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Dossier : 2004­4446(IT)G

ENTRE :

FONDS D’ÉDUCATION HÉRITAGE INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

____________________________________________________________________

Appel entendu les 25 et 26 novembre 2009, à Toronto (Ontario).

Devant : L’honorable juge Lucie Lamarre

 

Comparutions :

 

Avocats de l’appelante :

Me William I. Innes

Me Angelo Gentile

 

 

Avocats de l’intimée :

Me Eric Noble

Me Bobby Sood

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT MODIFIÉ

L’appel de la nouvelle cotisation datée du 27 août 2004 à l’égard de l’année d’imposition 1999 de l’appelante, laquelle a été établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, est accueilli et la nouvelle cotisation est renvoyée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation compte tenu du fait que le revenu imposable révisé de 13 305 885 $ ne représente pas le bénéfice de l’appelante pour cette année‑là. Le revenu net de 2 009 856 $ déclaré par l’appelante sera rétabli, avec l’ajout, toutefois, d’un montant de 104 593 $ représentant les frais de congrès dont la déduction a été refusée et dont le refus n’a pas été contesté par l’appelante dans le présent appel. La déduction du montant de 3 076 $ au titre de dons de bienfaisance que le ministre a admise dans la nouvelle cotisation susmentionnée est également maintenue.

 

Les déductions supplémentaires admissibles, représentant une augmentation de la déduction se rapportant à des pertes d’années antérieures reportées prospectivement et une augmentation de la déduction pour amortissement que le ministre a admise afin de réduire l’obligation fiscale globale résultant de la nouvelle cotisation portée en appel (comme il en est fait mention au paragraphe 5 de l’avis d’appel), seront annulées comme l’appelante le demande à l’alinéa 36b) de l’avis d’appel.

 

À la demande des parties, des observations seront soumises à la Cour au sujet des dépens, par écrit ou oralement, au gré des parties, dans les 30 jours qui suivront la date du jugement modifié.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour d’avril 2010.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour de septembre 2010.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


 

 

Référence : 2010 CCI 161

Date : 20100416

Dossier : 2004­4446(IT)G

ENTRE :

FONDS D’ÉDUCATION HÉRITAGE INC.,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT MODIFIÉS

 

La juge Lamarre

 

[1]              Il s’agit de l’appel d’une nouvelle cotisation établie par le ministre du Revenu national (le « ministre ») pour l’année d’imposition 1999 de l’appelante. En établissant la nouvelle cotisation, le ministre a rajusté le revenu de l’appelante en y ajoutant un montant de 11 842 789 $ au titre d’une [traduction] « déduction de frais d’inscription refusée » et en déduisant un montant de 651 353 $ au titre de [traduction] « provision pour créances douteuses admises ».

 

[2]              L’appelante, Fonds d’éducation Héritage Inc. (autrefois connue sous le nom d’Allianz Education Funds Inc. et antérieurement connue sous le nom de Corporation Financière Canadienne Américaine (Canada) Limitée (« CFCA »), exploitait au Canada une entreprise dans le cadre de laquelle elle distribuait des parts du Régime de bourses d’études Héritage (le « Régime »), un régime d’épargne qui est admissible à titre de régime enregistré d’épargne‑études (le « REEE ») en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « LIR »). Dans sa déclaration de revenus pour l’année d’imposition 1999, l’appelante a déclaré un revenu net de 2 009 856 $. Dans le calcul du revenu tiré de son entreprise, l’appelante a exclu les frais d’inscription qu’elle avait gagnés, mais qu’elle n’avait pas reçus, à la fin de son exercice, le 31 décembre, (soit un montant de 11 842 789 $). L’appelante avait déclaré ses frais d’inscription de cette façon pendant un certain nombre d’années avant l’année 1999. Par conséquent, le solde de clôture des sommes à recevoir, à la fin de l’année 1998, c’est‑à‑dire tous les frais d’inscription tirés des ventes conclues en 1998 et auparavant (les frais d’inscription de 1998 à recevoir), a été inclus dans le revenu de l’année 1999. Les frais d’inscription de 1998 à recevoir qui ont été ajoutés au revenu de l’appelante pour l’année 1999 s’élevaient à 13 442 628 $ (voir la pièce A‑3).

 

[3]              En rajustant le revenu net de 1999 de l’appelante, le ministre a inclus les frais d’inscription facturés, mais non reçus, pour l’année 1999 (11 842 789 $) sans rajuster ni réduire le revenu net en excluant le montant de 13 442 628 $ que l’appelante avait inclus dans son revenu en 1999, montant qui avait été gagné en 1998 et au cours d’années antérieures. Par conséquent, le ministre a augmenté le revenu net de l’appelante pour l’année 1999 en le portant de 2 009 856 $ à 13 305 885 $ (pièce A‑3).

 

[4]              Dans ses états financiers, l’appelante a déclaré un revenu de 225 731 $ pour l’année 1999, revenu qui a été calculé selon la méthode de la comptabilité d’exercice et qui incluait les frais d’inscription à recevoir de 1999, soit un montant de 11 842 789 $, mais qui n’incluait pas les frais d’inscription de 1998 à recevoir, qui s’élevaient à 13 442 628 $.

 

[5]              Au début de son avis d’appel, l’appelante déclare que la seule question qui se pose dans le présent appel est de savoir si les frais d’inscription en question (11 842 789 $) devaient être inclus dans le calcul de son revenu pour son année d’imposition 1999. Sous le titre : [traduction] « Les points en litige », l’appelante déclare que le point en litige est le suivant : [traduction] « Les recettes provenant des frais d’adhésion [d’inscription] des membres basées sur les dépôts futurs possibles [dépôts que les membres du Régime n’avaient pas effectués au 31 décembre 1999] devaient‑elles être incluses dans le calcul du revenu de l’appelante pour son année d’imposition 1999? ».

 

[6]              Dans son acte de procédure, l’appelante a répondu à cette question par la négative, en fondant sa prétention sur le fait qu’elle n’avait pas légalement droit aux frais d’inscription basés sur de tels dépôts futurs possibles tant que ces dépôts n’étaient pas de fait effectués par les membres du régime. L’appelante invoquait les articles 9 et 12 de la LIR.

 

[7]              Dans la réponse modifiée, l’intimée déclare qu’il s’agit de savoir si les frais d’inscription à recevoir ont été à juste titre inclus dans le calcul du revenu de l’appelante. L’intimée a répondu à cette question par l’affirmative et a soutenu que l’inclusion des frais d’inscription à recevoir dans le calcul du revenu de l’appelante est conforme aux principes comptables généralement reconnus (les « PCGR ») et donne une idée plus exacte du revenu de l’appelante.

 

 

 

Les faits

 

[8]              Le Régime a été établi par la Fondation de bourses d’études Héritage (la « Fondation »), une société à but non lucratif sans capital‑actions constituée en personne morale en vertu des lois du Canada. La Fondation était chargée de l’administration du Régime à l’égard duquel l’appelante fournissait des services à la Fondation. Ces services comprenaient la distribution de parts du Régime, conformément aux dispositions d’un contrat de franchisage, qui prévoyait le paiement de frais d’inscription (d’adhésion) en faveur de l’appelante.

 

[9]              Les personnes qui achetaient des parts du Régime (appelées « membres » ou « souscripteurs ») convenaient d’être liées par les dispositions d’une entente relative à une bourse d’études conclue avec la Fondation. L’entente relative à une bourse d’études devait être déposée avec un prospectus conformément à la législation provinciale applicable aux valeurs mobilières, et plus précisément conformément au Règlement C‑15 (le « Règlement C‑15 ») (pièce A‑1, onglet 1). Le prospectus (qui devait indiquer clairement la nature spéculative du régime de bourses d’études et le coût réel de participation au régime pour le souscripteur) faisait partie de l’entente relative à une bourse d’études. Selon les prospectus de 1998 et de 1999, le membre devait souscrire au moins deux parts du Régime et s’engager à effectuer des dépôts prédéterminés auprès du dépositaire [la banque chargée de recevoir les dépôts]. Les prospectus disaient également que des frais d’adhésion (d’inscription) de 100 $ la part ainsi que certains autres montants allaient être déduits du montant des dépôts afin de couvrir les frais d’administration du Régime. Plus précisément, les prospectus indiquent ce qui suit :

 

[traduction]

 

Frais d’adhésion et autres déductions

 

Aux termes de l’entente, le dépositaire est autorisé à déduire les montants suivants du dépôt ou de l’épargne selon le cas :

 

a)      Des frais (les « frais d’adhésion »[1]) de 100 $ la part sont payables au placeur [l’appelante] comme suit :

 

(i)                  les premiers 50 $ qui sont déposés pour une part;

(ii)                le reste des frais d’adhésion est payé au moyen de la déduction d’un montant représentant 50 p. 100 des dépôts subséquents, tant que la totalité des frais d’adhésion ne sera pas payée;

 

b)      Les honoraires annuels du dépositaire, selon l’entente, (les honoraires du dépositaire »[2]), de :

 

(i)                  3,50 $ plus la TPS, selon la méthode du dépôt unique

(ii)                6,50 $ plus la TPS, selon la méthode du dépôt annuel

(iii)               9,50 $ plus la TPS, selon la méthode du dépôt mensuel.

 

(Voir le prospectus de 1998, pièce A‑1, onglet 2, page 9, et le prospectus de 1999, pièce A‑1, onglet 3, page 10.)

