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Dossier : 2009-1593(IT)I

ENTRE :

RALPH LAPIERRE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 27 octobre 2009, à Moncton (Nouveau‑Brunswick).

 

 Devant : L’honorable juge Lucie Lamarre

 

 Comparutions :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui‑même

 

 

Avocate de l’intimée :

Me Jill Chisholm

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté à l’égard de la nouvelle cotisation datée du 14 octobre 2008 et établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») pour l’année d’imposition 2007 est rejeté, et, pour cette année‑là, l’appelant n’a droit à aucune déduction au titre de frais de déménagement en application de l’article 62 de la Loi.

 

 

 

Signé Ottawa, Canada, ce 19e jour de novembre 2009.

 

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour de décembre 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.


 

 

 

 

Référence : 2009 CCI 595

Date : 20091119

Dossier : 2009-1593(IT)I

ENTRE :

RALPH LAPIERRE,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Lamarre

 

[1]              Le présent appel, instruit sous le régime de la procédure informelle, a été interjeté à l’égard d’une nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») le 14 octobre 2008. Dans cette nouvelle cotisation, le ministre a refusé à l’appelant une déduction de 900 $, demandée relativement à des frais de déménagement, dans le calcul de ses revenus pour l’année d’imposition 2007, et ce, en application de l’article 62 et de la définition de « réinstallation admissible » du paragraphe 248(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi »). À l’audience, l’appelant a déclaré que la déduction demandée aurait dû s’élever à 1 113 $ plutôt qu’à 900 $.

 

[2]              Les dispositions pertinentes de la Loi sont les suivantes :

 

62(1) Frais de déménagement – Un contribuable peut déduire dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition les sommes qu’il a payées au titre des frais de déménagement engagés relativement à une réinstallation admissible dans la mesure où, à la fois :

 

a) elles n’ont pas été payées en son nom relativement à sa charge ou à son emploi ou dans le cadre ou en raison de sa charge ou de son emploi;

 

b) elles n’étaient pas déductibles par l’effet du présent article dans le calcul de son revenu pour l’année d’imposition précédente;

 

c) leur total ne dépasse pas le montant applicable suivant :

 

(i) dans le cas visé au sous-alinéa a)(i) de la définition de « réinstallation admissible » au paragraphe 248(1), le revenu du contribuable pour l’année tiré de son emploi au nouveau lieu de travail ou de l’exploitation de l’entreprise au nouveau lieu de travail, selon le cas,

 

(ii) dans le cas visé au sous-alinéa a)(ii) de cette définition, le total des montants inclus dans le calcul du revenu du contribuable pour l’année par l’effet des alinéas 56(1)n) et o);

 

d) les remboursements et allocations qu’il a reçus relativement à ces frais sont inclus dans le calcul de son revenu.

 

[…]

 

(3) Frais de déménagement – Pour l’application du paragraphe (1), sont comprises dans les frais de déménagement toutes dépenses engagées au titre :

 

a) des frais de déplacement (y compris les dépenses raisonnables pour repas et logement) engagés pour le déménagement du contribuable et des membres de sa maisonnée qui se transportent de l’ancienne résidence à la nouvelle résidence;

 

b) des frais de transport et d’entreposage des meubles du contribuable qui doivent être transportés de son ancienne résidence à sa nouvelle résidence;

 

c) des frais de repas et de logement, près de l’ancienne résidence ou de la nouvelle résidence, engagés par le contribuable et les membres de sa maisonnée pendant une période maximale de 15 jours;

 

d) des frais de résiliation du bail en vertu duquel il était le locataire de son ancienne résidence;

 

e) des frais relatifs à la vente de son ancienne résidence;

 

f) lorsque le contribuable ou son époux ou conjoint de fait vend l’ancienne résidence par suite du déménagement, des frais, pour le contribuable, à l’égard des services juridiques relatifs à l’achat de la nouvelle résidence et des impôts, frais, droits et taxes (sauf toute taxe sur les produits et services ou taxe à la valeur ajoutée) applicables au transfert ou à l’enregistrement du droit de propriété de cette résidence;

 

g) des intérêts, impôts fonciers, primes d’assurance et coûts du chauffage et des services publics relativement à l’ancienne résidence, jusqu’à concurrence de 5 000 $ ou, s’il est moins élevé, du total des dépenses de cette nature engagées par le contribuable pour la période, à la fois :

 

(i) tout au long de laquelle l’ancienne résidence n’est ni ordinairement occupée par le contribuable ou par une autre personne qui y résidait habituellement avec lui immédiatement avant le déménagement, ni louée par le contribuable à une autre personne,

 

(ii) au cours de laquelle des efforts sérieux sont faits en vue de vendre l’ancienne résidence;

 

h) du coût de la révision de documents juridiques pour tenir compte de l’adresse de la nouvelle résidence du contribuable, du remplacement des permis de conduire et des certificats d’immatriculation de véhicules non commerciaux (à l’exclusion du coût de l’assurance-véhicule) et des connexion et déconnexion des services publics;

 

il est toutefois entendu que le terme ne vise pas les frais (autres que les frais visés à l’alinéa f)) engagés par le contribuable pour l’acquisition de sa nouvelle résidence.

