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Dossier : 2009-3451(IT)I

ENTRE :

GERARD HUMBER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

____________________________________________________________________

 

Appel entendu le 28 avril 2010, à St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador)

 

 Devant : L’honorable juge Judith Woods

 

 Comparutions :

 

Représentant de l’appelant :

M. Fred Cole

 

Avocate de l’intimée :

Me Devon E. Peavoy

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

          L’appel interjeté de la cotisation établie en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu pour l’année d’imposition 2007 est rejeté.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 6e jour de mai 2010.

 

 

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2010.

 

 

 

François Brunet, jurilinguiste.


 

 

 

 

Référence : 2010 CCI 253

Date : 20100506

Dossier : 2009-3451(IT)I

ENTRE :

GERARD HUMBER,

appelant,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

 

[traduction française officielle]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

La juge Woods

 

[1]     En l’espèce, la Cour est appelé à décider si l’appelant, Gerard Humber, a droit à un crédit d’impôt pour emploi à l’étranger relativement à l’emploi d’enseignant qu’il a exercé au Qatar.

 

[2]     L’appelant est un ingénieur qui a été employé pour enseigner le génie par le College of the North Atlantic (le « CNA ») à son campus de Doha, au Qatar. Le CNA est basé à St. John’s, à Terre‑Neuve‑et‑Labrador.

 

[3]     Une cotisation a été établie à l’égard de l’appelant en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») relativement à l’année d’imposition 2007 par laquelle il lui a été refusé un crédit d’impôt pour emploi à l’étranger de 9 080,80 $.

 

[4]     En vertu d’un contrat conclu avec l’État du Qatar, le CNA a établi, exploite et administre un collège d’arts appliqués et de technologie à Doha, au Qatar.

 

[5]     Selon le site Web du CNA, le campus du Qatar dispense des programmes en sciences de la santé, en technologies de l’information, en techniques du génie et en gestion. Le campus comporte aussi une école de sécurité et un centre d’études financières et bancaires.

 

Analyse

 

[6]     L’article 122.3 de la Loi prévoit un crédit d’impôt pour le particulier résidant au Canada qui travaille à l’étranger pour un employeur canadien. Selon les documents budgétaires, l’objet principal du crédit d’impôt est d’aider les entreprises canadiennes qui emploient des Canadiens à soumissionner des contrats à l’étranger. L’idée est de permettre aux entreprises canadiennes de réduire leurs coûts de main‑d’œuvre.

 

[7]     Cette disposition est reproduite ci‑dessous, et le passage pertinent a été souligné :

 

122.3(1) Déduction de l’impôt payable en cas d’emploi à l’étranger – Lorsqu’un particulier réside au Canada au cours d’une année d’imposition et que, tout au long d’une période de plus de 6 mois consécutifs ayant commencé avant la fin de l’année et comprenant une fraction de l’année (appelée la « période admissible » au présent paragraphe) :

 

a) d’une part, il a été employé par une personne qui était un employeur déterminé, dans un but autre que celui de fournir des services en vertu d’un programme, visé par règlement, d’aide au développement international du gouvernement du Canada;

 

b) d’autre part, il a exercé la totalité, ou presque, des fonctions de son emploi à l’étranger :

 

(i) dans le cadre d’un contrat en vertu duquel l’employeur déterminé exploitait une entreprise à l’étranger se rapportant à, selon le cas :

 

(A) l’exploration pour la découverte ou l’exploitation de pétrole, de gaz naturel, de minéraux ou d’autres ressources semblables,

 

(B) un projet de construction ou d’installation, ou un projet agricole ou d’ingénierie,

 

(C) toute activité visée par règlement,

 

(ii) dans le but d’obtenir, pour le compte de l’employeur déterminé, un contrat pour la réalisation des activités visées à la division (i)(A), (B) ou (C),

 

peut être déduite du montant qui serait, sans le présent article, l’impôt à payer par le contribuable pour l’année en vertu de la présente partie une somme égale à la fraction de l’impôt qu’il est par ailleurs tenu de payer pour l’année en vertu de la présente partie que représente le moindre des éléments suivants :

