formation ne porte que sur la connaissance des produits à vendre120. L’imposition de règles de conduite ou de comportement constitue aussi une preuve directe, sauf si les règles correspondent à des normes applicables peu importe le statut du travailleur, notamment des normes légales.121

__________________________

120 Sarrazin c. Canada (M.R.N.), [1997] A.C.I. no 320 (QL), par. 10 et 13 (attrapeurs de poulets dans les poulaillers des producteurs : prestataires); Services Barbara‑Rourke, précité (note 115), par. 44; Yunes c. Garland Canada Inc., [2004] J.Q. no 8434 (QL)(C.S. Qué.), par. 17 (démarcheur : prestataire); Services de santé Marleen Tassé, précité (note 31), par. 30, 74 et 87; Desrochers, précité (note 116), par. 24 à 26.

 

121Charbonneau, précité (note 4), par. 7 et 11; Dr Denis Paquette, précité (note 99), par. 33 (no 8); Services de santé Marleen Tassé, précité (note 31), par. 16, 25, 63; Neblina Spa Enr., précité (note 95), par. 5, 14, 16; Ménard, précité (note 98), par. 8.

 

•   Réplique

 

[50]         En réplique, l'avocat de la FBN a soutenu que l’arrêt Combined Insurance n’était pas applicable ici en raison de différences importantes quant aux faits. Il a notamment mentionné les faits énoncés au paragraphe 7 de l’arrêt, en particulier le fait que la travailleuse dans Combined Insurance agissait pour le payeur d’une façon non exclusive, le fait que la travailleuse avait toute latitude relativement aux choix des personnes à qui présenter des propositions d’assurance et le fait qu’elle devait détenir à ses frais une police d’assurance appropriée couvrant à sa responsabilité civile personnelle.

 

[51]         Il a aussi fait valoir que la qualification des relations juridiques proposée par le procureur de monsieur Massicolli était complexe alors qu’en réalité la situation était beaucoup plus simple. Les clients de monsieur Massicolli et, par la suite, ceux de l’équipe Auger‑Massicolli, étaient des clients de la FBN. Le contrat de service était intervenu entre ces clients et la FBN. La relation contractuelle entre monsieur Massicolli et la FBN était celle résultant d’un contrat de travail. C’est en raison du fait que monsieur Massicolli était son employé qu’elle avait le droit d’exercer un contrôle serré sur l’exécution de ses tâches de conseiller en placement et de représentant inscrit.

 

[52]         L’avocat de la FBN a fait les commentaires suivants sur les critères retenus par son confrère pour conclure au statut de travailleur autonome. En ce qui a trait à l’horaire, il a rappelé que monsieur Massicolli était une personne qui arrivait très tôt au travail et repartait très tard. Il allait au-delà des normes de la FBN. C’est pour cette raison que peu de contrôle a été exercé sur son horaire. En ce qui a trait au recrutement de clients, il a rappelé que chaque ouverture de compte devait être approuvée par la FBN. Il a aussi rappelé que toutes les opérations sur les comptes des clients étaient contrôlées de façon quotidienne ou mensuelle par la FBN. Selon lui, les normes de la FBN constituaient un ensemble de règles relatives à la façon de faire le travail. Le fait que les représentants avaient une certaine latitude pour constituer leur clientèle et déterminer le créneau dans lequel ils voulaient exercer leurs activités ne faisait pas perdre à la FBN son droit de contrôler le travail de ses conseillers en placement à l’égard de cette clientèle. En ce qui a trait au statut de mandataire prévu au Statut 39, il a rappelé que, selon le Statut 2, les membres de l’ACCOVAM ainsi que leurs employés devaient s’engager à se conformer aux statuts, aux règlements, aux ordonnances et aux principes directeurs et que lorsqu’une personne exerçait à titre de mandataire une activité reliée aux valeurs mobilières, le membre était responsable de la conduite du mandataire et devait surveiller ses actes. Finalement, le contrat de mandat devait avoir été approuvé par écrit par l’ACCOVAM en vertu de l’alinéa 39.4 n) du Statut 39, ce qui ne s’est pas fait ici.

 

Analyse

 

[53]         Je suis d’accord quant à l’exposé présenté par l’avocat de la FBN. J’aimerais toutefois ajouter les commentaires suivants.

 

•      L'intention

 

[54]         Comme le point de départ pour déterminer si monsieur Massicolli occupait un emploi assurable est d’établir s'il était lié par un contrat de travail ou par un contrat de service, selon les dispositions du Code civil, il est important de constater comment les parties ont elles‑mêmes qualifié la nature de leurs rapports contractuels. Ici, la preuve de l'intention des parties est claire. Elle révèle que les parties désiraient conclure un contrat de travail, et non pas un contrat de service. En effet, monsieur Massicolli a signé une demande d’emploi le 26 août 1993 en vue de devenir conseiller en placement chez LBG, maintenant la FBN. Du point de vue de LBG, il est clair que monsieur Massicolli a été engagé comme employé salarié puisqu’on lui a assigné un numéro d’employé, soit le 11368, sur le formulaire de demande d’emploi. Sur ce formulaire, on parle d’emploi postulé et d’analyse de candidature.

 

[55]         Quant à monsieur Massicolli, il y indique son désir d’entrer au service de LBG et, dans l’éventualité où il serait engagé, il convient de se conformer aux règlements et aux pratiques en vigueur chez LBG. Il manifeste clairement ainsi son intention de subordonner son travail à la direction et au contrôle de LBG. Dans les conditions d’embauche, il est question non pas d’honoraires, mais plutôt de « salaire annuel » sous forme de commissions. Dans sa lettre de confirmation de l’engagement de monsieur Massicolli, monsieur Maurice Dupont, vice‑président et directeur de succursale, après avoir énoncé les différentes modalités de l’engagement, accueille avec plaisir monsieur Massicolli dans son équipe[27].

 

[56]         Un autre indice que LBG a engagé monsieur Massicolli comme salarié est le fait qu’elle lui a offert de nombreux avantages sociaux, entre autres, différentes assurances collectives, dont l’assurance‑vie, l’assurance invalidité, l’assurance médicale et l’assurance dentaire, dont les coûts étaient supportés généralement par LBG/FBN. Un des rares avantages sociaux, parmi ceux décrits dans le Guide de l’employé auxquels monsieur Massicolli n’avait pas droit était le régime de pension à prestations déterminées de la FBN. En outre, il avait droit à plusieurs rabais consentis par la FBN et la BNC en ce qui a trait aux différents services offerts par ces sociétés à leurs clients, même si monsieur Massicolli affirme ne pas s’être prévalu de ces privilèges. Je ne connais pas de clients qui offrent ce genre d’avantages sociaux à leurs fournisseurs (prestataires de services). Monsieur Massicolli n’en a nommé aucun, sauf Cascade. Quand je lui ai demandé de préciser s’ils étaient offerts à des fournisseurs, il a reconnu qu’ils étaient limités aux employés de Cascade.

 

[57]         En plus d’avoir eu l'intention d'engager monsieur Massicolli comme un salarié, LBG/FBN a continué à le considérer comme son salarié tout au cours de la période pertinente, puisque FBN a établi à l’égard des années 2003 et 2004 des feuillets de renseignements T4 faisant état des revenus d’emploi reçus de la FBN par monsieur Massicolli. En outre, lors de son départ le 1er octobre 2004, la FBN a établi un relevé d’emploi conformément à ses obligations en vertu de la Loi. Monsieur Massicolli n’a jamais contesté cette façon de procéder de la part de la FBN, sauf peut‑être lorsqu'il a signé son engagement à se conformer au Code d'éthique, puisqu’il a biffé « comme condition de mon emploi »[28].