 

[10]         L’alinéa 2a) des ententes relatives à une bourse d’études prévoit ce qui suit :

 

[traduction]

 

2. Dépôts

 

a)      En signant la demande [de bourse d’études], le membre s’engage :

 

(i)                 à s’inscrire au Régime;

(ii)                à faire des dépôts auprès du dépositaire (les « dépôts ») dans le compte établi par le dépositaire conformément à la méthode de dépôt indiquée dans la demande;

(iii)              à souscrire le nombre de parts du Régime indiqué dans la demande;

 

b)      Le membre autorise le dépositaire et le fiduciaire du dépositaire à déduire les montants suivants des dépôts ou de l’épargne, selon le cas :

 

(i)            les premiers 50 $ des dépôts pour chaque part et 50 p. 100 des dépôts subséquents, tant que les frais d’adhésion de 100 $ la part n’auront pas été payés;

(ii)           les honoraires du dépositaire, tels qu’ils sont indiqués dans le prospectus;

(iii)          les primes d’assurance collective, le cas échéant;

(iv)                 des frais annuels d’administration aux fins de la constitution du compte de résultat utilisé pour le paiement des frais d’administration futurs de la Fondation. Le montant annuel représente ½ de 1 % du capital et des intérêts afférents au dépôt, calculé chaque année et déduit chaque mois des intérêts;

(v)                   des frais individuels supplémentaires pour tout service spécial demandé par un membre, tels qu’ils sont indiqués dans le prospectus.

 

[Voir pièce A‑1, onglets 4 et 5.]

 

[11]         Monsieur Onofrio Loduca, directeur financier de l’appelante, a témoigné à l’audience. Il a déclaré qu’en fait, les membres pouvaient exercer divers choix à l’égard des dépôts : un seul paiement ou des paiements mensuels ou annuels, conformément à un calendrier de cotisation. Par conséquent, les paiements étaient habituellement effectués sur une période pouvant aller jusqu’à trois ans, en fonction de l’âge de l’enfant et de la rapidité avec laquelle le membre voulait accumuler des intérêts dans le cadre du Régime (transcription, pages 91 et 92).

 

[12]         Le prospectus et l’entente relative à une bourse d’études prévoyaient également qu’un membre pouvait se retirer du Régime n’importe quand au cours de la période de 60 jours suivant le dernier en date des jours suivants : le jour de la signature de la demande ou le jour du dépôt initial effectué aux termes de l’entente, sur avis écrit, l’avis devant être reçu au siège social de la Fondation au cours de cette période de 60 jours. Au moment du retrait, tous les dépôts que le membre avait effectués étaient remboursés à celui‑ci, à l’exception des primes d’assurance et des intérêts gagnés sur les dépôts. Les frais d’adhésion devaient être remboursés au membre.

 

[13]         Après la période de 60 jours susmentionnée, le membre pouvait encore mettre fin à sa participation au Régime. Au moment de pareil retrait, tous les dépôts devaient être remboursés au membre, moins les déductions effectuées sur ces dépôts, ce qui comprenait les frais d’adhésion, qui n’étaient pas remboursés au membre (voir le prospectus de 1998, pièce A‑1, onglet 2, pages 9 et 10; le prospectus de 1999, pièce A‑1, onglet 3, page 2; l’entente de 1998 relative à une bourse d’études, pièce A‑1, onglet 4, alinéas 5a) et b); l’entente de 1999 relative à une bourse d’études, pièce A‑1, onglet 5, alinéas 5a) et b)).

 

[14]         En outre, si le membre n’effectuait pas un dépôt lorsqu’il était tenu de le faire, la Fondation avisait le membre de pareil défaut, normalement dans un délai de 30 jours. L’omission du membre d’effectuer le dépôt requis dans les 60 jours suivant un tel avis mettait fin à sa participation au Régime, auquel cas le membre pouvait, dans un délai de trois ans, faire rétablir sa participation au Régime, ou demander le remboursement de toute l’épargne, sans les intérêts, moins les déductions déjà effectuées (y compris les frais d’adhésion). Si le membre n’exerçait pas de choix dans le délai de trois ans, l’épargne était virée au Fonds complémentaire (un fonds composé des intérêts qui s’accumulaient sur les fonds qui étaient dans le Fonds des bourses d’études) (voir les prospectus de 1998 et de 1999, pièce A‑1, onglet 2, page 10, et onglet 3, page 11; les ententes relatives à une bourse d’études de 1998 et de 1999, pièce A‑1, onglet 4, article premier et alinéa 5c), et onglet 5, alinéa 5c)).

 

[15]         Monsieur Loduca a expliqué qu’un membre, ou son fondé de pouvoir en cas d’invalidité ou de décès du membre, devait respecter le calendrier des dépôts dont il avait convenu (alinéa 4a) des ententes relatives à une bourse d’études, pièce A‑1, onglets 4 et 5) pour que le bénéficiaire puisse avoir droit à la pleine valeur à l’échéance du Régime (transcription, pages 129 et 130).

 

[16]         Madame Doreen Johnston qui, en sa qualité de vice‑présidente, Administration, et d’administratrice de l’appelante au cours de l’année d’imposition en question, supervisait le comité chargé des bourses d’études, a également témoigné. Elle a expliqué que le calendrier des dépôts indiquait les dates d’échéance des cotisations, étant donné que tous les régimes sont conçus de façon à rapporter à peu près le même montant, en intérêts, à leur date d’échéance. Le calendrier prédéterminé est en fait un programme obligatoire d’épargne pour les gens qui veulent continuer à participer au Régime, mais la personne qui, pour une raison ou une autre, veut se retirer du Régime n’est aucunement tenue de verser des cotisations (transcription, pages 160 et 161).

 

[17]         Le contrat de franchisage conclu entre la Fondation et l’appelante (pièce A‑1, onglet 6) prévoyait ce qui suit en ce qui concerne les frais d’inscription (d’adhésion) :

 

[traduction]

 

Droit de résiliation

 

6.         Si la personne qui souscrit une entente relative à une bourse d’études demande à la Fondation de résilier l’entente dans les 60 jours suivant l’acceptation de l’entente, la Fondation a le droit de résilier l’entente et de faire en sorte que soient remboursés à cette personne tous les fonds déposés auprès du dépositaire dans le cadre de l’entente, et ce, même si la Fondation a signé l’entente. Si la Fondation exerce ce droit, CFCA n’aura droit à aucun paiement à l’égard de l’entente et devra remettre à la Fondation tous les fonds qu’elle aura reçus à l’égard de l’entente, à défaut de quoi la Fondation pourra déduire le montant de ces fonds d’autres paiements qu’elle doit à CFCA.

 

[...]

 

            Paiements effectués par la Fondation en faveur de CFCA

 

8.         a)         La Fondation versera à CFCA un montant égal aux frais d’inscription à l’égard de toutes les ententes relatives à une bourse d’études vendues par CFCA, au fur et à mesure que ces frais deviendront exigibles.

 

            [...]

 

[18]         Monsieur Loduca a expliqué que, sur le plan de la comptabilité financière, l’appelante incluait immédiatement les frais d’adhésion (d’inscription) de 100 $ dans son revenu, alors qu’aux fins de l’impôt sur le revenu, elle incluait uniquement dans le revenu les frais qu’elle avait perçus des membres au fur et à mesure que ceux‑ci effectuaient les dépôts. L’appelante estimait ne pas avoir légalement droit aux frais d’adhésion tant que les dépôts n’étaient pas réellement effectués par les membres.

 

[19]         Monsieur Loduca a expliqué que cette approche avait été adoptée à cause du libellé de l’alinéa 8a) du contrat de franchisage, qui stipulait que les frais d’inscription devaient être versés à l’appelante [traduction] « au fur et à mesure que ces frais de[venaient] exigibles », c’est‑à‑dire lorsque la Fondation recevait les dépôts (transcription, page 36). Lors du contre‑interrogatoire, M. Loduca a déclaré que l’appelante interprétait ces termes, [traduction] « au fur et à mesure que ces frais deviendront exigibles » ainsi :

 

[traduction]

étant donné que la Fondation peut recevoir ces dépôts [des membres] et que les frais d’adhésion et les frais d’inscription sont retirés de ces dépôts, ils sont en mesure de transmettre ces frais au placeur [transcription, page 82].

 

[20]         Madame Johnston a également témoigné que le droit de la Fondation de recevoir les frais d’adhésion prenait uniquement naissance au moment où un contrat était signé ou à la date à laquelle le chèque pouvait être encaissé, selon la dernière en date des deux éventualités. Elle a ensuite donné des précisions en disant que les frais d’adhésion pouvaient uniquement être déduits des dépôts, que tant que des dépôts n’étaient pas effectués, aucuns frais d’adhésion n’étaient payés et qu’il n’y avait aucun moyen de contraindre un membre à effectuer un dépôt (transcription, pages 169 et 173).

 

[21]         Madame Johnston interprétait les termes [traduction] « au fur et à mesure que ces frais deviendront exigibles » comme voulant dire que le paiement en faveur de l’appelante n’était effectué que lorsque des dépôts étaient effectués et que les frais d’adhésion étaient déduits de ces dépôts. Elle a déclaré que si aucun dépôt n’était effectué, il n’y avait pas de frais d’inscription et que l’appelante ne pouvait pas exiger le paiement parce que les règlements régissant la Fondation et l’appelante permettaient uniquement la perception de frais si des dépôts étaient effectués (transcription, pages 177 et 178).

 

[22]         En fait, l’appelante n’a jamais facturé de montant à la Fondation et elle n’a jamais demandé à la Fondation de verser des fonds ou des sommes qui n’avaient pas été reçus des membres. Toutefois, M. Loduca a reconnu que l’acceptation par la Fondation de la demande d’un membre et de l’entente relative à une bourse d’études avait pour effet de déclencher automatiquement le droit de l’appelante de recevoir le montant de 100 $ à titre de commission (transcription, page 86). Dans les notes jointes aux états financiers de l’appelante pour l’exercice ayant pris fin le 31 décembre 1999, il est déclaré (note 1.b)) que l’appelante obtient les frais d’adhésion à titre de rémunération pour les services qu’elle fournit sur le plan de la distribution. Ces frais sont enregistrés au moment de la vente et sont perçus au fur et à mesure que des dépôts sont effectués aux termes du Régime (pièce A‑1, onglet 7, page 4).

