Jugements de la Cour canadienne de l'impôt

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[traduction française officielle]

 

 

Numéro du dossier de la Cour : 2008-913(IT)I

 

 

COUR CANADIENNE DE L’IMPÔT

 

ENTRE :

MESFIN HAGOS,

                                                                                                                                 appelant,

                                                                    - et -

 

                                                  SA MAJESTÉ LA REINE,

                                                                                                                                   intimée.

 

          APPEL ENTENDU DEVANT LE JUGE EN CHEF ADJOINT ROSSITER

                 dans la salle d’audience 6B, Service administratif des tribunaux judiciaires,

                                                       180, rue Queen ouest,

                                                          Toronto (Ontario),

                                          le mardi 30 septembre 2008, à 10 h 50.

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT RENDUS ORALEMENT

                                                                       

COMPARUTIONS :

 

M. Mesfin Hagos                                                                                       L’appelant lui‑même

 

Me Sharon Lee                                                                                          Avocate de l’intimée

 

 

Également présents :

 

M. William O’Brien                                                                                      Greffier‑audiencier

 

Mme Linda O’Brien                                                                                 Sténographe judiciaire

 

                                       A.S.A.P. Reporting Services Inc. © 2008

 

200, rue Elgin, bureau 1105                           130, rue King Ouest, bureau 1800

Ottawa (Ontario)  K2P 1L5                           Toronto (Ontario)  M5X 1E3

613-564-2727                                                  416-861-8720

 

 

 


Toronto (Ontario)

--- Le prononcé de la décision a débuté    le mardi 30 septembre 2008, à 10 h 50.

LE JUGE ROSSITER : La Cour rendra maintenant sa décision.

La présente affaire porte sur une nouvelle cotisation, établie pour l’année d’imposition 2004 de l’appelant, par laquelle le ministre du Revenu national (le « ministre ») a refusé une déduction de 35 000 $ demandée à titre de crédit d’impôt pour frais médicaux en vertu des articles 118 et 118.2 de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »).

Il semble qu’en décembre 2002, l’appelant a appris que son frère jumeau, Assefa Hagos, était gravement malade. Assefa Hagos avait déjà été résident canadien, mais il semble qu’il soit devenu résident de l’Érythrée en 1998 et le soit resté jusqu’à sa mort, en février 2003.

L’appelant soutient avoir engagé des frais s’élevant à 35 000 $, et a demandé à les déduire dans le calcul de ses revenus pour l’année d’imposition 2004.

L’examen de la preuve révèle que les frais engagés par l’appelant incluaient 12 000 $ pour un visa de sortie qui devait permettre à son frère cadet de l’aider à ramener leur frère Assefa au Canada, environ 4 531 $ pour des billets d’avion, 2 700 $ pour des repas et des séjours à l’hôtel pour l’appelant, 4 000 $ pour les funérailles de son frère jumeau, 6 750 $ pour des dépenses familiales, et 250 $ pour des taxes d’aéroport.

L’appelant soutient que les dépenses en cause ont été réellement engagées pour son propre compte, car il est son frère jumeau. C’est là l’essentiel de son argument, malgré que les dépenses en cause aient été engagées pour fournir des soins à son frère jumeau et pour ramener ce dernier au Canada.

L’article 118 de la Loi traite des crédits d’impôt pour frais médicaux. Plus précisément, c’est l’article 118.2 de la Loi qui est le plus pertinent.

La Loi est très claire : pour avoir droit à un crédit d’impôt pour frais médicaux, l’appelant doit satisfaire à toutes les exigences de l’article 118.2.

L’article 118.2 de la Loi exige notamment que les sommes aient été engagées à l’égard d’une personne à charge du particulier. Le paragraphe 118(6) de la Loi précise le sens du terme « personne à charge ». Entre autres, il peut s’agir d’un frère qui réside au Canada à un moment de l’année. Ainsi, il n’y a aucun doute qu’Assefa Hagos était le frère de l’appelant, et qu’il était, dans une certaine mesure, une personne à charge de l’appelant. Il faut toutefois se demander si Assefa Hagos était résident du Canada à un moment de l’année en cause.