 

248(1) Définitions – Les définitions qui suivent s’appliquent à la présente loi.

 

[…]

 

« réinstallation admissible » Réinstallation d’un contribuable relativement à laquelle les conditions suivantes sont réunies :

 

a) elle est effectuée afin de permettre au contribuable :

 

(i) soit d’exploiter une entreprise ou d’occuper un emploi à un endroit au Canada (appelé « nouveau lieu de travail » à l’article 62 et au présent paragraphe),

 

(ii) soit de fréquenter, comme étudiant à temps plein inscrit à un programme de niveau postsecondaire, un établissement d’une université, d’un collège ou d’un autre établissement d’enseignement (appelé « nouveau lieu de travail » à l’article 62 et au présent paragraphe);

 

b) la résidence que le contribuable habitait ordinairement avant la réinstallation (appelée « ancienne résidence » à l’article 62 et au présent paragraphe) et celle qu’il habitait ordinairement après la réinstallation (appelée « nouvelle résidence » à l’article 62 et au présent paragraphe) sont toutes deux situées au Canada;

 

c) la distance entre l’ancienne résidence et le nouveau lieu de travail est supérieure d’au moins 40 kilomètres à la distance entre la nouvelle résidence et le nouveau lieu de travail.

 

Toutefois pour l’application des paragraphes 6(19) à (23) et de l’article 62 à la réinstallation d’un contribuable qui est absent du Canada mais y réside, il n’est pas tenu compte des mots « au Canada » au sous-alinéa a)(i) de la présente définition ni de son alinéa b).

 

[…]

 

[3]              Les faits en cause ne sont pas en litige. L’appelant réside à Moncton, au Nouveau‑Brunswick, avec son épouse et sa fille. Le 16 janvier 2007, il a pris l’avion à Moncton pour se rendre à Edmonton, en Alberta, et occuper un emploi pendant dix semaines auprès de SecureCheck, à Yellowknife, aux Territoires du Nord‑Ouest. L’appelant a dépensé 1 113 $ pour un billet d’avion aller‑retour entre Moncton et Edmonton et pour se loger et se nourrir pendant une nuitée à Edmonton. Il s’agit là du montant en litige. Entre le moment où l’appelant a quitté Edmonton pour aller à Yellowknife et est revenu à Edmonton vers le 7 avril 2007, date où il est retourné à Moncton, c’est son employeur, SecureCheck, qui a couvert les frais engagés par l’appelant.

 

[4]              Pendant sa période d’emploi de dix semaines, l’appelant a séjourné au camp fourni par son employeur, où il était logé et nourri. Pour cette période, l’appelant avait seulement emporté ses vêtements d’hiver, de l’équipement de survie, de la lecture, une radio et des disques compacts.

 

[5]              L’appelant a gardé sa maison à Moncton, y a laissé toutes ses possessions, a conservé son permis de conduire du Nouveau‑Brunswick et a continué d’avoir recours au même médecin au Nouveau‑Brunswick. L’épouse et la fille de l’appelant sont restées à Moncton, et l’appelant n’est pas allé leur rendre visite pendant sa période d’emploi.

 

[6]              En l’espèce, la question est de savoir si, en application des paragraphes 62(1) et 62(3) de la Loi, l’appelant a droit à une déduction de 1 113 $ à titre de frais de déménagement.

 

[7]              Pour avoir droit à une déduction, l’appelant doit démontrer que ces frais ont été engagés relativement à une réinstallation admissible. Ce terme est défini au paragraphe 248(1) de la Loi, et s’entend d’une réinstallation effectuée afin de permettre au contribuable d’occuper un emploi à un endroit au Canada (le nouveau lieu de travail), à condition que la résidence que le contribuable habitait ordinairement avant la réinstallation (l’ancienne résidence) et celle qu’il habitait ordinairement après la réinstallation (la nouvelle résidence) soient toutes deux situées au Canada et que la distance entre l’ancienne résidence et le nouveau lieu de travail soit supérieure d’au moins 40 kilomètres à la distance entre la nouvelle résidence et le nouveau lieu de travail.