 

[23]         En fait, aux fins de déclaration dans ses états financiers, l’appelante tenait le compte tout le long de l’année de chaque part vendue et de chaque vente acceptée par la Fondation. Aux fins comptables, par exemple lorsqu’il s’agissait de préparer des états financiers, on utilisait un modèle prévisionnel selon lequel la probabilité de recevoir des frais d’inscription avec le temps était prise en compte dans le calcul du revenu (les frais d’inscription à recevoir étant également traités comme des éléments d’actif – pièce A‑1, onglet 7, bilan, page 1), et des rajustements étaient effectués au moyen d’une provision ou d’une provision pour dépréciation pour les frais qui ne seraient pas perçus avec le temps (état des bénéfices non répartis dans les états financiers, pièce A‑1, onglet 7, page 2; transcription, pages 9, 10, 100 et 101). La moyenne historique des sommes à recevoir qui devenaient irrécouvrables était de 5,5 p. 100 (transcription, page 99).

 

[24]         Aux fins de l’impôt, dans le cas où elle devait rembourser les frais d’adhésion à un membre qui décidait de se retirer du Régime au cours des 60 premiers jours, l’appelante déclarait les frais d’adhésion comme s’ils avaient été reçus et elle effectuait une déduction du même montant lorsqu’elle remboursait l’argent au membre. Aucune déduction éventuelle n’était effectuée aux fins de l’impôt (transcription, pages 26 et 27).

 

[25]         Monsieur Kenneth Daniel Devine, qui était administrateur fiscal chez Allianz Life Insurance Co. et dirigeant de l’appelante, a également témoigné. Il a déclaré qu’il avait examiné les déclarations de revenus de l’appelante. Son témoignage n’a pas ajouté grand‑chose à celui des autres témoins. Il a reconnu que le contrat de franchisage conclu entre la Fondation et l’appelante devait être une entente légalement exécutoire, mais il a déclaré que l’appelante n’avait pas droit aux commissions lorsque les parts étaient vendues. Elles étaient enregistrées à titre [traduction] d’« argent reçu » (transcription, pages 212 et 213).

 

[26]         En outre, M. Loduca a reconnu que les dépenses engagées par l’appelante dans le cadre de la vente des parts vendues en 1999 (pièce R‑2) étaient déduites dans le calcul du revenu aux fins de l’impôt. Un montant d’environ 15 ou 16 millions de dollars sur les 18 millions de dollars imputables aux salaires et aux commissions se rapportait aux commissions versées aux représentants pour des ventes conclues en 1999 (transcription, page 108).

 

[27]         La preuve révélait également que l’appelante avait conclu des contrats d’affacturage de créances avec sa société mère américaine affiliée, en vendant ses créances (y compris les frais d’inscription à recevoir) en vue de financer ses activités. La société mère déterminait les chances qu’elle avait de recouvrer ces créances dans l’avenir et elle réduisait le prix d’achat au moyen d’un taux d’intérêt incluant le risque y afférent (transcription, pages 43, 122 et 123). Le taux d’actualisation était déterminé après qu’il eut été tenu compte des créances douteuses passées de l’appelante, de la période moyenne de perception par le passé des frais d’adhésion à recevoir et du taux préférentiel à la date de l’opération (voir la note 4 jointe aux états financiers, pièce A‑1, onglet 7, page 7).

 

[28]         Aux termes des documents intitulés : [traduction] « Ententes – vente de comptes » (les contrats d’affacturage de créances) produits sous la cote R‑2, onglets 4 et 5, l’appelante vendait à Allianz Life (la société mère) les frais d’inscription présents et futurs gagnés et à gagner par l’appelante au moyen de la vente de régimes de bourses d’études dans le cadre ordinaire de ses activités, et Allianz Life devait ensuite assumer les risques et les obligations se rattachant à la perception de ces frais. M. Loduca a expliqué que l’appelante transmettait le risque à sa société mère et qu’il était tenu compte de ce risque dans le taux d’actualisation à un taux estimatif, ce qui voulait dire que le risque pouvait en fait être plus élevé ou plus faible (transcription, pages 120 et 121). M. Loduca a déclaré qu’en cas de non‑paiement des créances, Allianz Life ne pouvait pas percevoir d’argent de la Fondation parce que la Fondation, qui était une entité constituée en société à but non lucratif, n’avait pas d’argent ni d’actifs (transcription, pages 125 et 140).

 

[29]         L’avocat de l’appelante a produit en preuve des extraits de la transcription de l’interrogatoire préalable de Mme Vanda Yantsis, agente des appels à l’Agence du revenu du Canada (l’« ARC »). Lors de l’interrogatoire préalable, Mme Yantsis a témoigné qu’au moment où elle avait ratifié la nouvelle cotisation ici en cause, elle était d’avis que l’appelante n’avait pas le droit d’exiger le paiement. L’intimée a depuis lors changé d’idée et elle est maintenant d’avis que, bien que l’appelante n’ait pas le droit de poursuivre les membres, elle a le droit, aux termes du contrat de franchisage, d’exiger le paiement de tout montant que la Fondation lui doit en vertu des dispositions de ce contrat (transcription, pages 253 à 257).

 

Les dispositions législatives

 

[30]         LIR

          ARTICLE 9

 

(1) Revenu. Sous réserve des autres dispositions de la présente partie, le revenu qu’un contribuable tire d’une entreprise ou d’un bien pour une année d’imposition est le bénéfice qu’il en tire pour cette année.

 


ARTICLE 12

 

(1) Sommes à inclure dans le revenu. Sont à inclure dans le calcul du revenu tiré par un contribuable d’une entreprise ou d’un bien, au cours d’une année d’imposition, celles des sommes suivantes qui sont applicables :

 

[...]

 

b) Sommes à recevoirles sommes à recevoir par le contribuable au titre de la vente de biens ou de la fourniture de services au cours de l’année, dans le cours des activités d’une entreprise, même si les sommes, en tout ou en partie, ne sont dues qu’au cours d’une année postérieure, sauf dans le cas où la méthode adoptée par le contribuable pour le calcul du revenu tiré de son entreprise et acceptée pour l’application de la présente partie ne l’oblige pas à inclure dans le calcul de son revenu pour une année d’imposition les sommes à recevoir qui n’ont pas été effectivement reçues au cours de l’année; pour l’application du présent alinéa, une somme est réputée à recevoir pour services rendus dans le cours des activités de l’entreprise à compter du premier en date des jours suivants :

 

(i) le jour où a été remis le compte à l’égard des services,

 

(ii) le jour où aurait été remis ce compte si la remise n’avait pas subi un retard indu;

 

Les arguments de l’appelante

 

[31]         L’appelante soutient qu’elle n’avait pas un droit inconditionnel clair de percevoir ou de recevoir les frais d’inscription. Selon l’appelante, le droit à ces frais dépendait entièrement de la survenance d’un événement incertain indépendant de sa volonté, c’est‑à‑dire que le droit de recevoir ces frais était entièrement fondé sur la décision unilatérale des membres de continuer à effectuer des dépôts. L’avocat de l’appelante a cité la décision M.N.R. v. John Colford Contracting Co. 60 DTC 1131, (1960), 26 D.L.R. (2d) 15 (C. de l’É.) dans laquelle le juge Kearney a interprété ainsi l’expression « amount receivable » (somme à recevoir) aux pages 1134 et 1135 :

 

[traduction]

 

Comme la Loi ne définit pas ce qu’est un montant « recevable », je pense qu’il convient d’essayer de trouver le sens ordinaire de ce terme dans le domaine dans lequel il est employé. Si l’on recourt à une définition de dictionnaire, on constate que, dans le Shorter Oxford, troisième édition, le mot anglais « receivable » (à recevoir) est défini comme désignant quelque chose qui est « susceptible d’être reçu ». Cette définition est si vaste qu’elle n’aide guère à trouver une solution. Elle désigne une chose quelconque pouvant être transmise à quelqu’un qui est susceptible de la recevoir. Cela pourrait s’appliquer à un legs prévu dans le testament d’un testateur vivant, mais personne ne considérerait un tel legs comme un montant « recevable » pour un légataire potentiel. En l’absence d’une définition législative contraire, le « bénéficiaire » doit avoir davantage qu’un droit précaire à la réception du montant en question; il doit être clair qu’il a un droit légal à la réception du montant, quoique ce droit puisse ne pas nécessairement être immédiat. Une autre définition, mentionnée par J. Cameron, est « à recevoir », et Eric L. Kohler, dans A Dictionary for Accountants, édition de 1957, à la p. 408, définit le mot anglais « receivable » comme signifiant « recouvrable, qu’il s’agisse ou non d’une somme due ». Je pense que ces deux définitions sous‑entendent l’existence d’un droit.

 

Cela nous amène à nous demander si, sur le plan juridique, chacune des retenues dans le cas qui nous occupe possédait la qualité requise pour s’entendre d’une somme à recevoir. Le président de la présente cour, qui parlait de la qualité requise pour constituer un revenu, a dit ce qui suit dans la décision Robertson Ltd. v. Minister of National Revenue, [1944] Ex. C.R. 170,182 [2 DTC 655, 660] :

 

Ces montants avaient‑ils, au moment où ils ont été reçus, ou ont‑ils acquis au cours de l’année de réception, la qualité de revenus, pour utiliser l’expression du juge Brandeis dans Brown v. Helvering (1934), 291 U.S. 193? À mon avis, l’expression qu’il a utilisée et que j’ai déjà mentionnée, établit un critère important pour déterminer si le montant reçu par un contribuable a la qualité de revenu. Son droit au paiement est‑il absolu, libre de toute restriction contractuelle ou autre quant à sa disposition, son usage ou sa jouissance? Autrement dit, est‑il possible de considérer une somme confiée à un contribuable comme un bénéfice ou un gain tiré de son entreprise durant toute la période où il garde cette somme, sous réserve de conditions précises et non remplies, et où le droit de la garder et d’en faire usage ne lui est pas encore dévolu et peut ne jamais lui être dévolu?