 

c) la fraction de 80 000 $ que représente par rapport à 365 le nombre de jours :

 

(i) d’une part, compris dans la partie de la période admissible qui est au cours de l’année,

 

(ii) d’autre part, au cours desquels le particulier résidait au Canada;

 

d) 80 % de son revenu pour l’année tiré de cet emploi et pouvant raisonnablement se rapporter aux fonctions exercées au cours des jours mentionnés à l’alinéa c),

 

par rapport à :

 

e) l’excédent éventuel du montant applicable suivant :

 

(i) si le particulier réside au Canada tout au long de l’année, son revenu pour l’année,

 

(ii) s’il est un non-résident à un moment de l’année, le montant déterminé selon l’alinéa 114a) à son égard pour l’année,

 

sur :

 

(iii) le total des montants représentant chacun une somme déduite en application de l’article 110.6 ou de l’alinéa 111(1)b) ou déductible en application des alinéas 110(1)d.2), d.3), f), g) ou j) dans le calcul de son revenu imposable pour l’année.

 

(1.1) Revenu exclu – Aucun montant ne peut être inclus en application de l’alinéa (1)d) au titre du revenu d’un particulier pour une année d’imposition tiré de son emploi auprès d’un employeur si les conditions suivantes sont réunies :

 

a) l’employeur exploite une entreprise de services qui compte un maximum de cinq employés à plein temps tout au long de l’année;

 

b) le particulier :

 

(i) a un lien de dépendance avec l’employeur ou est son actionnaire déterminé,

 

(ii) si l’employeur est une société de personnes, a un lien de dépendance avec l’un de ses associés ou est l’actionnaire déterminé de celui-ci;

 

c) n’était l’existence de l’employeur, il serait raisonnable de considérer le particulier comme l’employé d’une personne ou d’une société de personnes qui n’est pas un employeur déterminé.

 

(2) Définitions – Les définitions qui suivent s’appliquent au paragraphe (1).

 

« employeur déterminé »

 

a) Personne résidant au Canada;

 

b) société de personnes dont la valeur totale des participations appartenant à des personnes résidant au Canada ou à des sociétés contrôlées par des personnes résidant au Canada est supérieure à 10 % de la juste valeur marchande totale de toutes les participations dans la société de personnes;

 

c) société qui est une société étrangère affiliée d’une personne résidant au Canada.

 

« impôt qu’il est par ailleurs tenu de payer pour l’année en vertu de la présente partie » ou « impôt payable par ailleurs en vertu de la présente partie pour l’année » Le montant qui, sans le présent article, les articles 120 et 120.2, le paragraphe 120.4(2) et les articles 121, 126, 127 et 127.4, correspondrait à l’impôt payable en vertu de la présente partie pour l’année.

 

[Non souligné dans l’original.]

 

[8]     Le différend porte sur le sous‑alinéa 122.3(1)b)(i) de la Loi, lequel exige que les fonctions de l’emploi soient exercées dans le cadre d’un contrat en vertu duquel l’employeur exploite une entreprise à l’étranger se rapportant à l’une des activités précisées à cette disposition. La Cour doit répondre à la question centrale suivante : le CNA exploitait-il une entreprise ayant trait à un projet d’ingénierie?

 

[9]     Le représentant de l’appelant a semblé avancer deux moyens distincts pour soutenir que cette exigence est remplie.

 

[10]    D’abord, il a soutenu qu’il existait un lien entre l’entreprise exploitée par le CNA et les entreprises pétrolières exploitées par des sociétés contrôlées par l’État du Qatar.

 

[11]    Le représentant de l’appelant n’a pas expliqué ce lien aussi clairement que je l’aurais souhaité. L’appelant a témoigné que bon nombre de ses étudiants en génie étaient employés par des sociétés pétrolières appartenant à l’État. De plus, l’État du Qatar aurait participé à l’administration du campus du Qatar parce que certains de ses représentants siégeaient au conseil d’administration du campus. La thèse de l’appelant semble être que le contrat liant le CNA avec l’État du Qatar soutenait les projets d’ingénierie menés par les entreprises pétrolières.