 

[58]         Non seulement monsieur Massicolli a signé une demande en vue d’obtenir un emploi au sein de la FBN (à l’époque LBG) le 26 août 1993, mais il a aussi agi en conformité avec l’existence d’un contrat de travail en déclarant ses revenus reçus de la FBN comme des revenus tirés d’un emploi. (Voir notamment les déclarations de revenus pour 2003 et 2004 produites aux onglets 39 et 40 de la pièce INT‑1). Il a aussi déduit, à la ligne 229 de ses déclarations de revenus, les dépenses engagées pour gagner ce revenu d’emploi. À cet effet, il a rempli le formulaire T777 pour détailler ces dépenses. Il n’a aucunement préparé un état des résultats, ce qui est requis de toute personne qui exploite une entreprise. Le seul revenu d'entreprise déclaré ne s'élève qu'à 400 $ et se rapporte à une activité qui n'est pas le courtage.

 

•      Conduite des parties

 

[59]         Bien évidemment, il est possible que les deux parties au contrat, à savoir la FBN et monsieur Massicolli, se soient trompées sur la nature véritable de leur relation contractuelle. Il revient à la Cour de s’assurer que la conduite des parties lors de l’exécution du contrat était conforme à l’intention exprimée par elles lorsqu’elles ont convenu de former le contrat[29]. La Cour doit s’assurer notamment que toutes les conditions essentielles à l’existence d’un contrat de travail ont  été réunies. Ici, la condition qui peut poser problème est celle relative à l’existence d’un lien de subordination. Comme l’a souligné l'avocat de la FBN dans sa plaidoirie ‑ Code civil, jurisprudence et doctrine à l’appui ‑, le critère qui permet, au Québec, de distinguer entre un contrat de travail et un contrat de service ou d’entreprise est celui de l’existence d’un lien de subordination.

 

—   Lien de subordination

 

[60]         Il est rare qu’une preuve directe aussi précise qu'abondante soit présentée à la Cour pour démontrer l'existence d'un droit de direction et de contrôle sur le travail fourni par un travailleur. Généralement, il faut avoir recours à une preuve indirecte, fondée sur un ensemble d’indices d’encadrement, pour établir si un lien de subordination existe. Ici, la preuve directe du droit de direction et de contrôle et de l’exercice de ce droit provient en grande partie de la preuve documentaire, à savoir le Guide de l’employé, le Guide du conseiller en placement, le Code d'éthique et le Guide de conformité.

 

i)     Guide de l’employé

 

[61]         Dans le Guide de l'employé, on trouve à l'article 2.2 la directive traitant de la présence au travail, et à l’article 2.7, celle traitant du processus d’évaluation de rendement (pièce A‑2, volume 5, onglet 23) :

 

2.2 Présence au travail

 

En tant qu’employé, nous avons tous la responsabilité d’être présent au travail. L’absentéisme a des répercussions sur l’ensemble du service de l’employé. Lorsqu’un employé ne respecte pas son horaire ou est absent sans raison valable, son travail doit être effectué par ses collègues, ce qui crée une surcharge de travail et affecte la qualité du service rendu aux clients. La contribution quotidienne de l’employé est indispensable afin d’assurer la réalisation des opérations de son service.

 

2.7 Processus d’évaluation de rendement

 

La firme croit que les employés doivent recevoir régulièrement de la rétroaction sur la qualité de leur travail. L’évaluation du rendement est donc le processus par lequel le gestionnaire évalue la performance actuelle de l’employé en identifiant ses forces ainsi que les améliorations à apporter. Le processus permet également d’établir un plan d’action favorisant l’acquisition de compétences requises dans le cadre du travail et le développement professionnel.

 

Les objectifs spécifiques visés par le processus d’évaluation du rendement sont :

 

- Définir des critères de rendement clairs et mesurables pour les employés.

-Discuter franchement et ouvertement avec les employés :

            - de leur niveau actuel de rendement;

            -des progrès à réaliser pour atteindre des buts précis;

            -des problèmes actuels ou potentiels.

-Fournir aux employés et aux gestionnaires une occasion régulière de communiquer.

 

Chez FBN les évaluations sont effectuées entre le 1er octobre et le 15 novembre de chaque année et chez NBCN, elles sont effectuées tout au long de l’année, suivant un système basé sur l’anniversaire de la date d’embauche de chaque employé.

 

Tout employé qui n’a pas obtenu son évaluation de rendement est en droit de la demander à son supérieur immédiat.

[Je souligne.]

[62]         Lorsqu’un conseiller en placement s’absente, il doit s’assurer de trouver un remplaçant durant ses absences. Cela va de soi puisque les clients doivent être en mesure de joindre leurs conseillers en placement en tout temps pendant les heures normales d’ouverture. Monsieur Leclerc a confirmé qu’un conseiller en placement ne pouvait travailler pour deux maisons de courtage. Le Guide du conseiller en placement énonce la politique de la FBN en cas d’absence d’un conseiller en placement. Voici les deux premiers points de la directive en cette matière[30] (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P100‑11) :

 

§                                 Lors de l’absence d’un conseiller en placement, les transactions non sollicitées et les transactions sollicitées au préalable doivent être exécutées en premier lieu par un membre de l’équipe du conseiller en placement; soit un conseiller associé ou un adjoint en placement, lequel doit être enregistré dans la province de résidence du client.

 

§                                 Si aucun membre de l’équipe n’est disponible/enregistré dans la province de résidence du client ou si le conseiller en placement absent n’est pas associé à un conseiller en placement ou n’a pas d’adjoint en placement détenant les enregistrements appropriés, la transaction doit être exécutée par le directeur de la succursale ou son remplaçant désigné lequel doit également détenir les enregistrements appropriés.

[…]

[Je souligne.]

 

[63]         En ce qui a trait à l’horaire de monsieur Massicolli, monsieur Leclerc, le directeur de la succursale, a reconnu que les conseillers en placement n’avaient pas à pointer. En particulier, monsieur Massicolli jouissait d’une grande marge de manœuvre quant aux heures de travail. Par contre, comme tous les conseillers en placement, il devait se conformer à des normes de rendement minimales. Lors de son engagement, on lui avait écrit que « votre progrès sera contrôlé et révisé régulièrement ». Si monsieur Massicolli n’avait pas travaillé suffisamment d’heures durant les périodes normales d’ouverture de la succursale de la FBN à Pointe‑Claire, la première sanction aurait été une diminution des commissions[31]. Si un tel état de fait avait le moindrement perduré, la FBN aurait exercé un contrôle en exigeant une plus grande présence de la part de monsieur Massicolli. Si ce dernier ne s’était pas soumis à la directive d’être plus présent de façon à générer plus d’affaires la FBN, des mesures disciplinaires auraient pu être prises, mesures pouvant aller jusqu’au renvoi de monsieur Massicolli. Compte tenu du fait que monsieur Massicolli était un excellent producteur, qu’il générait de fortes commissions durant la période pertinente — 457 943 $ en 2003[32] —, il va sans dire qu’il n’était pas nécessaire que la FBN contrôle ses présences à la succursale de Pointe-Claire.

 

[64]         On trouve dans le Guide de l'employé cette directive traitant de la tenue vestimentaire :

 

2.4 Tenue vestimentaire

 

Chaque employé représente la firme auprès de l’ensemble de ses clients et de ses collègues de travail. C’est pourquoi le professionnalisme doit guider le choix de la tenue vestimentaire.

 

[je souligne.]

[65]         Monsieur Leclerc a confirmé qu’il n’a pas été nécessaire d’intervenir auprès de monsieur Massicolli parce que ce dernier avait une tenue vestimentaire exemplaire.

 

ii)    Guide du conseiller en placement 

 

[66]         La FBN a préparé un Guide du conseiller en placement dans lequel on trouve une description des diverses politiques et procédures de la société que les conseillers en placement doivent suivre. Comme il serait trop long de toutes les décrire, je devrai me limiter à n’en mentionner que quelques‑unes. Toutefois, on trouvera en Annexe 1 jointe à ces motifs la table des matières du guide pour en illustrer l’ampleur.

