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Dossier : 2007-4575(IT)I

ENTRE :

 

JAMES C. GRILL,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu le 5 septembre 2008, à Vancouver (Colombie‑Britannique).

 

Devant : L’honorable juge L. M. Little

 

Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Pavanjit Mahil

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’encontre de la cotisation établie à l’égard de l’appelant en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2005 est rejeté, sans dépens, conformément aux motifs du jugement ci‑joints.

 


Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 5e jour de janvier 2009.

 

 

« L. M. Little »

Juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de janvier 2009.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


 

 

 

 

Référence : 2009CCI5

Date : 20090105

Dossier : 2007-4575(IT)I

 

 

ENTRE :

 

JAMES C. GRILL,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

Le juge Little

 

A.      Les faits

 

[1]     En mai 1995, l’appelant a commencé à travailler pour Envision Credit Union (« Envision »), à la succursale située au 32711, South Fraser Way, à Abbotsford, en Colombie‑Britannique (le « lieu de travail »).

 

[2]     Pendant l’année d’imposition 1995, l’appelant et sa femme résidaient au 51575, Ferry Road, à Rosedale, en Colombie‑Britannique (la « résidence située sur Ferry Road »).

 

[3]     Au début de l’année 1996, l’appelant et sa femme ont acheté un terrain non bâti situé au 10303, Royalwood Boulevard, à Rosedale. L’appelant et sa femme se sont fait construire une nouvelle résidence sur le lotissement (la « résidence située sur Royalwood Boulevard »).

[4]     En octobre 1996, l’appelant et sa femme ont quitté la résidence située sur Ferry Road pour emménager dans la résidence située sur Royalwood Boulevard.

 

[5]     La résidence située sur Royalwood Boulevard et le lieu de travail étaient à environ 50 kilomètres de distance l’un de l’autre.

 

[6]     Le 1er juillet 2004, l’appelant et sa femme se sont séparés.

 

[7]     L’appelant et sa femme ont alors convenu de vendre la résidence située sur Royalwood Boulevard. La vente a eu lieu en novembre 2005.

 

[8]     Le 29 novembre 2005, l’appelant a quitté la résidence située sur Royalwood Boulevard pour emménager dans un nouveau logement, situé au 35931, Empress Drive, app. 2, à Abbotsford (la « résidence d’Abbotsford »).

 

[9]     La distance entre la résidence de Royalwood Boulevard et le lieu de travail était supérieure de 40 kilomètres à la distance entre la résidence d’Abbotsford et le lieu de travail.

 

[10]    Pendant les années d’imposition 1995 à 2005, l’appelant a continué de travailler pour Envision, à la même succursale située à Abbotsford.

 

[11]    Dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition 2005, l’appelant a déduit des frais de déménagement de 22 984,54 $. Ce montant incluait des frais de déplacement, de repas, d’hébergement temporaire, de transport et d’entreposage, ainsi que divers honoraires juridiques et immobiliers que l’appelant a engagés à l’occasion de son déménagement de la résidence située sur Royalwood Boulevard à celle d’Abbotsford.

 

B.      La question en litige

 

[12]    La question à trancher est de savoir si, dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition 2005, l’appelant peut déduire des frais de déménagement de 22 984,54 $.

 

C.      Analyse

 

[13]    Les paragraphes 62(1) et (3) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») prévoient ce qui suit :

 

Frais de déménagement

 

62. (1) Un contribuable peut déduire dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition les sommes qu’il a payées au titre des frais de déménagement engagés relativement à une réinstallation admissible dans la mesure où, à la fois :

 

a) elles n’ont pas été payées en son nom relativement à sa charge ou à son emploi ou dans le cadre ou en raison de sa charge ou de son emploi;

 

b) elles n’étaient pas déductibles par l’effet du présent article dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition précédente;

 

c) leur total ne dépasse pas le montant applicable suivant :

 

(i) dans le cas visé au sous-alinéa a)(i) de la définition de « réinstallation admissible » au paragraphe 248(1), le revenu du contribuable pour l’année tiré de son emploi au nouveau lieu de travail ou de l’exploitation de l’entreprise au nouveau lieu de travail, selon le cas,

 

(ii) dans le cas visé au sous-alinéa a)(ii) de cette définition, le total des montants inclus dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année par l’effet des alinéas 56(1)n) et o);

 

d) les remboursements et allocations qu’il a reçus relativement à ces frais sont inclus dans le calcul de son revenu.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

 

Frais de déménagement

 

