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Dossier : 2010-277(IT)I

ENTRE :

CHRISTINA THOMPSON,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

____________________________________________________________________

Appel entendu le 16 juin 2010 à Ottawa, Canada

 

Devant : L’honorable juge Wyman W. Webb

 

Comparutions :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocat de l’intimée :

Me Andrew Miller

 

____________________________________________________________________

 

JUGEMENT

 

L’appel interjeté par l’appelante à l’encontre d’une pénalité imposée en application du paragraphe 163(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu relativement à la déclaration de revenu que l’appelante avait produite pour 2007 est accueilli, et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation eu égard au fait que ladite pénalité est annulée.

 

L’intimée paiera à l’appelante des dépens de 500 $.

 

Signé à Halifax (Nouvelle‑Écosse), ce 19e jour de juillet 2010.

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de septembre 2010.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur.


 

 

Référence : 2010 CCI 381

Date : 20100719

Dossier : 2010-277(IT)I

ENTRE :

CHRISTINA THOMPSON,

appelante,

et

 

SA MAJESTÉ LA REINE,

intimée.

 

[TRADUCTION FRANÇAISE OFFICIELLE]

 

 

MOTIFS DU JUGEMENT

 

 

Le juge Webb

 

[1]              La question en litige dans le présent appel est de savoir si la diligence raisonnable invoquée par l’appelante peut être admise comme moyen de défense contre une pénalité imposée en application du paragraphe 163(1) de la Loi de l’impôt sur le revenu (la « Loi ») relativement à certains revenus de placement que l’appelante avait omis d’inclure dans la déclaration de revenu qu’elle a produite pour 2007. Le paragraphe 163(1) de la Loi prévoit ce qui suit :

 

163  (1) Toute personne qui ne déclare pas un montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une déclaration produite conformément à l’article 150 pour une année d’imposition donnée et qui a déjà omis de déclarer un tel montant dans une telle déclaration pour une des trois années d’imposition précédentes est passible d’une pénalité égale à 10 % du montant à inclure dans le calcul de son revenu dans une telle déclaration, sauf si elle est passible d’une pénalité en application du paragraphe (2) sur ce montant.

 

[2]              La pénalité prévue au paragraphe 163(1) de la Loi est imposée à la personne qui ne déclare pas, dans sa déclaration de revenu produite pour une année donnée, un revenu qui aurait dû être inclus dans une telle déclaration, si la personne a déjà omis de déclarer un revenu qui aurait dû être inclus dans une déclaration de revenu produite pour une des trois années d’imposition précédentes. L’appelante reconnaît dans son avis d’appel qu’elle avait omis d’inclure un montant dans sa déclaration de revenu pour 2006, ce montant étant de 868 $.

 

[3]              L’appelante déclare dans la réponse qu’elle avait omis d’inclure dans sa déclaration de revenu pour 2007 des revenus de dividendes de 3 336 $ et des revenus d’intérêt de 17 043 $. L’appelante était l’unique témoin à l’audience. Le seul montant que l’appelante a mentionné tout au long de son témoignage comme étant le montant qu’elle avait omis d’inclure dans sa déclaration de revenu pour 2007 était de 17 043 $. Le type de revenu n’a pas été précisé. Il a été seulement établi qu’il s’agissait d’un revenu qui devait être déclaré dans un feuillet T5. L’appelante a déclaré qu’elle n’avait pas reçu le feuillet T5 relatif à ce revenu et j’accepte son témoignage.

 

[4]              L’appelante a toutefois inclus dans son recueil de documents l’avis de nouvelle cotisation qu’elle avait reçu pour 2007. Il est mentionné dans l’avis de nouvelle cotisation que le revenu supplémentaire non déclaré dans la déclaration de revenu de l’appelante pour 2007 était de 20 829 $ (ce qui représente 450 $ de plus que la somme de 3 336 $ et de 17 043 $). Le type de revenu n’est pas précisé dans l’avis de nouvelle cotisation. Étant donné que j’ai conclu que la diligence raisonnable est un moyen de défense dont peut se prévaloir l’appelante, il n’est pas nécessaire d’établir le montant exact qui serait utilisé pour fixer le montant de la pénalité.