 

[67]         Sous la rubrique « Opération des comptes », on décrit la marche à suivre pour l’ouverture d’un « compte - détail » [33]. Monsieur Leclerc a bien précisé qu’on ne pouvait pas ouvrir un compte à la FBN sans le consentement de celle-ci. Pour ouvrir un compte au nom d’un client et pour que ce compte puisse être autorisé par le directeur de la succursale, le fichier client devait avoir été rempli par le conseiller lui-même et non pas par son adjoint. Le conseiller en placement doit bien connaître son client et le formulaire « fichier client » doit contenir toute l’information requise. Le conseiller doit obtenir une copie de pièces d’identité acceptables et non périmées pour tout nouveau client. Le guide précise quels sont les pièces d’identité et documents acceptables. Pour un particulier, ces pièces comprennent un passeport, un permis de conduire, une carte d’assurance maladie, etc. (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, G500‑01, page 5). Selon le guide, le conseiller doit s’assurer que toute la documentation requise est reçue et remise au personnel opérationnel de la succursale aux fins de vérification (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, G500-01, pages 3 et 13).

 

[68]         Le contrôle effectué par le directeur de succursale à l’égard de la conduite de ses conseillers en placement est une surveillance constante. Si le fichier client n’est pas complet, il doit refuser l’ouverture du compte. Si des modifications sont apportées au profil du client, notamment en ce qui a trait à son acceptation du niveau de risque, des révisions doivent être faites au fichier. En d’autres mots, si les objectifs de placement changent, ils doivent être notés dans le fichier client. Une fois le compte ouvert, le directeur de succursale continue de contrôler l’ensemble des opérations effectuées sur le compte. Cette vérification se fait quotidiennement, mensuellement et annuellement. Monsieur Leclerc a reconnu que les mesures adoptées par la FBN pouvaient être plus strictes que les normes édictées par l’ACCOVAM. Il a donné comme exemple les règles en matière d’achat sur marge. L'intérêt de la FBN découle du fait que, si elle accepte de hauts niveaux de risque, elle doit avoir le capital nécessaire pour respecter les normes de l’industrie.

 

[69]         Selon Monsieur Massicolli, l'équipe Auger‑Massicolli adoptait des pratiques d'ouverture de dossier plus strictes que les normes minimales de l'ACCOVAM et de la FBN. Notamment, on exigeait la signature du client pour compléter le fichier client. En outre, une adjointe de son équipe s'occupait de faire le travail de conformité, à savoir s'assurer que les décisions de placement prises par l'équipe étaient bien exécutées par le personnel de la FBN ; cela consistait notamment à vérifier les quantités et les prix pour les opérations d'achat et de vente qui devaient être effectuées. Même si tout cela est conforme à la réalité, cela ne change pas le fait que la FBN a donné des directives relatives à ces activités et a exercé un contrôle étroit sur celles‑ci.

 

[70]         Dans la section du Guide du conseiller en placement traitant des politiques sur le crédit (P100-01), on décrit à la page 4 les modalités de règlement relatives aux comptes au comptant ainsi que les critères d’intervention du Service du crédit[34]. Par exemple, le dixième jour ouvrable suivant la date de règlement, « [l]’employé du Service du crédit peut, s’il le juge nécessaire, procéder à la liquidation ou au dénouement de la transaction non réglée s’il n’a pas reçu confirmation du conseiller en placement avant 14 h que le règlement de la transaction a été effectué. Dans le cas d’une liquidation forcée ou d’un dénouement, aucune commission n’est créditée au conseiller en placement. » (Souligné dans l’original.) (Pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P100-01, page 4)[35].

 

[71]         On décrit également, dans la même section du guide, la politique pour récupérer les soldes débiteurs non garantis en ce qui a trait aux montants supérieurs à 500 $ mais inférieurs à 5 000 $. On y mentionne que le vingt-sixième jour suivant le défaut de règlement, l’employé du Service du crédit remet le dossier à une agence de recouvrement. Les frais de recouvrement, de 25 % des montants recouvrés, demeurent la responsabilité du conseiller en placement. Le guide indique que le conseiller en placement a le loisir d’utiliser la Cour des petites créances pour tout montant inférieur à 1 000 $.

 

[72]         En ce qui a trait aux montants supérieurs à 5 000 $, il y a intervention du contentieux de la FBN et, généralement, les frais de recouvrement pourront être partagés en parts égales entre la FBN et le conseiller en placement (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P100-01, page 24).

 

[73]         Dans la « section honoraires d’avocat, règlements et jugements impliquant la responsabilité des conseillers en placement », il est mentionné qu’à l’égard de plaintes jugées sérieuses et complexes les honoraires d’avocat externe seront facturés en parts égales au conseiller en placement visé par la plainte ou la poursuite et à la succursale dont relevait celui-ci au moment des faits litigieux. Par contre, tout règlement doit être payé par le conseiller en placement concerné, à moins de circonstances particulières. Les sommes en question sont remboursables à même les commissions du conseiller et, advenant son départ de la FBN, il demeure responsable de leur paiement peu importe les circonstances de son départ (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P160-01, pages 2 et 3, en vigueur le 30 août 2004).

 

[74]         Dans la section du Guide du conseiller en placement traitant des commissions payables par les clients, il est question des rabais de commission brute offerts aux clients. On y mentionne, à la page 2, qu’aucun rabais ne peut réduire la commission brute en deçà de la commission minimum sans pénalité pour le conseiller en placement, à moins que le directeur de succursale n’ait autorisé une telle réduction (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P100-02). Le directeur de succursale a la responsabilité de corriger tout comportement non conforme aux intérêts de la FBN et à l’esprit de la politique énoncée dans le guide.

 

[75]         Une autre section du guide traite des politiques en matière de publicité (section P100-09 du Guide du conseiller en placement). Dans l’introduction, on rappelle que les règles de l’industrie exigent que la publicité effectuée par la FBN ou par un de ses conseillers en placement doit être préalablement approuvée par un officier administrateur désigné. Le guide indique que le directeur de succursale a été mandaté à cet effet. On y mentionne également qu’en plus de l’approbation du directeur de succursale, certains types de publicité doivent également recevoir l’approbation du service de la conformité de la FBN. « En général, on vérifie si des faits pertinents ou des conditions ont été omis, si certaines affirmations ou prétentions sont exagérées, trompeuses ou injustifiées. Toute mention de taux ou de rendement doit être accompagnée d’un avis de déni de responsabilité et nous devons nous assurer que les titres ne figurent pas sur la liste des titres restreints de la firme. » (Pièce A‑2, volume 4, onglet 13, section P100-09, page 1 de 2.)

 

[76]         Il existe également dans le guide une politique relative aux communications avec des clients non-résidents vivant dans des paradis fiscaux. Cette politique est en vigueur depuis le 31 mars 2006. Quoique postérieure à la période pertinente, elle révèle le droit qu’a la FBN d’exercer un contrôle sur ses courtiers ou ses conseillers en placement. Notamment, il y est mentionné qu’il est interdit à un conseiller en placement d’effectuer des transactions par l’intermédiaire d’un autre courtier en valeurs mobilières ou d’une institution financière; toutes les transactions doivent être acheminées aux personnes autorisées du secteur de l’arbitrage (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, section P120‑10 du Guide du conseiller en placement, à la page 1). On y mentionne que l’objectif général poursuivi par cette politique est de favoriser une approche « proactive » visant à protéger l’intégrité et à sauvegarder l’image de la FBN tout en maintenant un haut niveau d’éthique dans les relations d’affaires avec les clients non-résidents. Le but est d’assurer le respect de la réglementation qui découle de la règle « Bien connaître son client », du règlement 1300 de l’ACCOVAM (identification de tous les propriétaires véritables), de la Loi sur le recyclage des produits de la criminalité et le financement des activités terroristes, et des règles de l’Internal Revenue Service. Parmi les mesures de contrôle adoptées par la FBN concernant le courrier électronique, on mentionne que le contenu des courriels et des documents transmis ou reçus sera balayé par un logiciel spécialisé afin d’identifier les communications écrites avec les endroits reconnus comme des paradis fiscaux (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, section P120-10, page 5).

 

iii)    Le Code d’éthique

 

[77]         En avril 2003, le président et chef de la direction de la FBN a présenté à ses employés un nouveau code d’éthique. Monsieur Leclerc a indiqué qu’il avait été adopté après la déconfiture des marchés; on peut penser notamment à la mauvaise publicité créée par les affaires Enron et Nortel.

