ENTRE :
et
Appel entendu et jugement rendu oralement sur le banc le 30 juin 2017, à Québec (Québec).
Comparutions :
JUGEMENT
L’appel à l’encontre des nouvelles cotisations datées du 29 mai 2015 établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu concernant les années d’imposition 2012, 2013 et 2014 de l’appelant est admis à l’égard de la pénalité seulement et, à tous autres égards, les nouvelles cotisations sont maintenues et l’appelant n’a droit à aucun autre allègement. Par conséquent, les nouvelles cotisations sont déférées au ministre du Revenu National pour examen et nouvelles cotisations conformément aux motifs du jugement ci-joints.
ENTRE :
DANIEL TURCOTTE,
appelant,
et
SA MAJESTÉ LA REINE,
intimée.
MOTIFS DU JUGEMENT
[1] J’ai admis l’appel oralement sur le banc le 30 juin 2017 et j’ai avisé les parties que des motifs accompagneront mon jugement écrit.
[2] L’appel dont il est question ici concerne des nouvelles cotisations datées du 29 mai 2015, établies en vertu de la Loi de l’impôt sur le revenu, L.R.C. (1985), ch. 1 (5e suppl.), telle que modifiée, (la « Loi »), par le ministre du Revenu national (le « ministre ») à l’égard des années d’imposition 2012, 2013 et 2014 de l’appelant.
[3] En vertu desdites nouvelles cotisations, le ministre a apporté les ajustements suivants à l’impôt de la partie X.1 de la Loi à l’égard des contributions excédentaires effectuées par l’appelant à ses régimes enregistrés d’épargne-retraite (« REER ») et aux REER au profit de sa conjointe, à la pénalité pour la productive tardive de ses déclarations T1-OVP et aux intérêts :
Année |
Impôt $ |
Pénalité $ |
Intérêts $ |
2012 2013 2014 |
1 927,56 10 404,00 8 670,00 |
327,69 1 768,68 433,50 |
263,74 727,91 73,87 |
[4] Pour établir et maintenir les nouvelles cotisations, le ministre a tenu pour acquis les faits suivants :
a) durant le mois de novembre 2012 et le mois de janvier 2013, l’appelant a contribué les montants suivants à ses REER et aux REER au profit de sa conjointe :
Montant contribué |
Mois de la contribution |
Nom du rentier |
Émetteur du régime |
130,000 $ 100 000 $ 50 000 $ 40 000 $ 5 000 $ |
Novembre 2012 Novembre 2012 Novembre 2012 Novembre 2012 Janvier 2013 |
Daniel Turcotte Daniel Turcotte Martine Michel Martine Michel Daniel Turcotte |
Banque Tangerine The Empire Life Insurance Company The Empire Life Insurance Company Manulife Bank of Canada Fonds de solidarité des travailleurs du Québec (F.T.Q.) |
b) durant le mois de novembre 2014, l’appelant a retiré les montants suivants de ses REER et des REER au profit de sa conjointe :
Montant du retait |
Mois du retrait |
Nom du rentier |
Émetteur du régime |
59 549 41 261
|
Novembre 2014 Novembre 2014
|
Martine Michel Martine Michel
|
The Empire Life Insurance Company Manulife Bank of Canada |
c) pour les années d’imposition en litige, les montants maximum déductibles au titre des REER de l’appelant étaient les suivants :
Année d’imposition |
2012 |
2013 |
2014 |
Maximum déductible |
221 622 $ |
14 678 $ |
1 300 $ |
d) comme les cotisations inutilisées à la fin de chacun des mois de novembre 2012 à octobre 2014 pour les années d’imposition en litige dépassent de plus de 2 000 $ le maximum déductible au titre du REER, l’appelant est assujetti à l’impôt frappant les excédents des cotisations au REER de 1% pour chaque mois où les montants sont demeurés dans son REER (se référer aux documents en Annexe pour faire partie intégrante de la présente Réponse).
[5] Monsieur Daniel Turcotte, un courtier d’assurance, a témoigné à l’audience et il a expliqué qu’il a vendu en 2012 son bureau d’assurance ce qui a généré d’importants revenus imposables qu’il a tenté de diminuer en contribuant à ses REER au maximum ainsi qu’aux REER au profit de sa conjointe. Il a affirmé avoir agi de bonne foi en étant convaincu d’être en règle avec la Loi. Près de vingt mois plus tard, il a appris qu’il n’avait pas le droit de contribuer aux REER au profit de sa conjointe lorsqu’il a contribué au maximum à ses propres REER.
[6] Monsieur Turcotte a également expliqué qu’il a procédé en novembre 2014 au retrait des contributions excédentaires effectuées aux REER au profit de sa conjointe et qu’il a dû payer les impôts supplémentaires résultant de ces retraits.
[7] Monsieur Turcotte ne conteste pas le fait qu’il a effectué des contributions excédentaires à ses REER et aux REER au profit de sa conjointe mais il considère que les impôts et la pénalité qui en ont résulté sont abusives dans les circonstances vu qu’il s’agit d’une erreur raisonnable qui n’a pas été commise de mauvaise foi.