 

[5]              Après l’établissement de la nouvelle cotisation de l’appelante pour défaut de déclaration des revenus de placement en 2006, l’appelante tenait à ce que le problème ne se reproduise pas. TD Waterhouse détient et gère les placements de l’appelante. Paul Debanne est le conseiller financier de l’appelante chez TD Waterhouse depuis plusieurs années. Lors de l’entrevue que l’appelante a eue avec son conseiller financier au mois de novembre 2007, elle a exprimé son inquiétude quant au fait qu’elle n’avait pas reçu son feuillet T3 pour 2006. Le père de l’appelante n’avait pas non plus reçu son feuillet T3 pour les revenus de placement pour 2006 et une nouvelle cotisation avait été également établie à son égard. L’appelante voulait faire en sorte qu’il ne lui manque aucun feuillet d’impôt dans ses déclarations de revenus ultérieures. Paul Debanne a conseillé à l’appelante de communiquer avec son assistante au mois d’avril 2008 afin de vérifier si elle avait tous les feuillets de renseignement pour 2007 avant de produire sa déclaration de revenu pour 2007.

 

[6]              Le 7 avril 2008, l’appelante a envoyé un courriel à l’assistante de Paul Debanne (Tina Lucas) pour vérifier si elle avait tous les feuillets d’impôt nécessaires. Elle avait envoyé en pièce jointe une liste qui mentionnait six feuillets T3, deux feuillets T4RIF et deux feuillets T5. Ces feuillets faisaient état du nom de l’émetteur, du type de revenu et du montant du revenu. Le montant total pour tous les feuillets d’impôt mentionnés dans la liste s’élevait à 51 237 $. Tina Lucas a confirmé par courriel (aussi envoyé le 7 avril 2008) que les feuillets d’impôt mentionnés par l’appelante reflétaient les montants de son compte.

 

[7]              L’appelante s’en remettait à son conseiller financier pour toutes les décisions en matière de placement relatives à son compte et recevait simplement une somme mensuelle de 3 500 $ (qui donnerait un total annuel de 42 000 $). L’appelante a remarqué que le revenu qu’elle avait déclaré pour 2007 (environ 50 000 $) était inférieur à son revenu total pour 2006 (environ 57 600 $), mais elle a déclaré qu’elle avait supposé qu’une baisse du marché en était la cause. Le revenu total déclaré pour 2007 représentait environ 87 % de son revenu total pour 2006. Bien qu’il y ait eu une diminution de 13 %, son revenu était déposé dans son compte TD Waterhouse et elle ne l’a donc pas reçu directement. TD Waterhouse, qui avait reçu le revenu, avait confirmé que l’appelante avait tous ses feuillets d’impôt pour 2007. En confirmant qu’elle avait tous ses feuillets d’impôt pour 2007, TD Waterhouse reconnaissait qu’en déclarant le revenu figurant sur ces feuillets, l’appelante déclarerait tous ses revenus de placement. Le revenu manquant n’était pas inclus dans ces feuillets d’impôt.

 

[8]              Dans Saunders c. La Reine, 2006 CCI 51, 2006 D.T.C. 2267, [2006] 2 C.T.C. 2255, la juge Woods a déclaré ce qui suit :

 

12 La pénalité visée par le paragraphe 163(1) est un exemple d’un cas de responsabilité stricte, même si la Cour a déjà jugé que cette pénalité pouvait être annulée si le contribuable réussissait à établir qu’il avait fait preuve de diligence raisonnable.

 

[9]              Dans Dunlop v. La Reine, 2009 CCI 177, 2009 D.T.C. 650, [2009] 6 C.T.C. 2223, le juge Boyle a réitéré la déclaration selon laquelle la pénalité ne s’appliquera pas si le contribuable « peut prouver qu’il a montré le niveau requis de diligence raisonnable ».

 

[10]         Le juge Létourneau, s’exprimant au nom de la Cour d’appel fédérale dans le récent arrêt Les Résidences Majeau Inc. c. La Reine, 2010 CAF 28, a déclaré ce qui suit :

 

7 Quant à la pénalité, nous sommes satisfaits que le juge n’a pas commis d’erreur en la maintenant. Pour y échapper, l’appelante devait établir qu’elle avait fait preuve de diligence raisonnable.

 

8 Selon l’arrêt Corporation de l’école polytechnique c. Canada, 2004 CAF 127, un défendeur bénéficie de la défense de diligence raisonnable s’il établit l’une ou l’autre des deux choses suivantes : soit qu’il a commis une erreur de fait raisonnable, soit qu’il a pris des précautions raisonnables pour empêcher que ne se produise l’évènement qui donne naissance à la pénalité.

 

9 L’erreur de fait raisonnable emporte un double test : subjectif et objectif. Le test subjectif est satisfait si le défendeur établit qu’il s’est mépris en ce qu’il a cru en une situation de fait qui, si elle avait existé, aurait éliminé le caractère fautif de son geste ou de son omission. En outre, pour que cet aspect de la défense opère, il faut aussi que l’erreur soit raisonnable, i.e. une erreur qu’une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commise. Il s’agit là du test objectif.