 

[8]              L’appelant soutient que, malgré qu’il ait gardé sa résidence à Moncton et que sa famille y soit restée pendant sa période d’emploi de dix semaines à Yellowknife, il habitait ordinairement à Yellowknife du début de son nouvel emploi, en janvier 2007, jusqu’à la fin de cet emploi, en avril 2007.

 

[9]              L’appelant a invoqué deux décisions de la Cour, lesquelles avaient été rendues sous le régime de la procédure informelle : Cavalier v. R., 2001 CarswellNat 2374, [2002] 1 C.T.C. 2001, et Persaud v. R., 2007 CarswellNat 2542, 2007 DTC 1432.

 

[10]         Au paragraphe 22 de Cavalier, le juge Bowie a conclu que, pour être considéré comme un résident habituel, un contribuable n’a pas à avoir eu l’intention de rester au nouveau lieu de résidence en permanence ou pour une période d’une durée particulière. Il a rajouté que le contribuable « n’a pas non plus à avoir déménagé tous ses meubles ou à avoir été accompagné par les membres de sa famille immédiate ». Dans Cavalier, le contribuable, qui résidait à Delta, en Colombie‑Britannique, avait accepté d’aller enseigner pendant une session (de janvier à la fin d’avril) à un collège situé à Fort McMurray, en Alberta. Là‑bas, le contribuable vivait dans un logement meublé situé dans une résidence du collège. Son épouse était restée à Delta. Le contribuable a pu déduire des frais de déménagement en application du paragraphe 63(2) de la Loi, à savoir un billet d’avion aller simple pour aller de Delta à Fort McMurray, des frais d’automobile pour le voyage de retour de Fort McMurray à Delta, des repas et l’hébergement pour cinq nuits, moins les sommes qui lui avaient été remboursées par son employeur. Tout compte fait, le contribuable avait pu déduire environ 250 $.

 

[11]         Dans Persaud, le contribuable avait demandé la déduction, au titre de frais de déménagement, des frais engagés pour aller du Nouveau‑Brunswick à l’Alberta, où il avait occupé un emploi pendant quatre mois. Pendant cette période‑là, l’épouse du contribuable était restée à leur résidence du Nouveau‑Brunswick. Au paragraphe 13 de sa décision, le juge Webb s’est fondé sur Cavalier pour conclure que le fait que l’épouse de l’appelant était restée au Nouveau‑Brunswick et que les meubles et les autres effets de l’appelant y étaient aussi restés n’était pas déterminant. Le juge Webb a aussi souligné que le temps passé à un endroit donné est un facteur dont il faut tenir compte pour décider si le particulier réside habituellement à cet endroit. Le juge Webb s’est ainsi exprimé au paragraphe 16 de Persaud :

 

[16]      Toutefois, dans les cas où le particulier n’a pas rompu ses liens de résidence à un endroit particulier, le temps passé au nouvel endroit est un facteur dont il faut tenir compte en décidant si ce particulier réside habituellement au nouvel endroit, étant donné que plus celui‑ci reste longtemps au nouvel endroit, plus il est probable qu’il s’y soit établi dans sa vie de tous les jours. Dans l’affaire MacDonald c. Sa Majesté la Reine, 2007 CCI 250, le particulier s’était rendu en Alberta à deux reprises. Lors du premier voyage, il n’avait pas pu trouver de travail et, la seconde fois, il n’avait travaillé que pendant six semaines. Dans ce cas‑ci, l’appelant est resté à Fort McMurray beaucoup plus longtemps que ne l’avait fait M. MacDonald. De même, dans ce cas‑ci, l’appelant a ouvert un compte de banque à la coopérative de crédit de Fort McMurray, alors que M. MacDonald n’avait pas ouvert de compte.

 

Dans Persaud, le contribuable a donc pu déduire une somme totale de 2 198 $ au titre de frais de déménagement, somme représentant les frais du voyage aller‑retour entre sa résidence au Nouveau‑Brunswick et son nouveau lieu de travail à Fort McMurray, en Alberta.