 

[32]         Le critère établi dans la décision Colford a été adopté par la majorité des juges de la Cour suprême du Canada dans l’arrêt Maple Leaf Mills Limited v. The Minister of National Revenue, 76 DTC 6182. Les juges, à la majorité, ont dit ce qui suit (page 6186) :

 

[...] Le droit de recourir à cette troisième source pour atteindre le montant du revenu minimum garanti n’a jamais été un droit précaire. Il est évident qu’à toutes les époques en cause, l’appelante avait droit à toutes les indemnisations qui, ensemble, devaient porter son revenu au niveau du minimum garanti. Il est également certain que le droit de l’appelante au montant de la dette résultant du déficit pour une année donnée était un droit inconditionnel. Elle était assurée de toucher ce montant quoique pas nécessairement sur le champ. J’accepte sans aucune hésitation le critère formulé par le juge Kearney dans Le ministre du Revenu national c. John Colford Contracting Company Limited [60 DTC 1131] (1960) Ex. C.R. 433, aux pp. 440 et 441. Cette Cour a rejeté sans motif écrit le pourvoi interjeté à l’encontre de cet arrêt. [62 DTC 1338] (1962) S.C.R. viii.

 

[33]         Quant à l’application de ce critère aux faits de la présente affaire, l’appelante a fait valoir qu’elle n’avait aucun droit clair et inconditionnel au revenu que représentaient les frais d’inscription impayés, revenu tiré de dépôts futurs possibles. Selon l’appelante, tout droit qu’elle possédait peut‑être était un droit précaire et les frais d’inscription ne peuvent pas être considérés comme étant [traduction] « recouvrables » d’une façon inconditionnelle, comme ayant été [traduction] « reçus » ou comme [traduction] « devant être reçus ». L’appelante a soutenu que son droit de recevoir le paiement des frais d’inscription et d’exiger le paiement prenait uniquement naissance lorsqu’un dépôt était réellement effectué par un membre. L’appelante a invoqué les paragraphes 7, 9 et 10 du Règlement C‑15, qui établissent le droit des membres de retirer des dépôts ou de cesser d’effectuer des dépôts n’importe quand, sans assumer d’obligations futures. L’appelante a en outre invoqué les termes exprès du prospectus et des ententes relatives à une bourse d’études, qui devaient être conformes au Règlement C‑15. Elle s’est également fondée sur ce qu’elle a qualifié d’unique interprétation raisonnable du contrat de franchisage et sur la preuve présentée par Doreen Johnston et par Onofrio Loduca. Elle a soutenu que, par conséquent, les frais d’inscription se rapportant à des dépôts futurs possibles n’étaient pas des sommes à recevoir en vertu de l’alinéa 12(1)b) de la LIR et qu’ils ne doivent pas être inclus dans son revenu de l’année 1999. De fait, selon l’appelante, un montant qui ne comportait aucun droit clair inconditionnel de recouvrement ou de réception n’avait pas à être inclus dans son revenu lorsque le droit à ce montant dépendait entièrement de tiers, à savoir les membres, qui pouvaient à leur guise effectuer ou ne pas effectuer des dépôts futurs.

 

[34]         En outre, l’appelante a affirmé que la méthode de déclaration employée par le ministre donnait une idée tout à fait inexacte de son revenu pour son année d’imposition 1999 dans la mesure où cette méthode omettait d’exclure les frais d’inscription se rapportant aux régimes vendus en 1998 et au cours d’années d’imposition antérieures.

 


Les arguments de l’intimée

 

[35]         L’intimée a soutenu que le montant de 11,8 millions de dollars représentant les commissions non perçues était à recevoir en 1999 même si le paiement n’était dû qu’au cours d’une année ultérieure; par conséquent, ces commissions devaient être incluses dans le revenu de l’année d’imposition 1999 conformément à l’alinéa 12(1)b) de la LIR.

 

[36]         À l’appui de ses prétentions, l’intimée s’est principalement fondée sur les dispositions du contrat de franchisage. Elle a soutenu que l’appelante avait un droit clair, quoique pas nécessairement immédiat, de recevoir les frais d’inscription, une fois qu’une entente relative à une bourse d’études avait été vendue et que la Fondation avait assumé l’obligation de payer ces frais sur acceptation de la vente d’une nouvelle part. Selon l’intimée, l’obligation de la Fondation de payer l’appelante prenait naissance à ce moment‑là, indépendamment de la question de savoir si le paiement des frais devait être fait immédiatement ou dans l’avenir. Contrairement à ce que soutenait l’appelante, cette obligation de payer ne prenait pas naissance au moment où les membres effectuaient leurs dépôts. L’intimée a soutenu que les points suivants étayent ses arguments :

 

·                        l’appelante a décrit les montants se rattachant aux frais d’inscription comme des « sommes à recevoir » aux fins comptables et elle a déclaré ces montants à titre d’éléments d’actif dans son bilan;

 

·                        l’appelante a vendu une partie des frais d’inscription à recevoir à sa société mère (Allianz). L’affacturage de ces sommes à recevoir est incompatible avec les assertions de l’appelante lorsque celle‑ci déclare qu’elle n’avait pas droit à ces montants tant que les dépôts n’étaient pas effectués par les membres.

 

[37]         L’intimée affirme que l’appelante comprenait que son droit au plein montant des frais d’inscription prenait naissance au moment où des parts étaient vendues à un membre, comme l’indiquait le libellé des divers contrats d’affacturage de créances et des états financiers approuvés par l’appelante et par la société mère de l’appelante.

 

[38]         Le préambule des contrats d’affacturage de créances disait que l’appelante vendait à sa société mère des créances qui représentaient [traduction] « des frais d’inscription véritables présents et futurs gagnés et à gagner par l’appelante au moyen de la vente de régimes de bourses d’études dans le cadre ordinaire de ses activités ». Le paragraphe 3 des contrats d’affacturage des créances disait également que le prix d’achat des comptes en souffrance vendus à la société mère devait être payable à l’appelante à la fin du mois au cours duquel lesdits comptes devenaient des sommes à recevoir au moyen de la vente d’un régime de bourse d’études ou de régimes de bourses d’études (pièce R‑2, onglets 4 et 5).

 

[39]         De l’avis de l’intimée, ce libellé montre que la vente d’un régime de bourse d’études était l’événement déclenchant le droit de l’appelante aux frais d’inscription en vertu de l’alinéa 8a) du contrat de franchisage.

 

[40]         Quant à l’obligation de l’appelante, en vertu du paragraphe 6 du contrat de franchisage, dans le cas où l’entente relative à une bourse d’études d’un souscripteur était résiliée dans un délai de 60 jours, de rembourser à la Fondation tout montant reçu de cette dernière, l’intimée est d’avis qu’il s’agit d’une condition résolutoire (et non d’une condition suspensive), dont l’existence ne change rien à la qualité de sommes à recevoir des frais d’inscription non perçus. L’intimée a cité l’arrêt Commonwealth Construction Co. v. The Queen, 84 DTC 6420 de la Cour d’appel fédérale (page 6424) :

 

[...] le dossier révèle que les droits de l’appelante sur les montants qui lui avaient été payés en 1974 et 1975 étaient « absolus et sans aucune restriction, contractuelle ou autre, quant à sa disposition, son usage ou sa jouissance ». Ils n’étaient assujettis à aucune condition précise et non exécutée. Une fois les conditions suspensives stipulées dans les lettres-contrats précitées échangées entre les parties exécutées, comme elles l’ont été, le droit de recevoir les fonds et de les garder s’était réalisé et était absolu. Il est exact qu’il pourrait être nécessaire de restituer les fonds en tout ou en partie si l’appel est accueilli. Mais, à mon avis, il s’agit là d’une condition résolutoire qui n’influe pas sur le droit absolu de l’appelante de les utiliser jusqu’à ce que cette condition se réalise. Selon moi, elle ne porte pas atteinte à leur caractère de revenu au moment de leur réception.

 

[Condition résolutoire]

 

Quant à la différence entre les effets d’une condition suspensive et ceux d’une condition résolutoire sur la question de la comptabilisation d’un revenu, le savant juge de première instance s’est appuyé sur une citation tirée de l’affaire Meteor Homes Ltd. v. Minister of National Revenue 61 DTC 1001, p. 1007 et 1008 qui justifie l’opinion que j’ai formulée plus haut :

 

...Mertens, Law of Federal Income Taxation, vol. 2, chap. 12, p. 127, examine « le problème du moment où les montants constituent ... des déductions pour le contribuable dans une comptabilité d’exercice ». Il en a parlé à la p. 132 dans les termes suivants :

 

                            Ce ne sont pas toutes les conditions qui empêchent la comptabilisation du revenu; l’éventualité doit être réelle et valable. Une condition qui suspend la création d’un droit légal de demander paiement exclut effectivement la comptabilisation du revenu jusqu’à ce que la condition se soit réalisée, mais la réalisation possible d’une condition résolutoire (qui entraîne la résolution d’une obligation) ne peut donner lieu à la remise à plus tard de la comptabilisation. (Les italiques sont de moi).

 

[41]         Enfin, l’intimée est d’avis que l’appelante ne peut pas demander à la présente cour d’enlever du revenu les sommes à recevoir qu’elle a déduites au cours de l’année d’imposition antérieure et qu’elle a incluses dans son revenu pour l’année visée par le présent appel (soit le montant de 13 442 628 $).