Assefa Hagos est décédé en 2003. Il n’a donc pas pu résider au Canada en 2004, année où les dépenses dont l’appelant a demandé la déduction auraient prétendument été engagées. Si nous nous penchons sur l’année 2003, Assefa Hagos n’était pas non plus un résident du Canada à ce moment‑là. Bien qu’il était citoyen canadien, il n’était plus résident du Canada depuis 1998, et, pour cette raison, la demande de crédit d’impôt doit être rejetée.

De plus, les déductions ont été demandées pour l’année d’imposition 2004, alors que les dépenses en cause avaient été engagées en 2003. La demande de crédit d’impôt doit aussi être rejetée pour cette raison‑là.

La Cour compatit à la situation personnelle de l’appelant, mais, malheureusement, elle ne peut pas se fonder sur la compassion pour rendre sa décision.

Compte tenu des faits établis, la Loi ne permet pas d’accorder les déductions demandées. La Loi ne permet pas non plus à la Cour de tenir compte de la compassion pour rendre sa décision. C’est aussi simple que cela. Les pouvoirs de la Cour ne lui permettent pas de rendre des décisions fondées sur la compassion.

La Cour d’appel fédérale a expliqué la chose de façon fort concise en 2004, dans Chaya v. R., 2004 DTC 6676, où le juge Rothstein, au nom de la Cour d’appel fédérale, s’est exprimé de la façon suivante au paragraphe 4 :

« Le demandeur soutient que la loi est inéquitable et il demande à la Cour de faire une exception pour lui. Toutefois, la Cour n’a pas le pouvoir de faire droit à sa demande. La Cour doit appliquer la loi telle qu’elle est. Elle ne peut pas déroger aux dispositions législatives pour des raisons liées à l’équité. S’il estime que la loi est inéquitable, le demandeur doit avoir recours au Parlement et non pas à la Cour. »

Je donne maintenant la même explication à l’appelant. L’appelant affirme que la loi est inéquitable, et il demande à la Cour de faire une exception pour lui. La Cour canadienne de l’impôt n’a pas ce pouvoir. La Cour doit appliquer la loi telle qu’elle est. Elle ne peut pas déroger aux dispositions législatives pour des raisons liées à l’équité.

S’il estime que la loi est inéquitable – et je n’ai pas dit que la loi est équitable –, l’appelant doit s’adresser au Parlement et non pas à la Cour.

M. Hagos, personne n’a affirmé que la Loi est équitable, ni même qu’elle est raisonnable. Il ne m’appartient pas d’en décider.

Mon rôle est d’appliquer la loi telle qu’elle est. Les dispositions de la Loi et la jurisprudence de la Cour d’appel fédérale sont claires et précises.

Pour les raisons exposées ci‑dessus, l’appel est rejeté. Il ne sera pas adjugé de dépens.

M. Hagos, avez‑vous des questions?

M. HAGOS : Je ne sais pas comment dire.

LE JUGE ROSSITER : Je ne vous ai pas demandé de dire quelque chose, je vous ai demandé si vous aviez des questions.

M. HAGOS : D’accord, ma question est la suivante — il s’agit peut-être d’un malentendu —, mais je croyais que la Cour était indépendante et qu’elle pouvait faire des exceptions.

LE JUGE ROSSITER : La Cour est indépendante. Elle peut faire des exceptions dans les cas prévus par la loi. En l’espèce, la loi ne permet pas à la Cour de faire une exception, car les faits en cause ne correspondent pas aux exigences de l’article 118.2 de la Loi. Je ne peux rien pour vous. D’accord?

M. HAGOS : Oui, donc --

LE JUGE ROSSITER : -- Pardon?

M. HAGOS : Comment puis‑je interjeter appel?

LE JUGE ROSSITER : Si vous voulez aller en appel --

M. HAGOS : -- Est‑ce que cette décision est finale ou --

LE JUGE ROSSITER : -- vous pouvez porter la décision en appel devant la Cour d’appel fédérale. Vous pouvez demander à Mme Lee de vous expliquer le fonctionnement du processus d’appel. Pour être bien honnête, je ne m’occupe pas de ces questions-là.

Mme Lee, avez-vous des questions?

Mme Lee : Non, votre honneur.

LE JUGE ROSSITER : L’appel est rejeté. Merci. Bonne journée.

--- L’audience prend fin à 10 h 58.

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 28e jour de septembre 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

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