 

[12]         Dans MacDonald, une décision rendue par le juge Webb et à laquelle il a fait référence dans le passage cité ci‑dessus (MacDonald c. La Reine, 2007 CarswellNat 1031, 2007 CCI 250), le contribuable a eu moins de succès. Le juge Webb a tenu compte du fait que le contribuable avait conservé son permis de conduire de la Nouvelle‑Écosse et sa couverture d’assurance médicale provinciale, que sa conjointe de fait était demeurée en Nouvelle‑Écosse, qu’il avait gardé ses maisons en Nouvelle‑Écosse, qu’il n’avait pas emporté toutes ses possessions avec lui en Alberta, qu’il n’avait pas acheté de maison en Alberta et qu’il n’avait pas transféré ses comptes bancaires là où il était allé travailler. Le juge Webb a conclu que les frais de déplacement dont le contribuable avait demandé la déduction ne constituaient pas des frais de déménagement en application du paragraphe 62 de la Loi.

 

[13]         À l’autre extrême, et conformément à la décision MacDonald, se trouvent les deux décisions récentes de la Cour sur lesquelles l’intimée se fonde. Dans ces décisions, la Cour n’a pas suivi le même raisonnement que dans Cavalier et Persaud pour décider si le contribuable avait le droit de déduire des frais de déménagement relativement à une réinstallation effectuée pour occuper un emploi.

 

[14]         Ainsi, au paragraphe 15 de Sampson c. La Reine., 2009 CarswellNat 990, 2009 CCI 204, la juge Campbell a dit croire qu’en adoptant l’article 62 de la Loi, le législateur visait les réinstallations ayant un caractère permanent. Pour arriver à cette conclusion, la juge Campbell s’était fondée sur le passage suivant, cité au paragraphe 9 de sa décision, qui est tiré des motifs du juge Estey de la Cour suprême du Canada dans Thomson v. M.N.R., [1946] S.C.R. 209, aux pages 231 et 232 :

 

          [traduction]

 

D’après le dictionnaire et d’après l’interprétation que les tribunaux donnent de ces termes, un individu est « résident habituel » du lieu où, dans sa vie de tous les jours, il habite d’une manière régulière, normale ou habituelle. On « séjourne » à un endroit que l’on visite ou dans un lieu où l’on demeure exceptionnellement, occasionnellement ou par intermittence. Dans le premier cas, c’est le caractère permanent qui prédomine, et dans le second, le caractère temporaire. La différence ne peut être exprimée d’une manière claire et nette, chaque cas devant être évalué compte tenu de tous les facteurs pertinents, mais ce qui précède indique d’une façon générale la différence essentielle.

 

[15]         Au paragraphe 11 de Sampson, la juge Campbell a aussi fait référence à la décision de la Cour rendue par le juge en chef adjoint Christie (tel était alors son titre) dans Rennie v. M.N.R., 90 DTC 1050, et elle a cité le passage suivant, qui est tiré du sommaire du jugement présenté dans le recueil Dominion Tax Cases :

 

          [traduction]

 

[11]      […] Les paragraphes 62(1) et (3) de la Loi, qui permettent la déduction des « frais de déménagement », ne peuvent être interprétés de manière à envisager qu’un contribuable puisse avoir plus d’une résidence à la fois à quelque moment que ce soit, étant donné que ces dispositions visent le début d’un emploi quelque part au Canada provoquant le déménagement du contribuable depuis le lieu où il avait sa résidence habituelle avant le déménagement vers un lieu au Canada où il a eu sa résidence habituelle après le déménagement. Les mots « résidence habituelle » doivent être assortis de la connotation que la Cour suprême leur a donnée dans l’arrêt Thomson […].

 

[16]         Dans Sampson, la juge Campbell n’a pas adopté le raisonnement employé dans Cavalier et Persaud, mais elle a plutôt présenté le raisonnement suivant aux paragraphes 15 à 17 de sa décision, faisant implicitement référence au paragraphe 62(3) de la Loi :

 

[15]      […] Dans ces décisions, il me semble qu’on a accordé plus d’importance à la durée du séjour qu’il ne convenait de le faire. Il s’agit certainement d’un critère, un parmi tant d’autres à prendre en considération dans le contexte de l’ensemble de la preuve relative à chaque affaire. Si trois mois suffisent, cela signifie‑t‑il, par exemple, que trois mois moins une semaine, ou moins deux jours, ne suffisent pas? Cette dernière période peut suffire ou ne pas suffire en fonction de l’ensemble de la preuve présentée dans le cadre d’un appel donné. Je crois que le législateur a promulgué l’article 62 relativement à une réinstallation ayant un caractère permanent, comme la Cour suprême l’a décrit dans l’arrêt Thomson.

 

[16]      C’est ce qu’il apparaît quand on se penche sur le type de dépenses envisagées dans cette même disposition, y compris le transport de meubles, les frais de résiliation du bail ou de vente de la résidence, les frais juridiques relatifs à l’achat d’une nouvelle résidence au nouvel emplacement ainsi que le coût du changement d’adresse du résident.