 

[78]         Dans le Code d'éthique, le président de la FBN a indiqué qu’il est important que tous les employés lisent et comprennent parfaitement le Code d’éthique de façon à ce que les principes qui y sont énoncés deviennent leur « modus vivendi », qu’ils les guident dans leurs conseils et dans les gestes faits à l’égard de leurs clients, des autres personnes concernées et de leurs collègues. Le président mentionne que « [l]es lois et les règles établies par les organismes de réglementation du commerce des valeurs mobilières et les organismes d’autoréglementation décrivent avec précision la façon dont nous devons mener nos affaires; le code d’éthique traduit l’esprit dans lequel nous devons tous travailler pour assurer l’intégrité et la bonne réputation de notre entreprise. » (Pièce A‑2, volume 5, onglet 17, page 1 du Code d’éthique.) Le code précise que les employés doivent renouveler, chaque année, leur engagement de se conformer au Code d’éthique et à toute modification connexe, sous peine de perdre leur emploi. Toute dérogation au Code d’éthique pouvait donner lieu à des sanctions, y compris le renvoi motivé (pièce A‑2, volume 5, onglet 17, page 3 du Code d’éthique). Monsieur Massicolli a signé, le 12 septembre 2003, la formule d’engagement, l’engageant ainsi à respecter les règles du Code d’éthique et des Politiques de sécurité informatique. Il a toutefois rayé la mention « comme condition de mon emploi » (voir pièce A‑2, volume 5, onglet 22).

 

[79]         Le Code d’éthique contient de nombreuses règles à suivre, dont notamment, celles reliées à la confidentialité de l’information. Par exemple, on précise à la page 5 que les dossiers de chaque client doivent être maintenus dans la plus stricte confidentialité. Un employé ne peut bénéficier personnellement de la connaissance d’une information ou des affaires confidentielles d’un client ni permettre à une tierce personne de bénéficier de la connaissance d’une telle information confidentielle qu’il aura divulguée à cette personne.

 

[80]         Parmi les mesures ayant trait aux conflits d’intérêts, il est mentionné que les cadeaux et les divertissements offerts à l’employé ne doivent pas mettre ce dernier dans des situations compromettantes ni influencer les décisions qu’il prend dans l’exercice de ses fonctions chez la FBN (pièce A‑2, volume 5, onglet 17, page 6 du Code d’éthique). Tous les employés agissant à titre d’administrateur de sociétés ouvertes ou fermées doivent obtenir  les autorisations requises par la FBN avant d’accepter une telle fonction auprès d’une société autre que la FBN (pièce A‑2, volume 5, onglet 17, page 6 du Code d’éthique).

 

[81]         La FBN a établi des politiques relatives aux transactions avantageuses. Une transaction avantageuse suppose une forte probabilité de gain et un certain degré d’exclusivité par rapport au droit de participation. L’employé est tenu d’informer immédiatement son supérieur immédiat de tout événement pouvant engendrer un conflit d’intérêts entre l’employé et ses clients ou la FBN afin que des mesures soient prises pour résoudre le conflit.

 

iv)   Guide de conformité

 

[82]         Les directeurs de succursale doivent, dans le cadre de l’exercice de leurs fonctions, appliquer les directives du Guide de conformité à l’intention des directeurs de succursale (Guide conformité)[36]. Ce guide se veut un complément au Manuel de conformité, dont le but est de présenter en profondeur la législation à laquelle un directeur de succursale doit se conformer et de le guider dans ses différentes tâches quotidiennes. Le Principe directeur no 2 de l’ACCOVAM fixe des normes minimales pour la surveillance des comptes au détail. Ce principe directeur n’empêche pas un membre comme la FBN d’établir des normes plus strictes de surveillance. Ainsi, la FBN peut donner des directives à ses conseillers en placement indiquant les restrictions établies à l’égard de certains titres qu’ils ne peuvent négocier. La liste de ces titres peut venir du contentieux de la FBN ou du secteur du financement de celle-ci, cette liste étant préparée par ces services.

 

[83]         Parmi d'autres mesures de surveillance, il y a celle relative à l’ouverture d’un compte pour une personne résidant à l’étranger (excluant les États-Unis). On mentionne expressément à ce sujet que le conseiller en placement doit obtenir l’approbation du Service de la conformité pour l’ouverture d’un tel compte[37]. Le Guide de conformité décrit les mesures de contrôle des comptes que prend, quotidiennement et mensuellement, le directeur de succursale, ainsi que les points à vérifier; soit, notamment, la concentration excessive des titres, les opérations non convenables à un client, le nombre excessif d’opérations, les conflits d’intérêts en ce qui concerne les activités d’un conseiller en placement et les opérations d’un client, les stratégies de négociation inadéquates ou bien à risque élevé, la détérioration de la qualité du portefeuille d’un client, les appels de marge non réglés.

 

[84]         Font l’objet d’un examen mensuel les relevés mensuels des comptes de clients ayant généré 1 500 $[38] et plus de commissions, les relevés mensuels des employés, les relevés des comptes discrétionnaires et les relevés des comptes ayant une dispense de courrier. Le Guide de conformité spécifie les points de vérification et les mesures à prendre. Par exemple, si le directeur de succursale constate un volume excessif, c'est-à-dire que le ratio des commissions brutes générées par le conseiller excède 1,5 % des biens que le conseiller gère et qu’un comportement inapproprié est constaté, des mesures disciplinaires peuvent être envisagées (voir pièce A‑2, volume 5, onglet 14, pages 31 et 36 du Guide de conformité).

 

[85]         Monsieur Massicolli soutient que peu de surveillance a été exercé à l'égard de son travail puisque monsieur Auger et lui faisaient eux-mêmes le travail de conformité par l’intermédiaire de l’une de leurs adjointes, dont la tâche consistait justement à faire ce travail. Pourtant, dans une lettre publicitaire vantant les mérites de l’équipe Auger‑Massicolli et décrivant le « Portefeuille Panier MWA », monsieur Luc Paiement, président responsable des services aux particuliers chez la FBN, prend soin de préciser que ce fonds géré par monsieur Auger est supervisé par le service de gestion de portefeuille de la FBN. Il s’agit d’un comité spécial qui se réunit tous les trois mois pour confirmer que les placements effectués demeurent en tout temps cohérents et « en droite ligne avec » les objectifs financiers du « Portefeuille Panier MWA » (voir pièce INT‑1, onglet 32, page 108).

 

[86]         Le Guide de conformité traite également des règles de l’ACCOVAM établissant l’obligation pour les membres du personnel inscrit de participer à un programme de formation continue afin de pouvoir maintenir leur enregistrement[39]. À cet égard, le directeur de succursale a le devoir de suivre le cheminement professionnel de ses conseillers en placement et du personnel inscrit dans sa succursale. Ainsi, il doit suivre, voire même guider, la progression de ses conseillers en placement et des autres membres du personnel inscrit dans leur formation professionnelle. Il doit également s’assurer que les délais accordés pour la réussite des cours de formation continue sont respectés (pièce A‑2, volume 5, onglet 14, page 85 du Guide de conformité).

 

[87]         Finalement, le paragraphe 3.9 traitant des pratiques de négociation contient des directives précises sur la façon de faire, dont, notamment, une interdiction de solliciter des ordres de clients sur la base de rumeurs : « FBN interdit à ses employés de propager les rumeurs de nature sensationnelle susceptibles d’affecter les conditions du marché. » (Pièce A‑2, volume 5, onglet 14, page 91 du Guide de conformité.)

 

[88]         Dans sa conclusion, le Guide de conformité énumère les objectifs que vise à atteindre la surveillance efficace exercée par la succursale. On peut y lire à ce propos ce qui suit: « une surveillance efficace s’avère une bonne pratique commerciale qui se traduit par l’acquisition et le maintien de la bonne réputation de la succursale à la fois aux yeux des clients et des employés » (pièce A‑2, volume 5, onglet 14, page 93 du Guide de conformité).