 

[42]         L’intimée a affirmé que la Cour ne devrait pas examiner cet argument puisque l’appelante ne l’a pas invoqué dans son acte de procédure. Elle a cité la décision Santoro et al. c. La Reine, 2004 DTC 3684, 2004 CCI 764, dans laquelle le juge Rip (tel était alors son titre) a décrit en ces termes la fonction des actes de procédure aux paragraphes 43 et 44 :

 

[43]      Selon les auteurs Williston et Rolls7, le rôle des actes de [procédure] se divise en quatre :

         [TRADUCTION]

1.     Définir avec clarté et précision la question qui donne lieu à un litige entre les parties.

2.     Prévenir honnêtement la partie adverse des arguments qui seront invoqués contre elle, afin qu’elle puisse faire porter sa preuve sur la question controversée. Un défendeur est en droit de savoir ce que le demandeur affirme contre lui. Le demandeur est en droit de connaître la nature de la défense qui lui sera opposée.

3.     Aider la cour à déterminer la véracité des allégations faites par les parties en litige.

4.     Constituer un dossier des points en litige soulevés dans la cause, de manière à prévenir de futurs procès sur les questions sur lesquelles on aura statué.

[44]      Les actes de [procédure] visent donc à informer les parties de la preuve qu’elles doivent réfuter au procès. Chacune énonce les faits qui sous-tendent sa thèse dans un acte de [procédure] de manière à ce que sa preuve soit bien définie et que les éléments de preuve pertinents puissent être présentés. Il n’est pas loisible au juge de première instance de se prononcer sur un point s’il n’a pas été soulevé dans un acte de [procédure] et qu’aucune preuve n’a été présentée à l’égard de ce point spécifiquement.

          ____________________

 

                7 The Law of Civil Procedure, Butterworth & Co. (Canada) Ltd., Toronto (1970), à la p. 637.

 

[43]         L’intimée a également invoqué les paragraphes 169(2.1) et 165(1.11) de la LIR en disant que l’appelante, en sa qualité de grande société, ne pouvait pas modifier son avis d’appel en vue de demander un redressement qu’elle ne mentionnait pas dans son avis d’opposition (il a été fait mention de la décision rendue par la Cour d’appel fédérale dans l’arrêt La Reine c. Potash Corp. of Saskatchewan Inc., 2004 DTC 6002, 2003 CAF 471).

 

La contre-preuve de l’appelante

 

[44]         En ce qui concerne ce dernier argument, l’appelante a répondu qu’elle ne soulevait pas de nouvelles questions ou qu’elle ne demandait pas de nouvelles formes de redressement, c’est‑à‑dire des questions et des redressements non mentionnés dans son avis d’opposition. En soutenant que la méthode de calcul du revenu employée par le ministre donne une idée tout à fait trompeuse étant donné que cette méthode ne supprime pas de montants du calcul à l’égard des régimes vendus avant l’année 1999, l’appelante, selon ce qu’elle affirme, répond directement aux hypothèses de fait figurant aux alinéas 10h) et j) ainsi qu’à un argument invoqué au paragraphe 17 de la réponse modifiée, lesquels sont libellés ainsi :

 

[traduction]

 

10.h)    L’inclusion des frais d’inscription à recevoir dans le calcul du bénéfice que l’appelante tirait de son entreprise donnait une idée exacte du revenu de l’appelante.

 

[...]

 

10.j)     L’exclusion des frais d’inscription à recevoir dans le calcul du bénéfice que l’appelante tirait de son entreprise donnait une idée inexacte du revenu de l’appelante.

 

[...]

 

 

17. Il soutient que l’inclusion des frais d’inscription à recevoir dans le calcul du revenu de l’appelante est conforme aux PCGR et donne une idée plus exacte du revenu de l’appelante.

 

 

[45]         L’appelante a uniquement présenté une preuve en vue de réfuter les hypothèses de fait de l’intimée. En ce qui concerne la [traduction] « règle de la grande société » invoquée par l’intimée, l’appelante a fait valoir que cette règle n’empêche pas un contribuable d’invoquer de nouveaux faits ou de nouveaux moyens pour démolir les hypothèses du ministre et pour répondre aux arguments du ministre (il a été fait mention de la décision rendue par la Cour dans l’affaire British Columbia Transit c. Canada, [2006] G.S.T.C. 103, 2006 CCI 437, où la position que la Cour d’appel fédérale avait adoptée dans l’arrêt Potash cité par l’intimée était examinée).

 

Analyse

 

I.                   Les frais d’inscription gagnés mais non encore reçus sont‑ils des sommes à recevoir à inclure dans le revenu conformément à l’alinéa 12(1)b) de la LIR?

 

[46]         Comme il en a été fait mention dans la décision Colford, l’expression « somme à recevoir » n’est pas définie dans la LIR. Dans cette décision, il a été conclu qu’une somme sera à recevoir si le bénéficiaire a un droit clair, quoique pas nécessairement immédiat, de la recevoir.

 

[47]         Dans l’affaire Colford, il s’agissait de savoir si la délivrance d’un certificat d’architecte constituait une condition suspensive liant la société contribuable, condition qui empêchait cette dernière de demander une retenue tant que le certificat n’était pas délivré. En Ontario, il a été conclu qu’un entrepreneur n’a aucun droit au montant d’une retenue tant que le certificat n’est pas délivré et que l’entrepreneur ne peut pas engager de poursuite avant la délivrance du certificat à moins qu’il ne soit clair que l’architecte a refusé sans motif légitime de délivrer le certificat. La Cour de l’Échiquier a dit que l’achèvement des travaux et l’acceptation par l’architecte sont des conditions suspensives qui devaient être remplies pour que le contribuable ait droit au paiement de la retenue. À titre de corollaire, la Cour de l’Échiquier a conclu que la retenue n’avait pas la qualité d’une somme à recevoir tant que l’architecte n’acceptait pas le travail.

 

[48]         En l’espèce, il faut se demander si l’appelante avait droit aux frais d’inscription au moment où les ententes relatives à une bourse d’études étaient vendues ou uniquement au moment où les membres effectuaient leurs dépôts. Est‑il possible de dire que le paiement des dépôts par les membres, conformément aux ententes relatives à une bourse d’études, constituait une condition suspensive liant l’appelante et l’empêchant de demander les frais d’inscription tant que les membres n’effectuaient pas les dépôts? L’appelante avait‑elle droit aux frais d’inscription avant le paiement des dépôts et aurait‑elle pu à juste titre engager une poursuite contre la Fondation avant que ces dépôts soient effectivement faits par les membres?

 

[49]         Le droit de l’appelante de recevoir les frais d’inscription à l’égard de la vente des ententes relatives à une bourse d’études trouve sa source dans le règlement provincial (le Règlement C‑15), dans le prospectus, dans les ententes relatives à une bourse d’études conclues entre la Fondation et les membres et dans le contrat de franchisage signé par la Fondation et par l’appelante, considérés dans leur ensemble. En effet, il faut examiner tous ces documents ensemble puisqu’ils dépendent les uns des autres et qu’aucun d’eux n’existerait en l’absence des autres.

 

[50]         Par conséquent, le contrat de franchisage vise à autoriser l’appelante à vendre les ententes relatives à une bourse d’études devant être conclues entre les membres et la Fondation sur acceptation de ces ententes par la Fondation et à accorder à l’appelante un droit exclusif à cet égard, le tout conformément à un prospectus qui doit être conforme au règlement provincial.

 

[51]         Selon le règlement provincial (le Règlement C‑15), le prospectus déposé à l’égard de la vente des ententes relatives à une bourse d’études doit faire une distinction fort claire entre la Fondation, qui est un organisme sans but lucratif, et le placeur, qui vend le Régime aux termes d’une entente relative à une commission (soit dans ce cas‑ci l’appelante). Le Règlement C‑15 établit les honoraires maximaux (y compris la commission) à payer à l’égard d’un régime et exige que le Régime accorde au souscripteur le droit de se retirer du Régime, sans qu’il lui en coûte quoi que ce soit, dans les 60 jours qui suivent la signature de l’entente, le souscripteur n’étant pas obligé de payer de frais en sus de ceux qu’il a déjà payés s’il veut se retirer du Régime après ce délai de 60 jours (pièce A‑1, onglet 1).

 

[52]         Le préambule du contrat de franchisage (pièce A‑1, onglet 6) dit que l’appelante (CFCA) [traduction] « veut aider la Fondation à promouvoir l’objet de la Fondation en encourageant les gens à conclure des ententes relatives à une bourse d’études ».

 

[53]         Le contrat de franchisage dit ensuite que les parties conviennent des conditions suivantes :

 

Paragraphe 2 : [traduction] « La Fondation accorde à [l’appelante] le droit exclusif, à l’échelle mondiale, d’encourager les gens à conclure des ententes relatives à une bourse d’études avec la Fondation. »

 

Paragraphe 3 : [traduction] « [L’appelante] fera tous les efforts nécessaires en vue de promouvoir l’objet de la Fondation et du [...] Régime en encourageant les gens [...] à conclure des ententes relatives à une bourse d’études. »

 

Paragraphe 6 : [traduction] « Si la personne qui souscrit une entente relative à une bourse d’études demande à la Fondation de résilier l’entente dans les 60 jours qui suivent l’acceptation de l’entente, [...] la Fondation a le droit de résilier l’entente et de faire en sorte que soient remboursés à cette personne tous les fonds déposés auprès du dépositaire dans le cadre de l’entente. Si la Fondation exerce ce droit, [l’appelante] n’aura droit à aucun paiement à l’égard de l’entente et devra remettre à la Fondation tous les fonds qu’elle aura reçus à l’égard de l’entente, à défaut de quoi la Fondation pourra déduire le montant de ces fonds d’autres paiements qu’elle doit à [l’appelante]. »

 

Paragraphe 8 : [traduction] « a) la Fondation versera à [l’appelante] un montant égal aux frais d’inscription à l’égard de toutes les ententes relatives à une bourse d’études vendues par [l’appelante] au fur et à mesure que ces frais deviendront exigibles.