 

10 Le deuxième volet de la défense requiert, tel que déjà mentionné, que des gestes soient posés ou des mesures prises pour éviter l’événement qui engendre la pénalité.

 

[11]         Même si la pénalité en cause n’est pas précisée dans l’arrêt de la Cour d’appel fédérale, il ressort de la décision[1] dont il a été interjeté appel devant la Cour d’appel fédérale que la pénalité en cause était celle qui, avant le 1er avril 2007, était imposée en vertu de l’article 280 de la Loi sur la taxe d’accise. Le moyen de défense fondé sur la diligence raisonnable était également invoqué relativement à l’imposition de cette pénalité (voir Pillar Oilfield Projects Ltd. v. The Queen, [1993] G.S.T.C. 49).

 

[12]         J’estime que l’appelante a démontré qu’elle avait fait preuve de diligence raisonnable. L’appelante avait été induite en erreur quant à la situation factuelle de savoir si elle avait reçu tous ses feuillets d’impôt concernant ses placements auprès de TD Waterhouse. Elle croyait qu’elle avait tous ses feuillets d’impôt et, par conséquent, qu’en déclarant le revenu figurant sur ces feuillets elle déclarait tous ses revenus de placement. Il était légitime de sa part de supposer qu’elle était en possession de tous ses feuillets (et par conséquent de tous ses revenus de placement) parce qu’elle avait vérifié auprès de TD Waterhouse (qui détenait ses placements) pour obtenir confirmation qu’elle avait tous ses feuillets. TD Waterhouse a confirmé que tel était le cas. L’erreur de l’appelante de ne pas déclarer le revenu tel qu’il figurait sur le feuillet T5 manquant était une erreur commise de bonne foi, et une personne raisonnable placée dans les mêmes circonstances aurait commis la même erreur.

 

[13]         Je suis également d’avis que l’appelante a pris toutes les précautions raisonnables pour éviter toute omission de déclaration de revenus de placement. Comme je l’ai déjà souligné, l’appelante a reçu confirmation de la part de TD Waterhouse qu’elle avait tous ses feuillets d’impôt concernant ses revenus de placement au mois d’avril 2008 avant de produire sa déclaration de revenu pour 2007. Étant donné que tous ses placements étaient détenus par TD Waterhouse, c’est TD Waterhouse qui aurait reçu les revenus de placement et qui devait connaître les revenus de placement que l’appelante avait gagnés en 2007 et, par conséquent, quels feuillets d’impôt l’appelante aurait dû recevoir pour 2007.

 

[14]         En conséquence, l’appel est accueilli et l’affaire est renvoyée au ministre du Revenu national pour nouvel examen et nouvelle cotisation eu égard au fait que la pénalité imposée en application du paragraphe 163(1) de la Loi relativement à la déclaration de revenu que l’appelante avait produite pour 2007 est annulée.

 

[15]         L’intimée paiera à l’appelante des dépens de 500 $.

 

 

       Signé à Halifax (Nouvelle‑Écosse) ce 19e jour de juillet 2010.

 

 

 

 

« Wyman W. Webb »

Juge Webb

 

 

 

Traduction certifiée conforme

ce 2e jour de septembre 2010.

 

Espérance Mabushi, M.A.Trad. Jur


RÉFÉRENCE :                                  2010 CCI 381

 

NO DU DOSSIER DE LA COUR :     2010-277(IT)I

 

INTITULÉ :                                       CHRISTINA THOMPSON

                                                          c.

                                                          SA MAJESTÉ LA REINE

 

LIEU DE L’AUDIENCE :                   Ottawa (Canada)

 

DATE DE L’AUDIENCE :                 Le 16 juin 2010

 

MOTIFS DU JUGEMENT :               L’honorable juge Wyman W. Webb

 

DATE DU JUGEMENT :                   Le 19 juillet 2010

 

COMPARUTIONS :

 

Pour l’appelante :

L’appelante elle‑même

Avocat de l’intimée :

Me Andrew Miller

 

AVOCATS INSCRITS AU DOSSIER :

 

       Pour l’appelante :

 

                          Nom :                     

 

                          Cabinet :

 

       Pour l’intimée :                            Myles J. Kirvan

                                                          Sous-procureur général du Canada

                                                          Ottawa, Canada



[1] 2009 CCI 286, [2009] G.S.T.C. 90, [2009] 2009 G.S.T.C. 118.

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