 

[89]         Monsieur Leclerc a indiqué que, si un conseiller en placement ne respectait pas les directives données par la FBN et que le conseiller contrevenait à ces directives, l’intervention de la FBN pouvait aller d’un avis écrit jusqu’à une mesure disciplinaire et même jusqu’au congédiement. Monsieur Leclerc a rappelé que la FBN a intérêt à s’assurer d’un grand niveau de confiance auprès de sa clientèle puisqu’il y va de sa réputation.

 

v)       Existence du cadre réglementaire

 

[90]         Le fait que la FBN était tenue en vertu des règles de réglementation de l’ACCOVAM d’exercer une supervision très étroite sur ses salariés ne fait pas en sorte que ces salariés ne peuvent pas être considérés comme tels et que l’on doit exclure ces règles aux fins de la détermination de la nature véritable de la relation contractuelle de la FBN avec son personnel. Compte tenu de l’importance de la bonne gestion des marchés financiers au Québec et dans le reste du Canada, et compte tenu du fait que l’adoption de pratiques abusives ou frauduleuses par certaines maisons de courtage aurait de sérieuses répercussions sur la réputation de l'ensemble des maisons de courtage, notamment la diminution de la confiance des investisseurs dans l’industrie du courtage, il va de soi que les différentes maisons de courtage se sont regroupées au sein de l’ACCOVAM pour adopter des règles strictes de réglementation et que la Commission des valeurs mobilières a jugé approprié en 1982 de confier à cet organisme l’administration et la réglementation des activités des courtiers en valeurs mobilières.

 

[91]         L’analyse des règles de l’ACCOVAM n’a révélé aucune obligation de la part d’un membre de cette association d’exercer une supervision et un contrôle sur les entreprises exploitées par d’autres courtiers, sauf s’il s’agit d’un mandataire qui n’est pas constitué en société par actions (« incorporated salesperson »). La FBN doit exercer un contrôle sur sa propre entreprise et, en particulier, sur son propre personnel, notamment ses conseillers en placement, par l’intermédiaire desquels la FBN exploite son entreprise de prestation de services de conseils et de courtage. À la lecture de ces règles, on constate qu’elles visent les « membres et leurs associés, leurs administrateurs, leurs dirigeants et leurs employés »[40]. À cette liste, certaines des règles de l’ACCOVAM ajoutent parfois les mandataires du membre[41]. Dans ce dernier cas, le membre doit être « responsable de la conduite du mandataire et […] surveille[r] ses agissements relativement à l’entreprise » (article 39.4 c)) des Statuts) et être « responsable envers les clients […] des actes et des omissions du mandataire relativement à l’entreprise du membre, comme si le mandataire était [un] employé […] » (article 39.4 d) des Statuts). Rappelons qu’un mandataire exerce une activité pour le compte du mandant. Il va sans dire qu’un membre est tenu d’exercer un contrôle sur son mandataire[42].

 

[92]         Rappelons également que monsieur Massicolli a affirmé qu’il n’agissait pas comme mandataire de la FBN. C’est plutôt la FBN qui agissait, selon lui, comme son mandataire lorsqu’elle établissait des factures à l’intention de ses clients, recouvrait les comptes impayés et payait la rémunération de ses adjointes.

 

—   Entreprise de la FBN et non de monsieur Massicolli

 

[93]         L'ensemble de la preuve sur ce point révèle amplement que l’entreprise de courtage, y compris la prestation de services de conseils en matière de placement, était celle de la FBN. Rappelons également que les parties avaient convenu que l’entreprise exploitée par la FBN était une entreprise de services de courtage consistant notamment à offrir aux particuliers des services de conseils de placement par l’entremise de conseillers en placement.

 

[94]         Même si, de façon familière, on pouvait utiliser dans la correspondance et dans tout autre échange de communications l’expression « les clients de monsieur Massicolli » ou « vos clients », je n’ai aucun doute que les clients en question étaient ceux de la FBN, même de ceux qui ont été sollicités directement par monsieur Massicolli et ceux qui ont été transférés à un autre conseiller en placement de la FBN pour une contrepartie de 25 000 $[43]. Étant un salarié de la FBN et agissant, par conséquent, au nom et pour le compte de la FBN, monsieur Massicolli sollicitait des clients potentiels au bénéfice de la FBN. Quand les clients acceptaient de « faire affaires » avec monsieur Massicolli, ce dernier ouvrait un compte à la FBN en se soumettant aux normes strictes de la FBN en matière d’ouverture de nouveaux comptes. Ces clients devenaient juridiquement des clients de la FBN. D'ailleurs, lorsque monsieur Massicolli a mis fin, en mai 2004, à un contrat de service conclu avec un de « ses » clients, il l'a remercié de « la confiance que vous avez témoignée à la [FBN] tout au long de ces années ».

 

[95]         Lorsqu’ils ont quitté la FBN en octobre 2004 pour les Valeurs mobilières Desjardins, ont reconnu messieurs Auger et Massicolli, ils n’avaient pas pu apporter avec eux les dossiers de « leurs » clients. Ils reconnaissaient ainsi, à tout le moins implicitement, que ces clients appartenaient à la FBN. Il a fallu que les clients demandent eux‑mêmes à la FBN de transférer une copie de leur dossier et tout leur portefeuille, comme cela était leur droit, pour que l’équipe Auger‑Massicolli puisse continuer à leur fournir leurs services à l’établissement de leur nouvel employeur[44].

 

[96]         S'il est vrai que monsieur Massicolli jouissait d’une certaine marge de manœuvre quant à la façon d’exécuter son travail – ce qui se traduisait notamment par le choix de s’associer avec monsieur Auger et d’adopter un modèle d’affaires correspondant à celui de la gestion discrétionnaire de portefeuilles confiés par des entrepreneurs du Québec ‑, de nombreuses autorisations par des dirigeants de la FBN étaient nécessaires. Le fait que monsieur Auger possédait l’expérience et les qualifications nécessaires pour gérer des portefeuilles a fait que monsieur Massicolli a pu poursuivre son approche consistant à privilégier un modèle d’affaires axé sur les conseils de placement pour lesquels ils recevaient des honoraires plutôt que des commissions. Par contre, lorsque venait le temps d’organiser une campagne de marketing ou d’envoyer des lettres publicitaires sur une grande échelle, il fallait nécessairement obtenir l’autorisation de la FBN. Il est tout à fait normal que la FBN ait eu son mot à dire relativement à ces choses, non seulement du fait qu'il s'agissait de ses clients et en raison de l’existence de règles établies par l’ACCOVAM, mais également du fait que la réputation de son entreprise était en jeu. Il était tout à fait justifié qu’elle exerce un contrôle sur la façon dont son entreprise était exploitée.

 

[97]         Pour établir qu’ils exploitaient une entreprise comme travailleurs autonomes, monsieur Massicolli a fait témoigner monsieur Auger. Ce dernier a affirmé avoir élaboré un plan d’affaires, sans qu’il n’y ait d’approbation à obtenir de la FBN. À titre d’exemple, il a mentionné sa grille d’honoraires pour les services de gestion offerts dans le « Panier MWA ». Lorsque je l’ai interrogé, monsieur Auger a reconnu que la grille d’honoraires était essentiellement semblable à celle de la FBN, sauf que dans leur cas ils offraient beaucoup plus de services pour les mêmes honoraires. En effet, il est indiqué dans la brochure publicitaire de l’équipe Auger‑Massicolli que leurs honoraires de gestion comprennent la gestion de portefeuille, les conseils financiers, l’administration des comptes, l’accompagnement du client dans ses rencontres avec ses collaborateurs, tels que les comptables, les fiscalistes, les avocats, les banquiers, les assureurs et d’autres professionnels (pièce INT‑1, onglet 32, à la page 106).