 

b) [L’appelante] s’engage à fournir toute l’aide nécessaire à la Fondation afin de permettre à la Fondation d’administrer le Régime. En échange de l’aide de [l’appelante], la Fondation versera à [l’appelante], ou de la façon indiquée par [l’appelante], le plein montant des frais annuels déposés dans le compte de résultat auprès du fiduciaire responsable des bourses d’études et le plein montant des honoraires du dépositaire reçus par la Fondation à l’égard des ententes relatives à une bourse d’études conclues après la date des présentes et avant la date de la résiliation. »

 

[54]         Le contrat de franchisage est rédigé de façon à respecter les objectifs du règlement provincial, en laissant une certaine latitude aux souscripteurs, et en ne les obligeant pas à participer au Régime ou à continuer à en être membres.

 

[55]         Toutefois, les dispositions du contrat de franchisage portant sur la rémunération à verser à l’appelante par suite de la vente d’ententes relatives à une bourse d’études sont à mon avis rédigées de telle façon que l’appelante puisse affirmer avoir droit à cette rémunération dès la vente d’une entente relative à une bourse d’études, et ce, pour les motifs ci‑après énoncés.

 

[56]         Premièrement, le paragraphe 6 du contrat de franchisage prévoit que, si la Fondation exerce son droit de résiliation lorsqu’un souscripteur se retire du Régime dans les 60 premiers jours, [traduction] « [l’appelante] n’aura droit à aucun paiement », ce qui veut à mon avis dire, au contraire, que l’appelante a droit à ce paiement si le souscripteur n’exerce pas son droit de se retirer du Régime.

 

[57]         Deuxièmement, le paragraphe 8 prévoit que la Fondation doit verser à l’appelante, non pas les « frais d’inscription », mais un [traduction] « montant égal aux frais d’inscription » à l’égard de toutes les ententes relatives à une bourse d’études vendues. Si l’on compare ce paragraphe avec la disposition concernant la rémunération à verser à l’appelante pour l’aide qu’elle fournit aux fins de l’administration du Régime, nous constatons qu’aux termes de l’alinéa 8b), la Fondation doit payer [traduction] « le plein montant des frais annuels déposés dans le compte de résultat [...] et le plein montant des honoraires du dépositaire reçus par la Fondation à l’égard des ententes relatives à une bourse d’études ». L’alinéa 8b) ne parle pas d’« un montant égal », mais du [traduction] « plein montant des frais annuels déposés » et du [traduction] « plein montant des honoraires du dépositaire reçus par la Fondation ».

 

[58]         À mon avis, le contrat de franchisage a été libellé de façon que les frais d’administration soient payés lors de leur dépôt ou lors de leur réception par la Fondation, ce qui n’était pas précisé pour les frais d’inscription. L’alinéa 8a) emploie plutôt les mots [traduction] « un montant égal aux frais d’inscription à l’égard de toutes les ententes relatives à une bourse d’études vendues ».

 

[59]         Le fait que la Fondation devait payer les frais d’inscription au fur et à mesure qu’ils devenaient exigibles ne veut pas pour autant dire que l’appelante avait le droit de les recevoir uniquement lorsque la Fondation aurait reçu ces frais. Un montant égal aux frais d’inscription était payable par la Fondation dès que des ententes relatives à une bourse d’études étaient vendues, mais ce montant n’avait pas à être payé tant que les frais d’inscription n’étaient pas exigibles.

 

[60]         À mon avis, le paiement des dépôts par les membres ne constituait pas une condition suspensive liant l’appelante et l’empêchant de demander un montant égal aux frais d’inscription tant que les dépôts n’étaient pas effectués. L’appelante avait droit à un montant égal aux frais d’inscription dès que les ententes relatives à une bourse d’études étaient vendues. Comme la Cour suprême du Canada l’a dit dans l’arrêt Maple Leaf Mills, pour qu’un montant soit considéré comme une somme à recevoir au cours d’une année d’imposition, il y a deux conditions à remplir : (1) un droit à l’indemnité; (2) un accord obligatoire entre les parties (76 DTC 6182, page 6186).

 

[61]         Comme Mertens l’a dit dans l’extrait tiré de l’ouvrage intitulé : Law of Federal Income Taxation reproduit dans le passage de la décision Meteor Homes que la Cour d’appel fédérale a cité dans l’arrêt Commonwealth Construction, précité, page 6424, ce ne sont pas toutes les conditions qui empêchent la comptabilisation du revenu. La réalisation possible d’une condition résolutoire qui entraîne la résolution d’une obligation ne peut donner lieu à la remise à plus tard de la comptabilisation (ibid.). Si j’applique le principe que la Cour d’appel fédérale a adopté dans l’arrêt Commonwealth Construction, je conclus au vu du dossier que le droit de l’appelante à un montant égal aux frais d’inscription n’était assujetti à aucune restriction, et ce, bien qu’il eût peut‑être été nécessaire de rembourser l’argent provenant des frais d’inscription si le souscripteur se retirait du régime au cours des 60 premiers jours, et même si l’appelante n’avait peut‑être jamais reçu les frais d’inscription dans le cas où le souscripteur n’effectuait pas les dépôts. Le fait que les souscripteurs pouvaient choisir de se retirer du Régime constitue, à mon avis, une condition résolutoire qui n’empêchait pas la comptabilisation du revenu au cours de l’année où les ententes relatives à une bourse d’études étaient vendues par l’appelante.

 

[62]         À mon avis, ni le témoignage de M. Loduca ni celui de Mme Johnston ne contredisent cette conclusion. M. Loduca a reconnu dans son témoignage que c’était la vente des ententes relatives à une bourse d’études qui déclenchait le droit de recevoir les frais d’inscription. Mme Johnston a témoigné que le droit de la Fondation aux frais d’inscription prenait naissance au moment où un contrat était signé ou au moment de la signature du chèque, selon la dernière en date des deux éventualités, et que la Fondation ne pouvait pas contraindre un membre à effectuer un paiement. Lorsqu’elle a témoigné au sujet de son interprétation du contrat de franchisage, Mme Johnston a parlé du moment où les frais d’inscription devenaient payables à l’appelante, et non du moment où le droit de l’appelante prenait naissance.

 

[63]         Le fait que l’appelante devait être payée lorsque les dépôts devenaient exigibles ne change rien au fait que son droit de recevoir le montant prenait naissance dès que l’entente relative à une bourse d’études était signée et non lorsque la Fondation était tenue de payer (voir The Queen v. Derbecker, 84 DTC 6549 (CAF)). La possibilité que le souscripteur annule le régime ne veut pas non plus dire que le droit de l’appelante était incertain ou conditionnel (voir The Queen v. La Capitale, Compagnie d’Assurance Générale, 98 DTC 6428, page 6430).

 

[64]         Je suis également d’accord avec l’intimée lorsqu’elle affirme que la vente par l’appelante de ses créances à sa société mère et le fait que l’appelante inscrivait ces créances à titre d’éléments d’actif dans ses états financiers indiquent également que l’appelante estimait avoir le droit de recevoir les frais d’inscription au cours de l’année où ils étaient gagnés, c’est‑à‑dire au cours de l’année où les ententes étaient vendues.

 

[65]         Cette conclusion est conforme aux principes régissant l’interprétation des contrats commerciaux tels qu’ils sont reproduits dans la décision que la présente cour a rendue dans l’affaire Costco Wholesale Canada Ltd. c. Canada, [2009] G. S. T.C. 38, 2009 CCI 134 :

 

[17]     Les parties ont convenu que, lorsqu’il s’agit de répondre à cette question et d’interpréter ces contrats, les principes d’interprétation contractuelle à appliquer sont bien résumés dans l’arrêt 3869130 Canada Inc. v. I.C.B. Distribution Inc., de la Cour d’appel de l’Ontario :

 

[traduction]

 

31    [...]

 

D’une façon générale, [...] il faut interpréter un contrat commercial :

 

a)         globalement, de manière à attribuer un sens à toutes ses dispositions et à éviter une interprétation qui annulerait l’effet d’une ou de plusieurs dispositions,

 

b)         de façon à déterminer l’intention des parties conformément aux termes qu’elles ont utilisés dans le document écrit et compte tenu de la « présomption cruciale » selon laquelle les parties voulaient vraiment dire ce qu’elles ont dit,

 

c)         compte tenu de la preuve objective de la matrice factuelle sous‑tendant la négociation du contrat, indépendamment de l’intention subjective des parties, et (dans la mesure où le contrat renferme une ambiguïté),

 

d)         d’une façon conforme aux principes commerciaux reconnus et aux bonnes pratiques commerciales, en évitant toute absurdité sur le plan commercial.

 

[66]         Enfin, le fait que la Fondation était une société à but non lucratif et qu’elle ne possédait pas d’actifs n’influe pas sur ma décision. De fait, selon le Règlement C‑15, des fonds suffisants doivent être mis de côté en fiducie aux fins du paiement des frais d’administration des fonds détenus en fiducie par le dépositaire, et les ententes relatives à une bourse d’études prévoient que le dépositaire est autorisé à avoir un compte de résultat servant au paiement des frais d’administration futurs de la Fondation (sous‑alinéa 2b)(iv). Par conséquent, bien que la Fondation ne possède pas d’actifs, le fonds d’administration existait précisément aux fins du paiement des frais, y compris à mon avis les frais d’inscription gagnés qui devaient être payés lorsqu’ils devenaient exigibles.

 

[67]         Je conclus donc que les frais d’inscription devaient être déclarés au titre du revenu selon la méthode de la comptabilité d’exercice au cours de l’année où ils étaient gagnés, qui n’est pas nécessairement l’année au cours de laquelle ces frais devenaient exigibles ou l’année au cours de laquelle ces frais étaient payés.