Dispositions législatives
[8] Les dispositions législatives applicables au présent litige sont les paragraphes 204.1(2.1), 204.2(1.1) et 204.3(1) de la Loi, lesquelles se lisent comme suit :
204.1(2.1) Impôt payable par les particuliers – Le particulier qui, à la fin d’un mois donné postérieur au mois de décembre 1990, a un excédent cumulatif au titre de régimes enregistrés d’épargne-retraite doit, pour ce mois, payer un impôt selon la présente partie égal à 1 % de cet excédent.
204.2(1.1) Excédent cumulatif au titre des REER. L’excédent cumulatif d'un particulier au titre des régimes enregistrés d'épargne-retraite à un moment donné d’une année d’imposition correspond à l’excédent éventuel du montant visé à l’alinéa a) sur le montant visé à l’alinéa b) :
a) les primes non déduites, à ce moment, qu’il a versées à des régimes enregistrés d’épargne-retraite;
b) le résultat du calcul suivant :
A + B + R + C + D + E
où :
A représente les déductions inutilisées au titre des REER du particulier à la fin de l’année d’imposition précédente,
B l’excédent éventuel du moins élevé du plafond REER pour l’année et de 18 % du revenu gagné du particulier, au sens du paragraphe 146(1) pour l’année d’imposition précédente sur le total des montants représentant chacun :
(i) le facteur d’équivalence du particulier pour l’année d’imposition précédente quant à un employeur,
(ii) le montant prescrit quant au particulier pour l’année,
C si le particulier a atteint 18 ans au cours d’une année d’imposition antérieure, 2 000 $; sinon, zéro,
D le montant relatif à un régime collectif quant au particulier à ce moment,
E si le particulier a atteint 18 ans avant 1995, le montant de transition qui lui est applicable à ce moment; sinon, zéro;
R le facteur d’équivalence rectifié total du particulier pour l’année.
204.3(1) Déclaration et paiement de l’impôt. Les contribuables visés par la présente partie doivent, dans les 90 jours qui suivent la fin de chaque année postérieure à 1975 :
a) produire auprès du ministre, sans avis ni mise en demeure, une déclaration pour l’année vertu de la présente partie, selon le formulaire prescrit et contenant les renseignements prescrits;
b) estimer, dans cette déclaration, l’impôt dont ils sont redevables en vertu de la présente partie pour chaque mois de l’année;
c) verser cet impôt au receveur général.
[9] En vertu de ces dispositions, un particulier qui, à la fin d’un mois donné, a un excédent cumulatif au titre de ses REER, tel que déterminé au paragraphe 204.2(1.1) de la Loi, doit, pour ce mois, payer un impôt égal à 1% de cet excédent. Le particulier doit, de plus, produire dans les 90 jours qui suivent la fin de l’année d’imposition au cours de laquelle le particulier a eu un excédent, une déclaration pour l’année selon le formulaire prescrit, soit le formulaire T1-OVP, estimer l’impôt dont il est redevable pour chaque mois de l’année et verser cet impôt au receveur général.
[10] Un particulier qui ne produit pas une déclaration pour l’année en vertu de la partie X.1 de la Loi peut être assujetti à la pénalité pour production tardive d’une déclaration de revenu prévue au paragraphe 162(1) de la Loi.
[11] Dans le cas présent, l’appelant a mal interprété les dispositions de la Loi concernant les montants qu’il pouvait contribuer à ses REER et aux REER au profit de sa conjointe. Il a fait une erreur en contribuant aux REER au profit de sa conjointe après avoir contribué au maximum dans ses propres REER. L’appelant n’a pas agi de mauvaise foi et il croyait sincèrement qu’il respectait les dispositions de la Loi.
[12] L’appelant a procédé à des retraits des montants accumulés dans les REER au profit de sa conjointe dès qu’il a appris qu’il avait effectué des contributions excédentaires à ces régimes. L’appelant a dû acquitter les impôts payables à l’égard de ces retraits (capital et intérêts).
[13] Ne sachant pas qu’il avait effectué des contributions excédentaires à ses REER et aux REER au profit de sa conjointe, l’appelant ignorait qu’il devait produire des déclarations de revenu (formulaires T1-OVP) pour les années d’imposition 2012, 2013 et 2014.
[14] Il s’agit là d’une erreur raisonnable dans les circonstances.
[15] À l’audience, après avoir été informée de la décision rendue le 5 octobre 2016 par ma collègue la juge Johanne D’Auray de notre cour dans l’affaire Murray E. Hall c. La Reine, [2016] A.C.I. no 181, l’intimée a accepté d’annuler les pénalités pour production tardive des déclarations de revenu T1-OVP pour les années d’imposition 2012 à 2014 inclusivement.
[16] Par conséquent, l’appel est admis à l’égard de la pénalité seulement et, à tous autres égards, les nouvelles cotisations sont maintenues et l’appelant n’a droit à aucun autre allègement.
Signé à Ottawa, Canada, ce 7e jour de décembre 2017.
« Réal Favreau »
Juge Favreau
RÉFÉRENCE : |
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Nº DU DOSSIER DE LA COUR : |
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INTITULÉ DE LA CAUSE : |
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LIEU DE L’AUDIENCE : |
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DATE DE L’AUDIENCE : |
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MOTIFS DE JUGEMENT PAR : |
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DATE DU JUGEMENT : |
COMPARUTIONS :
Pour l'appelant : |
l'appelant lui-même |
Avocat de l'intimée : |
Me Emmanuel Jilwan |
Nom : |
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Cabinet : |
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Nathalie G. Drouin Sous-procureure générale du Canada Ottawa, Canada
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