 

[98]         Il est vrai qu’en vertu de l’entente contractuelle entre la FBN et monsieur Massicolli, ce dernier était responsable de toute perte subie par la  FBN par suite du non-recouvrement d’honoraires, ou de toute autre perte pouvant résulter du placement effectué par un client. Il est vrai également que plusieurs dépenses devaient être engagées par monsieur Massicolli pour gagner son revenu de commissions; ces dépenses comprenaient notamment les suivantes : le salaire de certaines adjointes administratives additionnelles que monsieur Massicolli ou l’équipe Auger‑Massicolli avaient jugé utile d’avoir; le coût d’achat de certain matériel, notamment de matériel électronique; le coût d’un service de données financières, notamment le Bloomberg. L’existence de l’entente ou des modalités en question n’est pas incompatible avec l’existence d’un contrat de travail. On n’a qu’à penser aux caissières des chaînes d’alimentation et d’autres commerces de vente au détail, qui sont souvent tenues responsables des écarts de caisse, aux représentants commerciaux payés à la commission qui supportent eux-mêmes leurs frais de transport, et aux travailleurs de la construction qui fournissent leurs propres petits outils.

 

[99]         Il faut tenir compte du fait que la FBN avait adopté un modèle d’affaires en vertu duquel ses conseillers en placement recevaient environ 50 % des commissions brutes recueillies par la FBN en contrepartie de la fourniture de leurs services de courtage et de conseils en placement. La FBN aurait pu tout aussi bien supporter toutes les dépenses et rémunérer ses conseillers en placement en leur versant un salaire fixe avec boni ou en leur payant un pourcentage beaucoup moindre que les 50 % des commissions brutes. Dans un tel contexte, il est tout à fait compréhensible que la FBN ait jugé que certaines dépenses devaient être supportées par le conseiller en placement s’il devait avoir droit à un taux de commission de 50 %.

 

[100]     À mon avis, la lettre du 24 janvier 2004 exprimant la frustration de l'équipe Auger-Massicolli reflète le fait que messieurs Auger et Massicolli ne voulaient plus se comporter comme les salariés (à commissions) qu’ils étaient, mais voulaient plutôt agir comme des personnes travaillant de façon indépendante de la FBN, ce qui n’était pas permis en vertu des règles de l’ACCOVAM, à moins qu’ils ne deviennent eux-mêmes membres de l’ACCOVAM.

 

[101]     Certains arguments de l'avocat de monsieur Massicolli méritent des commentaires. Lors de sa plaidoirie, le procureur de monsieur Massicolli a reconnu que le contrat intervenu lors de l'engagement de monsieur Massicolli pouvait être un contrat de travail. Par contre, ce contrat avait été transformé par la suite en contrat de service. Quand je lui ai demandé à quel moment cela se serait produit, il a dit initialement : « À la fin de la période de neuf mois, période durant laquelle la FBN versait un salaire de base de 15 000 $ au cours des neuf premiers mois ». Prié de préciser si c'est bien à la fin de cette période de neuf mois que le contrat de service a pu prendre naissance, l'avocat a acquiescé. Or, quand je lui ai demandé de préciser qu'est‑ce qui avait changé dans la conduite des activités de monsieur Massicolli qui pouvait justifier une telle conclusion, l’avocat de monsieur Massicolli a été incapable de le faire. Comme je l'avais mentionné, seulement les modalités de la rémunération avaient changé. Par la suite, l’avocat a dit que le changement était survenu plus tard, lorsque le modèle d'affaires adopté par messieurs Auger et Massicolli avait été changé et qu'ils avaient adopté le modèle de la gestion de portefeuille.

 

[102]     Selon la façon de voir de monsieur Massicolli, son entreprise consistait à offrir des services de conseils en matière de placement et cette entreprise était régie par l’ACCOVAM. Contre‑interrogé par le procureur de la FBN au sujet des exigences de capital minimum énoncées au Statut 17 de l’ACCOVAM, monsieur Massicolli a répondu que c’était la FBN, son fournisseur de services, qui devait avoir ce capital minimum (voir pièce A‑2, onglet 17, Statut 17). Selon l’article 1 de ce statut, tous les membres « doivent avoir et maintenir en tout temps un capital régularisé en fonction du risque supérieur à zéro calculé conformément au Formulaire 1 et aux exigences que le conseil d’administration peut au besoin prescrire par règlement ».

 

[103]     L’interprétation des faits que propose l'avocat de monsieur Massicolli n'est pas conciliable avec la conduite des parties, puisque le payeur, la FBN, a continué à préparer des feuillets d'information T4 et des formulaires T2200, ce qui indique clairement que la FBN considérait monsieur Massicolli comme son employé. D'ailleurs, monsieur Massicolli a même préparé ses déclarations de revenu en inscrivant ses revenus de commission payés par la FBN, ainsi que ses honoraires, comme des revenus tirés d'un emploi.

 

[104]     Le fait que monsieur Massicolli a formé, avec monsieur Auger, une société en participation n'est pas incompatible avec l'existence d'un contrat de travail. Il peut y avoir un contrat de société même si les parties à un tel contrat n'exploitent pas une entreprise. En effet, l'article 2186 du Code civil définit un contrat de société comme étant « celui par lequel les parties conviennent, dans un esprit de collaboration, d'exercer une activité, incluant celle d'exploiter une entreprise, d'y contribuer par la mise en commun de biens, de connaissances ou d'activités et de partager entre elles les bénéfices pécuniaires qui en résultent. » (Je souligne.) Par conséquent, il est possible d'avoir une société composée de personnes qui recherchent la réalisation d'un bénéfice pécuniaire à partager entre elles sans que l'activité qu’elles exercent constitue l'exploitation d’une entreprise. Il pourrait y avoir ainsi, il me semble, une activité qui pourrait consister à fournir des services en tant que salarié ou à faire la location de biens.

 

[105]     En résumé, la preuve a amplement démontré qu'il existait un lien de subordination entre monsieur Massicolli et la FBN durant la période pertinente. Le contrat le liant à la FBN était un contrat de travail et non de service.

 

[106]      Pour tous ces motifs, l'appel de la FBN est accueilli et la décision rendue par le ministre est infirmée. Monsieur Carlo Massicolli occupait un emploi assurable auprès de la FBN durant la période du 1er janvier 2003 au 1er octobre 2004.

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour de janvier 2009.

 

 

« Pierre Archambault »

Juge Archambault


Annexe 1

 


 

 

 


Annexe 2



Annexe 3


Annexe 4



RÉFÉRENCE :                                  2008 CCI 624

 

Nº DU DOSSIER DE LA COUR :      2008-224(EI)

 

INTITULÉ DE LA CAUSE :              FINANCIÈRE BANQUE NATIONALE INC. c. LE MINISTRE DU REVENU NATIONAL ET CARLO MASSICOLLI

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Montréal (Québec)

 

DATES DE L’AUDIENCE :               les 17 juillet et 1er août 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT PAR :       L'honorable juge Pierre Archambault

 

DATE DU JUGEMENT :                   le 16 janvier 2009

 

COMPARUTIONS:

Avocats de l'appelante :

Me Wilfrid Lefebvre

Me Vincent Dionne

Avocat de l'intimé :

Me Mounes Ayadi

Avocats pour l'intervenant:

Me Serge Racine

Me Stéphane Larochelle

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :  

       Pour l'appelante :                        

                     Nom :                            Me Wilfrid Lefebvre

                                                          Me Vincent Dionne  

                 Cabinet :                           Ogilvy Renault, S.E.N.C.R.L.

                                                          Montréal (Québec)

       Pour l’intervenant :

                     Nom :                            Me Stéphane Larochelle

                 Cabinet :                           Séguin Racine, Avocats Ltée

                                                          Laval (Québec)

 

       Pour l’intimé :                             John H. Sims, c.r.

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1]           Comme monsieur Massicolli a cessé son emploi chez la FBN le 1er octobre 2004 (pièce A‑2, onglet 9), il serait plus précis de définir la période pertinente comme celle du 1er janvier 2003 au 1er octobre 2004.

[2]           Lors de son témoignage, monsieur Massicolli s'est déclaré être un représentant inscrit auprès de l’ACCOVAM. Toutes les notes infrapaginales afférentes à l'entente partielle sur les faits sont les miennes.