 

II.      L’inclusion des frais d’inscription à recevoir dans le calcul du revenu de l’appelante pour l’année d’imposition 1999 donnait‑elle une idée plus exacte du revenu de l’appelante?

 

[68]         En somme, si le ministre avait raison d’inclure les frais d’inscription à recevoir dans le revenu au cours de l’année où ces frais étaient gagnés, il aurait dû exclure les frais d’inscription gagnés au cours d’années antérieures afin de donner une idée exacte du revenu de l’appelante en 1999. La preuve à l’appui est que, dans ses états financiers, l’appelante a adopté la méthode prévisionnelle qui est reconnue par le ministre et elle a déclaré un revenu avant impôts de 225 731 $ en 1999. Si l’appelante avait employé la même méthode aux fins de l’impôt sur le revenu, en faisant les rajustements appropriés, son revenu net aurait été de 514 610 $ (comme je l’expliquerai ci‑dessous) au lieu du montant de 2 009 856 $ qu’elle a déclaré (chiffre obtenu en enlevant les frais d’inscription gagnés en 1999 et en incluant les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999).

 

[69]         En adoptant la méthode prévisionnelle sans enlever les frais d’inscription gagnés au cours d’années antérieures, le ministre est arrivé à un montant de 13 305 885 $ au titre du revenu. Cela ne donne clairement pas une idée exacte du revenu de l’appelante en 1999.

 

[70]         Dans l’arrêt Canderel Limited v. The Queen, 98 DTC 6100, la Cour suprême du Canada a dit ce qui suit, à la page 6110 :

 

(1) La détermination du bénéfice est une question de droit.

 

(2) Le bénéfice tiré d’une entreprise pour une année d’imposition est déterminé en déduisant des revenus tirés de l’entreprise pour l’année en question les dépenses engagées pour gagner ces revenus : M.N.R. c. Irwin, précité, Associated Investors, précité.

 

(3) Dans la détermination du bénéfice, l’objectif est d’obtenir une image fidèle du bénéfice du contribuable pour l’année visée.

 

(4) Dans la détermination du bénéfice, le contribuable est libre d’adopter toute méthode qui n’est pas incompatible avec :

 

            a) les dispositions de la Loi de l’impôt sur le revenu;

 

            b) les principes dégagés de la jurisprudence ou les « règles de droit » établis;

 

            c) les principes commerciaux reconnus.

 

(5)        Les principes commerciaux reconnus, notamment ceux codifiés formellement dans les PCGR, ne sont pas des règles de droit mais des outils d’interprétation. Dans la mesure où ils peuvent influencer le calcul du revenu, ils ne le feront qu’au cas par cas, selon les faits relatifs à la situation financière du contribuable.

 

(6)        En cas de nouvelle cotisation, une fois que le contribuable a prouvé qu’il a donné une image fidèle de son revenu pour l’année, image compatible avec la Loi, la jurisprudence et les principes commerciaux reconnus, il incombe alors au ministre de prouver que le chiffre fourni ne donne pas une image fidèle ou qu’une autre méthode de calcul fournirait une image plus fidèle.

 

[71]         À mon avis, l’appelante a démontré que les états financiers préparés à l’aide de la méthode prévisionnelle, sur laquelle le ministre s’est fondé en incluant dans le revenu les frais d’inscription gagnés en 1999, mais non encore reçus, donnait une idée exacte du revenu en 1999. Comme il en a ci‑dessus été fait mention, le revenu avant impôts déclaré dans les états financiers est de 225 731 $.

 

[72]         Aux fins de l’impôt sur le revenu, si l’on effectue des rajustements sans déduire les frais d’inscription gagnés en 1999 (soit un montant de 11 842 789 $), le revenu déclaré doit s’élever à environ 410 017 $, comme le montre la pièce A‑3. La première colonne de la pièce A‑3 montre le revenu avant impôts indiqué dans les états financiers (225 731 $). Le premier élément, dans la deuxième colonne, est le revenu après impôts figurant dans les états financiers (75 245 $). Je tiens compte du fait que le montant de 75 245 $ n’inclut pas le montant de 13 442 628 $ (les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999), mais qu’il inclut le montant de 11 842 789 $ (les frais d’inscription gagnés en 1999, mais non encore reçus en 1999). Par conséquent, si l’on ajoute tous les rajustements de la deuxième colonne (à l’exception des 13 442 628 $ qui n’auraient pas dû être inclus pour l’année 1999, étant donné que ce montant représente les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999) au revenu net de 75 245 $, sans déduire les 11 842 789 $, on obtient un revenu de 410 017 $. Si l’on ajoute à ce chiffre le montant de 104 593 $ (soit l’avant-dernier élément de la troisième colonne), représentant les frais de congrès refusés, dont je ne suis pas ici saisie, le revenu à déclarer devrait être de 514 610 $.

 

[73]         Le ministre a conclu que le revenu de l’appelante, aux fins de l’impôt, s’élevait à 13 305 885 $[3] (voir la pièce A‑3, troisième colonne).

 

[74]         À mon avis, selon la prépondérance des probabilités, le montant de 514 610 $ donne une idée exacte du revenu de l’appelante pour l’année d’imposition 1999. En fait, sauf les rajustements se rapportant aux frais d’inscription, le ministre a accepté tous les rajustements apportés au revenu qui sont indiqués dans la pièce A‑3. Comme nous le savons, l’appelante a décidé de déclarer son revenu sans inclure les frais d’inscription gagnés, mais non encore reçus des souscripteurs, de sorte que son revenu déclaré aux fins de l’impôt était de 2 009 856 $. Par conséquent, l’appelante s’était déjà pénalisée en déclarant ce montant au titre du revenu plutôt qu’un montant de 514 610 $.

 

[75]         Les chiffres susmentionnés montrent sans aucun doute que le montant établi par le ministre au titre du revenu ne donne pas une idée exacte du revenu de l’appelante pour l’année 1999. Il y a une différence énorme entre le montant qui aurait en premier lieu dû être déclaré (514 610 $) ou même le revenu réellement déclaré par l’appelante (2 009 856 $) et le revenu établi par le ministre (13 305 885 $).

 

[76]         L’intimée a soutenu que l’appelante ne pouvait pas soutenir que les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999 devaient être déduits du revenu parce qu’elle n’avait pas invoqué ce point dans son acte de procédure. L’intimée s’est fondée à cet égard sur un extrait de l’ouvrage intitulé The Law of Civil Procedure, de Williston et Rolls, que le juge Rip, de la présente cour, avait cité avec approbation dans la décision Santoro, en soulignant l’importance des actes de procédure. La fonction des actes de procédure y a été décrite comme comportant quatre volets :

 

1.                 définir avec clarté et précision la question en litige entre les parties;

2.                 aviser raisonnablement la partie adverse de la preuve à réfuter, de façon qu’elle puisse faire porter sa preuve sur les questions divulguées;

3.                 aider la cour à déterminer la véracité des allégations faites par les parties;

4.                 constituer un dossier des points en litige soulevés dans la cause, de manière à prévenir des litiges futurs portant sur des questions qui ont déjà été tranchées.

 

[77]         Il est vrai que l’argument de l’appelante, lorsqu’elle s’est opposée à la nouvelle cotisation, était que les frais d’inscription gagnés en 1999 ne devaient pas être inclus dans le revenu étant donné qu’elle n’avait pas droit à ces frais. Toutefois, l’appelante s’est fondée sur les articles 9 et 12 de la LIR en demandant à la Cour d’annuler la nouvelle cotisation ici en cause.

 

[78]         En outre, l’intimée elle‑même, dans sa réponse modifiée à l’avis d’appel, a ouvert la porte à l’argument voulant que le revenu soit calculé de façon à donner une idée exacte du revenu de l’appelante.

 

[79]         En fin de compte, je dois décider si la nouvelle cotisation doit être confirmée. En l’espèce, la méthode de calcul du revenu constitue le fondement de la nouvelle cotisation. La détermination du bénéfice conformément à l’article 9 de la LIR est une question de droit. En calculant le revenu aux fins de la nouvelle cotisation, le ministre, délibérément ou non, n’a pas exclu du revenu les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999.

 

[80]         Eu égard aux circonstances, je conclus qu’il est plutôt malhonnête d’affirmer que la nouvelle cotisation doit être confirmée compte tenu du fait que l’appelante n’a pas expressément soutenu que les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999 devaient être déduits du revenu. À mon avis, il va implicitement de soi que, si l’appelante n’a pas réussi à convaincre la Cour qu’elle avait raison d’exclure de son revenu de l’année 1999 les frais d’inscription gagnés cette année‑là, les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999 doivent être exclus dans le calcul du bénéfice.

 

[81]         L’intimée ne peut pas déclarer qu’elle a été prise par surprise, ou qu’elle n’a pas été avisée d’une façon raisonnable de la preuve à réfuter. La question en litige se rapportait à la méthode à employer pour calculer le revenu. Il était certes loisible à l’appelante, lorsqu’il s’agissait de réfuter l’allégation selon laquelle son revenu, tel qu’il avait été établi dans la nouvelle cotisation, donnait une idée exacte de son bénéfice pour l’année d’imposition 1999, d’affirmer que le ministre n’avait pas déduit du revenu les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999.

 

[82]         Pour établir un parallèle avec la situation qui existait dans l’affaire Argus Holdings Limited v. The Queen, 2000 DTC 6681 (CAF), l’inclusion des frais d’inscription gagnés avant l’année 1999 dans le revenu de cette année‑là donnerait lieu à une distorsion énorme du revenu de l’appelante, car ce revenu ne représente pas le bénéfice de l’année d’imposition 1999, mais représente plutôt celui d’années antérieures. On n’obtiendrait donc pas une idée exacte du revenu si les frais d’inscription gagnés en 1999 et ceux qui ont été gagnés avant l’année 1999 étaient imposés au cours de l’année d’imposition 1999 de l’appelante.