62. (3) Pour l’application du paragraphe (1), sont comprises dans les frais de déménagement toutes dépenses engagées au titre :

 

a) des frais de déplacement (y compris les dépenses raisonnables pour repas et logement) engagés pour le déménagement du contribuable et des membres de sa maisonnée qui se transportent de l’ancienne résidence à la nouvelle résidence;

 

b) des frais de transport et d’entreposage des meubles du contribuable qui doivent être transportés de son ancienne résidence à sa nouvelle résidence;

 

c) des frais de repas et de logement, près de l’ancienne résidence ou de la nouvelle résidence, engagés par le contribuable et les membres de sa maisonnée pendant une période maximale de 15 jours;

 

d) des frais de résiliation du bail en vertu duquel il était le locataire de son ancienne résidence;

 

e) des frais relatifs à la vente de son ancienne résidence;

 

f) lorsque le contribuable ou son époux ou conjoint de fait vend l’ancienne résidence par suite du déménagement, des frais, pour le contribuable, à l’égard des services juridiques relatifs à l’achat de la nouvelle résidence et des impôts, frais, droits et taxes (sauf toute taxe sur les produits et services ou taxe à la valeur ajoutée) applicables au transfert ou à l’enregistrement du droit de propriété de cette résidence;

 

g) des intérêts, impôts fonciers, primes d’assurance et coûts du chauffage et des services publics relativement à l’ancienne résidence, jusqu’à concurrence de 5 000 $ ou, s’il est moins élevé, du total des dépenses de cette nature engagées par le contribuable pour la période, à la fois :

 

(i) tout au long de laquelle l’ancienne résidence n’est ni ordinairement occupée par le contribuable ou par une autre personne qui y résidait habituellement avec lui immédiatement avant le déménagement, ni louée par le contribuable à une autre personne,

 

(ii) au cours de laquelle des efforts sérieux sont faits en vue de vendre l’ancienne résidence;

 

h) du coût de la révision de documents juridiques pour tenir compte de l’adresse de la nouvelle résidence du contribuable, du remplacement des permis de conduire et des certificats d’immatriculation de véhicules non commerciaux (à l’exclusion du coût de l’assurance-véhicule) et des connexion et déconnexion des services publics;

 

il est toutefois entendu que le terme ne vise pas les frais (autres que les frais visés à l’alinéa f)) engagés par le contribuable pour l’acquisition de sa nouvelle résidence.

 

[14]    Le paragraphe 248(1) de la Loi définit ainsi l’expression « réinstallation admissible » :

 

« réinstallation admissible » Réinstallation d’un contribuable relativement à laquelle les conditions suivantes sont réunies :

 

a) elle est effectuée afin de permettre au contribuable :

 

(i) soit d’exploiter une entreprise ou d’occuper un emploi à un endroit au Canada (appelé « nouveau lieu de travail » à l’article 62 et au présent paragraphe),

 

(ii) soit de fréquenter, comme étudiant à temps plein inscrit à un programme de niveau postsecondaire, un établissement d’une université, d’un collège ou d’un autre établissement d’enseignement (appelé « nouveau lieu de travail » à l’article 62 et au présent paragraphe);

 

b) la résidence que le contribuable habitait ordinairement avant la réinstallation (appelée « ancienne résidence » à l’article 62 et au présent paragraphe) et celle qu’il habitait ordinairement après la réinstallation (appelée « nouvelle résidence » à l’article 62 et au présent paragraphe) sont toutes deux situées au Canada;

 

c) la distance entre l’ancienne résidence et le nouveau lieu de travail est supérieure d’au moins 40 kilomètres à la distance entre la nouvelle résidence et le nouveau lieu de travail.

 

Toutefois pour l’application des paragraphes 6(19) à (23) et de l’article 62 à la réinstallation d’un contribuable qui est absent du Canada mais y réside, il n’est pas tenu compte des mots « au Canada » au sous-alinéa a)(i) de la présente définition ni de son alinéa b).