[3]           Monsieur Martin Leclerc, le directeur de la Succursale, a indiqué lors de son témoignage qu’il n’avait aucune connaissance de l’existence d’une société de personnes en participation formée par l’équipe Auger-Massicolli. Par conséquent, il n’a pas consenti à cette forme d’association ni ne l’a acceptée. Lorsque deux conseillers décident de faire équipe, un formulaire de demande d’autorisation doit être signé non seulement par eux, mais aussi par le directeur de la Succursale et le premier vice‑président. (Pièce INT‑1, onglet 10.)

[4]           Monsieur Massicolli a confirmé que la société en participation n’avait pas été enregistrée comme doivent l'être les sociétés en nom collectif.

[5]           Pour faciliter la compréhension de cette entente sur les faits, j'ai inversé l'ordre des paragraphes 22 et 23.

[6]           Les actionnaires de Les Placements Sydwood inc. étaient messieurs Auger et Massicolli et/ou des membres de leur famille. Comme une redevance était versée pour l’utilisation de ces marques de commerce, on peut déceler dans la démarche des deux conseillers en placement des considérations de planification fiscale et patrimoniale. En d’autres mots, il s’agissait là d’un mécanisme tout à fait usuel de fractionnement des revenus.

[7]           Pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P100 03, page 1 de 7, en vigueur le 1er août 2005. Même si ce document vise une période postérieure à la période pertinente, je crois qu'il décrit bien la situation telle qu'elle existait durant la période pertinente. Ce commentaire s'applique, de façon générale, à tout document semblable cité dans ces motifs.

[8]           Pièce A‑2, volume 4, onglet 13, P100 03, page 7 de 7, en vigueur le 1er août 2005, Annexe 1.

[9]           Il s'agit de l'ajustement prévu à la lettre B du Sommaire des revenus mensuels. Voir également la pièce INT‑1, onglet 8, page 21.

[10]          À la partie V du Guide de l'employé, traitant des congés, il est indiqué expressément que cette partie ne s’applique pas aux employés rémunérés uniquement à commission.

[11]          Voir le par. 75 de ces motifs, qui traite de cette règle du guide.

[12]          Dans sa lettre du 14 mai 2004 adressée à un de ses clients, monsieur Massicolli constate qu’il serait préférable de mettre fin à leur partenariat d’affaires étant donné que le modèle d’affaires prôné par Auger‑Massicolli ne répond pas aux besoins financiers de ce client. En conclusion, il écrit : « En terminant, j’aimerais vous remercier de la confiance que vous avez témoignée à la Financière Banque Nationale tout au long de ces années » (pièce A‑2, volume 5, onglet 20).

[13]          Au même moment, soit le 27 janvier 2004, monsieur Massicolli demande qu’il soit nommé vice‑président de la FBN, et confirmation de sa nomination à ce poste lui est communiquée le 29 janvier 2004 (pièce A‑2, volume 5, onglet 32).

[14]          Le directeur de succursale de monsieur Massicolli a reconnu qu’il n’est pas habituel qu’un conseiller en placement fasse son travail à partir de sa résidence.

[15]          Les revenus tirés d'un emploi de monsieur Massicolli pour 2003 s'élèvent à 457 943 $. De ce montant, il a déduit des dépenses d'emploi s'élevant à 187 469 $. Les quatre postes de dépenses les plus importants sont des frais « autres » s'élevant à 134 697 $ (que monsieur Massicolli a décrits comme des frais pour l'obtention d'information en placement), des frais de voiture de 13 298 $, des frais de repas et boissons et frais de représentation de 19 658 $ (dont 50 % sont admissibles) et le salaire de 9 522 $ payé à un adjoint ou à un remplaçant (pièce INT‑1, onglet 39, pages 136, 160 et 161).

[16]          À moins que le contexte n'indique le contraire, toute référence au courtage dans ces motifs a trait au courtage en valeurs mobilières.

[17]          Le statut numéro 2 de l’ACCOVAM porte sur la qualité de membre. On y définit un membre en disant ce qui suit :

Toute personne physique, une firme ou une société par actions peut faire une demande d'adhésion si, (a) dans le cas d'une personne physique, il ou elle est résident du Canada; dans le cas d'une firme, elle est constituée en vertu des lois d'une des provinces ou d'un des territoires canadiens et, dans le cas d'une société par actions, elle est constituée en société en vertu des lois du Canada ou de l'une de ses provinces [...]; (c) le candidat et ses administrateurs, dirigeants, associés, investisseurs et employés, ainsi que ses sociétés de portefeuille, personnes de son groupe et sociétés reliées le cas échéant, s'engagent à se conformer aux Statuts [...]  de [l’ACCOVAM].

 

Je conclus de cette énumération qu'une société de personnes peut devenir membre de l’ACCOVAM et que, lorsqu'on utilise le terme « associés » (« partners » dans la version anglaise), ce dont il est question c’est les membres d’une telle société de personnes.

[18]          Pièce A‑2, volume 2, onglet 12.

 

[19]          Voir pièce A‑2, volume 2, onglet 12, S. XXXIX du Manuel de réglementation de l’ACCOVAM.

[20]          Dans la version anglaise, on écrit : « but may not be that of an incorporated salesperson ». Je comprends de cet énoncé qu'un « représentant » ne peut être constitué en société par actions alors que le membre peut l'être.

[21]          Je comprends que le Statut 39 vise à imposer une obligation de surveillance à l’égard d’une personne qui exploite une « entreprise reliée aux valeurs mobilières », selon la définition à l’article 39.2, si elle ne le fait qu'à titre d'employé ou de mandataire « au nom du membre », à savoir pour le compte du membre.

[22]          À l’article 9 du règlement 1300 de l’ACCOVAM, on indique que :

La demande d’approbation à titre de gestionnaire de portefeuille doit être présentée à l’Association et peut être accordée si le candidat :

(a)    a satisfait aux exigences relatives à la compétence applicables prévues à la partie I du Principe directeur no 6; ou

(b)   détient depuis les trois dernières années une inscription en vertu des lois canadiennes sur les valeurs mobilières à titre de gestionnaire de portefeuille, de conseiller en placement ou dans toute autre catégorie d’inscription équivalente;

(c)    est un associé, un administrateur, un dirigeant, un employé ou un mandataire d’un membre;

(d)   fait cette demande à l’aide du formulaire que le conseil d’administration peut au besoin prescrire. [Je souligne.]

[23]          Il faut mentionner que le Principe directeur no 2 fixe des normes minimales du secteur pour la surveillance des comptes au détail. On y mentionne expressément qu’elles n’empêchent pas les membres d’établir des normes plus strictes de surveillance (pièce A‑2, volume 3, onglet 12, p. 2, Introduction).

[24]          Il faut mentionner que les juges Pelletier et Létourneau ont manifesté leur adhésion à cette décision du juge Décary. Par contre, dans une décision plus récente, Combined Insurance Company of America c. M.N.R. et Mélanie Drapeau, 2007 CAF 60, écrite par le juge Nadon, à laquelle, d'ailleurs, les juges Pelletier et Létourneau ont souscrit, on se réfère à nouveau à la décision Wiebe Door. Par contre, il n'est aucunement fait référence dans l'arrêt Combined Insurance à la décision 9041‑6868 Québec Inc. et il n'y est pas fait mention que l'interprétation adoptée par le juge Décary ne faisait plus loi au Québec.