 

[83]         En outre, le fait que, à moins que la nouvelle cotisation ne soit confirmée, l’appelante puisse éviter d’être imposée sur le montant qui n’a pas été inclus dans le revenu d’années antérieures à cause de la méthode que l’appelante a adoptée en déclarant son revenu aux fins de l’impôt n’est pas pertinent. On ne saurait invoquer ce fait pour justifier une nouvelle cotisation que le ministre n’est pas autorisé à établir en vertu de la LIR (voir Trom Electric Co. Ltd. c. La Reine, 2005 DTC 62, 2004 CCI 727)[4].

 

[84]         Enfin, en ce qui concerne l’argument de l’intimée selon lequel, conformément aux paragraphes 169(2.1) et 165(1.11) de la LIR, l’appelante, qui est une grande société, ne pouvait pas soulever une nouvelle question, c’est‑à‑dire une question n’ayant pas été soulevée dans l’avis d’opposition, l’appelante répond qu’elle ne soulève pas une nouvelle question, mais qu’elle fournit simplement de nouveaux faits ou de nouveaux moyens afin de démolir les hypothèses du ministre et de répondre à l’argument du ministre.

 

[85]         Dans la décision British Columbia Transit c. Canada, [2006] G.S.T.C. 103, 2006 CCI 437, le juge C. Miller, de la présente cour, en faisant des remarques au sujet de l’arrêt Potash invoqué par l’intimée, a dit ce qui suit :

 

39 Dans la présente affaire, l’intimée a affirmé que BC Transit n’a pas exposé dans l’avis d’opposition les faits relatifs au paiement des taxes foncières et des sous-loyers et les motifs quant à la question de la « contrepartie symbolique ». Elle n’a pas allégué de manquements quant à la question ou au redressement demandé.

 

40 Je n’estime pas que l’argument de l’intimée soit convaincant. L’affaire Potash ne portait pas sur l’absence de motifs ou de faits, mais plutôt sur le refus d’augmenter le montant en cause. Il n’y a aucun changement demandé à l’égard du montant en cause en l’espèce par rapport à ce qui était énoncé dans l’avis d’opposition, et la question en litige n’a pas changé non plus. La question en litige invoquée a toujours été le droit aux CTI. L’intimée a raison lorsqu’elle affirme que la question des taxes foncières n’a pas été soulevée dans les motifs ni dans les faits, mais j’estime que cela n’est pas fatal.

 

41 Dans l’arrêt Potash, la Cour a cité les propos suivants tenus par monsieur R. M. Beith, fonctionnaire au ministère des Finances, lors du congrès de 1994 de l’Association canadienne d’études fiscales :

 

[TRADUCTION]

 

                        La législation en question vise notamment à définir beaucoup plus tôt les questions contestées, de façon que l’obligation fiscale finale se rapportant à une année d’imposition puisse être déterminée en temps opportun.

 

                        Étant donné la complexité de la législation et le nombre de questions soulevées, les années d’imposition d’un nombre important de grandes sociétés sont longtemps demeurées en suspens pendant que des oppositions ou des appels étaient en instance, de sorte que ces sociétés ont pu soulever de nouvelles questions en se fondant sur de nouvelles interprétations et sur le résultat de décisions judiciaires contestées par d’autres contribuables.

 

                        Récemment, le vérificateur général et le Comité des comptes publics ont décelé un problème particulier. Une affaire portant sur le calcul de la « déduction relative aux ressources » qui avait abouti à une décision défavorable au ministère a donné lieu à des demandes qui étaient non seulement fondées sur les faits particuliers sur lesquels la cour s’était prononcée, mais aussi sur une nouvelle question se rapportant au calcul de la « déduction relative aux ressources ». Ces demandes, découlant directement et indirectement de la décision rendue par le tribunal, mettaient en cause des montants élevés, au titre de l’impôt et des intérêts.

 

                        En résumé, il est essentiel que les revenus soient davantage prévisibles et que les obligations potentielles soient donc déterminées et réglées dans un délai plus raisonnable.

 

42 Il en ressort que les éléments qui revêtent de l’importance pour le ministre sont la question et le montant en litige et non les motifs et les faits dont l’intimée invoque l’absence. Il serait beaucoup trop contraignant pour une grande société d’interpréter ces dispositions comme des dispositions qui la limitent aux seuls faits précisés à l’étape de l’avis d’opposition. Cela ne semble pas correspondre à l’effet recherché par l’article, si l’on tient compte des propos de M. Beith, ni à l’interprétation que la Cour d’appel fédérale en a fait dans Potash. Le libellé de l’article 306.1 lui-même évoque seulement les questions et le redressement. Fait intéressant, au Congrès sur la fiscalité de 1994, M. Beith a poursuivi en disant ceci au sujet de l’alinéa 165(1.11)c) (la disposition de la Loi de l’impôt sur le revenu équivalente à l’alinéa 301(1.2)c)) :

 

[TRADUCTION]

 

Cette exigence n’est pas différente de ce que la règle de droit exige actuellement de tous les contribuables. En outre, à l’inverse des exigences concernant la question et le montant, il est possible de soulever des faits et des motifs additionnels dans les appels.

 

Il s’agit certainement d’un point de vue sensé que je fais mien. Je conclus que BC Transit n’a pas enfreint les dispositions du paragraphe 301(1.2) et, par conséquent, l’article 306.1 n’est pas invoqué. BC Transit est libre d’alléguer que les paiements de taxes foncières et de sous-loyers sont des faits pertinents à la question de la contrepartie du bail.

 

[86]         En l’espèce, le ministre a établi le revenu de l’appelante, dans la nouvelle cotisation, à 13 305 885 $. Si l’appelante avait déclaré le revenu selon la méthode de la comptabilité d’exercice aux fins de l’impôt sur le revenu, comme elle l’a fait aux fins comptables, son revenu aurait dû s’élever à environ 514 610 $. Or, l’appelante a déclaré un revenu de 2 009 856 $. Elle ne demande pas de ramener son revenu à 514 610 $. Elle demande uniquement l’annulation de la nouvelle cotisation, qui indique un revenu de 13 305 885 $. Selon moi, le fait que l’appelante n’a pas mentionné expressément dans ses actes de procédure que le ministre n’avait pas soustrait les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999 en établissant son revenu pour l’année 1999 dans la nouvelle cotisation n’est pas fatal. Comme il en a déjà été fait mention, la chose est implicite dans ce cas‑ci et les actes de procédure permettent de déduire que l’appelante n’a pas accepté le montant que le ministre a calculé au titre du revenu. Les faits que l’appelante a présentés prouvaient selon la prépondérance des probabilités que le revenu, tel que le ministre l’avait établi dans la nouvelle cotisation, ne donnait pas une idée exacte du revenu de l’appelante pour l’année d’imposition 1999.

 

[87]         Pour les motifs susmentionnés, l’appel de la nouvelle cotisation datée du 27 août 2004 à l’égard de l’année d’imposition 1999 de l’appelante, laquelle a été établie par le ministre en vertu de la LIR, est accueilli et la nouvelle cotisation est déférée au ministre pour nouvel examen et nouvelle cotisation compte tenu du fait que le revenu imposable révisé de 13 305 885 $ ne représente pas le bénéfice de l’appelante pour cette année‑là. Le revenu net de 2 009 856 $ déclaré par l’appelante sera rétabli, avec l’ajout, toutefois, d’un montant de 104 593 $ représentant les frais de congrès dont la déduction a été refusée et dont le refus n’a pas été contesté par l’appelante dans le présent appel. La déduction du montant de 3 076 $ au titre de dons de bienfaisance que le ministre a admise n’est pas en litige. Les déductions supplémentaires admissibles, représentant une augmentation de la déduction se rapportant à des pertes d’années antérieures reportées prospectivement et une augmentation de la déduction pour amortissement que le ministre a admise afin de réduire l’obligation fiscale globale résultant de la nouvelle cotisation portée en appel (comme il en est fait mention au paragraphe 5 de l’avis d’appel), seront annulées comme l’appelante le demande à l’alinéa 36b) de l’avis d’appel.

 

[88]         À la demande des parties, des observations seront soumises à la Cour au sujet des dépens, par écrit ou oralement, au gré des parties, dans les 30 jours qui suivront la date du jugement modifié.

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 16e jour d’avril 2010.

 

 

« Lucie Lamarre »

Juge Lamarre

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 20e jour de septembre 2010.

 

 

 

Mario Lagacé, jurilinguiste

 


RÉFÉRENCE :                                  2010 CCI 161

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :      2004­4446(IT)G

 

INTITULÉ :                                       FONDS D’ÉDUCATION HÉRITAGE INC.

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Toronto (Ontario)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Les 25 et 26 novembre 2009

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Lucie Lamarre

 

DATE DU JUGEMENT MODIFIÉ : Le 16 avril 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Avocats de l’appelante :

Me William I. Innes

Me Angelo Gentile

 

 

Avocats de l’intimée :

Me Eric Noble

Me Bobby Sood

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                   Nom :                             William I. Innes

 

                   Cabinet :                         Fraser Milner Casgrain s.e.n.c.r.l.

                                                          Toronto (Ontario)

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada

 

 



[1]  « Frais d’adhésion » s’entend du montant de 100 $ la part déduit des dépôts par le dépositaire.

[2]  « Honoraires du dépositaire » s’entend des honoraires annuels du dépositaire versés à la Fondation pour lui rembourser ses frais.

[3] Ce chiffre comprend les frais d’inscription gagnés avant l’année 1999.

[4] Je dois ici dire que l’appelante n’a pas réellement évité d’être imposée sur le montant des frais d’inscription gagnés avant l’année 1999. Il est vrai qu’en 1998, l’appelante a déduit le montant de 13 442 628 $, mais elle a inclus dans son revenu de l’année 1998 les frais d’inscription gagnés avant l’année 1998 (voir la pièce R‑1).

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