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[15]    Dans la décision Bracken v. The Minister of National Revenue, 84 DTC 1813 (C.C.I.), le juge Christie, alors juge en chef, a énoncé quatre conditions qu’un contribuable doit remplir pour pouvoir déduire ses frais de déménagement de son revenu en vertu du paragraphe 62(1) de la Loi. À la page 1819, le juge en chef Christie avait déclaré :

 

À mon sens, le législateur envisage au paragraphe 62(1) l'existence de quatre éléments distincts : l'ancien lieu de travail, le nouveau lieu de travail, l'ancienne résidence, la nouvelle résidence, ainsi que la comparaison entre deux distances, soit d'une part la distance entre l'ancienne résidence et le nouveau lieu de travail, et d'autre part la distance entre la nouvelle résidence et le nouveau lieu de travail, celle‑là devant être supérieure à celle-ci de 40 kilomètres ou plus pour que les frais de déménagement puissent être déduits. […]

 

[16]    Je suis d’accord avec l’interprétation que le juge en chef Christie a faite du paragraphe 62(1) de la Loi. Il ressort clairement de la formulation du sous‑alinéa 62(1)c)(i) qu’un contribuable n’a le droit de déduire dans le calcul de son revenu d’emploi et/ou d’entreprise ses frais de déménagement que s’il, ou elle, a engagé les frais en question en vue d’une réinstallation liée à un « nouveau lieu de travail ». La définition de l’expression « réinstallation admissible » contenue au paragraphe 248(1) de la Loi exige que la réinstallation soit effectuée « afin de permettre au contribuable […] d’exploiter une entreprise ou d’occuper un emploi à un endroit au Canada (appelé « nouveau lieu de travail » à l’article 62 et au présent paragraphe) ». Par conséquent, les termes de la Loi prévoient clairement, ou exigent, que l’on soit en présence d’un « nouveau lieu de travail » afin que les dépenses engagées par les contribuables soient déductibles à titre de frais de déménagement. [Non souligné dans l’original.]

 

[17]    Dans l’arrêt Giannakopoulos c. Le ministre du Revenu national, [1995] 3 C.F. 294 (C.A.F.), la Cour d’appel fédérale a elle aussi étudié la question de la déductibilité des frais de déménagement en vertu du paragraphe 62(1). Au paragraphe 7, le juge Marceau a déclaré :

 

En vertu du paragraphe 62(1), le contribuable peut déduire ses frais de déménagement lorsqu'il se rapproche de son nouveau lieu de travail. L'employé doit résider à une distance raisonnable de son travail. Lorsqu'il accepte un nouvel emploi, il peut se voir forcé de déménager afin de demeurer à une distance pratique de son travail. Au paragraphe 62(1), on reconnaît que la réinstallation constitue une dépense légitimement liée au travail. Pour fermer la porte aux tentatives d'un contribuable d'invoquer la disposition lorsqu'il désire simplement changer de résidence, la disposition requiert que le déménagement rapproche le contribuable de son travail d'au moins 40 kilomètres.

 

[18]    L’appelant a soutenu que son lieu de travail, situé à Abbotsford, devrait être qualifié de « nouveau lieu de travail » aux fins du paragraphe 62(1) de la Loi. Bien que l’appelant ait commencé à travailler pour Envision au lieu de travail en 1995, il prétend que son déménagement à Abbotsford en 2005 a été effectué en vue de lui permettre d’occuper un emploi au lieu de travail.

 

[19]    Toutefois, le lieu de travail de l’appelant n’a pas changé. Bien que le fait d’avoir quitté sa résidence située sur Royalwood Boulevard pour emménager dans la résidence d’Abbotsford en 2005 ait rapproché l’appelant de son lieu de travail de plus de 40 kilomètres, je suis dans l’impossibilité de conclure que l’appelant a déduit des frais de déménagement d’un revenu gagné dans un « nouveau lieu de travail ».

 

[20]    Compte tenu des faits énoncés ci‑dessus, je suis dans l’incapacité de faire dire à la Loi que les frais de déménagement que l’appelant a déduits de son revenu sont visés par les dispositions du paragraphe 62(1).

 

[21]    L’appel est rejeté, sans dépens.

 

Signé à Vancouver (Colombie‑Britannique), ce 5e jour de janvier 2009.

 

 

« L. M. Little »

Juge Little

Traduction certifiée conforme

ce 15e jour de janvier 2009.

 

Alya Kaddour‑Lord, traductrice


 

 

RÉFÉRENCE :                                  2009CCI5

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2007-4575(IT)I

 

INTITULÉ :                                       James C. Grill et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Vancouver (Colombie‑Britannique)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 5 septembre 2008

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge L. M. Little

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 5 janvier 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

 

 

Avocat de l’intimée :

Me Pavanjit Mahil

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

              Pour l’appelant :                  

 

                             Nom :                   

 

                         Cabinet :                  

 

                Pour l’intimée :                   John H. Sims, c.r.

                                                          Sous‑procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

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