 

La demande d'autorisation d'en appeler de l’arrêt Combined Insurance à la Cour suprême du Canada a été rejetée sans motifs le 25 octobre 2007 ([2007] C.S.C.R n156 (QL)). Selon la position défendue par l’avocat de Combined Insurance dans sa réponse écrite à la demande d’autorisation, l’arrêt de la Cour d’appel fédérale dans Combined Insurance « ne contredit aucunement l’arrêt 9041-6868 Québec inc. rendu par cette même Cour en 2005 » (paragraphe 25 de la réponse). Il ajoute :

 

La Cour d’appel fédérale […] devait conclure qu’il n’existait aucun lien de subordination quant à l’exécution du travail que devait faire Mme Drapeau pour le compte de l’intimé. […] La Cour d’appel fédérale a donc bel et bien appliqué les dispositions pertinentes du Code civil du Québec en l’espèce. (paragraphe 13 de la réponse)

 

[...] La Cour d’appel fédérale n’a pas ressuscité les critères de common law afin de déterminer l’existence d’un contrat de travail au Québec. [Elle] a plutôt correctement révisé toute la preuve au dossier, contrairement au premier juge, et a conclu qu’il n’y avait pas de lien de subordination entre Mme Drapeau et l’intimée en appliquant plusieurs indices d’encadrement tels que la propriété des instruments de travail, les chances de profits et les risques de pertes, l’intégration, le degré de contrôle, la présence obligatoire au lieu de travail et le respect de l’horaire de travail, le contrôle des absences pour vacances, les pouvoirs de sanction, l’imposition de moyens d’exécution de travail, la remise de rapports d'activités et le contrôle de la qualité et de la quantité de travail […] » (paragraphe 15 de la réponse).

[25]             2007 CCI 604.

[26]          Cet article se lit comme suit :

1308.   L'administrateur du bien d'autrui doit, dans l'exercice de ses fonctions, respecter les obligations que la loi et l'acte constitutif lui imposent; il doit agir dans les limites des pouvoirs qui lui sont conférés.

1308.   The administrator of the property of others shall, in carrying out his duties, comply with the obligations imposed on him by law or by the constituting act. He shall act within the powers conferred on him.

Il ne répond pas de la perte du bien qui résulte d'une force majeure, de la vétusté du bien, de son dépérissement ou de l'usage normal et autorisé du bien.

He is not liable for loss of the property resulting from a superior force or from its age, its perishable nature or its normal and authorized use.

 

[27]         Il est à noter qu'un passage dans cette lettre peut porter à confusion. En effet, monsieur Dupont mentionne que LBG pourra résilier « votre association avec notre maison », plutôt que de parler de contrat de travail. Évidemment, le mot « association » peut avoir plusieurs sens. Il peut indiquer que les deux parties ont formé une société de personnes. Sur cette question, monsieur Massicolli a précisé lors de son témoignage que ni lui ni monsieur Auger n’était un « associé » de la FBN. Le mot « association » peut aussi être synonyme de « collaboration ». Je crois que c’est le sens qu’il faut retenir ici.

[28]          Voir le par. 78, ci-après.

[29]          Pour une discussion de cette démarche, voir mon article aux pages 2:63 et suivantes.

[30]          Cette directive est datée du 28 mars 2007. Il n'a pas été établi si elle existait durant la période pertinente. Même si elle n'existait pas, elle illustre le droit de direction et de contrôle que possédait la FBN sur ses conseillers en placement.

[31]          Les conseillers inscrits depuis cinq ans dans l'industrie et trois ans à la FBN et générant des commissions brutes inférieures à 55 000 $ pendant trois mois consécutifs voyaient leurs commissions nettes réduites de 33% au cours du mois suivant (pièce Int‑1, onglet 8).

[32]          Cela représente sa part après déduction des frais que lui imputait la FBN. Donc, on peut supposer que les commissions brutes (avant partage) étaient aux environs d’un million de dollars.

[33]          On trouvera en Annexe 2 jointe à ces motifs la table des matières concernant l'ouverture d’un compte-détail (pièce A‑2, volume 4, onglet 13, G500-01).

[34]          On trouvera en Annexe 3 jointe à ces motifs la table des matières concernant cette question (pièce A‑2, onglet 13, P100‑01 du Guide du conseiller en placement).

[35]          Sous la rubrique « Soldes débiteurs non garantis », on mentionne qu’une perte de crédit est toujours la responsabilité du conseiller en placement. Toutefois, dans les cas où cette perte résulte d’une erreur administrative, la responsabilité du conseiller en placement est limitée aux gestes que celui-ci a faits pour contribuer à l’erreur.

[36]          On trouvera en Annexe 4 jointe à ces motifs la table des matières partielle (sans la description de ses annexes) de ce guide.

[37]          Voir pièce A‑2, volume 5, onglet 14, page 18 du Guide de conformité.

[38]          Selon monsieur Massicolli, ses clients généraient tous plus de 1 500 $ par mois.

[39]          Dans le Principe directeur no 2, à la section I, « Instauration et maintien de procédures, délégation et formation », on mentionne dans l’introduction ce qui suit :

 

Introduction

Pour exercer une autoréglementation efficace, le membre doit commencer par instaurer et maintenir un système de surveillance qui, à la fois, favorise les objectifs commerciaux du membre et assure un processus d’autoréglementation. À cette fin, un membre doit instaurer et maintenir des procédures qui doivent être contrôlées par des personnes qualifiées. La formation continue du personnel en tout ce qui a trait à la conformité au chapitre des ventes constitue un aspect important de l’autoréglementation.

[Je souligne.]

Sous la rubrique suivante, « Instauration de procédures », on précise au paragraphe 4 que « [t]outes les politiques instaurées ou modifiées doivent recevoir l’approbation de la haute direction. »

[40]          Voir notamment les objets énoncés dans l’acte constitutif de l’ACCOVAM, article 2(b) reproduit en partie au paragraphe 28 de ces motifs.

[41]          Voir notamment la règle concernant le « compte géré », Règlement 1300, article 7.

[42]             À mon avis, le Statut 39 de l'ACCOVAM, qui est son dernier, a été ajouté pour inclure le cas d'une personne qui pourrait ne pas être considérée comme un employé dans les provinces canadiennes de common law. Comme il n'y existe pas de codification des lois, comme au Québec, ce sont les tribunaux qui ont élaboré les critères pour distinguer entre un travailleur autonome (indépendant) et un employé. Le contrôle n'est que l'un des nombreux critères utilisés par ces tribunaux dans cette tâche. Ce critère a souvent été considéré comme non fiable (voir notamment Market Investigations Ltd. v. Minister of Social Security, [1968] 3 All E.R. 732 (Q.B.D.), à la p. 736). D'ailleurs, les tribunaux le considèrent parfois comme « neutre » et donnent plus d'importance à d'autres critères comme le risque de pertes, la propriété des outils et la possibilité de réaliser un bénéfice. Pour parer à l'éventualité qu'un représentant soit considéré comme un travailleur autonome dans ces circonstances, l'ACCOVAM a, selon toute vraisemblance, jugé opportun de traiter du cas où le représentant agit comme mandataire d'un membre. On peut difficilement imaginer qu'au Québec un mandataire soumis à un haut degré de direction et de contrôle de la part d'un membre ne soit pas considéré comme un salarié du membre, étant donné qu'au Québec, en vertu du choix adopté par l'Assemblée nationale, le lien de subordination (à savoir le fait que le travail est effectué sous la direction ou le contrôle du payeur) est le critère déterminant pour distinguer entre un salarié (employé) et un travailleur autonome. En adoptant le statut 39, l'ACCOVAM s'assurait que ses règles de réglementation seraient appliquées de façon uniforme à travers le Canada. Même si l'intention de l'ACCOVAM n’était pas celle que je lui prête, il n'en demeure pas moins que le résultat est que ses règles sont appliquées ainsi à travers le Canada.

[43]             Dans l’affaire Bouchard c. Canada, [2008] A.C.I. no 356 (QL), mon collègue le juge Favreau a conclu récemment que la contrepartie reçue pour un transfert semblable effectué par des conseillers en placement de la FBN constituait un revenu tiré d’un emploi, et non pas le produit de disposition d’un achalandage ou une allocation de retraite.

[44]          Pièce INT‑2, onglets 41, 42 et 43. Après le départ de messieurs Auger et Massicolli, monsieur Leclerc, le directeur de la succursale de l’Ouest-de-l’Île, a estimé le taux de conservation par la FBN des clients servis par l’équipe Auger‑Massicolli à environ 50% des actifs gérés par elle. Selon Monsieur Massicolli, la plupart des clients auxquels ils fournissaient des conseils et dont ils géraient le portefeuille les ont suivis chez Valeurs mobilières Desjardins.

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