 

[17]      En outre, il est question de frais de repas pendant une période maximale transitoire de 15 jours. Si le législateur avait voulu qu’un contribuable puisse déduire de son revenu les dépenses engagées pour déménager du point A au point B sans beaucoup plus d’exigences, je crois que la disposition en cause aurait été formulée de manière totalement différente et qu’il ne serait pas nécessaire qu’on y fasse usage des mots « résident ordinaire ». 

 

[17]         Au paragraphe 20 de sa décision, la juge Campbell a conclu que les frais engagés par le contribuable pour se rendre à divers endroits au Canada n’étaient que des frais de déplacement incidents vers un nouveau lieu de travail, et qu’ils n’avaient pas trait à un changement de résidence depuis l’endroit où il avait vécu et avait toujours eu l’intention de retourner.

 

[18]         La deuxième décision sur laquelle l’intimée s’est fondée est Sears c. La Reine, 2009 CarswellNat 2379, 2009 CCI 344. Dans cette décision de la Cour, le juge Angers a conclu, au paragraphe 24, qu’il est impossible de conclure qu’un contribuable a établi une routine ou une vie de tous les jours dans à un nouvel endroit s’il n’a pas coupé ses liens sociaux et économiques avec l’ancien endroit. Dans Sears, le contribuable résidait au Nouveau‑Brunswick et s’était rendu en Alberta pour occuper un nouvel emploi pendant sept mois. Il avait gardé sa résidence au Nouveau‑Brunswick, et sa famille y était restée. Pendant qu’il était en Alberta, le contribuable vivait au camp de son employeur et n’avait pas à payer de loyer. Il avait inscrit son adresse au Nouveau‑Brunswick sur ses déclarations de revenus, et c’est d’ailleurs cette adresse‑là qui figurait sur les feuillets T‑4 que son employeur avait établis. Le contribuable avait conservé son permis de conduire du Nouveau‑Brunswick, sa couverture d’assurance médicale du Nouveau‑Brunswick et ses comptes bancaires au Nouveau‑Brunswick. Au paragraphe 24, le juge Angers a aussi affirmé que « le mode de vie [du contribuable] dans le nouvel emplacement correspondait à une résidence spéciale ou occasionnelle, incompatible avec l’objet ou les exigences régissant l’admissibilité à la déduction pour frais de déménagement sous le régime de l’article 62 de la Loi ».

 

[19]         Je partage les avis exprimés par la juge Campbell dans Sampson et par le juge Angers dans Sears. En l’espèce, l’appelant a quitté Moncton pour une période de dix semaines en 2007. Pendant qu’il était à Yellowknife, il n’avait pas à payer pour ses repas et son hébergement. Il avait gardé sa maison à Moncton, son permis de conduire du Nouveau‑Brunswick et sa couverture d’assurance médicale du Nouveau‑Brunswick. De plus, il avait laissé ses possessions à Moncton, et sa famille immédiate y était restée. Les feuillets T‑4 établis pour l’appelant ont été envoyés à son adresse postale à Moncton. L’appelant a aussi témoigné qu’il avait dû payer un impôt des non‑résidents aux Territoires du Nord‑Ouest (voir la deuxième page de la pièce A‑2). Par conséquent, je conclus, comme l’a fait la juge Campbell dans Sampson, que les frais engagés par l’appelant n’étaient que des frais de déplacement incidents vers un nouveau lieu de travail, et qu’ils n’avaient pas trait à un changement de résidence depuis Moncton, l’endroit où il avait toujours eu l’intention de retourner. Les déplacements faits par l’appelant en 2007 visaient seulement à lui permettre d’occuper un emploi temporaire. Les dépenses totalisant 1 113 $ dont l’appelant a demandé la déduction ne constituaient donc pas des frais de déménagement au sens de l’article 62 de la Loi.

 

[20]         Par conséquent, l’appel est rejeté.

 

 

 

Signé Ottawa, Canada, ce 19e jour de novembre 2009.

 

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 21e jour de décembre 2009.

 

Jean-François Leclerc-Sirois, LL.B, M.A.Trad.Jur.



RÉFÉRENCE :

2009 CCI 595

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2009-1593(IT)I

 

INTITULÉ :

Ralph Lapierre et Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

Moncton (Nouveau‑Brunswick)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 27 octobre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge Lucie Lamarre

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 19 novembre 2009

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelant :

L’appelant lui-même

 

Avocate de l’intimée :

Me Jill Chisholm

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

 

Nom :

 

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

John H. Sims, c.r.

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

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