 

[12]    Le représentant de l’appelant a avancé que le sous‑alinéa 122.3(1)b)(i) de la Loi n’exige pas que le lien entre l’entreprise du CNA et l’une des activités énumérées à cette disposition soit étroit. Il serait suffisant que l’entreprise « se rapport[e] » à l’une de ces activités.

 

[13]    Je conviens, avec le représentant de l’appelant, que le libellé du sous‑alinéa 122.3(1)b)(i) de la Loi a une portée extrêmement large (voir Nowegijick v. The Queen, 83 DTC 5041 (CSC)). Cela dit, il faut quand même faire l’analyse contextuelle et téléologique de cette disposition.

 

[14]    Manifestement, il existait un certain lien entre l’entreprise du CNA et les projets d’ingénierie en question. Toute formation technique de la nature de celle qu’offre le CNA soutiendra les activités commerciales que les étudiants pourraient mener par la suite.

 

[15]    Cependant, le lien entre la formation fournie par un collège d’enseignement général et les activités commerciales ultérieures est ténu. Un lien si faible ne saurait correspondre à l’intention exprimée par le législateur à l’article 122.3 de la Loi.

 

[16]    En l’espèce, il est possible qu’il ait existé un lien plus important entre l’entreprise du CNA et les entreprises pétrolières de l’État. Toutefois, les éléments de preuve produits étaient insuffisants pour le démontrer. Je tiens à souligner qu’aucun administrateur du CNA n’a témoigné à l’audience.

 

[17]    Selon le deuxième moyen avancé par l’appelant, le fait d’enseigner le génie constitue en soi un projet d’ingénierie.

 

[18]    À mon avis, cette interprétation sollicite le sens ordinaire de l’expression « projet d’ingénierie » au-delà de celui que le législateur a vraisemblablement voulu lui donner. En général, il y a une différence entre « enseigner » et « faire ».

 

[19]    Le représentant de l’appelant a cité la définition donnée à la [traduction] « pratique du génie » dans la Engineers and Geoscientists Act, 2008 [la loi sur les ingénieurs et les géoscientifiques] de Terre‑Neuve‑et‑Labrador. Il a dit que cette définition englobe l’enseignement du génie.

 

[20]    L’avocate de l’intimée soutient que l’inclusion de l’enseignement du génie dans la « pratique du génie » par la loi provinciale sollicite ce terme au‑delà de son sens normal. Selon elle, ce sens élargi est souvent utilisé dans des régimes de réglementation des professions afin d’atteindre des objectifs législatifs précis.

 

[21]    Je retiens la thèse de l’intimée à cet égard. L’enseignement du génie ne fait pas partie de ce qui est normalement considéré comme un projet d’ingénierie.

 

[22]    Vu les éléments de preuve dont j’ai été dûment saisie, je conclus que l’appelant n’a pas respecté les exigences de l’article 122.3 de la Loi. L’appel est rejeté.

 

 

 

Signé à Ottawa, Canada, ce 6e jour de mai 2010.

 

 

 

« J. M. Woods »

Juge Woods

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 18e jour de novembre 2010.

 

 

 

François Brunet, jurilinguiste.


 


RÉFÉRENCE :

2010 CCI 253

 

No DU DOSSIER DE LA COUR :

2009-3451(IT)I

 

INTITULÉ :

Gerard Humber c. Sa Majesté la Reine

 

LIEU DE L’AUDIENCE :

St. John’s (Terre‑Neuve‑et‑Labrador)

 

DATE DE L’AUDIENCE :

Le 28 avril 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :

L’honorable juge J. M. Woods

 

DATE DU JUGEMENT :

Le 6 mai 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Représentant de l’appelant :

M. Fred Cole

 

Avocate de l’intimée :

Me Devon E. Peavoy

 

AVOCAT INSCRIT AU DOSSIER :

 

Pour l’appelant :

 

Nom :

s.o.

 

Cabinet :

 

 

Pour l’intimée :

Myles J. Kirvan

Sous-procureur général du Canada

Ottawa, Canada

 

 

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